22. Dans des eaux agitées

Par Rachael

Le très puissant président de la Fondation tournait en rond dans le bureau de crise enterré sous l’immeuble. Miesko Ardéirim tenait sa rage sous contrôle depuis trois jours ; tout le monde marchait à pas feutrés autour de lui, de crainte que la moindre maladresse ne lui donne un prétexte pour déverser sa colère sur les malheureux présents. Pitoyables ! S’imaginaient-ils qu’il manquait à ce point de maîtrise de soi ?

La sécurité renforcée à laquelle les circonstances le contraignaient n’était pas pour rien dans son état d’esprit. Là-haut, dans le grand bureau panoramique, les premières lueurs du jour enflammaient les bateaux sur la baie, tandis que la ville s’éteignait. Ici, chaque regard sur les murs aveugles lui rappelait la situation : Miesko ignorait toujours ce qui s’était réellement passé trois jours plus tôt dans les jardins de sa villa.

Le gouvernement était pourtant si influençable, un ramassis d’administrateurs médiocres effrayés par leur ombre. Miesko aurait pu en croquer deux à chaque petit déjeuner. Rien de plus aisé que de les tordre, d’en essorer toutes les informations souhaitées. Leur représentant suprême, le magistrion, même chose : un pantin qui dansait au son des exigences ou des caprices de la Fondation. Mais les services secrets, eux, c’était une autre affaire. Malgré les pressions exercées, les responsables du renseignement ioniens n’avaient pas craché le morceau. Ils prétendaient qu’ils ne savaient rien. De qui se moquaient-ils ?

Quant aux équipes d’intelligence de la Fondation, elles pataugeaient. À quoi servaient donc les parts considérables des profits qu’il leur abandonnait chaque année pour protéger leur technologie et affermir leur navigation dans des eaux agitées par les conflits interplanétaires ?

Miesko soupira. Le parc était dévasté, un tiers des arbres déracinés ou calcinés. À quoi donc avait-on joué là-bas ? Et Ennius qui s’était envolé, lui aussi ! Ce petit crétin disparaissait parfois des jours pour s’abreuver d’alcool dans les bas-fonds d’Ithéus. Là, comme par hasard, il restait introuvable. Étonnante coïncidence !

C’était cela qui enrageait Miesko plus que tout. Qui s’était permis de s’attaquer à son fils ? SON fils !

Ce commando dont une dizaine de membres pourrissaient dans la morgue urbaine venait de nulle part, un mélange improbable de soldats suréquipés par l’Expérion et par l’Alliance. Des mercenaires ? Peu vraisemblable. Une bataille, alors, entre les deux puissances ennemies ? Plus plausible, mais quel enjeu l’avait suscitée ?

Tout cela n’avait aucun sens.

Les services de la Fondation s’étaient lancés à la chasse aux indices sur place et décortiquaient les faits et gestes d’Ennius durant ces dernières semaines. Curieux : Ennius n’avait jamais beaucoup aimé la maison sur la colline, à part pour tout mettre sens dessus dessous dans des fêtes orgiaques. Pourquoi y avait-il établi ses quartiers depuis trois semaines ? Qui était cette fille de l’Alliance avec laquelle il avait été vu juste avant de disparaître ? Introuvable, elle aussi.

Ennius irritait souvent Miesko : un indécis, un faible, un rêveur ! Incapable de tenir son rang.

Dans quelles embrouilles ce petit con avait-il encore été se fourrer ?

Vu le nombre de cadavres semés, cela semblait infiniment plus sérieux qu’à l’accoutumée.

Une cavalcade dans les couloirs le fit revenir les pieds sur terre. Un de ses assistants, Lumès, s’arrêta à trois pas de lui et balbutia, les yeux agrandis par la terreur :

— Ione est attaquée ! L’Expérion… plus de vingt croiseurs de guerre. Ils demandent la reddition immédiate.

