7 | La maison fermée

Par Seja

— La maison est fermée.

— Fermée ?

— Abandonnée.

— Depuis longtemps ?

— Des années.

— Pourquoi ?

— J’en sais rien.

— Vous savez.

— Je sais même pas qui vit là.

— Vous savez.

— Personne. Personne vit là.

— Vous savez qui y vivait.

— Je…

— Vous savez.

— Je sais. Mais je sais pas comment je sais.

— Devinez.

— Je peux pas juste deviner.

— Essayez.

— Une famille. Au début, il y avait… il y avait des parents. Trois enfants. Puis…

— Puis… ?

— Puis, il n’y a plus eu qu’un parent.

— Et les enfants ?

— Les enfants ont grandi. Ils sont partis.

— Tous ?

— Pas tous. Un est resté là.

— Dans la maison ?

— Dans la forêt. Il… non, elle. Elle n’en est jamais ressortie. Les parents… les parents ont cherché. Puis… 

— Puis… ?

— L’un a tenu. L’autre, non.

— Et la maison ?

— La maison est restée là, vide. Ses habitants sont partis, un par un. Ils ont… ils ont franchi cette porte, puis… puis, plus rien.

— Il ne sont jamais revenus ?

— Jamais.

— Ils sont partis où ?

— Loin de la maison. Loin de la forêt. Je…

— Oui ?

— Comment je sais tout ça ?

— Il n’y a que vous qui puissiez répondre à cette question.

— Et si je peux pas ?

— Vous pouvez. Parce que vous savez.

— Je sais ? Je sais… je sais parce que…

— Oui ?

— Je sais parce que je vivais dans cette maison ?

— Vous savez. Mais pas parce que vous viviez dans cette maison.

— J’étais le parent ? L’enfant ?

— Vous pensez que vous l’étiez ?

— Non.

— Alors qui ?

— Pourquoi la maison est abandonnée ?

— Pourquoi ?

— Elle… Elle n’aurait pas dû. D’autres gens auraient dû venir vivre ici. Près de la forêt.

— Alors, pourquoi personne n’est venu ?

— Je sais pas.

— Vous savez.

— Je peux pas le savoir. J’étais pas là.

— Si vous étiez pas là, pourquoi est-ce que nous sommes devant cette maison ?

— J’en sais rien. Je sais même pas où on est. On… on a traversé des portes. Des portes menant vers rien. Et maintenant, on est dans une forêt face à une maison abandonnée. Ca n’a aucun sens !

— Et pourtant, du sens, ça en a. Pour vous.

— Pour moi ?

— Réfléchissez.

— Je veux pas réfléchir.

— Vous voulez vous approcher de la maison ?

— Je… je veux pas m’approcher de la maison.

— Alors, vous voulez rester là ?

— Non, je veux pas non plus rester là.

— Si vous ne le voulez pas, il faudra que vous franchissiez une porte.

— Quelle porte ?

— Il n’y a qu’une porte ici.

— Celle de la maison ?

— Celle de la maison.

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Raza
Posté le 15/12/2024
Arrrrrrh..
Mais non.......
Ma théorie est moins crédible....mais je sens que il y a quelque chose.... mmmh... la comète est peut être un indice. Qui sait? Quelqu'un sait ? Pourquoi j'ai l'impression que je dois passer une porte ?
À bientôt et merci <3
Le Diable
Posté le 27/11/2024
Le rythme de vos dialogues m'a remis en tête le poèmes de Jean Tardieu (en particulier "La môme néant" et "Les erreurs"). J'en profite pour vous signaler qu'en Enfer les portes grésillent aussi.
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