Paris - Samedi - 21 h 38 - Jour 1.
Lucas a trente-trois ans ; l’âge du Christ, à ce qu’il parait. Sa décision est prise : il mourra ce soir. À cet instant, il tuerait pour une cigarette. Il farfouille dans sa poche arrière droite pour en dénicher une. C’est peine perdue puisqu’il a une fois de plus égaré son briquet. Ne pas trouver son feu est une problématique si récurrente qu’il en rachète un par semaine. Parfois, deux. À chacune de ses visites au tabac du coin, Marc le buraliste l’accueille avec le pouce levé. La salve de moqueries que Lucas subit lui donne souvent envie de répliquer. Pourtant, il s’abstient à chaque fois. Depuis le temps, il a appris à ravaler les réparties cinglantes qui fusent dans son cerveau. Lucas pourrait sans peine lui démontrer que son haleine de café - clope décollerait le papier peint d’un appartement tout entier.
— Si ta tête était pas attachée à ton corps, bougonne le sexagénaire accoudé derrière son comptoir, tu la perdrais, mon petit gars.
Celle-là, il l’a entendue un bon millier de fois depuis qu’il a emménagé dans le coin il y a trois ans. Comme d’habitude, il se contente de laisser couler. Il perd moins de temps à payer et s’en aller sans rien dire. Lorsqu’il explique à Marc que c’est son anniversaire, ce dernier se sent un peu bête. Pour se faire pardonner, il lui offre un briquet de collection qu’il part récupérer dans la vitrine de prestige de l’arrière-boutique. Rien à payer, c’est cadeau. De la part d’un radin pareil, ce présent revêt une saveur toute particulière. Cela vaut bien toutes les piques du monde. À la surprise de Lucas, le buraliste se montre plus clément que d’habitude.
— Mon petit gars, j’te trouve un peu patraque. T’es pas comme tous les jours.
Lucas admire le briquet. Marc s’en félicite. Ils se séparent bons amis.
C’est comme qui dirait « mon calumet de la paix » ! Sans rancune, hein. Par contre, demain, je t’en remets plein la tronche.
Seul Lucas est avisé qu’il n’y aura pas de lendemain. Une averse bien froide l’accueille à sa sortie de l’établissement. Quelle merde ! Et pourtant, ça colle bien avec ses idées noires. Dans la foulée, il fait un saut à la supérette du coin pour s’acheter un muffin pomme-cannelle ainsi qu’une bougie. Il tient à fêter son anniversaire et puis il raffole de ces pâtisseries cuites sur place. Devant la vitrine, il file ses dernières pièces de monnaie au clochard ; la puanteur de ce pauvre type lui fait monter la gerbe. Demain, il ne la sentira plus. Pour sa dernière soirée sur terre, Lucas a prévu un plan de soirée simple : il va monter chez lui, au neuvième étage de ce luxueux immeuble parisien, pour savourer son gâteau. Lorsque minuit sonnera, il se défenestrera et en finira une fois pour toutes avec cette existence pourrie qui lui pèse tant.
