Martin entra le premier, plus nerveux que d’habitude. Il me fit la bise puis s’écarta. Son épouse apparut derrière lui.
-Bonjour, je suis Sophie, je crois que vous avez entendu parler de moi.
-En effet, et je doute qu’il soit indispensable que je me présente.
-Vous êtes à la hauteur de ce qu’il m’a dit de vous, Lola.
-Je suppose que c’est plutôt positif.
-Extrêmement positif.
-Alors merci.
La curiosité que je percevais dans le regard de cette grande brune élégante n’empêchait pas la présence d’une certaine tension. Elle venait avant tout de Martin, d’habitude paisible, mais que je sentais gesticuler sur lui-même au point d’en avoir des tics nerveux. Sophie me regarda en silence et ses yeux se posèrent sur mon visage, puis sur mon corps et scrutèrent leur cible. Cela ne me mit pas mal à l’aise et je la laissai faire sans rompre le silence. Martin crut devoir meubler, comme si son absence momentanée des débats était une menace pour sa virilité.
-Euh Lola, je vais te régler pour…
-Martin ?
-Oui ?
-Et si tu allais simplement à la douche ?
L’invitation autoritaire, bien que tout à fait cordiale, fit sourire Sophie. Martin avait beau être aussi stressé qu’un premier de la classe avant d’entamer une récitation, il n’en restait pas moins intelligent. Il comprit le sens de ma suggestion, et disparut dans la salle de bain.
-Il vous a expliqué notre situation ?
-Oui, il l’a fait assez clairement.
-Cela vous choque ?
-Si c’était le cas je n’aurais pas accepté cette séance un peu spéciale.
-C’est la première fois que cela vous arrive, j’imagine ?
-De masser un client sous les yeux de sa femme ? Oui, en effet.
Sophie posa son manteau sur un bras du canapé. Elle portait une robe bleue et noire à manches longues, très près du corps, qui se terminait sous ses genoux. Cette jeune quadra tonique affichait une allure de dix ans de moins. Elle était mince, bien proportionnée, et de taille moyenne. Sous la robe moulante, le renflement d’une petite poitrine achevait de mettre en avant de façon raisonnable une féminité subtile.
-Sophie, je peux vous poser une question ?
-Je vous en prie.
-Je l’ai déjà posée à Martin, mais j’aimerais vraiment avoir votre réponse à vous. Est-ce votre idée, ce massage à venir et le fait d’y assister ? Ou tout au moins est-ce vraiment un désir de votre part, sans que vous ne vous en sentiez obligée ?
-Oui c’est mon idée, et non je ne le fais pas contre mon gré, pour lui faire plaisir. D’ailleurs pour le moment il est davantage nerveux que comblé.
-D’accord.
-Je dois vous dire, puisqu’on en est aux confidences, à quel point il a adoré vos deux massages. Sans parler de la dernière fois…
Je me sentis mal à l’aise. La dernière fois, comme disait Sophie, c’était ces deux heures au cours desquelles son mari m’avait fait l’amour contre six-cents euros. En parler face à elle était inconfortable.
-C’est moi qui devrais être gênée, vous ne trouvez pas ?
-Non, je pense que vous devriez être furieuse, mais je ne vois aucune raison pour que vous soyez gênée.
-Furieuse contre vous ?
-Oui, ou contre lui, ou contre la période difficile que vous traversez, je n’en sais rien.
-Ça servirait à quoi ?
-…
-Il vous a parlé de cette situation, visiblement…
-Sans entrer dans les détails.
-Il y a deux ans, l’accouchement de notre deuxième enfant s’est très mal passé, et j’ai failli mourir. Il y a eu Césarienne en urgence et d’innombrables complications. J’ai végété en soins intensifs très longtemps et je suis restée marquée par tout ça.
-Physiquement et moralement ?
-Oui.
-L’un entrainant l’autre ?
-Si ce n’était que ça, je ferais de la chirurgie réparatrice. Mais ce n’est pas uniquement ça.
-Et donc, depuis…
-Je ne supporte plus l’idée qu’on me touche de façon érotique. Nous avons entamé une thérapie de couple depuis un peu plus d’un an, mais c’est très long. Et difficile.
-L’idée d’autoriser Martin à des escapades coquines, c’est dans le cadre de la thérapie ?
-Non, c’est venu entre lui et moi, mais on l’a dit au psy qui nous suit, tout est clair et assumé.
