Chapitre 4 : Lettres de sang (1ère partie : Corail Gélatineux)

Notes de l’auteur : Voici donc un nouveau chapitre et, comme dit précédemment, le climax de cette première partie d'histoire. Ici on reprend tranquillement après une soirée arrosée, mais comme le corail gélatineux, il faut se méfier des apparences, on peut se retrouver piéger plus vite qu'on ne le pense...
Sinon, le saviez vous? Les liqueurs madrisées sont produites à partir d'une mousse spécifique à l'archipel, la mousse vineuse. Celle ci décompose ce sur quoi elle pousse et le fait fermenter grâce à des levures qu'elle produit. Les vapeurs alcooliques qu'elle dégage alors permettent de saouler rapidement insectes ou petits animaux qu'elle va ensuite prendre le temps de consommer... On dit que les alcools produits renforcent les sens en fonction de ce que la mousse a consommé!

A la fin de la prestation de Gaelyn l'atmosphère était solennelle. La joueuse resta au centre de la scène, intimidée. Et ce furent les anciens du clan du haut lac qui vinrent à sa rencontre. Marco les vit entourer la jeune femme, sans l'approcher, ni lui dire un mot. Elle, restait immobile, comme endormie.

Les anciens regardèrent la foule tout autour et l'un deux, un vieil homme vouté, à la voix rauque et au visage sévère prit la parole dans la langue insulaire :

— Voici la Valfreyja à qui nous avons laissé notre place !, dit-il en désignant Gaelyn, nous nous excusons d'avoir changé les règles et pénalisé notre chorale... Mais voici celle qui est venue de loin, porte nos habits, joue avec nos enfants et chante notre chant !

Il scruta le public silencieux d'un regard perçant en tournant autour de Gaelyn :

— La célébration de Ja est la célébration du foyer, de la vie qui nous est offerte sur cette terre d'abondance, reprit-il d'une voix grésillante, c'est la fête des arts et du souvenir... La jeune femme à mes côtés m'a rappelée des souvenirs... Elle m'a rappelée la tradition de l'accueil, les temps difficiles et l'entraide qui existait alors. Ce sont des valeurs qu'il ne faut pas oublier... Cette jeune femme m'a aussi montrée un art que je n'avais jamais vu. Pour ça et pour le reste, je veux la remercier...

Le vieil homme se tourna vers la jeune femme et s'approcha d'elle de sa démarche trainante. Puis avec une certaine gaucherie, il la prit dans ses bras en la serrant fermement si bien qu'elle faillit trébucher lorsqu'il la relâcha tout aussi brusquement. Désorientée, Gaelyn se laissa enlacer par chacun des anciens du clan qui avait pu venir sur l'île de Ja. Des applaudissements enflèrent dans l'assistance, marquant la reconnaissance des spectateurs et l'acceptation du choix des anciens. Ils durèrent longtemps dans une ambiance solennelle. Puis Gaelyn et les anciens sortirent de la scène, laissant les organisateurs reprendre la direction des festivités.

La jeune chercheuse en féérie fut chaleureusement accueillie au sein du clan, sans démonstration excessive. C'est du respect que lui témoignaient les villageois avant tout. Il n'y eut que les enfants avec qui elle avait joué qui sautèrent s'accrocher à ses jambes pour l'emmener s'amuser loin des chants qui n'en finissaient plus. Marco laissa la jeune femme retourner vers le campement du clan en compagnie des enfants et profiter de l'instant.

Madro qui était lui aussi à la traine vint se placer à côté du danseur et observa la jeune femme tiraillée en tous sens par les enfants et accompagnée de ses deux filles.

— Elle t'a bien eu la p'tite l'ami, dit-il en ricanant, bon laisse les femmes s'occuper... Ya Machico qui me dit qui parait qu'ya Bugio qu'a trouvé un gars du clan des champs de soufrières qu'à du kova qui sait pas trop quoi en faire... Tu viendrais pas nous aider à le soulager d'son fardeau des fois ?

— Quel genre de kova ? demanda Marco.

— Du bon... Qui pique la gorge et fais passer une soirée affalée sur du sable roux pour la meilleure soirée d'ta vie...