L’esprit dans le vague, Lucas traverse au feu vert et s’attire les foudres des automobilistes. Cette ville agressive le dégoûte pour la dernière fois. Il la quittera sans regret avec un gros doigt d’honneur. Le désamour face à son existence est réciproque. Il exècre ce « métro-boulot-dodo » qui régit son quotidien. Les collègues avec qui il sort parfois boire un pot le vendredi soir ne le considèreront jamais comme un ami car ils ne l’apprécient pas. La seule raison pour laquelle ils le côtoient, c’est parce qu’il est le collaborateur le plus en vue de Sunflower Interactive, la startup dans laquelle ils bossent. Là-bas, il a carte blanche. Il peut tout se permettre tant ses résultats financiers crèvent le plafond. Avec un peu de chance et en manœuvrant bien, ils profitent de son influence auprès de Phil Potrero, son PDG, et récupèrent quelques miettes de type primes d’objectifs à quatre zéros. D’ailleurs, avec l’énorme contrat qu’il conclura lundi matin, les bonus qu’ils obtiendront dans la foulée déclencheront de belles embrassades hypocrites. Mais bon, il ne verra pas la couleur de ce fric puisqu’il sera mort. Leur relation professionnelle est superficielle, Lucas en est conscient. Ces profiteurs, il les surnomme « les pique-bœufs ». Aucun d’eux ne se doute qu’il les compare à une variété d’oiseau qui se nourrit des parasites présents sur le dos de mammifères plus imposants qu’eux. Pourtant, ils continuent de se donner rendez-vous en fin de semaine pour trinquer. À vrai dire, l’invitation ne tombe que les jours où ils ne sont pas assez nombreux pour réserver le carré VIP de l’établissement qui leur servira de quartier général nocturne. Au début, Lucas n’avait pas compris que c’était dû aux départs en week-end de certains collaborateurs. Quelle naïveté ! Au bout du compte, il s’y est résigné ; peut-être que d’une certaine manière, ils ont besoin les uns des autres, comme les volailles bouffeuses d’insectes et leurs hôtes.
La carrière de Lucas a beau être florissante, il ne sera jamais heureux. L’argent ne fait pas son bonheur. Lorsque les nuits de déprime, il chiale au milieu de son gigantesque appartement parisien, il se persuade bon an mal an qu’il aurait dû faire d’autres choix de vie. Les choses se seraient passées d’une tout autre manière... Mais bon, il est trop tard. Il va mettre fin à toute cette connerie ce soir. L’idée avait commencé à germer dans sa tête alors qu’il patientait sur le quai du métro six mois plus tôt. Jamel, un de ses confrères, lui faisait la conversation. Lucas l’écoutait d’une oreille distraite, comme d’habitude. Après une série de grésillements assourdissants, les haut-parleurs de la station s’étaient mis à transmettre la voix fatiguée d’un employé du service de transport. Le pauvre type au micro avait expliqué que le trafic serait perturbé pendant les deux prochaines heures suite à « un accident grave de voyageur » deux stations plus loin. Un suicide, quoi…
— L’intervention des services de secours est en cours. Nous vous invitons à utiliser les autres correspondances. Merci de votre compréhension.
Un grondement synonyme de ras-le-bol général était monté des usagers massés les uns sur les autres. Quelle idée à la con de se jeter sous les rails d’une rame à l’heure de pointe ! Quel égoïsme avait poussé cette personne à commettre l’irréparable et pénaliser l’ensemble des voyageurs ? D’une pierre, deux coups. N’aurait-elle pas pu se foutre en l’air dans son coin sans emmerder son prochain ? Lucas faisait face à un choix cornélien : poireauter deux heures sur place ou se frayer un chemin dans les couloirs pour rejoindre une correspondance qu’il imaginait pleine à craquer. Embourbé dans ses pensées, Lucas n’avait cessé d’ignorer son compagnon d’infortune ; ce dernier s’était rappelé à son bon souvenir de la pire des manières.
— C’est pas toi qui irais faire ce genre de conneries, lui avait lancé le collègue.
— Pardon ?
— Ben ouais, t’as la belle vie, toi : pas de femme ni d’enfants ! Tu passes de bras en bras sans jamais t’attacher. T’as rien mais ça roule pour toi !
Sonné par la phrase vicieuse qu’il venait d’entendre, Lucas l’avait dévisagé. Son collègue lui avait maintenu la tête sous l’eau avec de nouvelles remarques pernicieuses.
— Moi, j’ai trois gosses, une merveilleuse épouse qui m’attend à la maison tous les soirs et le crédit de ma baraque sur le dos. Y a deux semaines, on a même adopté un putain de chiot lors d’un week-end « portes ouvertes » à la SPA... Du coup, on va partir en vacances avec cet été ! Va expliquer ça au proprio de notre future location : il va rien capter ! Toi, t’as rien de tout ça à gérer puisque t’as personne ! Quelle chance, bordel ! Quelle chance !
