Assit sur son trône d’or, Zeus scrutait l’horizon de l’Olympe, plongeant sa main dans sa barbe grise, il semblait pensif. Quelqu’un entra précipitamment dans la salle, interrompant le fil de ses pensées.
" Père, il faut agir vite. C’est Athéna… Elle est partie l’affronter seule ! " S’écria alors Hermès.
Zeus ne prononça pas un mot, mais on pouvait clairement lire la quiétude sur son visage. Son regard se tourna vers le messager des dieux. Il se leva et demanda alors :
" Où sont-ils allés ? "
– En Arcadie.
Sans plus attendre, Zeus se précipita vers la sortie. Héra, qui était présente dans la pièce, se mit devant son époux.
" N’oublie surtout pas. C’est de ta faute ce qui arrive aujourd’hui. Répare ton erreur et ramène ces deux là ici. "
Le maître de la foudre ne répondit pas aux paroles, qu’il perçu comme venimeuse, de son épouse. Il se changea en aigle, et descendit chez les mortels.
Des ailes puissantes battant l'air, Zeus fondit sur le champ de bataille comme une flèche. Sous sa forme d'aigle royal, il dominait la scène du haut des cieux, ses yeux perçants scrutant les corps enchevêtrés et la terre ensanglantée. L'odeur du fer chauffé et du sang frais le frappait avec une intensité inhabituelle, une symphonie macabre qui résonnait dans ses narines.
Il planait au-dessus de la mêlée, observateur impassible d'un carnage qui échappait même à son contrôle. Chaque cri de douleur et chaque soupir d'agonie étaient gravés dans sa conscience divine. Le sol, autrefois verdoyant et fertile, était désormais une toile maculée de rouge, un tapis funèbre où les rêves et les espoirs s'étaient éteints.
Des corps de mortels, réduits à l'état de pantins brisés, jonchaient le sol. Leurs armures, autrefois brillantes, étaient ternies par la sueur et le sang. Les boucliers, percés de coups, ne servaient plus de protection. Zeus les voyait tous, ces hommes et ces femmes, pris dans le tourbillon de la guerre, chacun luttant pour sa survie.
Au milieu des brumes du champ de bataille, une silhouette s'avança, revêtue d'une armure scintillante, luisant faiblement sous la lumière mourante du ciel. Athéna, la déesse de la sagesse et de la guerre stratégique, se tenait droite, sa lance fermement tenue dans sa main droite, son bouclier orné de la tête de la Gorgone reposant sur son bras gauche. Ses yeux, d’un gris d’acier, brillaient d’une détermination farouche, trahissant sa volonté inébranlable de ramener son frère à la raison.
Son visage, habituellement calme et réfléchi, était marqué par une résolution inflexible. Il n’y avait ni peur ni hésitation dans ses traits — seulement la froide certitude de quelqu’un prêt à faire ce qui doit être fait, même si cela signifie affronter un membre de sa propre famille. Chaque pas qu’elle faisait semblait calculé, comme si même sur ce champ de désolation, elle gardait le contrôle absolu de ses mouvements. Son casque, d’un or éclatant, abritait des pensées aussi affûtées que les armes qu’elle portait.
De l'autre côté du champ de bataille, une silhouette imposante émergea des ombres, enveloppée dans une armure noire maculée de sang. Arès, le dieu de la guerre, avançait avec la fureur d’un prédateur. Ses yeux, d’un rouge écarlate, flamboyaient de colère à la vue d’Athéna, une rage sourde et incontrôlable bouillonnant sous son casque. Sa respiration, rapide et lourde, soulevait son plastron, déjà marqué par les coups et éclaboussé de sang frais, vestiges de sa participation directe aux combats.
Dans sa main droite, une épée massive encore dégoulinante, ses doigts serrés sur la garde comme s'il voulait broyer le métal lui-même. Son bouclier, cabossé et usé par le choc de multiples batailles, pendait à son bras gauche. Chaque mouvement d'Arès respirait la brutalité, ses muscles tendus sous la violence contenue de son corps prêt à exploser à tout moment. Ses cheveux noirs, collés par la sueur et le sang, s’agitaient sous le souffle du vent, renforçant encore l’image de la rage incarnée.