Marco sourit :

— Je te suis.

La fête comme la veille au soir dura jusque tard dans la nuit. La matinée du lendemain fut donc difficile pour beaucoup et consacrée à la préparation d'un repas collectif pour les autres, des femmes principalement. Les premières debout, elles semblaient visiblement incapables de cuisiner sans faire de bruit et par une grande maladresse, faisaient régulièrement tomber casseroles, louches et vaisselles à proximité de leurs maris qui avaient l'impression d'avoir un troupeau d'éléphants en furie à l'intérieur du crâne.

Marco, la tête encore lourde des excès de la veille s'était fait réveiller assez tôt par Chaô pour aller pêcher et ainsi réapprovisionné le stock de nourriture des festivaliers qui s'amenuisait rapidement. L'atmosphère était humide et de nombreuses ondées lui rafraichirent l'esprit. Les prises furent médiocres et laissa aux deux hommes le temps de discuter navigation, le fils de Madro participant l'après-midi même à la course sur embarcation libre.

Au zénith, ils retournèrent apporter leur maigre butin sur la plage et Chaô partit s'occuper de son navire de compétition. Un santo, une pirogue taillée dans ce qui ressemble à une aubergine géante aux divers tons de verts, nervurés de pourpre.

Marco rejoignit Gaelyn dans le camp du clan qui les accueillait. La jeune femme était réfugiée sous une barque d'ajoncs, assise sur son châle, à trier et préparer des légumes et des fruits en compagnie des femmes du clan. D'immenses dômes de végétaux l'entouraient, menaçant à tout instant de s'écrouler et de l'enterrer vivante. Les femmes du clan avaient abandonnés l'idée de l'arrêter et certaines d'entre elles en profitaient pour lui apporter leur propre lot. L'idée s'était même propagée aux autres clans et les anciens avaient été contraints d'organiser un roulement pour la préparation de fruits par l'étrangère à la cadence infernale.

— Bonjour Gaelyn, dit le danseur en se mettant accroupit face à la joueuse aprè avoir dépassé la queue des profiteurs qui se plaignaient sur son passage.

— Bonjour, la pêche fut bonne ? répondit-elle en délaissant ses légumes, Pélaga à ses côtés en profita pour fermer le petit business de préparation culinaire qui exploitait la jeune femme, sous les protestations de la foule de ceux qui n'avaient pu en profiter.

— Pas vraiment... La pluie brouille la mer et je crois que Chaô est distrait par sa course aujourd'hui.

— Il est prêt ?

— Oui oui, plus que prêt. Mais justement je pense qu'il se met trop de pression. Lui et son père ont apporté un très bon Santo, bien profilé, creusé à bonne maturité... Et du coup il a le trac.

Gaelyn ne répondit rien.

— Je vous félicite à mon tour pour hier, reprit le danseur, c'était... Un beau jeu !

Gaelyn sourit :

— Je crois que c'est la bonne expression... Restent les pirates...

Le ciel commençait à gronder de nouveaux et le temps que Marco redresse la tête, l'averse s'abattit sur la plage. Celle-ci fini de faire fuir la foule de profiteurs espérant encore que la fille de l'Ouest s'occuperait de leurs fruits et légumes.

— Vous allez être trempée ! lui signala une femme du clan qui découpait des fruits à peine plus loin.

— Je le suis déjà madame ! répondit Marco en s'épongeant le front avant de chasser l'eau d'un geste sec du poignet.

Il recommença à parler en céréique pour Gaelyn :

— J'ai passé la matinée à écoper avec Chaô, trempés dans un mètre d'eau... Pour les pirates, nous les verrons demain matin, juste avant la tenue des combats de gros. Pour l'instant nous sommes dans la meilleure position possible face à eux, laissons les tranquilles encore un peu.

Le danseur se redressa, décolla ses vêtements de sa peau, qui se collèrent à nouveau dès qu'il les relâcha :

— Je vais me changer ! A toute à l'heure !