-Excusez-moi si je vous semble exagérément curieuse. C’est pas de la curiosité, d’ailleurs…
-Vous voulez être sûre que vous n’allez pas me faire du mal.
-C’est exactement ça, oui.
-Alors soyez tranquille.
Provenant de la salle de bain, le son de l’eau ruisselant sur les parois de la cabine s’interrompit. Martin n’allait pas tarder à revenir dans la pièce. Je fermai la fenêtre et remontai le son du lecteur CD qui diffusait une musique orientale à la fois sensuelle et apaisante. Sophie ouvrit son sac et s’approcha de moi.
-Tenez, Lola, pour la séance, dit-elle en me tendant cinq billets de cinquante euros.
-Non, ce n’est pas du tout le tarif.
-Ecoutez, on voulait vous acheter un cadeau, de toute façon, et nous n’en avons pas eu le temps, alors autant que vous preniez la somme qu’on avait quoi qu’il en soit prévu de mettre.
-C’est très gentil de votre part mais…
-Allez ne faites pas de manières.
Sophie glissa les billets dans la poche arrière de mon short en jean. Quand son bras passa dans mon dos et que la main chercha ma fesse, je sentis son parfum en même temps qu’une aura d’autorité. A ce prix-là, ce n’était pas désagréable d’obéir.
-Vous êtes aussi belle qu’il me l’avait dit, en tout cas.
-Merci.
-Et en effet, quelles jambes !
-…
-Vous êtes encore gênée ?
-Non, ça va.
-Je ne suis pas bisexuelle, c’était une remarque purement objective. D’ailleurs en ce moment je suis surtout asexuelle.
-Je sais. Je peux vous poser une dernière question ?
-Je vous écoute.
-Vous ne parvenez plus à faire l’amour, j’ai bien compris, mais avez-vous quand même quelques moments sensuels ensemble ?
-Martin a trop de mal avec l’idée que je lui donne du plaisir sans qu’il y ait de retour.
-C’est pas un peu contradictoire avec ce que nous allons faire dans les minutes qui viennent ?
-Si, mais Martin est pétri de contradictions. Et puis, là, vous servez d’interface, en quelque sorte.
-Interface, interface, est-ce que j’ai une gueule d’interface ?
Sophie sourit, puis son sourire devint rire, m’entraînant avec elle, et nous nous détendîmes enfin. Martin sortit de la salle de bain une serviette autour de la taille, l’air un peu penaud. Sophie prit place sur le canapé, enleva ses chaussures et replia ses jambes sous ses fesses. Ses yeux brillaient de la même curiosité que lors de son arrivée, mais il me sembla qu’il s’y ajoutait désormais de l’impatience.
Martin s’installa sur le ventre et je pris la soucoupe d’huile.
-Fleur d’oranger, ça te va ? Vu que tu n’as rien à cacher à Madame, autant se faire plaisir avec un parfum agréable…
-D’accord.
J’enlevai mon short, puis mon chemisier et mon soutien-gorge. Machinalement je jetai un coup d’œil vers Sophie dont le regard me jaugeait en détail. Elle resta silencieuse et je débutai le massage. La première demi-heure fut reposante. Je tournai autour de la table, comme à mon habitude, frôlant par moments la visiteuse assise sur le canapé, mais dont je réussis à oublier la présence. L’aspect non érotique de cette partie du massage y contribuait, ainsi que le silence respectueux de Sophie, qui nous observait, ne manquant ni un geste ni un effleurement.
Deux minutes avant d’inviter Martin à se retourner, je fis monter la température avec mes techniques désormais bien rodées. Tout d’abord en me penchant en avant, seins écrasés sur le haut de son dos, mes mains étirées cherchant leur chemin entre les deux fesses qu’elles écartèrent. Puis à hauteur de son bassin, mes mains reprenant leur trajet sinueux au cœur du fessier pour prolonger la caresse vers le membre frétillant allongé contre la table de massage, sortant de son hibernation pour devenir le centre de mon attention. Martin bougea légèrement, comme pour se donner de la contenance alors que le trouble avait commencé sa délicieuse progression dans tout son corps.
Quand la verge fut parfaitement huilée par mes caresses et que l’érection naissante me sembla appréciable, je l’invitai à se retourner.
Martin exhiba son pénis dressé aux yeux de son épouse.