Sans s’en rendre compte, Jamel avait fissuré l’armure soi-disant impénétrable du chevalier Lucas. Le reste du voyage s’était résumé à un monologue : l’autre con s’était épanché sur les remarques désobligeantes que lui assenait à longueur de journée leur responsable, un certain Jean-Marie. Pourquoi lui avoir rappelé la platitude de sa vie ? Dans la tête de Lucas, la goutte d’eau du désespoir avait rongé le rocher de son cerveau au point de le fendre. Cette litanie de mots l’avait noyé dans un océan de dépression. Les semaines suivantes avaient confirmé la morosité qui l’envahissait ; la page blanche de sa vie ne se noircissait que de morosité. Les traditionnels afterworks de rattrapage avaient perdu le peu de saveur des précédents. Lucas avait réalisé que l’unique activité à laquelle il trouvait un intérêt dans ces instants était de vider des verres pour remplir sa vie inintéressante. Le suicide… C’était la solution à tous ses problèmes existentiels. Choisirait-il une mort publique pour qu’on lui accorde enfin un peu d’attention ? À voir…
Au travail, il s’était donc efforcé de faire bonne figure ; il s’y était enfermé avec une persévérance si exacerbée qu’il était parvenu à boucler un dossier épineux avec le gouvernement chinois. Rien de moins. Après trois mois à se tourner autour, il avait réussi à forcer la décision. Pourtant, le déséquilibre entre son hyperactivité professionnelle et le néant que représentait sa vie personnelle l’écrasait de tout son poids.
*
Revenons dans le présent
Gâteau en main, Lucas arrive dans son spacieux loft qui occupe l’étage entier au sommet d’un bâtiment de standing parisien. Il file se changer dans son dressing, son costume favori lui tend les bras. Gagné par une soudaine lassitude, Lucas s’installe sur son canapé haut de gamme. À l’aide de son briquet flambant neuf, il allume la mèche de sa bougie. Ce geste anodin le ramène en enfance, lorsque ses parents lui cuisinaient un gâteau maison. Le goût n’était jamais au rendez-vous mais l’intention comptait plus que le reste. Nostalgique, Lucas contemple la flamme qui danse devant lui. Les yeux fermés, il fait un vœu puis se ravise. Dans peu de temps, il sera écrasé sur le trottoir, alors quel intérêt ! Il souffle la chandelle colorée, s’en débarrasse puis croque à pleines dents dans la douceur sucrée. Il s’attendait à mieux pour sa dernière soirée sur terre. Mais à quoi bon bien manger avant d’en finir ? C’est paradoxal car il a pris le temps de revêtir l’une de ses tenues préférées. Tout ça pour sauter par la fenêtre... Il dépose sa pâtisserie sur un coin de la table, abandonne son téléphone puis se dirige d’un pas décidé vers la baie vitrée. L’agitation du samedi soir monte de la rue jusqu’à son balcon. Au moins, il ne restera pas longtemps sur le trottoir. Cela le soulage d’une certaine manière...
Le suicide est en marche. Penché par-dessus la rambarde, il remet à plat son modus operandi. Le doute s’installe. Pourquoi n’ingère-t-il pas des médicaments à la place ? La réponse est toute trouvée : il n’est jamais malade. Un vrai roc doté d’une santé de fer. Dans sa salle de bain, il n’a aucun comprimé à gober. Il s’est renseigné sur le net : il ne pouvait se procurer les pilules nocives qu’il convoitait que sur ordonnance. Pourquoi aller chez le docteur pour feindre une maladie et se faire prescrire des médocs qui, si ça se trouve, n’auront aucun effet ? Quoi qu’il en soit, il a survolé les résultats de ses recherches internet à l’affût d’un médoc miraculeux qui l’aurait foudroyé en deux temps, trois mouvements. S’il avait mieux regardé, il aurait noté qu’une surdose de Doliprane l’aurait achevé. Parfois, l’évidence est invisible sous notre nez. Il a aussi étudié l’éventualité de se trancher les veines ; la méthode est traditionnelle et facile à appliquer. Elle a tout de même un sacré inconvénient : même allongé au fond d’une baignoire, la mort prend son temps pour venir. Au final, c’est un mauvais choix. Lucas veut en finir vite. Il va sauter par la fenêtre, un point c’est tout. À minuit pile.