Le regard fixé sur Athéna, Arès ne voyait plus qu’un obstacle à sa soif de destruction. Ses mâchoires étaient serrées, ses lèvres retroussées dans une grimace de haine, comme un animal acculé. Pour lui, il n’y avait plus de place pour la raison ou la diplomatie — seulement la guerre, brute et implacable, comme l’éclat sauvage de son armure rougie.
Athéna s’avança lentement vers son frère. Elle sait pourquoi Arès a agit ainsi. Il n’a jamais été aimé de Zeus, qui a toujours préféré, sans jamais le caché, la déesse de la sagesse.
" Renonce, mon frère. Tu peux encore arrêter ce carnage. Je te promets que si tu me laisses t’aider, père sera clément avec toi. " Clama Athéna, d’un ton confiant, mais légèrement tendre.
Sa voix résonna sur le champ de bataille, portée par le vent. Ses mots, mesurés et réfléchis, tranchèrent comme une lame à travers la cacophonie des combats. Mais Arès éclata d’un rire rauque, un son guttural qui résonnait comme un tonnerre sinistre au milieu du chaos.
"Clément ?" ricana-t-il. "Notre père, ce tyran ? Celui qui t’a élevée sur un piédestal et m’a jeté dans l’ombre ? Crois-tu vraiment qu’il connaît autre chose que le mépris ? Il n’y a pas de clémence, Athéna. Pas pour moi. Pas pour ce monde."
Il fit un pas en avant, sa lame titanesque traînant dans la poussière ensanglantée, dessinant un sillon sombre derrière lui. Ses yeux flamboyaient, mais dans leur éclat ardent se mêlait une douleur profonde, celle d’un fils rejeté, d’un dieu relégué au rôle de bourreau.
"Tu ne comprends pas Athéna. La guerre est la seule vérité, et aujourd’hui, je vais vous la faire comprendre à tous. Même toi." Repris Arès, dans un murmure menaçant.
Athéna resserra sa prise sur sa lance, sentant la tension monter dans l’air. Elle connaissait son frère, sa fureur incontrôlable, son besoin désespéré de prouver sa valeur. Mais elle ne pouvait pas le laisser poursuivre sur ce chemin. Elle prit une grande inspiration et leva son bouclier, dont la Gorgone semblait fixer Arès avec un regard perçant, presque vivant.
"Si c’est ce que tu veux, alors viens. Mais sache ceci, Arès : je ne me bats pas pour Zeus. Je me bats pour ceux que tu massacres sans pitié." Affirma Athéna, d’un ton décidé et déterminé.
Les deux dieux se figèrent un instant, comme deux montagnes prêtes à s’affronter, avant qu’Arès ne se jette sur elle avec un cri de guerre, sa lame s’abattant sur Athéna dans un éclair d’acier. Elle para l’attaque avec son bouclier, l’impact résonnant comme un coup de tonnerre. Le choc la fit reculer d’un pas, mais elle tint bon, ripostant avec un coup de lance vif et précis, visant l’ouverture de l’armure d’Arès. Leur combat devint un tourbillon d’éclats métalliques et d’étincelles, chaque coup porté étant chargé de la puissance divine. Autour d’eux, les quelques mortels encore vivant cessèrent presque de se battre, hypnotisés par cette confrontation titanesque. Leurs gestes semblaient ralentis, insignifiants face à la violence pure qui se déroulait sous leurs yeux.
Au-dessus, Zeus observait la scène dans sa forme d’aigle, le cœur lourd. Il savait qu’il ne pouvait pas intervenir directement, du moins pas sans risquer de briser davantage l’équilibre déjà fragile entre les dieux. Mais alors qu’il voyait ses deux enfants s’affronter avec une telle férocité, une pensée le traversa : Ai-je poussé Arès à devenir ce qu’il est ?