L’intimidation que j’avais ressentie face à cette femme belle et autoritaire s’évanouit presqu’instantanément. J’étais désormais investie dans mon rôle, et le rideau de ma représentation venait de se lever. Martin était le seul à être encore gêné. Si la réaction physiologique qui trahissait son excitation n’était qu’une pure histoire de corps caverneux, tout son langage corporel exprimait un certain malaise. Cet homme, d’habitude si sensuel, et dont les mains avaient toujours parcouru mon corps dès qu’elles en avaient eu l’occasion, restait immobile. Même ses yeux n’osaient ni se poser sur moi, pour au moins mater avec délectation ce que ses paumes ne caressaient pas, ni échanger de regard avec son épouse, dont je sentais près de moi la présence pourtant bienveillante.
Je profitai du massage du ventre et du torse pour prendre une des deux mains craintives, et la posai dans le bas de mon dos. Martin eut le réflexe de regarder enfin sa femme, qui lui sourit. La main hésitante se sentit autorisée, et se déplaça sur ma peau, tournant sur mes hanches, soulignant voluptueusement le galbe de mes fesses, et le pénis se déploya pour atteindre les sommets.
Je passai vingt minutes à tourner autour de la table, massant chaque muscle et chaque partie du corps, sans oublier mes rappels réguliers vers l’anatomie démonstrative de Martin. Son sexe fit des allers-retours entre le haut et le bas, réagissant soit à mes effleurements concrets, soit aux attouchements que Martin multipliait sur mon corps quand celui-ci passait à sa portée, prenant possession d’un sein, d’un bras, de mon dos, d’une cuisse ou de mes fesses, selon la position qui était la mienne. Enfin, je me remis contre le sommet de la table, ventre calé contre le repose-tête, les cheveux de Martin chatouillant mon piercing au nombril, et mon corps se courba à quatre-vingt-dix degrés. Mes seins balayèrent le visage de Martin, dont les bras s’étirèrent vers l’arrière pour garder un contact avec ma peau dans une exquise contorsion lubrique. Quand mon inclinaison fut maximale, mes seins écrasés contre lui entrèrent presque malgré eux dans sa bouche, et je sentis ses lèvres pincer doucement mes mamelons, tandis que ses bras enroulés dans mon dos maintenaient la posture fabuleuse dans une impossible éternité. Ma tête pivota en direction du canapé et mes yeux bleus regardèrent Sophie, alors même que mes mains trouvaient le sexe érigé, et d’un petit geste maîtrisé, en décalottèrent le gland. Il n’y avait toujours aucun sentiment négatif dans le regard de la femme dont le pénis bandé du mari luisait d’huile à la fleur d’oranger et de désir entre mes deux mains.
Je me redressai et me mis en place pour la finition, bien en face du canapé sur lequel Sophie était assise. Je me sentais mi masseuse érotique, mi professeur, dans une séance de pédagogie très explicite sur le thème de l’éjaculation masculine par stimulation directe du gland. En voilà un cours de fac intéressant !
Ma main gauche se lova sous les bourses qu’elle massa délicatement, et mon index droit décrivit des cercles imaginaires sur la surface brillante du champignon ardent. Martin eut une première convulsion de plaisir et gémit en se cambrant. Je fis monter doucement ma main gauche sur la hampe de la verge, comme une araignée à cinq pattes gravissant un mur pour trouver sa proie cachée sur le toit. L’index de la droite continua son petit manège innocent, glissant sur le gland comme une patineuse sur de la glace, laissant derrière elle non pas des rayures givrées, mais une onde de plaisir grandissant encore après son passage, comme les ronds dans un lac après les ricochets d’un galet. Le corps de Martin se tendit, ses poings se fermèrent, sa tête dodelina, et il gémit une deuxième fois, extirpant de sa gorge la complainte de l’homme obligé de lâcher prise dans le plus doux des abandons.
Martin venait de passer en pilotage automatique, et si ses mains continuaient de caresser mon corps, et en particulier mes seins, c’était devenu un réflexe libertin accompagnant le mélange de désir et de fluides divers qui montaient en lui. Je ne basculai pas le dossier de la table car cela aurait diminué la visibilité que Sophie avait de la scène. Un coup d’œil vers elle me permit de vérifier qu’elle suivait le déroulement des opérations, et que sa curiosité s’était muée en étonnement. Elle semblait captivée.
Ma main gauche, qui était montée jusqu’au niveau du frein qu’elle caressait désormais, descendit le long de la hampe, tirant la peau qui coulissa vers le bas, décuplant merveilleusement les sensations dans tout le pénis. De la main droite, je formai le traditionnel bec d’oiseau, et mes doigts descendirent en tournant sur le gland, seul au firmament. Martin haleta et le troisième gémissement, bien plus sonore, se termina en cri et en hoquet.
