Chapitre I - Le destin de Louis
Les personnages
- Louis, ancien bûcheron demeurant aux Avers, hameau de Moux-en-Morvan, surnommé aussi Louis le Preux ;
- Saturnin, ami de Louis, apothicaire du village ;
- Gobin, lutin voyageur accompagnant souvent Louis le Preux ;
- Maistre Pacolet, lutin mage au village ;
- Singletone, fille de Maistre Pacolet ;
- Mère Lousine, créature maléfique vivant dans l’eau ;
- Célénose, reine des Poules Noires ;
- Titania, reine des fées.
À presque 60 ans, de caractère morose et taciturne, Louis vivait seul dans sa chaumière au hameau des Avers dans la vallée du Chazelle au cœur du Morvan. La rivière prenait sa source plus haut, près du Mont Moux et alimentait les moulins pour se jeter en aval dans le Ternin. Le corps de ferme se dressait fièrement à flanc de coteau. Il y a fort longtemps, les aïeux du Louis avaient construit puis, au fil du temps, agrandi la masure : une grange, une étable et la maison formaient désormais une longère, si typique du pays. L’homme avait été bûcheron et, de son activité antérieure, il avait gardé un cheval qui lui servait encore pour débarder le bois pour sa cheminée. Mais la solitude l’ayant détourné de ses semblables, Louis se présentait maintenant comme le dernier ermite du Morvan. Il s’écriait à qui voulait l’entendre : « Oui, les ours existent ici ! Bienvenue Messieurs, Dames, pour vous servir ! ». Ainsi, les rares étrangers fuyaient devant ses propos et sa fourche qu’il promenait comme un trophée. Seul, Saturnin un copain d'école lui était resté fidèle.
Très souvent, Louis chiquait, pour le plus grand bonheur des enfants du village. Pour les plus intrépides, le jeu consistait à s’approcher au plus près du vieil homme, d’évoquer des banalités et d’esquiver d’un geste rapide le jet de la chique. Éviter la boulette de tabac et devenir pour un instant le héros du groupe : telle était la règle du jeu, aussi simple que stupide.
De son ancien métier, l’homme cachait une véritable vénération pour les arbres : chênes, bouleaux, hêtres qu'il apercevait de sa fenêtre. Souvent, il évoquait avec véhémence et brio, la gloire passée de la flore morvandelle. Il savait conter l’histoire de la plupart des chênes majestueux de la montagne. Mais personne ne le croyait vraiment lorsqu’il prédisait l'avenir des arbres dans ses pérégrinations au bourg de Moux-en-Morvan lors de la fête de la Saint-Denis.
***
Ce matin-là - comme chaque matin -, accoudé au prôme* de la maison, le vieil homme contemple le ciel de la vallée. Un arc-en-ciel se lève. Louis se souvient de toutes les balivernes que l’on raconte autour de ces phénomènes. Mais plus denses, plus claires, plus lumineuses, les couleurs scintillent dans un ciel limpide et pluvieux. Malgré ses réticences, il décide d’aller voir. « Et si c’était vrai, le trésor serait là ? » pense-t-il sans trop y croire. Sans oublier son couteau, un bâton et une serpette, l’homme prend le chemin de la montagne, traverse le pont qui enjambe la rivière et s’approche d’un grand chêne qu’il connait bien. Stupéfaction : les rayons éclairent le pied de l’arbre.
Louis s’approche, glisse ses mains dans les rayons de lumière. Il se brûle ! Recule. Rien ne bouge. Les rayons persistent. Louis revient. Agacé, il frappe trois coups de bâton sur le sol inondé de lumière. Rien n’y fait. Dépité, il jette son bâton à terre et se glisse maintenant entièrement dans les faisceaux de lumière incandescents. Et telle la victime d'un sable mouvant, Louis disparaît peu à peu. Sans crainte, excité par un trésor à portée de main, il se laisse aller… Mais après avoir été enseveli quelques secondes, il sent une force le repoussant à la surface. Excédé, il renonce finalement au trésor et reprend le chemin de sa maison. Seulement, son bâton n’est plus là et la marche lui semble plus facile. Soudain, dans les buissons, il aperçoit furtivement une ombre qui s’enfuit à sa vue.
— Bonjour, on vous attendait depuis longtemps, murmure un petit homme, bâton à grenouille à la main, chapeau gris sur une tête d’œuf, d’où émergent de trop grandes oreilles.
— Salut, se surprend à dire le bougre.