Une espèce de fatalisme impuissant terrassa Miesko. En revanche, il ne fut pas surpris. Pas plus que cela : les rapports en provenance de l’Expérion le chagrinaient depuis des semaines, jusqu’à troubler son sommeil. Chaque nuit, une pensée récurrente l’assaillait : si l’Expérion apprenait à se passer de la Fondation en contrôlant ses propres systèmes hyperespace, ni celle-ci ni Ione ne seraient plus à l’abri de leur appétit de conquête.

Son cauchemar venait de se concrétiser.

 

¤¤¤

 

— Arrangez-moi un rendez-vous avec le magistrion. Pas dans dix ans : maintenant !

La voix résolue de Miesko résonna dans l’espace vitré de son bureau. Après des heures à menacer l’Expérion de clouer leur flotte hyperespace au sol, à prendre contact avec les autorités de l’Alliance, à préparer dans l’urgence une éventuelle fuite, il avait repris ses quartiers en haut de l’immeuble. Inutile de se terrer au sous-sol : on savait d’où venait le danger.

Miesko ne quittait pas des yeux la ville, son regard sur la baie piquetée de bateaux qui montaient et descendaient au gré des vagues, comme des miniatures posées sur un tissu. Rien n’avait transpiré encore dans la capitale. Combien de temps avant que la panique ne s’y abatte ?

— Le magistrion est en route, monsieur, précisa Naéphé, son irremplaçable assistante. Il arrivera dans quelques minutes.

Miesko employait des humains pour l’administration de la Fondation, par refus de s’en remettre à des artifigences, comme ces idiots du gouvernement. Il s’en était toujours félicité et il s’en réjouissait aujourd’hui une fois de plus. Ses équipes s’affairaient avec autant de compétence que de détermination ; elles tenaient à distance l’affolement qui menaçait la planète entière aussi sûrement que les troupes de l’Expérion.

De la détermination, oui, voilà ce qu’il leur fallait. Il contempla son visage dans la vitre et tâcha d’effacer l’expression hagarde qui s’y lisait. À côté de lui, le reflet de Naéphé dévoilait des traits sereins, sagement encadrés de cheveux bruns à la coupe courte.

Grâce à elle, Miesko avait reconstitué son masque hautain quand le chef de l’État franchit le seuil de son bureau. Il l’apostropha d’un ton froid :

— Je ne crois pas aux coïncidences. Que s’est-il passé chez moi il y a trois jours ? Quel rapport avec cette invasion ?

Le magistrion, un homme rondelet à l’allure habituellement affable, lui répondit sur un mode agacé.

— Ce serait plutôt à vous de nous le dire. Moi non plus, je ne crois pas aux coïncidences : si votre fils s’est évaporé, ne serait-ce pas parce qu’il a vendu vos secrets à des forces étrangères ?

— Vous divaguez ! grinça Miesko avec dédain. Comment osez-vous ? Cette famille constitue le pilier sur lequel s’appuie l’administration ionienne depuis bientôt trois siècles.

— Vous admettrez que cette disparition se produit à un moment fâcheux.

— Vous arrivez chez moi pour m’insulter, avec des allégations aussi inconsistantes que l’écume au sommet des vagues. Viendraient-elles camoufler l’incompétence de vos services de renseignement ? Comment ces soldats des deux camps retrouvés dans ma propriété sont-ils entrés sur Ione sans être inquiétés ?

Il fixa Riufeld, le chef de la défense ionienne, trois pas en retrait derrière le magistrion, dissimulé par les pulpeuses gardes du corps dont celui-ci aimait se parer partout où il circulait. C’était un petit homme gris aux cheveux et à la moustache courts. Que faisait-il là ? Vu les intrigues qui se nouaient en permanence à Ithéus, Riufeld pouvait être considéré comme l’homme fort du régime, celui qui assurait par une diplomatie subtile l’équilibre de la situation pour le moins épineuse de leur planète, seule zone neutre au centre d’un conflit généralisé. Miesko n’avait jamais commis l’erreur de le sous-estimer, malgré son apparence terne. Les télépathes faisaient les meilleurs espions et les services de Riufeld les employaient en quantité.

