– Il reste encore ces papiers à trier, annonça Griselda, posant une pile de documents sur le nouveau bureau de Catherine.
Le dos de la rousse la faisait souffrir après à peine une journée de travail. Pourtant, en tant qu’ancienne domestique, elle était habituée aux efforts physiques. Mais par respect pour Griselda, la jeune femme ne se plaignait pas. Elle n’était simplement pas accoutumée à lire autant, donc elle allait très lentement. Heureusement, ça ne semblait pas déranger l’hôte du manoir.
– Pourquoi avez-vous autant de paperasse chez vous ?
Griselda fronça les sourcils, l'air contrarié. Catherine se rendit compte qu'elle l'avait vouvoyée à nouveau, par habitude, alors que Griselda lui avait demandé de ne pas le faire, car ça la mettait mal à l'aise. Elle rentra la tête dans les épaules et grimaça.
– Désolée…, murmura-t-elle.
– Ne t'en fais pas, tu t'y feras, sourit la femme aux cheveux argentés.
L'assistante s'apprêtait à se replonger dans son nouveau travail, mais Griselda continua à parler et répondit à la question de Catherine.
– Tu vois, je suis ambassadrice. Et j'utilise mon statut pour retrouver ton petit frère le plus rapidement. La plupart de ces documents le concernent.
Catherine eut soudain envie de trier tous les papiers entassés devant elle au plus vite. Chaque jour qui passait ne faisait qu'augmenter son angoisse, de plus en plus. Elle essayait de garder la tête vide, mais c'était dur, et elle se sentait constamment sur le point de craquer. Elle ne pouvait pas imaginer un monde sans son petit frère. Elle prenait soin de lui depuis qu’il était né. Elle ne voulait pas le perdre.
– Mon travail consiste, grossièrement, à traiter les relations entre les familles de Sirine et entre le royaume lui-même et les autres pays, ajouta Griselda.
– Et tu aimes faire ça ? demanda son assistante.
La femme aux yeux rouges parut étonnée par la question de la rousse.
– Je n'ai pas vraiment le choix, tu sais. Il n'y a souvent qu'un seul, parfois deux ambassadeurs. Avant moi, c'était Cerise.
– Cerise ? répéta Catherine.
– La mère de Noah. L'épouse d'Arthur. Ma meilleure amie, et la personne que j'aimais. Elle est décédée il y a onze ans. Ça a été très dur, pour nous tous. Et, souvent, ça l'est encore. Certains disent que les blessures finissent toujours par guérir, mais je pense que ce n'est pas vrai. Tu apprends à vivre avec, et pour moi, ce n'est pas encore le cas.
– Je suis navrée d'entendre ça, souffla la rousse, peinée.
– Tu n'as pas à l'être. Tu me fais beaucoup penser à elle, tu sais.
Catherine sourit timidement.
– J’aurais bien aimé la rencontrer.
– Vous vous seriez bien entendues, j’en suis sûre.
La rousse leva le visage, discrètement, vers l’ambassadrice, et comme elle croisa son regard, elle détourna les yeux. Cependant, dans les iris rouges de la femme, elle avait perçu une lueur de vive douleur, de tristesse et de manque. Elle n’aimait sans doute pas trop parler de Cerise, alors Catherine retourna à ses papiers.
– Tu ne vas pas dormir ici, quand même ! s’exclama Griselda.
Catherine haussa les épaules. Elle était épuisée, et honnêtement, elle se fichait de savoir où elle allait passer la nuit.
Les deux femmes se tenaient devant la porte du dortoir des domestiques. La rousse peinait à garder les yeux ouverts.
– Viens, tu vas dormir avec moi, déclara abruptement l’ambassadrice.
Catherine écarquilla les yeux, les joues rouges.
– Quoi ?
– Je vais te prêter mon lit, je dormirai sur le canapé.
La femme aux cheveux argentés partit ensuite dans le couloir, en direction des escaliers menant au premier étage, sans même laisser le temps à son assistante de répondre.
– Fais comme chez toi, sourit Griselda une fois qu’elles furent arrivées dans la chambre de celle-ci.
Catherine hocha légèrement la tête, serrant son sac de cuir contre son cœur. Il y avait toutes ses affaires et tout ce à quoi elle tenait dedans. La rousse s’assit doucement sur le bord du lit et s’enfonça dans le matelas.
– Il est très moelleux, murmura-t-elle.
Elle avait soudain envie de bondir dessus comme lorsqu’elle était petite. Elle se laissa lourdement tomber sur les couvertures et admira les baldaquins, émerveillée.
– Je n’arriverai jamais à dormir dans un lit aussi grand…
Griselda vint s’asseoir à côté d’elle, et le matelas s’écrasa un peu plus sous leur poids commun.
– Je me sentirais mal de te laisser dormir sur le petit canapé, se justifia-t-elle.
Catherine ne répondit rien. Elle n’allait pas refuser la proposition de son hôte, ce serait impoli, même si elle avait l’habitude de dormir sur des couchettes très étroites. Griselda se releva. Elle avança vers le fond de la pièce et déplia un joli paravent en bois gravé de motifs de feuilles décorées de feuilles d’or.
– Tu peux te changer derrière ça si tu le souhaites et ranger tes affaires sur cette étagère.
Catherine acquiesça.
– Je retourne en bas travailler un peu, d’accord ? dit l’ambassadrice.
– D’accord. Merci beaucoup.
– De rien, répondit la femme avec un chaleureux sourire. Bonne nuit, Catherine.
J'aime beaucoup ce chapitre et trouve sympa que tu nous laisse suivre ces personnages malgré le fait que Clave et Noah soient partis. Griselda est vraiment très gentille avec Cath, qui a l'air d'une jeune enfant, c'est trop mignon... Peut-être que j'ai un esprit un peu tordu, mais ce pourrait-il que la relation de ces deux personnages évolue...? Ça me semble possible, mais encore une fois, j'ai l'esprit tordu.
Hâte de lire la suite !
Bye.
Haha, tu sauras si elles se rapprochent seulement si tu lis la suite ;P
Je suis contente que ce chap t'ai plu, car j'ai beaucoup aimé l'écrire.
À bientôt !