* Un prôme : petite barrière de porte d’entrée des maisons morvandelles
— Je me présente : Gobin le lutin. Et toi ?
— Loulou, s’étonne encore une fois l’homme.
— Bon, je dois te prévenir ! Nous sommes dans la vallée du Chazelle,
— Je le sais bien, j’habite ici depuis plus de soixante ans,
— Ah, non. Nous sommes dans l’Autre Pays Morvandiau, au Royaume des 5 pays, annonce le lutin.
L’homme s’assied sur la souche d’un arbre, marque une pause en regardant ses mains ridées et poursuit :
— Cet Autre Pays Morvandiau, est-ce le pays du petit peuple de la forêt ?
— Oui. Mais attention, ici le temps est divisé par 4 ou 5 par rapport à « ton temps de l’autre côté » - si j’ose m’exprimer ainsi -. Quel âge avais-tu là-bas ?
— Donc, j'ai 16 ans maintenant, répond le désormais jeune homme après un rapide calcul.
— Oui, à peu près mais c’est plus compliqué : il faut tenir compte des variations climatiques de chaque côté. Maistre Pacolet notre mage et chef du village te le dira précisément. Bien, allons-y, la fête bat son plein, propose le lutin.
Sinuant dans la vallée couverte de champs en terrasse, le chemin débouche enfin sur un petit village aux couleurs vives. Émerveillé par ce spectacle féerique, Louis sautille sur le sentier de cailloux blancs pour mieux apercevoir chacune des habitations. Le grondement du fleuve en contrebas se dissipe progressivement pour laisser place à un tonitruant charivari musical. Louis perçoit maintenant distinctement le son des maracas, bombardes, harpes et flûtes. En s'approchant un peu, il découvre enfin le village, où des enfants lutins bruyants et tapageurs l'attendent au bord du sentier. D'immenses courges vertes, jaunes ou rouges abritent les habitants. Chacune de ces cucurbitacées possède une porte arrondie surmontée d'une fenêtre ornée d'argent. Enfin au sommet du toit, une cheminée rappelle étrangement le pédoncule du légume.
— Nous voici arrivés. Je te laisse avec Maistre Pacolet, annonce Gobin devant une grande demeure où flotte un drapeau vert, un disque marron en son centre.
— Bienvenue dans l'Autre Pays Morvandiau, rappelle le mage en sortant d'un gigantesque potiron vert et marron.
— Ce doit être les couleurs du Royaume ! songe Louis.
— Allons festoyer sur la place du village, où nous attendent mes compatriotes, poursuit Maistre Pacolet.
Équilibristes, jongleurs et dresseurs de grenouilles déambulent sous un chapiteau dressé près d’une estrade en bois. Louis y découvre le monde fabuleux des grenouilles dressées pour émerveiller les lutins rassemblés pour les festivités. Le dresseur s’approche d’une femme et lui demande poliment :
— Votre prénom s’il-vous-plait, Mademoiselle ?
— Singletone,
— Donnez-moi un nombre entre 1 et 10,
— 5, répond la jeune fille et immédiatement 5 grosses et belles grenouilles apparaissent dans la main du dresseur.
Le dompteur de grenouilles quitte la scène. S’avance alors un lutin déguisé en Monsieur Loyal, qui harangue la foule : « Soyez patients, le clou du spectacle arrive ! »
Louis se retourne vers Maistre Pacolet. Mais celui-ci vient de partir précipitamment vers l’estrade. Déconcerté, Louis s’adresse à Singletone :
— Qu’est-ce donc le clou du spectacle ?
— Tu ne seras pas déçu. Vraiment exceptionnel aujourd’hui. Viens vite vers l’Échafaud des Sacrifices.
Louis s'exécute sans mot dire. En s'approchant, malgré une foule compacte, il découvre, consterné un immense bûcher où - formant un cercle - gisent 5 très jeunes enfants lutins criant et pleurant à tue-tête. Maistre Pacolet, Gobin, Singletone et tous les autres attendent fébrilement l'instant où l'étincelle viendra voler la vie des innocents.
— Pourquoi ? Ne trouve qu’à dire Louis désespéré par ce spectacle si cruel. Maistre Pacolet rétorque :
— Il le faut malheureusement pour garder le fragile équilibre entre les 5 pays du Royaume. Au nord, l’espace marin des Ondines, Sirènes, Anguilles et Cetus. A l’est, la montagne des Elfes et des Fées. Au sud, le pays des Queulairds et Loups-vérous. Il y a aussi le Lopin des Terres Abandonnées et les Marais. Et nous, les lutins. » détaille le mage en lui montrant une vieille carte manuscrite du Royaume.
