Cette Gamine avait un don inné pour faire de la nourriture absolument et irrévocablement imbouffable.
On peut bien dire qu'il y en a pour tous les goûts, mais il y a des limites à tout, même à la tolérance.
Quand tu cherches à faire un gâteau par exemple, tu peux le jeter dans l'eau bouillante en pensant que ça le cuira. Immédiatement tu te rends compte qu'il s'agissait d'une connerie. Tu ne persiste pas, tu jettes tout et basta !
Mais là, non ! La Gamine continuait de touiller la mixture infâme coupée à l'eau. Elle avait mis les œufs après les fraises, alors ils se sont solidifiés dans l'eau bouillante.
Non mais, la persistance est une qualité, même quand on est con...
Elle prit une louche, la trempa dans la casserole (dont le fond pouvait très bien être entrain de cramer, on en saurait rien), souffla dessus et en sirota le tout.
...
Son visage resta de marbre. Sans mot dire, elle replongea la louche au fond du récipient et annonça :
« C'est prêt, à table ! »
Non ! Juste non !
« Il est hors de question que je mange quelque chose comme ça ! »
« Ne fais pas l'enfant, Vieux Gamin. Je n'ai mis que des produits comestibles de ta cuisine. Ça ne peut pas être dangereux. »
La substance répondit à ma place en remontant un agglomérat vert-marron, dont la consistance était comparable à de la gelée.
Il y a des choses comme ça qui devrait être interdites par la déclaration des droits de l'homme. Comme forcer les personnes âgées à manger les expériences culinaires des enfants.
Mais on ne sait jamais, ça pouvait se manger. Peut être.
Le poisson était son premier essai. La peau était crue alors que l'intérieur était carbonisé. Un exploit !
Allons, ça ne peut pas être si mauvais que ça ! Ça doit avoir le goût de la fraise, au moins.
Après une gorgée j'avais l'impression d'avaler des vieux morceaux de vêtements abandonnées dans le caniveau.
Je sortis de table pour aller vomir plus loin.