Celui-ci ne l’écoutait pas ; sa mine dédaigneuse indiquait clairement ce qu’il pensait des enfantillages échangés par les deux hommes. Il était occupé à déchiffrer un message. Il releva la tête, un sourire de satisfaction sur ses lèvres fines et ne se gêna pas pour couper le chef de l’État :

— Depuis deux jours, nous avons quelque peu dérogé aux règles de savoir-vivre habituelles en lançant nos télépathes en masse sur la piste des agents de l’Expérion. Ils sont apparus très anxieux de retrouver quelqu’un. Ceux qui le cherchent l’identifient par un portrait, sans plus de précision. Depuis hier soir, nous savons néanmoins de qui il s’agit. Devinez qui le dissimulait et où il se cachait ?

Il fixait Miesko avec insistance, ce qui ne déclencha que son scepticisme :

— Ce n’est pas le style de mon fils.

— Oh, si, si, vous allez voir ! Votre rejeton a mis les pieds dans quelque chose qui le dépasse totalement, tout héritier de la Fondation qu’il soit.

Il se ménagea une pause, pour savourer le suspense créé. Les bajoues du magistrion s’étaient affaissées en une mine ahurie : pas au courant, probablement.

— Je suis persuadé que nous pouvons encore déjouer l’attaque de l’Expérion si nous récupérons cet homme avant eux, ajouta Riufeld.

Miesko le regarda avec incrédulité. Déjouer l’attaque ? Avec vingt vaisseaux au-dessus de leur tête ? N’était-il pas bien trop tard pour cela ?

Il tenta d’éclaircir les intentions du chef de la défense :

— Et vous avez besoin de moi pour le dénicher ?

— Je ne vais pas en appeler à votre patriotisme, président Ardéirim, mais plutôt à votre compréhension de nos intérêts communs.

— Vous avez besoin de moi.

— Peut-être, concéda-t-il.

— Bien, alors quels sont nos intérêts communs en la matière ?

— Simple : préserver l’indépendance d’Ione et assurer la bonne marche des affaires.

— Je vous rappelle que mon fils a disparu.

— Si nous trouvons cet homme, nous trouverons votre fils. Nous aurons gagné la première bataille et nous posséderons un levier pour négocier avec l’Expérion. Ils ne tiennent pas tant que cela à nous envahir. Ione est bien plus utile pour eux telle quelle : un lieu de rencontres, une zone grise où l’on traite en toute discrétion.

— Foutaises ! S’ils n’ont plus besoin de nous, s’ils percent les secrets de l’hyperespace, ils reviendront dans quelques semaines ou quelques mois.

— Attendez de voir quels atouts nous aurons en main pour négocier.

— Tous ces efforts déployés pour récupérer un homme ? Qui donc suscite un tel intérêt de la part de l’Expérion ?

Riufeld le regarda avec intensité et lui tendit une photo.