-Mais comment est-ce que vous faites ça ?
La question était venue du canapé. Sophie, pupilles grises fixées sur le sexe de son mari, exprimait un mélange de fascination et d’hébétude.
-Venez.
-Pardon ?
-Venez à côté de moi.
-Vous êtes sérieuse ?
-Venez, Sophie.
Hésitante, la belle et autoritaire Sophie se leva, contourna la table où reposait, au bord de l’orgasme, l’homme qui lui avait fait deux enfants. Elle se mit à côté de moi, à ma gauche. J’avais récupéré son assurance du début de séance, dans un transfert insidieux qui la laissait désormais fébrile et mesurée, comme si, malgré la conscience aigüe de ce qu’elle avait désiré regarder, elle s’avérait décontenancée par l’intensité inattendue de la finition. Sophie était surprise d’être surprise.
-Relevez un peu les manches de votre robe, pour ne pas vous tacher avec l’huile.
Désormais à mon écoute, Sophie s’exécuta. Elle ne portait qu’une bague : son alliance. Je trouvai opportun qu’elle la garde. Ses mains étaient fines, très belles, et un vernis rouge parfaitement posé apportait une touche de séduction mêlée de préciosité, dans une ambiguïté qui se mariait remarquablement avec ce que ses longs doigts véloces allaient devoir exécuter.
Je fis un pas à droite pour lui laisser la place face à ce pénis qui l’avait tant de fois pénétrée, mais plus depuis deux ans. Elle se décala et je sentis le tissu de sa robe contre mon bras nu.
-Tenez, trempez vos doigts dans l’huile.
Sophie plongea dans la coupelle et étala le mélange à la fleur d’oranger sur ses mains qui devinrent luisantes.
-Mettez votre main gauche là, empoignez doucement sans serrer. Voilà… Et maintenant positionnez votre main droite juste au-dessus du gland.
-Comme ça ?
-Doigts réunis vers le bas. J’appelle ça le « bec d’oiseau ».
-Ah oui d’accord.
-Très bien. Maintenant vous descendez et quand vous arrivez au contact du gland, vous ouvrez les doigts, vous les enroulez dessus, et vous tournez, très doucement, sans appuyer, mais en gardant bien le contact. Les sensations doivent venir du glissement.
-Je ne vais pas lui faire mal ?
-Je ne crois pas, non…
Sophie baissa sa main droite et, de façon infiniment précautionneuse, toucha le gland de son mari. Ses doigts partirent dans cinq directions et descendirent vers le bas du chapeau. Martin frissonna.
-Tournez Sophie, comme si vous vouliez refermer un robinet. Là en l’occurrence, vous n’allez pas tarder à l’ouvrir…
L’image fit rire Sophie, ce qui eut le mérite de la libérer. Elle trouva le bon geste et s’enveloppa tout autour du champignon turgescent qui disparut derrière les cinq doigts refermés sur leur proie. Martin cria de surprise et de plaisir. Ils étaient tous les deux stupéfaits de la tournure que venait de prendre la séance. Je n’avais rien calculé, et n’avais pas prévu d’inviter Sophie à se joindre au massage. C’était sa question qui m’avait donnée cette idée. « Mais comment est-ce que vous faites ça ? » Et bien, je vais te montrer !
-Et maintenant ? Comment j’enchaine ?
-Faites-vous confiance. C’est davantage du ressenti que de la technique. Continuez, variez les pressions, les gestes, les directions, soyez à l’écoute de ce qu’il ressent et faites ce que bon vous semble. Vous connaissez le pénis de votre mari mieux que moi, non ?
Sophie me lança un regard qui signifiait « tu es vraiment une fille sympa, mais vas-y mollo sur les petites allusions quand même ». Je lui souris. Je n’avais pas voulu la blesser, bien au contraire.
Elle caressa la verge de Martin avec amour et une volonté évidente d’être la plus sensuelle possible. Je la sentais à la fois attentive et sur la réserve. A quelques reprises je me joignis à elle pour lui montrer un ou deux gestes coquins.
-C’est comme un joystick, lui dis-je en prenant le pénis érigé dans ma main droite, pouce sur le frein et quatre droits dansant sur le gland dans une charnelle glissade.
-J’adore vos images.
