Je suis seul en cuisine. La lumière vacille. Le silence est assourdissant.
Les plats qui mijotent me donnent l’impression d’être au cœur d’une cantine scolaire. Un steak haché bouillonne au fond d’une casserole. Une forte odeur de graisse s’évapore d’une poêle laissée à l’abandon. Je devine un fond de purée de pommes de terre dans ce qui ressemble à de la peinture acrylique dans le coin d’une assiette. Je ne suis même plus capable de faire un steak-frites ou une simple purée.
Qu’est-ce que je fais là, en cuisine ? Pourquoi avoir ouvert un restaurant ? Que faire d’autre, si je ne suis plus capable de faire ça ? Élever des chèvres en haute montagne ? Je ne sais même pas m’occuper d’une plante, ni même d’un enfant. Alors, un troupeau… Même élever un enfant, j’en ai été incapable. Je ne remercierai jamais assez ma chère Désirée, d’avoir éduqué notre fils comme elle l’a fait, pendant que je bâtissais mon empire gastronomique.
« Tout est fini. Tout est fini ! ». C’est ce que me nargue un pauvre brocoli laissé au sol, quasiment à mes pieds. Il me chante un air sur la fin de la gloire, le début du malheur et de la misère. J’essaie de me boucher les oreilles mais d’autres brocolis viennent le rejoindre. Tous chantent à tue-tête des pensées négatives. Je suis un incapable, un bon à rien. Même le rien, je finirai par le rater un jour ou l’autre. Tout cela tourbillonne et finit par me donner la nausée.
Les brocolis rient de plus belle jusqu’à ce que j’ouvre les yeux, aussi ronds que des billes. La cantine scolaire, les brocolis qui parlent, ce n’est qu’un cauchemar.
Mais, le brocoli brûlé au fond de la casserole est, quant à lui, bien réel.
Je me serait attendue à quelque chose de plus progressif sur la perte de confiance, alors que là, le cuisinier semble avoir accepté très rapidement le fait qu'il est nul et il le fait presque trop sereinement au début. (ce n'est que mon avis, mais vu la mauvaise foi du chapitre précédent, je trouve qu'il capitule un peu vite).
"C’est ce que me nargue un pauvre brocoli laissé au sol" cette phrase est curieuse, je vois ce que tu veux dire, mais j'aurais mis "même ce pauvre brocoli laissé au sol me nargue" ? Et laissé au sol dans le sens de laissé par terre ?
J'adore par contre le délire de la fin ! L'armada des brocolis ! Génial ! Et finalement, attaquer directement sur ces incertitudes en réduisant la description de la cuisine au début qui casse un peu le rythme, je me demande si ça n'aurait pas été plus sympa (mais c'est toi le chef !).
Cela dit l'idée de cette histoire est vraiment top et hyper originale !
Oui, le mot "narguer" en a perturbé plus d'un et plus d'une, c'est vrai... Oups...
Je voulais garder le meilleur pour la fin mais oui, j'aurais pu attaquer direct par le cœur du propos et distiller la description. Je l'avoue.
Merci, Aranck, pour tous ces retours !
Pour le reste, c'est du bon !
A bientôt !
Alors déjà bravo pour le style d'écriture. C'est léger, fluide, simple à lire, et sans prise de tête ! Cette petite histoire comique sait où elle va, et ça se sent !
Hâte de lire la suite, mais ces trois premiers chapitres sont déjà parfaitement maîtrisées, je te félicite, et je retourne à ma lecture ! :-)
Tes retours font chaud au cœur. J'essaie, en effet, de faire dans la légèreté et la simplicité. Si tu sens la maîtrise, tant mieux. Parce que, des fois, je ne sais pas trop où je vais... ahahaha !
Bonne suite de lecture !
Sinon ça plaisanter, c'est bien sympa et de tenir le rythme chaque jour c'est fort.
Il faut se méfier de tout. De tout.
Merci de ta lecture, Plume de Poney !
J'ai commencé à lire cette histoire de malédiction, je n'avais rien à dire sur les deux premiers chapitres (juste envie de poursuivre, parce que c'est chouette).
Mais ce chapitre attire mon attention. Un passage en focalisation interne ! Je trouve que ça donne de la profondeur au personnage principal. Je n'ai pas lu tous tes écrits encore, mais il me semble n'avoir lu que des dialogues jusque-là.
J'espère que cette alternance va continuer. En termes de rythme aussi, je trouve ça intéressant, d'avoir eu ces deux dialogues, puis d'avoir ce passage plus long.
Cette histoire de brocolis est à la fois drôle et touchante, j'admire la façon dont tu allies les deux dans ton écriture en général. Je vais poursuivre avec plaisir.
Je relève une coquille dans l'utilisation du verbe "narguer" : "C’est ce que me nargue" -> narguer n'est pas transitif, alors cette formulation me semble incorrecte.
A bientôt
Je compte bien mettre des rêves brûlés ci et là. Content que l'alternance te plaise. Et merci pour tout ce que tu as relevé sur ma plume. Ca me touche énormément !
J'essaie de faire dans le drôle et touchant à la fois. J'ai remarqué ces dernières années que le "uniquement drôle" ne me suffisait plus. Et j'adore mélanger les émotions, les faire tourbillonner pour que ça explose de partout dans le cœur des lecteurices.
A bientôt !