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aranck
Posté le 11/12/2019
Ah ben je comprends mieux Ennius. Doté d’un père comme celui-là, ça ne doit pas être simple tous les jours. Il n’est pas stupide ce président, mais la modestie ne l’étouffe guère et même s’il semble attaché à son fils (SON fils), on se dit qu’il n’a pas grand-chose d’un père. En même temps ses fonctions ont dû le déformer pas mal. Bref, je réserve mon avis sur le bonhomme.
La fin de ton chapitre est excellente ! Surtout que nous lecteurs on sait qui est sur la photo :-)
Je n’ai guère grand-chose à ajouter, si ce n’est que je me demande comment les négociations vont bien pouvoir tourner et que le Miesko en question risque fort d’être surpris par son rejeton qui, contrairement à l’image qu’il donne de lui au tout début, semble avoir lui aussi du caractère, l’autoritarisme en moins et l’ouverture d’esprit en plus.
Le Riufeld ne me plaît pas du tout. Militaire typique.
Et plane en arrière-plan le contrôle de l’hyperespace... Keizo va avoir du pain dur la planche, surtout que tout semble s'accélérer ! Aura-t-il le temps de mettre en place son plan ? J'espère que Brynn ne le trahira pas...
En tous cas c’est un chapitre qui se lit sans faim et l’introduction du père d’Enius est bien amenée.
Seule une phrase m’a dérangée dans sa tournure :
« Depuis deux jours, nous avons quelque peu dérogé aux règles de savoir-vivre habituelles en lançant nos télépathes en masse sur la piste des agents de l’Expérion. Ils sont apparus très anxieux de retrouver quelqu’un. Ceux qui le cherchent l’identifient par un portrait, sans plus de précision. Depuis hier soir, nous savons néanmoins de qui il s’agit. Devinez qui le dissimulait et où il se cachait ? » Qui sont ceux qui sont apparus anxieux ? Les télépathes ou les agents ? Ceux qui le cherchent sont aussi les agents de l’Expérion ? Mon cerveau ramolli ne capte pas qui est qui dans cette affaire, mais c’est peut-être juste moi.
Quant à ton écriture, toujours au top.
À bientôt et bizzz !
Rachael
Posté le 11/12/2019
Ah oui, tu as raison, ca pourrait être plus clair...
je pourrais mettre : Depuis deux jours, nous avons quelque peu dérogé aux règles de savoir-vivre habituelles en lançant nos télépathes en masse sur la piste des agents de l’Expérion. Ces derniers sont apparus très anxieux de retrouver quelqu’un. Ils l’identifient par un portrait, sans plus de précision....
Ca serait plus clair ?
Merci pour ton passage !
aranck
Posté le 12/12/2019
Oui, tout à fait, ça marche mieux avec "ces derniers". Et est-ce vraiment de l'anxiété ? Pas de l'impatience ? ou de la fébrilité ?
aranck
Posté le 12/12/2019
Hello,
Je passe par ici pour savoir si tu arrives à te connecter sur PA.
Depuis plusieurs jours, ça m'est totalement impossible. La page ne s'affiche pas comme si elle n'existait pas, je n'ai même pas de message d'erreur.
Et en attendant ta réponse, bizzz et bonne soirée.
Rachael
Posté le 12/12/2019
Le fofo est HS depuis 3 jours... Va voir sur la page d'accueil de FPA, tu auras un lien vers le discord qui sert de secours en attendant... :-(
aranck
Posté le 14/12/2019
Oui, merci, Danette m'a envoyé un petit mot.
Bizzz
Fannie
Posté le 06/10/2019
Re-coucou,
Si j’avais un père comme Miesko, j’aurais aussi envie de le fuir. ;-) Il est persuadé que son fils ne serait pas capable de cacher Yalis/Keizo (je ne sais pas sous quelle identité ils le connaissent) ; pourquoi le considère-t-il comme un ennemi, compte tenu de la nature d’Eshan, le créateur de la Fondation ? Il y a un certain temps que j’ai interrompu ma lecture ; j’ai peut-être besoin d’une piqûre de rappel ?
L’atmosphère change brutalement ; jusque-là, on entendait parler de la guerre, mais on n’en avait pas vraiment conscience. C’est tendu, tout à coup ; d’une manière ou d’une autre, ça va barder. Si maintenant l’Expérion ose attaquer Ione ouvertement et même militairement, tous ceux qui ne sont pas acquis à sa cause sont vraiment mal barrés.
