Ard ri Érenn — le roi suprême

Par Sebours
Notes de l’auteur : Voila! C'est la fin! Voici le dernier chapitre que je rajoute à mon histoire. Maintenant va commencer la longue et douloureuse épreuve de la réécriture. Merci de m'avoir lu et commenté. Cela m'a motivé à continuer d'écrire. Si vous avez une impression d'ensemble à me communiquer, n'hésitez pas. Toutes les remarques sont bonnes à prendre. J'ai adoré faire le poème d'introduction.

Ard ri Érenn

Mille flèches orcs transpercèrent son corps

Malgré cela il lutta et résista jusqu’à l’aurore.

Et c’est ainsi que le grand Nicéphore

Celui qui contrôlait jusqu’à la flore

Après mille maux de ses geôliers connut la mort !

Heureusement, Epiphone dans sa fuite emportait un trésor,

qui au creux de son ventre ne demandait qu’à éclore.

Bien qu’il ne puisse bénéficier de son père comme mentor,

La princesse savait que son fils un jour serait fort.

Un jour viendrait où sonnerait le cor !

Un jour il pourrait quitter son port !

Et alors il prendrait son essor !

Alors tous vers la victoire suivraient le prince Hector !

Extrait du chant satyre « La complainte de Nicéphore »

 

Depuis son coup de pression sur le Lugnasad, Epiphone réfléchissait à la bonne manière d’introduire Hector devant les fianna. Si seulement Iphigénie était encore de ce monde ! Elle aurait trouvé si facilement une solution pour son petit dauphin. Heureusement, Diodore et Bivot au cours de leurs discussions récurrentes venaient d’imaginer un stratagème. Le satyre allait organiser une grande cérémonie de remise de son torque au prince pour célébrer le vingtième anniversaire.

La grande timonière ne laissa rien au hasard. La préparation dura plusieurs mois. Elle commanda à la famille des Marteaux d’Airain le plus raffiné torque du bouclier-monde entièrement tressé d’or. L’excellence métallurgique des nains ne manquerait pas d’impressionner quiconque assisterait à l’évènement. Puis, fidèle à sa politique de propagande, Epiphone envoya ses troubadours à la rencontre des peuplues de la forêt pour chanter la légende de la princesse d’Anulune la meurtrie. Diodore mobilisa aussi les bardes satyres acquis à leur cause. Ceux-ci glorifièrent dans de nouveaux chants le regretté puissant druide Nicéphore et annonçait le prochain avènement de son héritier, le prince Hector. Comme pour l’élection à la timonerie, la propagande inculquait dans les esprits une impression d’inéluctable conclusion.

Sur la demande d’Epiphone, Diodore arborait à présent la ligne rouge sang sur sa toge. Cela permettait à présent de compter les partisans de la guerre au sein du Lugnasad. Par peur, par conviction, par résignation, la plupart des druides se rangeaient dans le rang des bellicistes. Le vénérable Astor se retrouvait chaque jour plus esseulé dans le camp de la paix. Une fois Hector sur le trône, on trouverait bien quelque chose pour condamner cet opposant et l’exclure définitivement de l’assemblée sacrée des satyres.

Enfin, après cette longue préparation, le Lugnasad convoqua les guerriers-chasseurs de toutes les tribus dan la forêt sacrée du Connacht. Les druides organisaient un recrutement exceptionnel d’une nouvelle génération de fiannas en vu de la fin de la trêve séculaire. Tous les prétendants affluèrent donc au cromlech de Caletos, l’incarnation de l’esprit de la meute. Le lieu portait une symbolique importante pour le corps d’élite des satyres. En participant, s’ils réussissaient, ils acceptaient sans restriction de se fondre dans le groupe et de devenir un gardien de la forêt.

Lorsque Hector arriva à la lisière du cercle de pierre, il embrassa les membres de la confrérie élémentaire qui l’avait accompagné au grand complet. Il pénétra avec déférence dans le lieu sacré et s’inséra dans la file d’attente à la suite des autres postulants. Epiphone eut un pincement au cœur. Comme son fils avait grandi ! Sa prestance, son port de tête, sa carrure et ses pieds qui trahissaient sa nature d’hybride le distinguaient positivement de ses concurrents. La désormais Grande Timonière ressentait une profonde fierté. Elle ne doutait pas de sa réussite malgré une certaine appréhension. N’était-il pas l’héritier d’un druide et d’une princesse ? Bon sang ne saurait mentir !

Deux immenses jarres, une blanche et une noire trônaient au centre du cromlech. Les participants, l’un après l’autre fourraient leur main dans l’une d’elles pour en ressortir une petite statuette de bois sculptée en forme d’animal. Diodore expliqua à ses amis que chaque prétendant tirait au sort la bête qu’il devait chasser et en cas de réussite deviendrait son totem. Ils avaient le choix entre la petite faune, dans le vase blanc et les seigneurs de la forêt dans le noir. Lorsque vint son tour, Hector piocha dans le second dans une représentation de sanglier. Il n’était que le cinquième présomptueux à tenter ce pari. Le druide derrière les urnes lui indiqua le fian qui suivrait sa chasse. Immédiatement il partit débusquer sa proie. Il avait qu’au levé du soleil, le lendemain matin pour réussir l’épreuve. La période d’attente angoissa quelque peu Epiphone, mais le retour triomphal de son fils sous le clair de lune, avec un magnifique sanglier sur les épaules. A l’aube, deux autres que lui pouvaient encore prétendre au statut de grand chasseur.