Fini de tergiverser. Les deux mains sur la barre métallique, il jette un dernier coup d’œil en bas. De nombreux passants circulent dans la rue à cette heure avancée. Comme un signe du destin, une averse glaciale arrose la chaussée. D’abord fine, elle s’intensifie sans prévenir. À présent, il pleut des hallebardes. Les promeneurs courent s’abriter, c’est tant mieux. Le moment est venu de faire le saut de l’ange. Déterminé, Lucas enjambe avec maladresse le garde-corps. Il se retient à la force de ses bras tendus derrière lui. Il s’est imaginé cet instant à de multiples reprises. Cela ne ressemble à rien de ce qu’il avait imaginé. Il ne revoit pas sa vie devant ses yeux et ça, c’est décevant. Ça le conforte dans l’idée qu’elle est chiante. Les gouttes glacées lui giflent le visage. Il s’essuie la figure avec sa manche gauche. Il ne se retient plus qu’à une main. L’adhérence sur la barre se réduit, il sursaute et se cramponne avec plus de fermeté. Les secondes passent et il ne saute pas. Qu’est-ce qui le retient ? Il n’a pas d’amis. Personne ne l’apprécie au point de passer du temps avec lui. On ne l’a jamais aimé. Il ne prend plus de nouvelles de sa famille, leurs chemins se sont séparés il y a fort longtemps. Il n’a aucune raison de vivre. Suspendu dans le vide, Lucas pense une dernière fois à la vacuité de son existence. Et si tout ceci n’était qu’une question de choix ? Et s’il n’avait pas pris les bonnes décisions à un instant donné ? Il paie les erreurs de son passé, tout bêtement. Envahi par la lâcheté, il n’est plus aussi certain de vouloir y aller. En fin de compte, se suicider n’est peut-être pas la solution la plus appropriée. Lucas s’imagine devenir plus approchable au boulot dès lundi matin. Quelle connerie lui a traversé l’esprit lorsqu’il a décidé de passer à l’acte ? L’affaire est entendue, on annule la mission ! C’est à en mourir de rire d’être aussi dégonflé. Il tente de repasser sa jambe par-dessus le rebord et c’est là qu’une bourrasque vicieuse le prend par surprise. Déséquilibré, ses doigts lâchent prise et ses semelles glissent sur le métal humide. Pris par la peur, ses yeux s’écarquillent quand son balcon s’éloigne. Pas de retour en arrière.
Dans un ultime élan de lucidité, ses phalanges se raccrochent in extremis au bas de la bordure. Le voilà suspendu à bout de bras. Il croit pouvoir se hisser à la force de ses muscles : si les héros de films en sont capables, pourquoi pas lui ? Il n’en a pourtant pas la force. Il lâche prise et c’est la chute libre. Ses jambes entrent en collision avec la balustrade d’en dessous. Aïe ! Il bascule et le voici qui descend la tête la première vers le sol. Il pense au spectacle qu’il va offrir aux badauds marigots : un gloubi-boulga de chair et d’os écrabouillés. On lui a souvent répété que la chute importait moins que l’atterrissage, le sien risque d’être explosif.
— Je t’en supplie, Dieu ! Aide-moi ! Pitié !