-Regardez. Là vous contrôlez la direction (je fis pencher doucement la manette de jeu vers la droite et vers la gauche, envoyant de savoureux élancements dans le ventre de Martin qui sembla souffler bien plus d’air qu’il n’en avait dans les poumons). Là vous chargez les missiles (mon pouce pressa le frein, comprimant la fine parcelle de peau ridée reliée à tant de terminaisons nerveuses à ma portée, puis la caressant négligemment, accentuant les élancements qui irradièrent dans tout le corps de Martin). Et là vous faites feu (les petits coussinets moelleux sous mes phalanges coulissèrent sur la surface lubrifiée dont le rouge vif était désormais en accord parfait avec les ongles de son épouse).
-Mmmmmmmmh, confirma Martin qui raidit le peu de son corps qui ne l’était déjà.
A peine conscient qu’il était une sorte de cobaye dans une séance de travaux dirigés, Martin atteignit le septième ciel bien différemment de ce qu’il avait imaginé. Deux femmes s’occupaient de sa verge avec méticulosité, faisant durer le plaisir aussi longtemps qu’il était nécessaire à son épouse pour parfaire la technique qu’une blonde à moitié nue lui apprenait directement de façon on ne peut plus contextualisée – pour ne pas dire « sur le tas ». Martin avait sûrement connu des moments plus désagréables dans son existence.
Je m’avançai en direction de son torse, laissant Sophie achever la finition à sa guise. Je massai doucement les épaules, puis la nuque et le cuir chevelu de Martin dont les mains se réjouirent que je sois revenue si près de lui. Je relevai alors, enfin, le dossier de la table, et Martin plongea son visage entre mes mamelons. Ses mains s’agrippèrent à mes fesses qu’elles caressèrent sans le moindre signe de lassitude, les doigts parcourant les bosses incendiaires, et je sentis à nouveau une langue aventurière chercher le contact avec mes tétons.
Laissant Martin déferler de tendresse et d’excitation sur mon corps, plus que jamais interface consentante entre sa femme et lui, je regardai Sophie aller et venir sur le pénis de son mari, qu’elle cajolait et stimulait avec amour et déférence. Elle avait compris l’essentiel et, si techniquement il y avait à redire, son interprétation était d’une grande sensualité. Si j’avais été dans le jury de « Masturbe avec les stars », je lui aurais mis la note de 7 !
Je sentis Sophie plus fébrile quand la fin approcha. Toutefois, elle ne m’appela pas, ne me demanda pas de conseil et ne m’invita pas non plus à la remplacer. Je ne prétendis pas avoir servi à quelque chose dans leur thérapie, et je ne suis pas naïve au point de croire qu’il y eut un « avant » et un « après » Lola. Toutefois, Sophie prit sur elle pour aller au bout de la finition, mais elle le fit avec plaisir. Ce n’était pas un rapport sexuel, et les mains de Martin ne la touchèrent pas. Mais une connexion érotique avait été établie entre eux. Ce qui me parut plausible, c’est que dans cette idée d’assister au massage, idée que Sophie s’attribuait, figuraient déjà les prémisses de cette connexion. Le terme « interface » semblait tout à coup avoir été utilisé à dessein, comme s’il traduisait déjà le passage à l’acte d’une intention inconsciente mais pertinente. Interface j’étais effectivement. Et j’en étais ravie.
Au bout d’interminables minutes au cours desquelles le sexe de Martin sembla par trois fois sur le point d’exploser, Sophie trouva le bon déclic. Ses doigts se mirent à chatouiller la surface du gland, effleurant sans vraiment toucher, mais leur proximité électrisante suffit à stimuler jusqu’au feu d’artifice la verge que plus de dix minutes de finition ininterrompue, dont certains passages à quatre mains, avaient mise dans un état tel que le moindre contact, aussi subtil soit-il, pouvait en déclencher l’éjaculation.
Martin se mit à gémir, ses mains se figèrent sur mes fesses et son nez pressa entre mes deux seins. Une arabesque de sperme sortit du méat et alla se répandre sur son ventre. Surprise, Sophie cria et elle dut faire un geste qui arracha un hurlement de plaisir à Martin, dont le pénis lâcha une deuxième giclée blanche qui fusa en une magnifique verticale, Sophie ayant malgré elle redressé le joystick lorsque celui-ci avait éjaculé, avant de lui retomber sur les mains, nappant de nacre ses beaux ongles rouges.