Une fois leurs compétences de chasseur éprouvées, les fianna passèrent à l’évaluation des capacités physiques des postulants. Après leur avoir tressé les cheveux, ils les lancèrent dans une poursuite à travers la forêt. Si le guerrier était attrapé, si une branche craquait sous ses pieds ou si ses tresses se défaisaient, c'était l'échec. Les concurrents devaient récupérer l’un des sept boucliers placés en lisière de forêt et de revenir au cromlech de Caletos sans se faire prendre. Hector s’acquitta avec brio de l’épreuve en terminant premier de la course.

Ainsi, ils n’étaient plus que sept à pouvoir devenir fian. On les plaça dans des trous à hauteur de leur taille. Sept guerriers-chasseurs armés de lances rituelles entourèrent chaque candidat. Au signale du carnyx, la terrible trompe de guerre, les assauts commencèrent. Armé du bouclier qu’il avait mérité, Hector commença à parer la multitude d’attaques. Au premier sang, c’était l’échec ! Un cierge flambait au centre du cromlech. Les aspirants devaient tenir jusqu’à ce que la bougie de cérémonie atteigne la ligne dessinée sur le contour. A gauche, un premier postulant fut touché et sorti de son trou, puis un deuxième. Hector peinait dans sa défense, il risquait d’être le prochain ! Epiphone sentait ses fianna plus vigoureux que les autres. Les guerriers-chasseurs voyaient-ils d’un mauvais œil la candidature d’un hybride ? Son instinct de mère l’empêcha de contenir son cri du cœur.

« Hector ! C’est une épreuve de combattant ! Montre-leur ta puissance ! »

La partie était presque perdue. Hector n’avait plus le choix. Il attira la flamme du cierge à lui et forma un cercle de feu pour se protéger. Les terribles guerriers-chasseurs reculèrent d’un pas. L’héritier de Nicéphore lança des traits qui embrasèrent les hampes des lances. Tous les satyres se figèrent. Quelque chose d’important venait de se passer. Epiphone en était convaincue. Son fils avait-il failli en utilisant ses pouvoirs pyrokinésiques ? Les terribles guerriers-chasseurs déposèrent leurs armes et se prosternèrent devant Hector.

« Gloire au nouveau Ard-ri-Erenn ! Nunn nous a envoyé son messie ! »

La grande timonière comprenait enfin. Son fils maîtrisait le feu, l’élément associé à la bannière de Cess-Khal. Voilà pourquoi le Lugnasad s’était si facilement rangé derrière sa cause ! Et voilà pourquoi les fianna le considéraient à présent comme leur roi suprême ! Pourquoi Diodore ne lui avait-il rien dit ? Hector aurait ainsi pu se passer de ces épreuves en étalant directement ses pouvoirs ! Alors qu’elle allait le réprimander, son ami lui susurra sa justification au coin de l’oreille.

« J’avais confiance en Hectol, mais je voulais l’endulcil avec ces épleuves ! »

« Il aurait pu échouer ! »

« Alols il n’aulait pas été digne d’êtle Ard-ri-Erenn cal il n’aulait pas été plêt poul cela ! »

Finalement, Diodore n’était pas si simplet que son élocution le laissait penser. Sa participation au Lugnasad l’avait profondément transformé. Il était devenu un sage. Il avait raison ! A quoi bon partir en guerre avec un chef indigne de sa tâche ? Cela faisait prêt de cent cycles qu’Epiphone se préparait à la confrontation. Elle ne laissait rien au hasard. Elle militarisait son peuple. Elle formait les shardanes. Elle avait créé les marlins. Elle unissait les bannières élémentaires. Elle fournissait toujours plus d’armes pour la gloire de la déesse. Elle préparait Hector depuis sa naissance à diriger la coalition. Son fils ne devait prendre le commandement s’il n’était pas prêt. A présent, la confrérie savait qu’il possédait un chef de guerre capable de les mener à la victoire ! A présent, il était Ard-ri-Erenn, le roi suprême !

La cérémonie du torque se transforma donc en couronnement. Le bijou commandé par Epihone débordait de détails symbolisant l’union des quatre peuples élémentaires. On retrouvait notamment le dessin de feu d’Hector, un carré dans un rond dont les lignes reliant les sommets opposés formaient à la foi une croix et quatre triangles. Les ornements aux deux extrémités du collier représentaient le visage de la princesse vengeresse et du regretté Nicéphore afin de rappeler à chaque instant l’ascendance exceptionnelle du nouveau roi suprême. Les carnyx résonnèrent, accompagnés du rythme des tambours de guerre au moment où Hector ceint son torque. Déjà on préparait le banquet pour célébrer ce jour glorieux. Epiphone n’en avait que faire ! Elle ne songeait plus qu’à une chose, la guerre !

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