13/09/25

Ding dongg.

Je cours à la porte d'entrée, Gustave est en week-end, c'est son jour de repos.

J'ouvre la porte, Naïm était là.

Il salua ma mère et lui expliqua le programme de la journée :

<<— Bonjour Madame, comment allez-vous ?>>

<<— Très bien merci, et toi ?>>

<<— Très bien aussi.>>

<<— Bon, que voulez-vous faire ?>>

<<— Si vous êtes d'accord, j'embarque Yaely avec moi. On doit retrouver mes amis près de la rivière, qui est à vingt minutes à pied. On a rendez-vous à quatorze heures trente. Je pense qu'elle sera de retour vers dix-sept heures trente ou dix-huit heures. Cela vous convient-il ou vous préférez qu'elle soit de retour plus tôt ?>>

<<— Très bien, je n'ai aucune objection. Amusez-vous bien les enfants, et pas de bêtises.>>

Arrivés sur place, un groupe de trois garçons nous attendait. Naïm fit les présentations :

Valery, il avait deux ans de plus, fils d’un politicien. Il était sur son vélo et me salua.

Mathis, lui, était assez calme. On avait le même âge, mais il semblait assez mature. Il vint me checker.

Et Joseph, lui, était très drôle, assez immature, pendu à un arbre la tête en bas, en crop top rose à paillettes.

On passa trois bonnes heures à papoter les pieds dans la rivière, à regarder Joseph faire l'idiot, et moi j'étais couchée, tête sur l'épaule de Naïm… une journée presque parfaite.

Vers la fin de la journée, je pris le numéro de Joseph, Valery et Mathis.

Naïm me raccompagna vers dix-sept heures quarante-cinq. Devant la porte, il déposa un doux baiser sur mon front et partit rejoindre son père à un match de basket.

Affalée sur le canapé, Maman m’y rejoignit en me demandant comment s’était passée mon après-midi. Je lui raconte donc, toute heureuse, comment s’est déroulée la sortie avec Naïm et ses amis.

Vers dix-neuf heures vingt-cinq, la sonnerie de mon téléphone retentit. C’était un message de Joseph :

« Salut Yaely, je voulais te dire que j'avais été très content de te rencontrer, depuis que Naïm parlait de toi.

Je ne veux pas être trop intrusif, mais est-ce que tu pourrais m'aider ? »

« Salut Joseph, moi aussi ça m’a fait plaisir de vous rencontrer. Bien sûr, pas de souci. Que se passe-t-il ? »

« Beh, depuis quelques mois maintenant, je crois que j'aime bien un des garçons de la bande. Et j'aimerais être sûr que c'est de l'amour, parce que comme t'as dû le remarquer, je suis cent pour cent gay. Mais le problème, c'est que j’ai peur que mes sentiments détruisent le groupe. »

« Je comprends complètement ce que tu ressens. J’ai ressenti la même chose pour Naïm…

Mais dis-moi, c’est qui ton crush ? »

« Mon crush, c’est Valery… »

« Ok je vois. Tu penses être amoureux de lui ? »

« Je ne sais pas… Quand je suis avec lui, j’ai continuellement envie de le coller. Quand il se moque de moi, ça me fait rire. Quand il est très proche, j’ai des papillons dans le ventre… Il est tellement beau. Quand je ne le vois pas pendant une semaine, je me sens mal, j’ai le cœur qui bat à la chamade. Quand on fait un téléphone arabe… Il est tellement gentil, attentionné, protecteur… Quand il est en couple, je ressens une pointe dans l’abdomen, ça fait mal. »

« C’est clair, t’es amoureux, y a pas photo. Tu devrais lui dire ! »

« Peut-être, mais j’ai pas le courage. »

« T’inquiète pas, je vais t’aider ! Naïm est au courant ou j’ai pas le droit de lui en parler ? »

« Je préfère pas, désolé. »

« Aucun souci. »

Pendant plusieurs heures, nous parlions de comment l’aider sans ruiner sa relation avec le groupe, jusqu’au moment où il commença à me parler de Naïm. Il m’envoyait des photos de quand il était plus petit, puis il m’avoua que l’an dernier, pour son anniversaire, Naïm avait été assez blessant, ce qui l’avait fait pleurer…

Déconcertée, je lui demandai pourquoi donc Naïm avait été si méchant.

Sa réponse m’a fait un choc :

« Beh, Naïm est pas très tactile avec moi, alors que moi je le suis beaucoup. Donc quand il me repoussait quand j’essayais de lui faire un câlin, ça me faisait mal… »

« Ah oui je comprends mieux…

Bon il faut que j’aille me coucher, à demain… »

« Bonne nuit, à demain. »

Le lendemain matin, je me réveillai vers dix heures. Je pris mon téléphone pour entamer la conversation avec Joseph :

« Saluuut, comment ça va aujourd’hui ? »

« Coucou ma belle, ça va et toi ? »

« Tout va bien. »

« Alors explique-moi un peu, pourquoi tu as peur de ruiner votre relation ? »

« Déjà, le problème c’est que Valery est complètement hétéro. Et il y a quelques mois, il m’avait confié que si un homme était en crush sur lui, ça le dégoûterait. Donc déjà ça ne me met pas à l’aise. Et puis, il m’avait fait pleurer au Nouvel An et à mon anniversaire. Donc je sais pas s’il tient réellement à moi… »

Comment ça, il l’avait fait pleurer à son anniversaire ?

