7. Erick

Par Lydasa.

Je ne sais pas pourquoi j’ai tellement envie de prendre soin de lui, de le prendre dans mes bras et de sécher ses lames avec mes pouces. La première fois que je l’ai vu, ses yeux bleus intenses reflétaient absolument toute la douleur de son âme, il m’a regardé avec tellement d’intensité, avec tellement de souffrance que je suis tombé amoureux de lui tout de suite. Sauf que je ne suis pas dupe, j’ai compris que sa souffrance est celle du cœur, des détails même infimes reflétaient ce qu’il a dû vivre. Comme ce collier qu’il a autour du cou, qu’il ne semble pas enlever même pour la douche, cette chaîne en argent avec deux anneaux passés dedans.

 

Lorsque nos corps se sont mélangés, ce n’était qu’une pulsion, moi je ne tenais plus, attiré par lui comme le papillon de nuit par la lumière. Lui avait juste besoin d’évacuer la pression. Je me contenterai de ça jusqu’à ce qu’il s’ouvre à moi, je ne le brusquerai pas, je prendrai soin de lui jusqu’à ce qu’il me sourie sincèrement, car pour le moment je vois bien que son sourire est fade, qu’il n’y a plus de joie et plus d’espoir. Mais ce soir, quand il dormait et que je suis parti chercher à manger, que je l’ai vu dans la rue paniquer, à me chercher, mon cœur s’est douloureusement serré. Il a peur que je l’abandonne, qu’il se retrouve à nouveau seul, jamais je ne lui ferai subir ça. Sauf que je ne peux pas lui dire que je suis tombé amoureux de lui, cela ne fait pas une semaine que l’on s’est trouvés, il va sûrement croire que c’est juste la force des choses, juste parce qu’on est potentiellement les deux seuls mecs survivants.

 

J’imagine comment cela pourrait être si la fin du monde n’avait pas eu lieu. Si nous nous croisions dans la rue, il ne me calculerait sûrement pas, je semble bien trop loin de son univers. Il n’aurait sûrement pas ce regard triste et peut-être qu’il tiendrait la main de celui qui l’a rendu comme ça. Je n’en veux pas à ce mec, il doit sûrement être mort, peut-être dans ses bras, mais sa disparition a brisé Ethan en une multitude de fragments. Il devait l’aimer profondément, moi personne ne m’a jamais aimé de cette manière. Ma petite sœur m’aimait comme un grand frère, mais je n’ai jamais eu de partenaire fixe, femme ou homme.

 

Le lendemain matin, je m’active à préparer le café, des crêpes sans œuf, et j’ai dégoté de la confiture et du sucre. Je le vois apparaître avec sa tête endormie, il a des cernes sous les yeux et le regard rouge, comme il est là, il a dû pleurer toute la nuit. J’aurais aimé aller dans son lit, le prendre dans mes bras pour le blottir contre mon torse et le consoler, mais je ne sais pas comment il aurait pu réagir à cela, il m’aurait repoussé, insulté peut-être, traité de pervers…

 

— Tu as dormi comme un bébé, j’ai l’impression, balancé-je.

— Quoi ? Dormir une heure, pleurer une heure ? Peut-être ? Je crois que je vais avoir du mal à le cacher, avoue-t-il.

— J’ai trouvé de la confiture pour les crêpes.

 

Je vois ses yeux s’illuminer instantanément, je pose la confiture devant lui ainsi que les crêpes, et il se jette dessus comme s’il n’avait pas mangé depuis des jours. Je me mets à glousser, le trouvant juste adorable comme ça. Je m’assis à côté de lui pour manger ma part avant qu’il ne la dévore à ma place. Aujourd’hui on a décidé de bouger un peu, et une fois dans la rue je louche sur un énorme 4x4. Je me dirige vers celui-ci et l’ouvre sans difficulté. Ethan me regarde, les bras croisés sur son torse avec un sourcil levé, je lui retourne son regard et monte sur le siège conducteur. J’arrache les fils sous le volant et commence à bidouiller dedans.

 

— Tu as des talents cachés, dis donc. Tu sais voler une voiture, balance-t-il avec froideur.

— Je ne crois pas que le propriétaire s’en rendra compte.

— Tu pourrais finir en taule pour ça, glousse-t-il.

— Oh ! Tu vas me mettre des menottes et me montrer ta grosse matraque ?

 

L’expression sur son visage est épique, je n’arrive pas à déterminer si l’idée l’enchante ou si ça l’énerve que je sorte des blagues perverses à chaque fois. J’arrive à démarrer la voiture, je balance mon sac à l’arrière, ferme la porte et baisse la fenêtre. Je passe mon bras sur la portière et tourne la tête vers lui, lui faisant un sourire ravageur en mode beau gosse. Je sais que ça faisait craquer les nanas.