Puis il partit en courant. Gaelyn le regarda disparaître derrière le rideau de pluie. Depuis qu'elle avait vu le couple de danseur harmonieux deux jours auparavant, elle observait chaque mouvement de l'homme de main de la Guilde des Sens. Chacun de ses gestes était précis, mesuré. Ça n'était pas remarquable au premier coup d'œil, mais évident lorsqu'on y prêtait attention. Il évoluait avec une grande fluidité, et avec un équilibre parfait, comme si l'environnement autour de lui n'opposait aucune résistance et qu'il flottait, guidé par son seul mouvement. Et pourtant c'était bien en deçà de la maitrise qu'il démontrait lorsqu'il dansait. Il n'était définitivement pas qu'un simple danseur... Laissant de côté ses réflexions, elle chercha les fruits et légumes encore à préparer et s'étonna qu'il n'y ait plus rien à faire...

Après le déjeuner, la grande course s'organisait. Du moins elle se préparait car il régnait sur la plage une joyeuse confusion. Chaque participant essayant de rejoindre la ligne de départ, sur terre ou sur mer, parmi la foule qui souhaitait assister à la course depuis la plage, mais aussi depuis certains points clefs du parcours, au cœur du lagon et bataillait pour avoir une bonne place. Le parcours partait du nord-ouest de la plage, sillonnait entre les nombreux récifs du lagon, longeait le large banc de sable qui le protégeait des vagues, puis serpentait à nouveau parmi les coraux avant de revenir à son point de départ.

— C'est difficile au départ car il y a trop de monde partout, expliqua dans la matinée Chaô à Marco, et après le grand banc, il faut naviguer entre les coraux gélatineux, c'est dangereux.

Après un temps assez long, où chaque participant recevait son ordre de passage dans un groupe, le nombre d'embarcations en compétition étant trop grand pour qu'elles partent toutes en même temps, le premier groupe s'élança au son d'une conque percée. Le fond peu profond du lagon permettait de naviguer à la rame ou à l'aide d'une perche. Les systèmes de propulsion s'entrechoquaient violemment au départ pour faire partir des embarcations de toutes sortes.

Sur la plage, sous de larges parasols plantés à la hâte, les spectateurs hurlaient des encouragements à leur candidat favori et se bousculaient pour avoir la meilleure vue sur les bateaux. A la lisière des parasols, Marco et Gaelyn en compagnie de Madèriché, Pélaga et ses deux filles tentaient tant bien que mal de rester abrités alors que des trombes d'eau s'abattaient à nouveau sur la plage. Marco regrettait son parapluie qui l'accompagnait presque toujours depuis qu'il était devenu danseur d'éther. Vu comme une arme dans ses mains, les insulaires ne lui avaient pas permis de le porter et il prenait la pluie.

Madro à l'écart avec ses amis de boissons était assis sous l'averse, portant comme de nombreux autochtones un chapeau à larges bords sur lequel dévalaient des torrents d'eau glacée.

— Comment peux-tu rester comme ça sous la pluie ? lui demanda Marco effaré.

Le vieux pécheur ne répondit pas, il sourit et désigna son chapeau qui le protégeait en partie, puis la bouteille dans sa main. Ses camarades de boissons levèrent leurs bouteilles à leur tour, trinquèrent et prirent une grande gorgée de liqueur. En basculant la tête en arrière, ils renversèrent toute l'eau de leur chapeau dans leur dos.

— Ne fais pas attention danseur, dit Pélaga sous les rires de Canari sa seconde fille, il ne sait que pécher et boire, le reste ça lui passe au dessus !

— Oui mais lui va voir Chaô sur le Santo ! répliqua Funchali en rejoignant son père, pataugeant dans les ruisseaux qui se formaient au creux du sable.

Sur la mer grisée par les intempéries, un nouveau groupe se préparait à partir. Parmi celui-ci, un pirate au bras puissant avait pris part à la course sur une barque du navire pirate. L'embarcation, bien plus lourde et moins mobile que celles employées par les insulaires n'avait aucune chance de gagner la course, mais le pirate pavanait sous les encouragements particulièrement vifs de ses camarades sur la plage. A mesure que les jours avançaient, ceux-ci étaient de plus en plus nombreux à terre.

