Chapitre 6 ou comment nous sommes retournés sur nos pas dans la bonne humeur pour la troisième fois

Par cirano

Après plusieurs heures de marche, deux barres énergisantes chacun et quelques papotages inconséquents :

L’air était frais et agréable à respirer. J’étais à côté de mon maître pendant que Valence avançait devant en regardant John qui gambadait dans la brousse. Ce chat passait son temps à se casser la gueule, c’était un miracle qu’il ne soit pas encore mort. Après pour le coup on était en enfer, ce qu’il voulait dire qu’en fait il était déjà mort. J’avais pas complètement tort quand j’ai dit que c’était un nom qui portait la poisse. Et soudain j’ai réalisé un truc, je me suis penché vers mon maître (mon maître faisait deux mètres cinquante, c’est une façon de parler) et j’ai chuchoté :

– Mais en fait, comment ça se fait que le chat est en enfer ?

Il eut l’air surpris par la question, puis leva les sourcils d’une manière qui voulait clairement dire : « aucune putain d’idée »

– Parce qu’ils vont pas à la messe, fit-il en haussant les épaules.

Je ne m’attendais pas du tout, mais alors pas du tout à l’entendre plaisanter. J’ai réfréné un rire-hoquet nerveux avant de lever un regard étonné à mon maître. Celui-ci me fixait avec un grand sourire, beaucoup trop content de sa blague. Je sais pas trop pourquoi, mais le fait qu’il fasse un effort pour essayer de me faire rire, ça m’a touché. Il remit son regard sur l’horizon et toujours avec son air de grand plaisantin, murmura presque pour lui-même :

– Ou parce qu’ils ont des poils.

Pour le coup j’étais pas sur d’avoir compris, mais c’était pas très grave, c’était déjà un très bon début. Fort de cette petite victoire et porté par l’ambiance générale qui était devenue clairement meilleure, j’ai lancé à Valence :

– Valence j’ai vu tes carnets, tu veux nous lire quelque chose ?

– Va te faire mettre, répondit-il en faisant un doigt d’honneur par-dessus son épaule.

– Ok.

Il y avait un vrai mieux. Mais mon maître eut l’air troublé, il se mit à regarder son poing, puis se fit un doigt à lui-même, intrigué. J’ai écarquillé grand les yeux en mourant de rire à l’intérieur de ma tête.

– C’est une insulte, lui ai-je dit en faisant attention que Valence ne l’entende pas.

Il se contenta d’acquiescer d’un air impressionné. C’était complètement adorable.

– John revient ici mon beau ! cria Valence qui commençait à s’inquiéter que son chat parte trop loin.

L’intéressé était grimpé sur petit arbre défeuillé, il tourna la tête en entendant la voix de son propriétaire, fit un pas dans le vide et tomba comme une pierre en poussant un miaulement de désespoir. Valence eut un petit cri et c’est précipité vers lui. Pour ma part je me suis mordu le poing gauche pour m’empêcher de rire. Je sentais que notre artiste teigneux était de plus en plus à l’aise avec mon maître et moi, une seule réplique mal placée et ça risquait de bousiller le faible début de confiance qu’il pouvait avoir.

– Il est con ton chat ! cria mon maître.

Pourquoi est-ce que je me donnais de la peine déjà ? À ma grande surprise Valence lança un regard désolé complètement condescendant à mon maître qui se renfrogna un petit peu. Et là j’ai réalisé quelque chose. Valence n’était pas juste un petit teigneux, c’était un artiste. Ce que je veux dire, c’est qu’il s’était tellement imprégné de son sale caractère et de sa volonté d’être teigneux, qu’il était devenu un virtuose de la mauvaise humeur. Il ne se contentait pas d’insulter bêtement, il jouait avec ses réactions et ses réparties, les adaptant aux situations et aux interlocuteurs pour un meilleur effet.

– Tu es sûr que tu veux le ramener au paradis ? plaisanta mon maître, un peu exaspéré.

– Vous l’avez cherché hein, ai-je répondu, toujours un peu choqué par le caractère de Valence. Et puis ça leur fera les jambes au paradis, il leur faut bien un cas comme ça de temps en temps.

– Pas faux, ricana mon maître.

Puis suivit un long silence, juste troublé par le bruit de nos pas et les ronronnements de John que Valence caressait dans ses bras. Ce n’était pas un silence gêné, nous savourions l’ambiance, l’air, le paysage. En y repensant, c’était quelque chose que je n’avais jamais fait au paradis, j’étais fatigué, courbaturé, j’avais faim, mon épaule me faisait un mal de chien, mes jambes étaient en compotes et mon esprit était embrouillé, mais je pense que ça avait un lien avec le fait que je me sentais aussi bien.

