Chapitre 1

Par Nascana

-Il est 23h45, tu es prête ?

La mère de famille jeta un regard au miroir du salon. Elle avait choisi ce naturel que certains dénigraient. Les cheveux lâchés, les yeux et les lèvres à peine maquillés lui paraissaient plus convenables. En reculant, elle contempla sa robe, sa préférée. Simple et pratique, elle était devenue son allié qui savait la mettre en valeur.

-Je suis prête ! annonça-t-elle.

-Il va falloir nous mettre en route, lui rappela son interlocuteur.

Ouvrant un tiroir, elle en tira une lettre.

-Je vais la mettre dans la cuisine pour eux, pour demain quand ils se lèveront.

Sa tache accomplie, elle se dirigea vers la porte d'entrée, l'autre sur ses talons.

-Il te reste encore dix minutes, si tu veux.

La femme d'âge mûr secoua la tête.

-Il faut que j'aille nourrir les poissons, soupira-t-elle. J'ai oublié. Les voisins m'ont demandé et j'ai oublié.

Levant les yeux sur sa maison, elle la contempla comme si c'était la dernière fois qu'elle la voyait. Inconsciemment, sa main se porta à son cœur.

-Merci d'être là, pour moi, murmura-t-elle.

-C'est mon rôle, je suis là pour ceux qui en ont besoin.

-J'en ai besoin. Parce que j'ai peur !

-C'est normal. Il n'y a rien de honteux à avoir peur.

Elle hocha la tête.

-Je n'en ai parlé à personne. J'ai fais comme ça devait être fait.

L'homme contempla sa montre attentivement. Une montre magnifique du reste, à gousset en or et argent, gravé de motif floraux. La mère de famille n'osait pas le regarder.

-Il est 23h58. Les poissons t'attendent.

Elle le savait mais elle avait peur.

-Je serais derrière toi, je marcherais dans tes pas.

Concentrée, elle se mit en route. Elle pouvait le faire.

C'était comme si la mère de famille avait dans un rêve, chacun de ses pas la rapprochait du trottoir d'en face. Avançant à bonne allure, elle ne faisait pas attention à ce qui l'entourait. Se fut son erreur. Une grave erreur.

Au dernier moment, elle vit la lumière devant elle. Éblouie, tel un animal, elle resta paralysée. Le crissement horrible ne la fit pas plus bougé.

Une masse de taule la percuta violemment, elle sentit son corps s'envoler sous le choc. La chute n'en fut que plus brutale. Elle s'étala sur l'asphalte, incapable de dire si elle avait mal ou non.

Alors c'était ça, la vérité, pensa-t-elle.

-23h59, annonça l'homme en se penchant sur elle.

C'était bien, la fin approchait. Elle souriait comme une idiote, ses pensées n'étant plus qu'une masse grossière.

-Merci, murmura-t-elle.

-Minuit !

Minuit, et sa poitrine ne se soulevait plus, ses yeux étaient devenus vitreux mais son sourire restait peint sur son visage, sincère.

-Si tous les clients pouvaient être comme ça, la vie des anges de mort serait bien plus simple, dit-il en lui fermant les yeux. Connaître dès la naissance l'heure de sa mort, ne permet pas à tout le monde de l'accepter aussi facilement que toi. Dommage !

Sûr de lui, il partit voir son prochain client.