— Rien ne peut justifier de tels meurtres, s’exclame Louis emphatique, devant de tels sacrifices.
Alors que le bûcher commence à s’enflammer, Louis détournant son regard, fend la foule et se sauve sur le chemin du retour.
— Ces nécessaires libations aux esprits forestiers nous permettront peut-être, de maintenir les ardeurs des Queulairds et des Loups-vérous qui veulent annexer Les Marais. Attends, il y aurait peut-être un autre moyen mais …, s’écrie Maistre Pacolet. Louis n’entend déjà plus rien. Il court vers l’arbre et se jette dans les faisceaux de lumière qui l’emportent dans la vallée du Chazelle en Morvan.
***
Ayant repris son bâton, Louis se hâte pour rejoindre sa maison mais la marche se fait plus difficile, le pas plus lourd : il a retrouvé son âge d’antan. Malgré la fatigue qui apparait, il avance vers sa masure. Au loin, monte une colonne de fumée semblable à celle du bûcher. Un instant, il doute : « Suis-je resté dans l’Autre Pays Morvandiau ? ». Il regarde ses mains ridées, poursuit péniblement son chemin et commence à comprendre en apercevant un attroupement dans la cour de sa longère. Son ami Saturnin s’égosille :
— La foudre vient de tomber sur la maison. Attention, la bâtisse est en feu. Il faut protéger l’étable.
— Sauvez mon cheval, Dortésia, braille Louis.
— Ton cheval est au pré. Mais où étais-tu donc passé ? Voici deux bonnes heures que je te cherche, s’étonne Saturnin.
Sans répondre, Louis contemple, impuissant, l'incendie qui ravage sa maison. Le toit s'effondre mais l’étable et la grange sont miraculeusement sauvées.
— Il ne me reste donc plus qu’à vivre avec Dortésia, mon fidèle cheval.
C’est ainsi que Louis, sans divulguer à quiconque son escapade extraordinaire, prit comme nouvelle demeure l’étable de son cheval. En secret, il se remémore son voyage. Ne plus jamais revenir dans ce pays barbare : tel était son état d'âme après ce triste voyage.
Lorsqu’une nuit obscure et sans sommeil, il entraperçoit dans l’étable un petit individu tressant le crin de son cheval, Louis s’enflamme :
— Que fais-tu là, Gobin ?
Le lutin murmure :
— Je suis revenu par le premier arc-en-ciel pour t’expliquer. Tu es parti comme la flèche d’un loup-vérou. Je suis venu te dire que tu n’aurais pas dû partir. Il te fallait rester que je puisse t’expliquer. Pour faire cesser les sacrifices d’enfants et maintenir la paix entre les 5 Pays du Royaume, il nous faut trouver une femme ou un homme comme toi pour activer l’artefact sacré,
— Qu’est-ce donc ?
— L'appareil régule la tension entre les Pays mais, sans énergie, il n'a plus la puissance nécessaire. Il nous faut recharger l’artefact avec de l’eau, à la source du Grand Fleuve, concède le lutin.
— Et que devrai-je faire ?
— Rejoindre la Vieille Chaussée, poursuivre au nord à la nage, chuchote Gobin.
— Faites-le vous-même !
— Aquaphobes nous sommes. As-tu déjà vu un lutin nager ?
— Mais, je suis trop vieux.
— As-tu donc tout oublié ? Tu n’auras que 16 ans chez nous, rappelle le lutin.
— Qu’aurais-je à gagner ?
— La stature d’un héros antique. Pour nous, tu ne seras rien moins qu’un nouvel Hercule, Ulysse ou Achille !
Peu intéressé par un passé révolu, Louis réfléchit à un autre gain : la jeunesse.
— Bien, mais je dirai à Saturnin et Dortésia que je me dois me rendre au marché à Saulieu, acquiesce l’homme.
