Les camions qui avaient servi à leur enlèvement étaient tous garés soigneusement les uns derrière les autres sur le côté. Tous semblaient cabossés, en très mauvais état. De l’autre côté, une salle d’où se trouvait visiblement le centre de contrôle. Ariane se précipita pour entrer mais la porte était fermée, elle n’irait nulle part comme ça. Prise de rage, la jeune fille tenta d’enfoncer la porte d’un coup de pied mais elle était définitivement bloquée.
– Attends !
Liz quitta ses côtés pour s’accroupir à côté de la garde évanouie.
– Qu’est-ce que tu fais ?
– Trouvé !
Liz brandit avec un grand sourire un trousseau de clefs et rejoint Ariane pour tester toutes les clefs unes à unes. Elle était beaucoup moins stupide que prévu finalement. Mais il n’y avait que 10 clefs. Chaque clef nécessitait 4 secondes pour être testée, 4 autres secondes pour changer de clef. Mais 80 secondes plus tard, la porte n’était toujours pas ouverte.
– Elle n’avait pas la clef pour rentrer...
– Qu’est-ce qu’on va faire... demanda Ariane tout haut, sans vraiment attendre de réponse.
Elle n’eut pas le temps d’y réfléchir, qu’une alarme assourdissante s’enclencha. Figeant au passage Maï Rose qui ne supportait pas ce bruit.
– Les soldats vont venir ! s’exclama Liz en se précipitant sur l’entrée.
La jeune fille entreprit de barricader la porte avec une première étagère, qu’elle renversa, Ariane se précipita pour l’aider. Il ne servait à rien d’essayer d’emprunter les véhicules, aucune d’entre elles ne savait conduire. Les étagères, bureaux et meubles de la pièce allaient suffire à empêcher qui que ce soit d’entrer.
– Qu’est-ce que vous faites ? s’affola Maï Rose en réalisant ce qu’elles faisaient. Les autres ne pourront plus rentrer !
– Oui. Et si des miliciens entrent, on est TOUTES mortes. Alors tais-toi et laisse-nous faire !
Un tremblement ébranla la porte.
Puis un silence. Ariane et Liz s’éloignèrent de la porte alors que Maï Rose s’en approcha :
– Aude ?
Son seul appel enclencha une série de tambourinages violents contre leur seule barrière de sécurité, effrayant Maï Rose qui se précipita aux côtés d’Ariane. Cette dernière restant silencieuse, elle n’arrivait pas à trouver une solution. Les trois filles étaient bientôt mortes.
De sa poche, elle sentit ses doigts effleurer une surface froide et lisse. Le crystal, celui qu’elle avait emprunté au sous-sol. Mais il ne sert à rien car elle n’est pas magique, elle ne peut pas s’en servir pour se défendre. A moins que...
Ariane sortit la sphère et la montra à ses deux camarades. Aucunes des deux ne savaient ce qu’il représentait et peut-être que ce sera à son avantage.
– C’est- une technologie qui peut utiliser de la magie.
– Et ouvrir le portail ?! vociféra Liz. Pourquoi tu ne l’as pas dit plus tôt ! Utilise-le !
Ariane, priant le ciel, n’importe quel Dieu qui l’entende, posa avec délicatesse la sphère colorée sur le miroir. Mais rien ne se produisit. Après tout, ce genre de technologie ne marche que pour ceux qui sont magiques.
Non, elle ne pouvait pas abandonner. Pas maintenant ! Pas à quelques minutes de chez eux, à une seule petite étape.
Je suis magique...
Ariane se concentra, imaginant un flux d’énergie venant de son intérieur et se diriger vers la sphère.
Je peux la faire fonctionner.
Ariane ferma les yeux.
Je viens de ce monde.
Un éclat de lumière l’aveugla et Ariane sentit ses doigts picoter, puis geler immédiatement. Lorsqu’elle ouvrit les yeux elle admira alors qu’une couche de givre venait de recouvrir l’entièreté du miroir. La bille prise dans la glace avec ses doigts, qu’elle entreprit de dégager.
– Ça marche ! s’exclama Maï Rose émerveillée.
L’instant d’après, le miroir prit une teinte brillante et le givre disparut aussitôt, se noyant dans la surface du miroir qui s’était transformé en un liquide argenté. Elle avait réussi.