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Diogene
Posté le 18/04/2014
Oh, mais que c'est horrible. Mais je reconnais bien là ta patte  Nascana, toujours aussi mordante et séduisante.
Nascana
Posté le 18/04/2014
C'est assez effrayant, je le reconnais. 
Merci pour ton passage.
Nascana 
Sati
Posté le 15/10/2011
encore un texte triste ! Il était sympa, mais triste ! Jolie trouvaille en tout cas. J'ai trouvé ton histoire bien écrite. Il y a ici et là quelques coquilles, mais rien de bien méchant. Mourir à minuit, et le savoir longtemps en avance, sacré perspective de vie et d'attente de l'instant fatidique. Bravo !
Spilou
Nascana
Posté le 15/10/2011
Merci. 
Contente que tu es aimé le thème et la lecture du texte.
Nascana 
Jamreo
Posté le 14/10/2011
Damn! Encore une catastrophe Nascana! J'avais cru à une banale sortie, au ciné ou au théâtre, MAIS EN FAIT l'identité de l'autre personnage est bien différente de ce que j'avais supposé. Je croyais que c'était le mari ...
C'est pour ça qu'elle a voulu écrire un mot avant de partir! Ca me paraissait possible, dans l'optique de ce que j'avais compris, mais quand même un peu décalé. Avec tant de gravité dans les paroles de la mère. Un bon effet de surprise (même si la violence de la fin tamise un tout petit peu mon impression) !
Nascana
Posté le 14/10/2011
C'est vrai que je me rend compte que le texte court chez moi à tendance à finir mal. 
J'avais fait en sorte qu'on pense que c'était le mari ou un ami.
J'avais peur que ce texte ne plaise pas mais maintenant je suis rassurée.
Merci.
Nascana 
Shaoran
Posté le 11/10/2011
oO' J'ai eu un doute sur là où tu voulais nous emmener (ouais bon d'accord c'est pas super français... mais fatiguée ><"), mais finalement tu réponds à mes questions à la toute fin donc ça va :p
Du reste, j'aime bien le texte et son ambiance, cette belle robe, spécialement enfilée pour son "rendez-vous avec la mort" si j'ai bien compris... un seul détail que tu aurais pu améliorer c'est ton personnage. Je aurais donné un nom particulier, histoire de lui donner corps ou alors j'aurais carrément raconté à la première personne, ça t'aurais permis de happer ton lecteur dans l'histoire plus efficacement. Mais comme dit, ça reste un simple point de détail... j'aime bien l'histoire dans son ensemble 
 
A peluche 
Sushi ^^ 
Nascana
Posté le 11/10/2011
Pas grave ^^. Le but c'était de douter donc si c'est réussit, c'est bien ^^. 
Avec du recul, c'est vrai que ça fait bizarre. Je referais peut-être une deuxième version du texte, en tenant compte des remarque.  
Merci pour la lecture, contente qu'elle t'est plu.
Nascana 
Seja Administratrice
Posté le 08/10/2011
Hum, je pensais au départ que c'était un psychopathe avec sa victime qu'il aurait conditionnée pour qu'elle accepte de mourir de sa main à minuit :P
Mais cette version-là est pas mal aussi xD Je trouve juste dommage qu'il y ait toutes ces fautes qui sortent un peu de la lecture -_- 
Nascana
Posté le 08/10/2011
Tiens, j'y avais pas pensé au psychopathe. 
Désolée pour les fautes, je le passerais à la beta-lecture après.
Merci.
Nascana 
vefree
Posté le 08/10/2011
Brrrr ! Nasca' pourquoi as-tu toujours des histoires fatalement morbides ?
Quoique celle-là est intéressante. Un ange de la mort... et sa cliente. C'est horrible de savoir quand et comment on va mourrir. Beurk ! En plus, la mère de famille est plutôt bonne pâte sur la question. Elle se laisse faire, se laisse emmener. Au début, je croyais que c'était un couple qui sortait pour la soirée, très anodin, donc... et puis en fait, les personnages n'ont pas de nom. Pourtant j'aurais peut-être apprécié que la mère de famille ait un prénom, histoire de mieux se l'approprier, aider à prendre parti. Mais peut-être était-ce intentionnel de ta part de rester en retrait, observateur de ce qui est en train de se dérouler.
Intéressante petite histoire.
Biz Vef' 
Nascana
Posté le 08/10/2011
Bonne question. J'ai l'impression que pour moi, texte court = morbide. 
Pour le prénom, c'était volontaire pour marquer le détachement de l'ange vis-à-vis de sa cliente.
Sinon, j'avais pour idée un monde où l'on apprend enfant quand on va mourrir. Sachant que quoi qu'on fasse on ne peut y échapper. Ils y a ceux qui l'acceptent comme mon personnage et ceux qui vont contre mais qui souvent se jete dans le piège de cette façon.
Merci pour le commentaire.
Nascana