La peur de crever le rend soudain croyant. À la base, il se voyait plus athée ou agnostique. Là, il prie parce qu’il est dans la merde. Comme quoi, une simple chute de plusieurs étages peut ébranler vos petites convictions. Sa supplication à connotation religieuse résonne en lui. Il la crie de façon mécanique. Sans vraiment y croire. Le vent souffle dans ses oreilles à mesure qu’il prend de la vitesse ! Le béton se rapproche de plus en plus vite ! Plus que quelques mètres avant l’impact. La distance se réduit encore. Trois mètres. Deux. Un.
Comme un idiot, Lucas ferme les yeux. C’est un réflexe inutile qui ne stoppera pas sa dégringolade. Bam ! Il est mort sans ressentir la moindre douleur. Étrange. De l’exécution de son plan à la réalisation, rien ne s’est passé comme prévu. Tout est calme autour de lui. Alors, il demeure immobile, les paupières closes. Il profite de cette sensation de bien-être, de cette quiétude. Il inspire puis expire. Tout est fini.
Je vais commencer par dire que j'étais très intriguée par ton synopsis, et que j'ai eu beaucoup de plaisir à découvrir ton style : il a quelque chose d'un peu cynique qui marche très bien avec ta thématique, et tu arrives à créer une sorte de décalage sarcastique entre ta narration et les événements qui laisse une distance bienvenue ! Aussi, c'est fluide, bien rythmé, et pour la construction générale je trouve que ton aller-retour passé/présent fonctionne bien !
Je commente directement le deuxième chapitre, par contre, parce que je me suis demandé à ma première lecture et ma seconde lecture l'a confirmé, si ton prologue était vraiment nécessaire. Dans ton premier chapitre, tu reprends toutes les informations que tu nous as glissé dans le prologue, et il ne m'a pas semblé que cela apportait sur le personnage beaucoup plus de nouveautés. Même si le prologue coule très bien, je crois qu'au final j'en arrive à la conclusion que je ne le trouve pas nécessaire : l'exposition de ton premier chapitre est suffisamment dense et instaure le même suspens, on n'a pas tellement besoins, je crois, de ce qui m'apparaît comme une redite.
Ensuite, j'ai noté quelques petits trucs de pinaillages :
- "Pour sa dernière soirée sur terre, Lucas a prévu un plan de soirée simple" ; répétition du mot soirée
- "Son collègue lui avait maintenu la tête sous l’eau avec de nouvelles remarques pernicieuses." : En fait dans ce passage, comme tu nous as bien présenté le vide interne de Lucas avant, on comprends en sous texte qu'il reçoit les remarques comme il recevrait du venin, du coup je crois que "remarques pernicieuses" n'est pas forcément nécessaire, voir alourdit un peu l'effet de ta phrase qui me semblerait plus percutante si tu la coupe après "sous l'eau" : on a l'idée, c'est suffisamment violent comme image pour qu'il soit confirmé que Lucas passe un mauvais moment hahaha
- "Moi, j’ai trois gosses, une merveilleuse épouse qui m’attend à la maison tous les soirs et le crédit de ma baraque sur le dos." : ici j'ai un peu tiqué sur le "merveilleuse", comme son collègue est dans un processus de comparaison négatif, ça invalide partiellement le fait qu'il puisse présenter ça comme quelque chose de pénible à gérer. J'aurais mis un autre adjectif, pas forcément quelque chose de dégradant pour l'épouse (on sent bien que la gars se plaint mais qu'au fond il est content de lui) mais quelque chose de plus ambigüe du style exigeante ou quelque chose comme ça : que ça puisse être lu de manière négative pour infirmer la potentialité qu'il soit content de rentrer chez lui et se taper sa famille, si j'ose dire hahaha
- "Toi, t’as rien de tout ça à gérer puisque t’as personne !" : le "t'as personne" m'a semblé peut-être de trop, le début de la phrase suppose par nature qu'il n'a personne et que c'est ça qui fait son bonheur, selon son collègue. Ajouter une construction négative annule un peu cet effet de "c'est génial, t'as RIEN à gérer, t'es LIBRE", qu'on comprends sans la fin de la phrase !