– Je pourrais m’habituer à ça, fit Valence qui avait dû se faire la même réflexion que moi.

– Pareil, me suis-je empressé de dire, content de l’opportunité de « discuter » avec notre petite teigne.

– Sauf à vous deux hein, précisa-t-il.

En l’ignorant, je me suis tourné vers mon maître.

– J’imagine qu’en tant qu’Archange des beaux paysages comme ça vous devez en avoir tout le temps ? ai-je demandé, des étoiles dans les yeux.

– Tu n’imagines même pas, répondit-il en souriant.

Valence, toujours devant, se retourna et lui lança un drôle de regard, puis John s’écrasa au sol alors qu’il essayait de frotter sa tête contre la joue du poète.

– Ho t’es pas possible toi, le sermonna-t-il en se retournant

L’artiste rentra ses épaules et baissa la tête, puis il déposa John sur son cou. Sa drôle de position permettait au chat de se coucher sans risquer de tomber. Ça ne devait pas être très confortable de marcher comme ça, mais ça me rassurait, peut être que le côté teigneux de Valence n’était qu’une carapace.

– Et le petit, tu fais quoi en fait au paradis ? me demanda-t-il

Une carapace sous laquelle se cachait un petit enfant tout faible et tout fragile. J’ai malgré tout essayé de jouer sur son terrain, et j’ai lancé sur un ton que je voulais condescendant :

– Pourquoi ? T’en as quelque chose à cirer ?

– Mais c’est qu’il est de mauvaise humeur ? T’as mal dormi ? Tu t’es levé du mauvais pied peut-être ? demanda-t-il avec un air faussement désolé.

Une carapace…

– Avant de partir en mission, je triais les dossiers de transfert de données multimédias, ai-je répondu en m’avouant vaincu.

– Ça a l’air chiant à mourir ton truc, fit-il.

– Ho t’inquiètes pas, ça l’est, mais ça a ses bons côtés. Normalement pour avoir une connexion internet dans ta cellule tu dois faire une demande par dossier, et c’est genre super galère de pouvoir remplir toutes les cases. Alors ce que j’ai fait, c’est que j’ai envoyé mon dossier pas complet du tout en plusieurs centaines d’exemplaires à mon département. Et quand j’ai reçu un des dossiers que j’avais envoyé, je l’ai malencontreusement mis dans la pile des complets, puis dans la pile des privilégiés. Et du coup j’ai eu une connexion de grand malade, ai-je expliqué, tout fier de mon stratagème.

– Pourquoi c’est compliqué de remplir toutes les cases ? continua à demander Valence.

J’étais trop content, la carapace faisait la conversation, et en plus je pouvais un peu me vanter, probablement que son chat le mettait de bonne humeur.

– Bha il faut être déjà parti en mission plusieurs fois, avoir un bon poste, genre être dans un bâtiment au-dessus de 100, avoir plusieurs années d’ancienneté, et tout ce genre de truc, ai-je dit en essayant bien d’appuyer sur le fait que c’était vraiment super compliqué.

– Et pourquoi tu mens pas sur ton dossier ? fit Valence.

– Ho et bien… ai-je commencé.

Quelque chose coinça en moi. Comme si mon esprit faisait un mouvement qu’il n’avait jamais su qu’il pouvait faire. Un frisson couru dans mon dos. Pourquoi je n’avais pas menti dans mon dossier ? C’était comme si Valence avait attrapé une main que je n’avais su que j’avais et que je n’avais jamais utilisée. Pourquoi je n’avais pas menti dans mon dossier ?

– C’était moins risqué, ai-je menti.

– Je sais pas ce que c’est internet, mais ça devait en valoir la peine, répondit-il

Ha oui c’est vrai. J’avais complètement oublié, 19e siècle, tout ça tout ça. J’ai répondu, un peu dans la lune :

– Clairement.

Il faudrait que je parle à mon maître.

La conversation s’arrêta là. Et nous avons continué à marcher dans le silence. La luminosité diminuait doucement. Au bout d’une heure ou deux, j’ai recommencé à avoir faim. Et apparemment mon maître aussi parce qu’il a sorti trois barres énergétiques du sac à dos. J’ai poussé un long soupir désespéré.

– Ange, veux-tu accroitre ma peine dans l’enfer de Dante ? Va te faire foutre, toi et tes barres énergisantes ! clama Valence d’un ton mélodramatique.

