Chapitre 3

Par Reiko

Une fois enfermé dans sa chambre, à double tours, il resta quelque temps plaqué contre celle-ci, comme s'il avait peur que sa mère essaye de forcer le passage pour rentrer, mais c'était aussi pour écouter les voix qui arrivaient jusqu'à lui. Il pouvait alors entendre son père hurler, éclater littéralement, entendant même de la vaisselle se briser au sol. Habituellement son père ne s'emportait pas. Il n'haussait jamais la voix. Quand il voulait que son fils fasse quelque chose, il lui expliquait clairement pourquoi, avec douceur et empathie et si de son côté Ombre avait des objections ils en discutaient tous les deux.

Mais avec sa mère, c'était quelque chose de très différent. Elle exigeait, elle ne demandait jamais. Ce qu'Ombre ne comprenait pas, car en soit, même s'il était mineur, il avait le droit au choix. Elle pouvait simplement lui dire pourquoi elle pensait concrètement que l'emmener faire sa scolarité en Nivanh était plus avantageux que de rester ici, chez lui ? Il aurait simplement voulut savoir cela. Car « Tu auras toutes les cartes en mains », il ne comprenait pas vraiment ce qu'elle pouvait entendre par là.

Finalement, alors que les cris se calmèrent, il alla se réfugier sous sa couette. Attrapant alors un gros coquillage ressemblant à une conque, c'était un souvenir qui datait de longues années. Quand ses parents étaient encore ensemble et avaient emmenés Ombre et ses amis sur les plages d'Adriane, des plages du monde des sorciers, réputées pour être les plus merveilleuses du coin. Ils y avaient ramassés chacun des coquillages différents et son père les avaient enchantés pour servir de communicateur. À la façon des téléphones humains, comme disait sa mère, mais il ne voyait pas ce que c'était pour sa part.  

Le garçon au visage vitiligo mit son oreille près du trou du coquillage pour finir par doucement parler.

- Tao ?… Galahad ?… Vous êtes réveillés ?…

Il y eut à peine quelques secondes d'attentes pour que le métisse entende la voix de ses amis en retour.

- Ombre ? Tu n'as pas l'air bien… demanda Tao.
- Il se passe quelque chose chez toi ? enchaîna Galahad.

Ombre soupira, se passant une main dans les cheveux pour finir par lâcher :

- Ma mère est là… Et… Elle veut que je parte avec elle habiter dans le monde des humains…
- Mais comment tu vas suivre les cours à l'Académie ?…
- Roh, parle pas des cours Galahad… S'te plaît ! s'impatienta l'asiatique.
- J'avoue que je ne sais pas… Elle dit que je devrais suivre les cours par correspondance… Et en plus aller à l'école chez les humains…
- C'est bien trop lourd ça… Elle ne pense pas que tu serais fatigué ? S'ils ont aussi cours toute une journée comme nous, tu vas devoir travailler la nuit…
- Je sais Tao, sauf que j'en sais rien. J'espère juste qu'elle ne va pas demander à dédoubler la classe préparatoire… J'ai pas envie de faire six ans au lieu de trois…
- Faudrait déjà que la directrice accepte ! Elle est super gentille, je suis pas sûr qu'elle accepterait ce genre de baille, réfléchit le garçon aux cheveux bleu-canard.

Le jeune sorcier se mit à soupirer. Il ne savait pas quoi faire. Pour finir par se mettre à nouveau à pleurer.

- Ne pleure pas, Ombre… Tu sais quoi ? On va venir demain chez toi, on va essayer de trouver une solution et de convaincre ta mère, okay ?
- Je… Okay, si tu veux Tao…
- Il a raison Ombre. Écoute, essaye de dormir, on arrive demain très tôt.

Après avoir dit au revoir à ses amis, le garçon avait séché ses larmes et essaya de fermer les yeux. Comment convaincre sa mère qui semblait… Si décidée ? Il n'avait jamais réussi jusqu'à présent en tout les cas.

Le lendemain, les garçons n'avaient pas cours, leur première semaine était seulement un jour sur deux, car le rythme et l'utilisation de la baguette était très endurant quand on venait de recevoir ses pouvoirs, il fallait donc le temps au corps de récupérer et à l'organisme de s'habituer. Ses amis finissant par arriver, ils saluèrent rapidement les deux parents. Ombre n'étant même pas venu prendre son petit-déjeuner pour ne pas avoir affaire à sa mère.