La transition entre les phases orgasmique et résolutive de Martin nous fit éclater de rire Sophie et moi. Son visage se figea et tout à coup, il se vit tel qu’il était : entouré de deux femmes, l’une étant la sienne et dont les mains dégoulinaient de sperme, l’autre étant cette jolie blonde avec qui il avait couché il y a peu de temps, et dont il tenait encore les fesses alors qu’il avait visiblement bavé entre ses seins. La prise de conscience se juxtaposa à l’étape de détumescence et Martin resta ébaubi, nous fixant toutes les deux avec un regard mi extatique, mi culpabilisé, alors que son sexe goutait encore en filaments qui eussent formé de magnifiques stalactites si nous l’avions massé en extérieur.
Je l’essuyai et fis un tour rapide à la salle de bains, afin de laisser aux époux un peu d’intimité dans un instant où elle me parut nécessaire. Quand je revins dans la pièce, Sophie alla se laver les mains à son tour.
-Merci, me dit Martin.
-Ça va, laisse tomber les violons.
-Tu avais imaginé cette tournure à l’avance ?
-Que dalle. C’est venu comme ça.
Quand Martin fut sous la douche, je me rhabillai en présence de Sophie. Une fois dans mon jean noir et mon pull rouge, je laçai mes Converse, assise sur le canapé, à côté d’elle.
-Vous êtes insoupçonnable, comme ça.
-On dirait une étudiante, hein ?
-Mais vous ne l’êtes pas ?
-Bah si, justement !
-Et Alessia est aussi séduisante que vous ?
-Plus de seins, moins de jambes.
-Martin m’avait parlé d’elle avant de tomber sur vous. Il m’avait dit qu’elle était un petit peu typée et très sensuelle.
-L’Italie du Sud produit parfois d’excellentes surprises. L’Etna, la Mafia, Lampedusa… et Alessia !
-Sicilienne, donc ?
-Quelques racines oui, et une capacité à bronzer en toutes circonstances au moindre rayon de soleil.
-Visiblement, c’est plus difficile pour vous.
-L’écran total est mon meilleur ami.
Sophie rit de bon cœur. Elle était plus détendue, et bien moins raide qu’à son arrivée. Sa posture autoritaire s’était effacée au profit d’un visage plus avenant et souriant.
-Vous financez vos études avec ces massages, et quelques extras ?
-Les extras c’est fini. Je garde ce par quoi j’ai commencé, à savoir les massages. Cela suffit largement.
-C’est sûrement mieux ainsi, oui. Même si Martin a pu en profiter. Enfin non, je ne voulais pas dire « profiter » excusez-moi…
-Y’a pas de mal, c’était le bon terme. Je n’y vois aucune intention négative, tout va bien.
-Vous avez l’air d’être quelqu’un de solide.
-Vous aviez l’air d’être quelqu’un d’assez froide.
Sophie comprit ce que je voulais dire. Elle était entrée une heure plus tôt avec une certaine retenue et un masque sur le visage, et s’apprêtait à sortir souriante et tout à fait détendue. Avoir l’air est à la fois très subjectif et très relatif.
-Message reçu.
-Cela dit vous n’avez pas tout à fait tort. Il faut être solide pour faire ça. Mais je pense que pour durer dans l’univers de l’escorting, il faut l’être davantage que je ne le suis.
-Ou peut-être simplement savoir placer ses limites aux bons endroits.
-Peut-être.
-Martin a eu de la chance.
Le chanceux en question nous rejoignit, douché, habillé et toujours vaguement gêné. Il prit la main de sa femme qui avait enfilé son manteau, et m’embrassa sur la joue. Sophie me fit la bise également et emmena son mari vers leur vie tourmentée. J’espérai le revoir bientôt pour savoir si cette séance avait produit ne serait-ce qu’une piste de discussion supplémentaire entre eux. C’était le but de toutes leurs expériences. D’un autre côté, ne jamais le revoir serait sûrement un excellent signe quant à une éventuelle reprise de la sexualité au sein du couple étrange mais attachant qu’ils formaient. L’avenir me le dirait.
Quand elle franchit la porte du salon de massage, Sophie me regarda en souriant.
-Prenez soin de vous, Lola.
J’avais déjà entendu ça…
Ô Sophie ! Ô Sophie ! Ô Sophie !
Reviens, je ferai « ouap dou ouap dou ouap dou »
Ô Sophie ! Ô Sophie ! Ô Sophie !
Et tu riras, ouap dou ouap dou ouap dou
Ô Sophie ! Ça m’suffit ! Ma philosophie !
Où suis-je ? Où vais-je ? D’où viens-je et où accours-je ?
Où accours-je ?