***
Revenu au village des Lutins, le jeune Louis rencontre Maistre Pacolet qui lui présente une vieille carte et lui explique rapidement la situation. Maintenant, le jeune homme cheminait au pied de la muraille de la Vieille Chaussée. Maistre Pacolet avait pourtant prévenu mais l'édifice impressionnait vraiment le jeune homme qui tentait de trouver un chemin à gravir. Gobin qui l'accompagnait jusque-là, refusa maintenant d'aller plus loin. Louis le rassura :
« Je vais grimper ici. Ne t’inquiète pas, je reviendrai avec cette gourde remplie d’eau de source. »
Après plusieurs heures de marche difficile, Louis découvre un immense lac vert aux rives escarpées. Mais poursuivre impose de se mettre à l’eau. Maistre Pacolet l’avait prédit ! Louis esquisse donc ses premiers mouvements de nage dans une eau douce, claire et chaude. Il progresse dans des nénuphars, lorsqu'une grenouille s’approche et l’avertit :
— Que fais-tu là, jeune aventurier ?
— Je recherche le trésor d'un bateau pirate englouti depuis longtemps, prétexte Louis pour ne rien révéler de sa mission.
— Il n'y a rien de tel par ici. Mais fais bien attention aux Sirènes qui t'enchanteront, aux Cétus qui t'hypnotiseront, aux Anguilles qui t’attraperont et aux Ondines qui pleurer, te feront.
— Et Rond et Rond, Petit Patapon, s’amuse le jeune homme.
Enfin, la queue de l’étang apparait au loin. Nulle trace des créatures maléfiques. Puis, le lac devient rivière ; rivière, ruisseau ; ruisseau, source. Enfin, Louis prélève un filet d'eau nécessaire à l’artefact. Près de la source, croît un bel arbre reconnu immédiatement par Louis : un bouleau. Il en profite pour extraire de la sève aux vertus médicinales incontestées.
« Un retour sans encombre et calme, » s’étonne Louis qui avait envisagé de nombreuses péripéties. En arrivant au village des lutins, résonnent déjà les clameurs célébrant les louanges du futur héros.
— Au pays des aveugles, les borgnes sont vraiment rois, pense-t-il.
— Merci pour l’apport de l’eau qui permettra le rétablissement de l’équilibre entre les 5 pays. J’avais oublié de te dire qu’en cette saison, les animaux aquatiques ont migré vers le sud, consent Maistre Pacolet.
— Alors, la grenouille m’aurait menti !, ajoute Louis.
— Bien sûr. Par nature, la grenouille est menteuse. Ne le savais-tu donc pas ? »
Sans artifice, ni sacrifice, une fête s'improvise alors sur la place du village. Les lutins heureux, chantent et dansent au son d’un orchestre inopiné. Au cours du festin, Maistre Pacolet prend la parole :
— Louis, nous te sommes reconnaissants pour ce que tu as fait. Aujourd’hui, je viens te proposer la main de ma fille unique. Si bien sûr, Singletone est d’accord.
— Singletone est donc ta fille, bredouille Louis désormais surnommé Louis le Preux.
L’assistance applaudit. Tout le monde se réjouit de cette bonne nouvelle, sauf un récalcitrant qui maugrée quelques paroles inaudibles. Le repas se poursuit dans une ambiance gaillarde et joviale. Seul, un incident viendra ternir la ribote. Après un voluptueux dessert, Jean s’oublie un peu en prenant un reste de tabac, qu’il chique et crache sur sa promise. Tout penaud, il chuchote :
— C’est une tradition de chez nous. Lorsque l’on accepte la main d’une fille, il faut lui cracher au visage. Singletone sourit à ce beau geste d’amour.
Un matin, le tambour résonne au village. Louis le Preux dort paisiblement dans sa courge. Ses voisins ont reconnu le rythme et l’informe d’une réunion près de l’arbre.
— Est-ce un nouvel arc-en-ciel ?, questionne Louis.
— Non, une réunion exceptionnelle pour tous, initiée par Maistre Pacolet, répondent en chœur quelques villageois.
Au centre de la foule, juché sur un énorme cèpe, Maistre Pacolet s’exprime alors dans un silence de plomb.
— Vous savez tous que l’artefact fonctionne parfaitement grâce à Louis le Preux, que je remercie encore. Cette nuit, l’artefact m’a informé d’une intrusion inconnue au sud, sur le Lopin des Terres Abandonnées. Je n’ai pas d’autres informations, mais nous connaissons tous les dangers de ce lieu hostile. Il nous faut savoir si de nouvelles menaces existent aux portes de notre pays !
— Bien parlé, lance un villageois.
— Ainsi, je souhaite qu’un ou deux vaillants informateurs puissent se rendre sur les lieux. Chacun aura un heaume, des gants et des bottes, poursuit le mage.