Une fois dans la chambre, Galahad, toujours très prévenant disposa pleins de petites douceurs qu'il avait acheter sur le chemin pour permettre à Ombre de prendre quelque chose à manger avant le repas du midi, il connaissait assez bien son ami pour savoir qu'il n'avait rien avalé depuis le réveil.

- Bon, avec Galahad, on a essayé de réfléchir.
- On sait que tu n'as pas envie de faire six ans de prépa' simplement parce que tu veux faire une coloc' avec nous.

Ombre ne pensait pas être aussi prévisible… Il se mit donc à rougir.

- Bien sûr, c'est aussi parce que tu veux faire ce dont tu as envie aussi rapidement que possible. Après tout, passer de trois ans à six avant d'être considéré majeur… C'est super long et chiant, faut l'avouer, lâcha Tao en mâchouillant un bonbon orange en forme de verre de terre.
- Alors on s'est dit… Qu'on pourrait éventuellement venir avec toi chez les humains ?
- Attends… Quoi ?

Ombre semblait ahuri. Regardant ses deux amis l'un après l'autre à plusieurs reprises. Ses yeux tremblant d'une émotion forte.

- Mais… Vous aussi, ça vous prendra beaucoup plus de temps…
- Oui, mais tu es notre meilleur ami… Si tu n'es pas avec nous à l'Académie, on aura l'impression d'être seuls. Comme toi chez les humains. Et comme ça, on fera tout en même temps ! le rassura Galahad avec un grand sourire.

Cette solution n'était pas vraiment mauvaise en soi. Il fallait bien l'avouer… Il ne put que faire une chose, venir prendre ses deux meilleurs amis dans ses bras pour les remercier. Car il savait que comme lui, ils n'étaient pas emballés à s'en aller vivre chez les humains. Pourtant, ils faisaient cette concession pour Ombre, car il le savait mal. Il n'y avait pas à dire, il avait les meilleurs amis de tous Glavanh. Maintenant… Il fallait aller proposer cette éventualité à sa mère.

Se prenant tous les trois par la main, comme quand ils étaient plus jeunes, pour se donner du courage, ils se rendirent dans le salon, ou sa mère semblait être en train de travailler sur un objet qu'ils avaient fini par connaître. Un ordinateur, un objet humain.

Ils s'assirent en face de la mère d'Ombre, qui était toujours habillée à la mode humaine. Celle-ci lui alant parfaitement, elle avait une taille mince qui se dessinait bien dans le tailleur bleu foncé qu'elle portait. Ombre avait toujours admiré la beauté de sa génitrice, mais cela semblait être son seul atout.

- Bonjour les enfants. Je suis contente de vous voir, j'espère que tout se passe bien à l'Académie, dit-elle distraitement.
- Maman ?
- Hum ?…
- Est-ce que tu pourrais arrêter de travailler quelques minutes ?… On aimerait te parler de quelque chose…

Les mains d'Ombre se mirent à trembler. Il appréhendait tellement… Mais ses amis lui serrèrent les mains pour lui donner du courage alors que sa mère levait enfin les yeux de son appareil.

- Bien, je vous écoute.

Sa voix était si… Stricte, sans l'être… Sa mère ressemblait plus à une directrice d'école sévère qu'à une maman aimante et à l'écoute de son enfant.

- Voilà, il se trouve que je ne veux pas partir avec toi… Mais vu que tu ne veux pas m'écouter, j'aurais peut-être une proposition à te faire.
- Une proposition ? Il n'y a rien à proposer, tu viens avec moi, trancha-t-elle.
- Non madame, vous ne comprenez pas… commença Tao.
- Ombre ne veux pas y aller parce qu'il a peur de devoir faire ses années d'Académie en deux fois à cause de l'école humaine et… Il n'a pas envie de se retrouver seul, vous comprenez ? enchaîna Galahad, le plus doucement du monde.

La mère soupira, tapant des ongles sur la table, comme si cela l'ennuyait.

- Oui, je vois tout à fait. Mais ce n'est rien, cela ne veut pas dire qu'il ne se fera pas d'amis. Et puis… Tu auras un cursus magique normal. Sois en sûr.

Ce fut un nouveau choc pour Ombre. Se rendait-elle compte de la masse de travail que ça allait faire ? Ou alors… Il se trompait et l'école des humains n'était pas aussi prenante qu'il se l'imaginait ?

- Madame, écoutez-nous, s'il vous plaît ! commença à s'énerver Tao, c'est pour cela que son ami reprit.
- En fait, nous voudrions Tao et moi venir aussi avec vous. Comme ça, Ombre ne sera pas seul. Croyez-vous que cela soit possible ?