Le pirate, un dénommé Derrinsen prit pourtant un bon départ, principalement car en s'acharnant violemment sur ses rames pour avancer, il avait fait le vide autour de lui, cognant perches, rames et compétiteurs. Puis en grognant, s'arc-boutant sur son banc de nage, il avait lancé sa barque à une vitesse prodigieuse et disparut bien avant tout les autres derrière le premier récif.

Chaô lui se présenta dans le sixième groupe sur son Santo, armé de sa pagaie, totalement concentré. Il ne percevait pas les encouragements du clan, ou ne voulait pas le montrer. Lorsque le signal de départ fut donné, il s'élança de manière chaotique, ayant du mal à s'imposer parmi ses concurrents, bataillant fermement pour planter sa pagaie dans l'eau. Mais lorsqu'il réussit à se libérer un couloir de nage, son santo fila rapidement pour passer le premier récif en bonne position.

— Funchali ! cria Pélaga en déracinant tant bien que mal un parasol, on prend la kolchéa, viens !

Les deux femmes partirent chercher la kolchéa familiale pour rejoindre la zone de coraux dans la seconde moitié de la course, entrainant avec elles Gaelyn. Marco lui resta avec les hommes. Trempé, il finit par se laisser tomber sur le sable, acceptant la liqueur madrisée de myrte, très tonifiante, que lui proposait un vieil homme à la moustache fournie et détrempée.

La kolchéa fut rapidement vidée de l'eau de pluie et mise à la mer. Pélaga poussait l'embarcation à l'aide d'une perche, tandis que sa fille et son invitée tenait le parasol déplié. La pluie s'arrêta aussi vite qu'elle avait commencé, dévoilant le fond peu profond du lagon. Les deux pêcheuses naviguèrent rapidement au cœur des récifs, vers des buissons de coraux brun-rouge et touffus.

— C'est des coraux gélatineux, expliqua Funchali, très dangereux, surtout s'ils attrapent.

Le corail qui affleurait à la surface de l'eau était constitué de longs filaments recourbés, très effilés.

— Ca déchire la coque, même pour les barques comme des pirates, poursuivit la jeune insulaire, et si ça casse tu es piégé.

— Comment ça ? lui demanda Gaelyn qui voyait la finesse des coraux à mesure qu'ils s'approchaient, imaginant mal qu'ils puissent déchirer la coque d'un navire avant justement de se briser.

Pélaga plaça la kolchéa tout proche des coraux et passa la perche à sa fille :

— Montres lui Funchali.

La jeune femme prit la perche et essaya de briser les branches du corail. La tâche se révéla plus difficile que ne l'aurait imaginé Gaelyn, le corail résistait aux assauts de la pêcheuse. En faisant levier, elle finit pourtant par briser une branche de la structure. La branche dériva dans l'eau, toujours reliée au reste du corail par une substance blanchâtre et gélatineuse. Cette substance se répandait dans l'eau en minces filaments. Puis elle commença à brunir, changeant d'aspect rapidement, elle était aussi moins souple, plus rigide.

— Ca durcit avec le sucre, dit Funchali, tu peux casser le corail, il se répare et grandit plus. Si ton bateau est dedans...

Elle chercha le bon terme en mirovan, mimant le phénomène en glissant les doigts de ses deux mains les uns dans les autres :

— ...Le corail il écrabouille le bateau et tu es fichu !

Gaelyn était très impressionnée par le phénomène, le corail se révélait particulièrement dangereux et elle en avait vu beaucoup dans le lagon.

— Bon on va aller par là-bas, dit Pélaga avant de reprendre la perche et voguer vers un rocher rond qui marquait un point de passage de la course. Une fois en place, la kolchéa tourna doucement sur elle-même sous un ciel qui se dégageait légèrement, le Soleil perçant même furtivement parmi les nuages.