Je remontai la conversation avec stupeur.

C’est bien ce que je pensais, c’est pas Valery qui l’avait fait pleurer mais Naïm.

Il était en crush sur Naïm ? Il fallait que j’en aie le cœur net… Si c’était le cas, pourquoi me le demandait-il à moi ?

Je repris la conversation comme si de rien n’était :

« Ah mais pourquoi tu l’aimes s’il t’a fait pleurer ? C’est pas sympa… »

« Je sais, mais je l’aime malgré tout, malgré les pleurs et le dégoût. Et c’est très perturbant. D’un côté j’ai envie de lui dire, mais de l’autre j’ai peur. »

« C’est normal d’avoir peur.

Mais dis-moi, tu m’as dit qu’il t’avait fait pleurer, non ? »

« Euuh oui, effectivement. »

« Beh, l’autre jour tu m’as dit que c’était Naïm qui t’avait fait pleurer… Avoue, c’est Naïm ton crush, pas Valery. »

« Je pensais que tu t’en souviendrais plus…

Désolé Yaely, vraiment. Je sais que c’est pas correct, mais j’arrive pas à ne pas l’aimer. Je suis tellement jaloux de toi, je t’envie. Tu as son amour, son attention, sa gentillesse, ses câlins… Toutes ces choses dont je rêve depuis qu’on est gosses. »

Je ne savais pas quoi dire. Je sentais mon cœur tomber en mille morceaux. Pourquoi j’avais confiance en Naïm ? Mais pourquoi j’étais jalouse d’un homme ?

Finalement, la menace ne venait pas que de Méline. J’allais devoir surveiller les filles et les garçons qu’il plaît…

Je repris mon téléphone en essayant de passer outre, d’être la plus mature possible, car il avait besoin d’aide…

D’aide pour draguer mon copain.

« Pas de souci, c’est tout à fait normal. Vu comme c’est une frappe atomique, je comprends complètement que tu le kiffes et je vais t’aider. »

« Ahaha effectivement, il est trop beau. Merci beaucoup, je sais que c’est pas normal et je suis vraiment désolé. »

« Aucun souci. »

Les jours passèrent. J’allais au collège, j’écrivais à Joseph minimum une heure par jour, je ne dormais presque plus à cause des cauchemars où je les voyais s’embrasser… De plus en plus, je m’éloignais de Naïm, par peur de dévoiler le secret de Joseph.

Ça me faisait mal de ne plus répondre à ses messages, et lui, il était inquiet, ça se voyait.

Mais chaque chose en son temps… Déjà, il fallait que je parle à Méline. Son comportement était de plus en plus ambigu…

<<— Hey Mel, ça va ? Je voulais te demander un truc. Sois la plus honnête possible.>>

<<— Salut Yaely, oui bien sûr, que se passe-t-il ?>>

<<— Est-ce que tu kiffes Naïm ?>>

Il y eut un blanc de quelques secondes avant qu’elle n’explose de rire :

<<— Beh enfin Yaely, Naïm et moi, on est de la même famille, c’est mon cousin. Et si ça peut te rassurer, notre famille vient d’Algérie, on n’est pas du nord.>>

<<— Mais pourquoi personne m’a prévenue ? Je me sens toute bête>>répliquai-je en pouffant.

On entra en cours, et à la fin de la journée, Naïm m’attrapa par le bras pile-poil sur ma cicatrice. Intérieurement, je souffrais.

Il me raccompagna chez moi. Durant le trajet, aucun de nous ne parla, même pas un regard.

Arrivé devant le portail, il s’avança, rapprocha sa bouche de mon oreille et me souffla :

<<— Je t’aime.>>

Je ne le fixai pas, tournai les talons et me réfugiai dans ma chambre…

Lui, il était là, les bras ballants devant le portail. Il n’avait pas bougé…

Le week-end arriva. Je me sentais mal mais tellement heureuse de ce « je t’aime » inattendu. J’en revenais pas…

Mon téléphone vibra, c’était Joseph. Ça faisait plus d’une semaine qu’on parlait et il se sentait enfin prêt à lui dire…

J’avais créé un groupe sur WhatsApp pour savoir ce qui allait se passer.

Joseph lui avoua tout : ses sentiments, pourquoi j’étais distante, ses peurs, ses angoisses, etc…

Vu.

Une heure. Deux heures.

Naïm ne répondait pas.