Cette fois, Ombre décela une sorte de changement dans le regard de sa mère. En effet, elle était énervée car elle pensait que ses amis voulaient la faire changer d'avis. Mais au contraire, ils semblaient comprendre et juste vouloir l'accompagner pour rester avec leur ami d'enfance. Elle trouva cela même adorable de leur part. En y réfléchissant, cela n'était pas en soit, une si mauvaise idée que cela.

- Bien, d'accord. Laissez-moi réfléchir et en fonction, je verrais pour aller en parler à vos parents.

Victoire, c'était le triomphe dans l'esprit des trois garçons qui explosèrent de joie, mais finirent par vite revenir dans la chambre d'Ombre pour ne pas déranger le travail de sa mère.

**

Sa mère avait vraiment prit le temps de réfléchir. Elle en avait même parlé à son ex-mari, sans aucune dispute. Faisant alors les pour et les contre sur un bout de papier. En soit, s'occuper d'Ombre n'était pas difficile, alors de Tao et Galahad… Elle devrait sans doute simplement demander une petite participation à leurs parents. Oui, ce n'était pas une mauvaise idée, surtout qu'elle était du genre à beaucoup travailler, même les week-ends. Avoir les amis de son fils avec lui quand elle ne serait pas là serait une aubaine.

Elle passa donc dans les deux familles. Expliquant toute l'idée de ce séjour chez les humains. Trois ans, c'était certes beaucoup, alors au début, elle proposa simplement un an, renouvelable en fonction des notes des enfants. Car en tout les cas pour Tao, cela semblait être un impératif.

Pourtant, elle se heurta à deux refus catégoriques de la part des familles de Galahad et de Tao. Elle n'en comprenait pas véritablement la raison à vrai dire. D'accord, ils ne connaissaient pas bien la mère d'Ombre, et alors ? Ombre était quand même l'ami d'enfance de leurs enfants, non ? De quoi avaient-ils peur ? Qu'elle s'occupe mal de leurs gosses ? Pourtant elle savait très bien s'occuper de son propre fils. Enfin ça, c'était ce qu'elle se disait, ne voyant pas qu'elle avait toujours brillé que par son absence et son autorité.

Rentrant enfin chez le père de son fils, dans cette maison qu'elle avait toujours détestée, elle dû l'annoncer aux trois enfants, qui étaient cette fois en train de prendre une petite collation dans la cuisine après leur seconde journée de cours. Ils semblaient excités, la journée devait avoir été des plus joyeuses pour eux.

Voyant sa mère arriver, Ombre eut un grand sourire pour elle. Impatient de savoir quand il allait partir avec ses amis.

- Alors ? On part avec eux ?!
- Non.

Fut la seule réponse de sa mère. Elle semblait elle aussi peiné, mais assez peu. Pourtant, elle aurait voulu faire plaisir à son fils et qu'il se sente bien chez elle, en Nivanh…

- Je suis sincèrement navrée les enfants. Mais vos parents ont refusés. J'ai pourtant essayé de les convaincre.
- Pour mes parents, c'était pas vraiment étonnant… fini par dire Tao.
- Ouais, on sait tous qu'ils ont du mal avec tes notes… C'est un peu pour te punir… comprit Galahad.

Ombre avait la mine sombre, il se sentait tellement seul tout à coup. C'est alors que ses amis vinrent le prendre dans ses bras, Tao venant chuchoter à son oreille :

- T'en fais pas, je vais faire des efforts pour qu'on arrive à venir au maximum l'année prochaine ! Je te le promets.
- Et puis… On s'arrangera pour venir te voir le week-end si ta mère veut pas te laisser rentrer, annonça Galahad.

Ses mots redonnèrent le sourire au jeune homme, qui commençait à avoir la peur au ventre du départ tout proche.

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iameosse
Posté le 20/07/2024
Hello,

C'est super triste pour Ombre je trouve. Sa mère lui impose une nouvelle vie et j'ai pas l'impression quel prend en considération les émotions de son enfant. Je ne l'apprécie par trop cette dame. A voir par la suite.

Eos
Lydasa.
Posté le 21/02/2021
ça se passe un peu vite dans ce chapitre aussi. Je pense que tu peux développé pas mal de point.
Sinon on comprend un peu mieux la relation des trois garçons, ils s'aiment plus que tout comme trois frère et c'est beau.
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