Gaelyn compta le temps de jouer trois manches de belote avant que des bruits de rames et des râles d'effort se fassent entendre. Peu après, apparurent les premières embarcations, deux santo et une arecacae, une pirogue à balancier taillée dans un tronc de palmier lui donnant un aspect écailleux. Chaô bataillait avec le pilote de l'arecacae et était talonné par le second santo. Les autres concurrents apparaissaient à présent, loin derrière. Les trois femmes encouragèrent le jeune pécheur alors que les trois concurrents allaient entrer dans une zone compliquée à négocier, chargée en récifs et coraux qui ne leur permettrait pas de passer facilement à plusieurs de front.

La compétition devint alors acharnée, Chaô faillit plusieurs fois se renverser, comme ses concurrents et se blessa sur les pointes effilées d'un massif de corail gélatineux. Il dut laisser filer le second santo alors que le concurrent sur l'arecacae s'était mis en travers. Il finit par reprendre la seconde place et partit à l'assaut de la première en tirant de toutes ses forces sur sa pagaie. La kolchéa tournait toujours sur elle-même, laissant passer les autres concurrents pour ne pas gêner la course. Plusieurs tombèrent à l'eau et l'un deux se blessa sévèrement à la jambe mais refusa toute aide, remontant sur sa barque avant de sortir de la course pour rentrer se faire soigner.

La kolchéa finit elle aussi par se diriger vers la plage pour voir Chaô allonger sur le sable, les bras douloureux, arrivé second de son groupe. Son père rinçait sommairement sa plaie à l'aide d'alcool avant de lui en proposer à boire. Marco rejoignit les femmes et prit Gaelyn à part.

— Il faut que nous allions voir le capitaine marchand, dit-il, il est descendu à terre aujourd'hui ce serait une bonne occasion de te présenter à lui.

— Et les pirates ?

— Toujours demain matin... Leur capitaine me nargue dès qu'il le peut, il a l'air de s'impatienter, tant mieux... Pour les mirovans, ils ont assisté à ta prestation d'hier. D'un côté ça pourrait les inquiéter. Donc on va rester assez vague sur qui nous sommes et d'où nous venons. D'après un rapide sondage, ils te prennent plutôt pour une « apaisante », j'ai appuyé cette version. Si ça leur convient, il serait bon de ne pas les désillusionner...

— Oui eh ben je ne compte pas trop faire illusion quand même..., répondit Gaelyn qui ne savait pas comment prendre la rumeur.

Les apaisants étaient des musiciens dont les talents permettaient d'apaiser les peines et la douleur, endormir les enfants et les malades, détendre les personnes. Parfois certains d'entre eux offraient des services bien plus osés. Cet aspect avait donné une image sulfureuse à toute la profession.

Les pas des deux voyageurs les conduisirent auprès des marins mirovans à la lisière des parasols. Un homme d'une cinquantaine d'années, au maintien fier, le buste large, la mâchoire puissante, portant une veste dont le col haut était fermé par six boutons bleu roi.

— Voici le capitaine Désio, dit Marco à Gaelyn, il est le maître du Ostrei Rapadura. C'est lui qui a accepté de nous conduire à Mirova.

— Enchantée, dit Gaelyn en abaissant légèrement le front.

— Appelez-moi Améri s'il vous plait, répondit le capitaine avec une voix étrangement légère, vous êtes donc la jeune prodige qui a illuminé la journée d'hier ?

Gaelyn n'eut pas le temps de répondre, peinant à suivre le vocabulaire riche du capitaine.

— Je n'eus point l'occasion d'assister à votre prestation, poursuivit-il, mais j'en ai entendu grand bien par mes hommes et les insulaires, permettez-moi donc de vous saluer.

L'homme fit une révérence avant de prendre les doigts de la jeune femme et de l'effleurer de ses lèvres.

— Excusez-moi capitaine, ma... Maitresse ne maitrise pas très bien le mirovan, reprit Marco, il vaudrait mieux faire des phrases simples pour elle.

— Pardon, pardon ! dit empressé le capitaine marchand à Gaelyn qui en profita pour récupérer sa main, quel est votre nom ?

— Je suis..., elle hésita à donner son nom, regardant du coin de l'œil Marco qui ne semblait pas en mesure de l'aider, miss Hastin.