 

— Hey, je t’amène faire un tour, bébé ?

— Oh mon Dieu ! C’est encore plus cliché que ton tatouage.

 

Il se met à ricaner, faisant le tour du véhicule pour venir grimper à côté de moi, mettant son sac à ses pieds. Il regarde l’intérieur, sauf que je ne démarre pas, il finit par me regarder en plissant des yeux.

 

— Ta ceinture !

— Oh… mais il n’y a pas de flics ! Et pas d’autres voitures, et pas d’animaux qui traversent !

— Ouais, mais elle va biper et ça va être chiant, lâché-je.

— Ah… ouais, pas faux.

 

Il finit par mettre sa ceinture et me fait un sourire ironique ; je démarre enfin pour prendre la route. Nous pourrons aller plus loin qu’à pied, et surtout nous fatiguerons moins. Le midi nous nous arrêtons manger dans un tout petit village. Je ressors la viande séchée que j’ai trouvée, voir son visage satisfait quand il croque dedans me fera toujours plaisir. Puis le soir, c’est dans une grande ville que je gare la voiture. On cherche un appartement branché sur le gaz et nous nous y installons pour la nuit. Prendre une douche tous les jours est presque devenu une habitude.

 

Cette nuit, nous sommes chacun dans notre chambre, je dors toujours en caleçon, sur le dos au milieu du lit. Je suis dans un sommeil profond quand quelque chose semble m’écraser. Dans mon rêve c’est un énorme chien qui se couche sur moi. Je finis par ouvrir les yeux, le soleil se lève à peine, et ce n’est pas un chien sur moi… mais Ethan, nu comme un vers, qui me fixe intensément de ses yeux bleus, haletant, ses mains posées sur mon torse nu.

 

— Tu fais quoi, Ethan ?

 

Il ne me répond pas, me fixant des ses yeux bleu profond, et se penche en avant pour venir me mordre le cou. Je frémis, pas que la situation me déplait, mais je veux comprendre pourquoi il me saute dessus comme ça. Je le repousse doucement par les épaules, mais je l’entends grogner, il serre les cuisses sur mes hanches, ce qui me fait couiner.

 

— Pourquoi tu me sautes dessus comme ça ?

— Laisse-toi faire, m’ordonne-t-il.

— Mais…

— Ta gueule !

 

Il me dévore les lèvres d’un coup pour que je ne réplique pas. Clairement, là, j’ai l’impression d’être simplement un gode qu’il va utiliser pour se calmer. Mais bon, je vais le laisser faire et je vais bien voir ce qu’il me réserve. Il prend le contrôle avant de me laisser la main dans ce dans qu’il veut brutal alors que ses larmes son venu juste avant sa jouissance. Je le prends dans mes bras, calmant enfin nos ardeurs, et sachant pertinemment qu’il allait se mettre à pleurer, car le sexe n’est pas un antidépresseur. Cela ne manque pas, il se remet à sangloter en se blottissant plus contre moi.

 

— Calme-toi, Ethan… Ne pleure pas !

— Si on s’était rencontrés autrement on ne se serait sûrement pas calculés… Tout ce qui se passe entre nous c’est juste parce qu’on est les deux potentiels survivants… On n’appartient pas au même monde.

— Ouais… et alors ?

— Il n’y aura jamais rien de sincère entre nous à part des pulsions sexuelles, gémit-il.

 

Mon cœur se serre, il vient de dire quelque chose qui me fait l’effet d’une douche froide.

 

— Alors pourquoi tu pleures ?

 

Il se remet à sangloter, je me crispe.

 

— Ne me dis pas des choses comme ça, et après ne te caches pas lâchement derrière tes larmes, gondé-je. Porte tes couilles et assume tes paroles, ou dis-moi ton problème pour me laisser t’aider ! Toi-même tu ne sais pas ce que tu veux ! Alors dis-moi le fond de ta pensée jusqu’au bout, hurlé-je presque.

 

Ses sanglots se taisent, il est toujours blotti contre moi, je sens qu’il se bat avec lui-même, qu’il cherche une réponse à ses propres réflexions. Il gémit de nouveau et je le sens se recroqueviller de plus en plus. Alors je repose ma question…

 

— Pourquoi tu pleures, Ethan ?

— Parce que… je ne veux pas tourner la page… Que j’ai l’impression d’être un monstre si je le fais !

 

Je le sens s’agripper à moi, ses larmes sont devenues silencieuse, mais elles sont toujours là ; je sais qu’il veut se confier plus, mais je lui laisse le temps, caressant doucement son dos d’une main.

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