Deux remarques :
- pour déverser sa colère sur les malheureux présents [normalement, le substantif « présent » ne s’emploie pas pour les personnes présentes ; je propose « ses malheureux collaborateurs » (ou « employés »)]
- Quant aux équipes d’intelligence de la Fondation [dans cette acception, « intelligence » est un anglicisme ; je propose « équipes du renseignement »]
Rachael
Posté le 06/10/2019
Miesko ne considère pas Keizo comme un ennemi puisqu'il ne le connait pas encore. Du coup, je ne suis pas sûre d'avoir compris ta question...
Tu as tout à fait raison pour l'anglicisme, pourtant ailleurs j'ai bien mis renseignement...
Sur "présents" en revanche, j'ai vérifié sur antidote et pour "présent" il me met "Personne qui est présente. Les présents et les présentes".
Merci de ta vigilance !
Fannie
Posté le 07/10/2019
Ce n’est pas pour susciter la polémique, mais je reste quand même dubitative quant à l’emploi de « les présents » dans ce contexte.
J’avais déjà consulté plusieurs dictionnaires quand j’ai rédigé mon commentaire et j’ai complété ma recherche entre-temps (dans le dictionnaire de l’Académie française, le dictionnaire du CNRTL, le TLFi (ou Atilf), le Trésor de la langue française, le Larousse, le Littré, le Robert et le dictionnaire historique.)
Il en ressort que « les présents » est généralement employé par opposition aux absents, dans le recensement des présents et des absents, dans le sens de participants ou de personnes qui assistent à une réunion, un cours, etc.
Le seul exemple qui me semble sortir un peu de ces usages assez restreints est toujours la même citation : « [Très vite, les émotions] ont acquis le pouvoir de provoquer chez tous les présents, par une sorte de contagion mimétique, le complexe affectivo-moteur qui correspond à l'événement survenu et ressenti par un seul (L. Febvre, La Sensibilité et l'hist., [1941] ds Combats, 1953, p.224). »
L’emploi que tu en as fait continue à me paraître étrange. En lisant le chapitre, j'imagine que les gens autour de Miesko vaquent à leurs occupations ; s'ils sont réunis autour de lui pour l'écouter, c'est autre chose, mais ce serait peut-être bien de le préciser.
Aliceetlescrayons
Posté le 22/09/2019
Ah moi j'adore ce chapitre! Les évènements se précipitent après la retraite dans la montagne. On ne sait pas encore de quel côté va se placer Papa Ardeirim (pas commode, d'ailleurs) et la menace de l'Experion qui pèse comme une épée de Damoclès... J'adore cette intensité dramatique ^^
Et je me réjouis de pouvoir filer voir la suite tout de suite!
Un seul petit pinaillage de rien : le dialogue final entre Miesko et Riufeld fait un peu "ping-pong". Il mériterait d'être un peu interrompu par leurs attitudes, histoire qu'on sente encore plus la tension monter.
Rachael
Posté le 22/09/2019
Non, pas commode le paternel ! je voulais montrer qu'il est un cran au dessus des autres, dans sa tête et objectivement, considérant sa position de pouvoir.
Je le note pour le dialogue final ! merci !
Keina
Posté le 19/08/2019
Un chapitre pkus stratégique, et plus ardu à comprendre... Bon, ce que j'en retiens, c'est que Ione est mal barrée et que papa Ennius n'est pas très content des manigances de son fils... À voir ce qu'il compte faire lorsqu'il saura l'identité du recherché... J'espère qu'il donnera une chance à Keizo, parce que sinon ils sont mal barrés ! à moins qu'ils s'enfuient par l'arche dans la maison... Si c'etait possible, évidemment. Me reste plus qu'à attendre la suite! 😊
Rachael
Posté le 19/08/2019
Oui, il est un peu plus politique, ce chapitre. Tu dis "ardu"; est-ce qu'il y a des choses qui ne t'ont pas parues claires ? Je suis en train de finir les corrections, je vais mettre la suite sous peu...
Rachael
Posté le 19/08/2019
Et merci pour ton passage, à bientôt !
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