Elle estima qu'il ne servait à rien de jouer la prudence maintenant, elle avait déjà donné son nom à un grand nombre d'insulaires et bientôt elle serait protégée, entre les murs de Mirova.

— C'est... un honneur pour moi d'emmener une si prodigieuse artiste à Mirova.

— Capitaine, reprit Marco, que pensez-vous des pirates qui sont ici ?

Le mirovan parut étonné de la question.

— Ils rodent dans l'archipel et je ne suis pas tranquille, poursuivit le danseur en désignant discrètement la jeune femme à ses côtés, vous savez avec de telles personnes on n'est jamais trop prudent...

— Oui je me méfie d'eux également, dit le capitaine avec une expression soudain sévère qui contrastait avec son apparente légèreté, les hommes parlent avec eux et je n'aime pas ce Morse, qui parait trop sûr de lui. De tels gaillards vous gâchent un plat rien que par leur présence, mais sur mon navire il n'y a aucun risque ! Nous sommes en prime escortés par quatre lamantins porteurs de parfum grégeois qui sauraient leur faire regretter toute action à notre encontre.

— Me voilà rassuré, répliqua le danseur avec un grand sourire en portant la main à son cœur avec une théâtralité que Gaelyn jugea excessive.

— Les courses de cosse vont commencer ! prévint un marin, faut venir voir ça c'est sympa !

— J'ai quelques douceurs à partager, reprit le capitaine, joignez-vous à nous pour l'occasion, qu'en dites-vous ?

Ainsi passa la fin d'après-midi et la soirée, en compagnie des marins mirovans qui ne cessèrent de complimenter Gaelyn pour sa prestation de la veille. Les deux voyageurs se sentaient définitivement proche de Mirova.

 

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Luvi
Posté le 02/05/2025
Bien le bonjour👋,

Je dois dire, outre l'intrigue qui rend fébrile, que ton univers est extrêmement bien travaillé. Chaque détail est bien décrit et offre de grande possibilité d'imagination (j'ai tiqué sur le "parfum grégeois " comme le feu grégeois? J'étudie la série Game of throne actuellement 😅)
La course était folle est le corail ! Sacré imagination ! Quoi que, si notre corail pouvait avoir les mêmes propriétés ! Ça laisse rêveur tout ça !
Quel est donc ce capitaine qui semble bien trop propre sur lui pour offrir une totale confiance ? Son arrivée intensifie la paranoïa que l'on à pour notre duo de choc !
Hâte de lire la suite
A bientôt
Plume de Poney
Posté le 02/05/2025
Bonjour à toi!

Merci pour tes compliments!
Pour le parfum grégeois c'est exactement ça. Selon les sources historiques, il semblerait que le feu grégeois était pas mal utilisé lors de batailles navales, donc j'ai voulu faire une déclinaison "sensoriel" de l'affaire...

J'ai trop fait monter ta paranoïa pour que tu te méfies de ce cher Améri Désio :)
Même si tu as raison, il faut toujours se méfier de tout le monde.
La bulle de paranoïa va se crever au prochain épisode si ça peut te rassurer.

Merci pour tout et à la prochaine!
Phideliane
Posté le 17/04/2025
hummm... mon côté suspicieuse me dit qu'il est trop poli pour être honnête, ce capitaine..Où était -il la veille, en plus, s'il n'a pas assisté à la représentation?.....
Le corail, belle trouvaille. Et les "apaisants", j'aime beaucoup l'idée. Bravo! Hâte de lier la suite, c'est de plus en plus addictif au fur et à mesure que l'on appréhende la richesse du monde et de l'histoire.
Plume de Poney
Posté le 17/04/2025
C'est bien d'être suspicieuse avec ce genre de bonhomme. C'est comme les chats, c'est quand on se détend qu'on se fait mordre :D

Pour le corail, sache qu'il a aussi un intérêt pâtissier. Puisque son suc se rigidifie avec le sucre, il peut être une bonne alternative pour la gélatine, à condition de le doser correctement et d'être capable de le récolter...

Merci pour ton appréciation et profites encore un peu du calme insulaire, le chapitre 3 était le chapitre tranquillou de l'aventure !

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