- "Les semaines suivantes avaient confirmé la morosité qui l’envahissait ; la page blanche de sa vie ne se noircissait que de morosité." : répétition de morosité
- "C’était la solution à tous ses problèmes existentiels. Choisirait-il une mort publique pour qu’on lui accorde enfin un peu d’attention ?" : alors ici je me suis interrogée parce que tu nous as présenté son point de vue sur les gens qui se suicident dans le métro (cette phrase est horrible hahahaha) et que sa conclusion c'était "est-ce que les gens peuvent pas faire ça dans le coin sans emmerder personne," en gros. Du coup je me suis dis tiens, ça me semble paradoxale avec ce que tu nous as montré de lui plus tôt. Peut-être que le passage du métro pourrait justement apporter sa propre réflexion sur le fait de se dire "putain c'est chiant les gens qui font ça. Mais. Je vais me suicider aussi. Est-ce que je serais du genre à vouloir de l'attention et m'exposer publiquement ? Est-ce que ces types font ça pour qu'on les remarque, est-ce que je veux faire pareil ?" (je sais pas si ce que je dis est clair si ce n'est pas le cas n'hésite pas !)
- I"l s’est imaginé cet instant à de multiples reprises. Cela ne ressemble à rien de ce qu’il avait imaginé." : répétition d'imaginé
- "On ne l’a jamais aimé. " : Il m'a semblé que cette phrase n'était pas nécessaire, elle rajoute un pathos un peu frontal qui ne m'a pas semblé être ce que tu voulais transmettre dans ton texte, et par ailleurs, on comprend tout à fait que personne ne l'aime vraiment puisqu'il n'a pas d'amis et ne contacte pas sa famille.
- I"l n’a aucune raison de vivre. Suspendu dans le vide, Lucas pense une dernière fois à la vacuité de son existence." : idem ici ! Je ne trouve pas forcément la première phrase nécessaire pour les même raisons que juste au-dessus !
- "Déséquilibré, ses doigts lâchent prise et ses semelles glissent sur le métal humide. Pris par la peur, ses yeux s’écarquillent quand son balcon s’éloigne." tu as "prise" et "pris" qui sonnent un peu redondant
- "Il bascule et le voici qui descend la tête la première vers le sol. Il pense au spectacle qu’il va offrir aux badauds marigots : un gloubi-boulga de chair et d’os écrabouillés. On lui a souvent répété que la chute importait moins que l’atterrissage, le sien risque d’être explosif." : Alors ici ça m'a interpellé, je me suis dis qu'il était étonnant qu'il ait le temps de penser à ça, je crois que c'est une considération que je l'aurais plutôt vu avoir plus tôt, quand il s'apprête à sauter mais ne parvient pas à passer le pas. Je pense que déplacer ce morceau donnerait plus de corps au fait qu'il renonce, et permettrait à ce passage ensuite de garder son rythme : il tombe et fait directement appel à Dieu sans autre raisonnement pragmatique parce qu'il est terrorisé par la chute.
- "Sa supplication à connotation religieuse résonne en lui." : je ne crois pas que "à connotation religieuse" soit nécessaire, on sait que c'est religieux héhé
Et voilà pour mes remarques ! En tout cas, très étonnant de voir un récit commencer par le suicide de son personnage principal, et je suis en attente de découvrir la suite !
J'en profite pour préciser que mes retours sont bien entendu tout à fait subjectifs, et que si certains ne sont pas clairs/que tu veux en discuter, n'hésite pas ! En espérant qu'ils te seront utiles !
P.S : Je me trompe peut-être mais je ne crois pas avoir vu de TW sur ton histoire et je sais que PA fais attention à ça, donc peut-être avant de te faire épingler, comme tu parles très ouvertement de nombreuses manières de se tuer, mettre dans ton titre un TW suicide au cas-où !
Au plaisir de lire la suite !