— L’entreprise est trop risquée, s’inquiète déjà le même villageois.
Louis le Preux s’avance et déclare simplement :
— J’irai,
— Et je t’accompagnerai, déclare Gobin, déterminé.
La foule applaudit. Maistre Pacolet adoube alors les deux émissaires et les convie en sa demeure pour examiner la carte.
« Il vous faudra emprunter le pont du Grand fleuve, monter le chemin jusqu’au Puits de la Mère Lousine. Mais après, personne ne s’est jamais aventuré aussi loin, admet le mage.
Les deux compagnons s’équipent : heaumes, gants et bottes. De plus, Louis prend son "coutiau", sa serpe, son bâton et sa gourde de sève de bouleau. Gobin, son attirail de pêche. Les deux compagnons s’approchent du pont suspendu. Ce dernier ondoie au vent au-dessus des flots. Il faudra être prudent car l’ouvrage menace. L’édifice craque, tangue mais ne rompt point. Les aventuriers poursuivent leur quête lorsqu'au bord du chemin, apparaît la margelle d'un puits.
« Le puits de la mère Lousine ! » murmure Louis.
Une voix terne et rocailleuse s'élève du fond de l’orifice :
— Bienvenue sur les terres abandonnées. Venez que je prédise votre destinée, Louis s’approche.
— Reculons vite ! C’est le piège que nous avait annoncé Maistre Pacolet, s’écrie Gobin qui tel un pêcheur à la mouche lance son fil, déroule son moulinet et hameçonne son compère d’infortune.
Rapidement, les deux émissaires s’échappent du piège qui les aurait engloutis dans le puits maléfique. Poursuivant leurs recherches, ils débouchent dans une clairière où picorent des poules noires d'aspect agressif. L’une d’elles bat des ailes, s’agite, commence à picorer les bottes des deux aventuriers et finalement se présente :
— Célénose, Reine des illustres Poules Noires, la réincarnation des anciennes Harpies. Nous voici depuis peu, installées sur ce lopin de terre abandonné de tous.
— Pour nous, les Lutins qui vivons au Nord, il nous faut des garanties de paix. Viendrez-vous nous envahir prochainement ? Auriez-vous le projet d’étendre votre territoire ?, déclare Gobin.
— Non, le territoire est déjà bien trop vaste pour nous. Nous resterons près du grand arbre où nous avons établi notre feu. Pour notre bonne foi, nous vous offrirons à chaque solstice d’été, 12 œufs frais que nous porterons près du Pont, ajoute la Reine des Poules noires.
— Bien, reconnait Louis, qui se souvient du bon goût d’une omelette aux girolles.
— Qu’il en soit ainsi, conclut la Reine.
Mais sur le chemin de retour, Gobin reste pensif :
— Il me semble qu’il pourrait y avoir un problème ultérieurement : des poules noires pourront entrer dans le Morvan via l’arbre et l’arc-en-ciel.
***
Gobin avait raison puisque dans le Morvan depuis lors, la poule noire apparaît d'elle-même au carrefour des quatre chemins. Certains paysans morvandiaux pensent qu’il est possible ainsi de communier avec le Diable. Il est d'usage de capturer le volatile, de lui lier les pattes et de le placer dans un cercle magique dessiné à terre. Pour invoquer Satan, il reste à crier aux quatre points cardinaux :
« Qui veut acheter ma poule noire ? »
Mais si le Diable arrive et achète la poule, prenez garde ! Il devra jeter les pièces dans le cercle sinon, il s'agira de fausse monnaie ou de pièces périmées inutilisables.
Quant à Louis, nul ne l’a revu dans le Morvan. Saturnin a repris le cheval. Aux Avers, la maison incendiée et les bâtiments tombent en ruines. Le hameau, jadis si prospère n’est aujourd’hui qu’un amas de pierres dans la vallée du Chazelle.
Fin du chapitre I
J'ai adoré cette petite histoire, c'est vraiment tout doux comme univers !
Cependant, parfois le texte saute un peu du coq à l'âne sans trop prévenir... Puis-je suggérer d'y ajouter quelques liaisons ou bien simplement de mettre un petit séparateur entre les différentes parties ?
En tout cas si jamais tu écris pus des aventures de Louis et Gobin, je les liraient avec plaisir
Je suis preneur de tous commentaires. Il s'agit du premier chapitre. Et avec plaisir , je vous communiquerais le second. Merci