Les fracas contre la porte les ramenèrent à la réalité, Ariane cria sur Liz.
– On ne sait pas combien de temps ça va tenir ! Vas-y !
– Mais je ne veux pas rentrer chez moi ! s’écria-t-elle en pleine panique. Je te l’ai déjà dit !
– Là, c’est soit tu retournes chez toi, soit tu meurs, tu préfères quoi ?
Les cognements sur la porte se faisaient de plus en plus fort, et à chaque coup, la jeune fille sursauta de plus belle. L’alarme ne semblait sans fin.
– Chez moi ! Je préfère chez moi !
– Alors fonce, on a plus de temps !
Liz eut un instant d’hésitation avant de poser une main sur le miroir, celui-ci se mettant à fluctuer autours de sa main, de la lumière perçait et venait aveugler la pièce, et en un instant et un bref cri, Liz se fit happer à l’intérieur, disparaissant subitement.
– A ton tour, Maï.
Ariane sentait le soulagement l’envahir, elles n’étaient plus qu’à un miroir de chez elles. Peut-être que cette expérience restera un cauchemar toute leur vie, mais ce ne sera plus qu’un rêve, elle serait à jamais en sécurité dans leur monde. L’air calme de Maï Rose la prit par surprise.
– Je dois les attendre.
– On a plus le temps de faire ça ! Et ils peuvent activer le miroir seuls ! On doit partir !
Si près, elles étaient si près de toutes s’en sortir. Ce n’était pas pour tout abandonner pour des inconnus de quelques jours. Maï Rose prit quelques pas dans sa direction et Ariane soupira de soulagement, elle comprenait, elle devait comprendre.
Hein ?
Alors qu’elle s’attendait à ce que Maï Rose passe le miroir à côté d’elle, son amie la poussa avec une force qu’elle ne lui connaissait pas vers le miroir.
– Maï Rose, qu’est-ce que tu fais ?
Puis elle comprit, son bras s’engluant dans le miroir, et alors qu’elle tenta de l’en sortir, celui-ci continuait de se faire aspirer dans le liquide visqueux argenté du miroir. Plus elle tirait, plus elle sentait sa peau la retenir, menaçant de se déchirer par la force. Une expression terrifiée se propagea sur son visage, Ariane tenta désespérément d’attraper Maï Rose dans sa chute. Mais elle avait déjà reculé, et la regardait avec désespoir :
– Je suis désolée Ariane ! Je te rejoins juste après ! Promis !
– Maï Rose !! Je t’
Engloutie dans le miroir, Ariane voulut crier, mais le miroir fondu se précipita dans sa bouche et bouchait ses poumons, son corps se faisant tirer de l’autre côté. Elle n’avait plus d’air, et bientôt, ne voyait plus rien. Mais elle n'abandonnera pas, elle s’acharna à garder une main tendue vers Maï Rose, pour qu’elle vienne avec elle, coûte que coûte.
Puis plus rien, son corps était englouti, l’air lui manquait. Peut-être que son périple s’arrêtait là, condamnée à se noyer dans un miroir qui aurait dû les ramener chez elles. Tous ces efforts ne servaient plus à rien, Maï Rose n’était plus là.
Et le temps s’arrêta.
_ _ _
Maï Rose rencontra son reflet à nouveau, le miroir n’était plus actif, elle ne pouvait plus partir.
Il n’y a plus qu'à attendre Eleo, Mike et Aude.
Elle n’entendait plus rien à part l’alarme assourdissante qui perçait ses tympans douloureusement. Maï Rose se retourna face à la seule porte de la salle de test et entreprit de retirer l’armoire et tous les débris de devant la porte. Elle devait faciliter l’arrivée de ses camarades, qui sont sûrement déjà en route pour la retrouver comme le voulait le plan.
Maï Rose s’éloigna de la porte, empoignant l’épée d’Ariane abandonnée. Si ce ne sont pas ses amis qui sortaient de cette porte, elle n’avait plus qu’une chose à faire. La jeune terrienne savait que tant que ce miroir existait, ils continueraient de causer des catastrophes sur son monde et elle ne les laissera pas faire.
– S’il vous plaît, faites que ce soit eux. murmura-t-elle tout bas, les larmes aux yeux.
Maï Rose brandit son épée et se prépara à réduire ce maudit miroir en morceaux.