– Ho oui c’est vraiment pas bon ! ai-je ajouté.

Mon maître eut l’air surpris, mais ne se laissa pas démonter :

– Ha bon tu trouves ? Moi j’aime plutôt bien, c’est à la vanille.

J’étais sûr que non, mais bon. Il haussa les épaules puis se tourna vers moi.

– Tu me passes ton bâton deux secondes ? demanda-t-il.

Je l’utilisais comme bâton de marche depuis le début du trajet. Je lui ai tendu, un peu flippé de ce qu’il allait en faire. Il le prit à deux mains, et en le tenant au niveau de sa taille, visa un arbre à une cinquantaine de mètres de là.

– Euh maître tu… euh vous faites quoi ? ai-je demandé alors que mon inquiétude augmentait proportionnellement avec la sphère rouge qui se formait au bout du bâton.

– Je croise les doigts pour avoir un poulet, répondit-il en faisant feu sur l’arbre.

Ok, j’avais compris ce qu’il voulait faire. Et même si mon maître avait l’air très balèze, j’ai quand même prié très fort pour avoir un poulet. Le projectile à percuté l’arbre qui se transforma instantanément. J’étais content, ça validait ma petite théorie comme quoi la transformation était plus violente lorsqu’on essayait de transformer des choses plus volumineuses ou puissantes. J’étais beaucoup moins content en voyant ce qui avait remplacé l’arbre. Deux mètres de haut, trois yeux noirs, blanc, couvert de poils. Un putain de troll des glaces. À ce moment-là j’ai eu très fort envie de retrouver le forgeron du bâton, le lui faire signer, puis le lui enfoncer dans le…

– Est-ce que ce truc est dangereux ? me demanda mon maître en pointant le troll qui poussait un rugissement absolument glaçant.

J’ai été surpris de cette question. Sans vraiment réfléchir je me suis exclamé, un peu flippé :

– Ouai c’est blindé dangereux, genre vraiment.

À ce moment-là j’avais compris la question comme « est-ce que ce truc est dangereux ? » pas comme « est-ce que ce truc est dangereux pour moi ? » alors que j’aurais peut-être dû. Quoi qu’il en soit, mon maître me fit un hochement de tête sérieux et dit :

– D’accord, alors mieux vaut ne pas prendre de risques.

J’aurais clairement dû. Mon maître passa sa main dans ses longs cheveux platine, se mit de profile par rapport au troll, puis, doucement, il tendit le bras et ajusta sa main pour qu’elle se retrouve à la hauteur de la tête du monstre. Ses yeux devinrent complètement blancs, puis dans un bruit de ressort assourdissant, il se démultiplia. Comme un objet qu’on met entre deux miroirs parallèles. Pendant une seconde, mon maître fut simultanément présent partout sur la ligne qui le séparait du troll. Puis tout revint à la normale, le bruit avait disparu, mon maître n’était plus qu’à un seul endroit, à côté de moi, la tête du troll empalée sur son bras.

– T’es sérieux ? fit-il d’un ton clairement énervé.

D’un air dégouté il fit glisser la tête par terre, puis me pointa le sac qu’il avait déposé avant de faire son attaque.

– Tu vas me sortir une nouvelle chemise, une bouteille d’eau, un essuie et du savon. Et t’as de la chance que je n’ai pas taché mon écharpe ! me réprimanda-t-il, vraiment en colère.

Je ne pensais pas mon maître aussi coquet, mais j’avais beaucoup trop peur pour plaisanter. Je me suis mordu la lèvre pour ignorer la douleur de mon épaule et j’ai plongé à deux mains dans le gigantesque sac à dos.

– Alors comme ça les anges n’aiment pas se salir les mains ? fit Valence d’un ton hautain.

– HO TOI TA GUEULE ! rugit mon maître qui essayait de déboutonner sa chemise avec une seule main.

Il déglutit en baissant les yeux. J’ai sorti une chemise bleu ciel du sac.

– Elle se mange ta merde ? me cria mon maître.

– Hein quoi ? euh… ho le troll ! bha je sais pas, la graisse donne une résistance au poison pendant une minute, ai-je répondu un peu paniqué.

J’ai lancé la bouteille d’eau et le savon à mon maître, il les attrapa au vol.

– Bordel de merde, chuchota-t-il.

Il arracha sa chemise.

– Ramenez-moi le corps, ordonna-t-il.

Nous avons filé sans demander notre reste.

– Jamais tu te tais toi ? ai-je chuchoté à Valence.

– Ho c’est toi qui as merdé, répondit-il avec un sourire gêné.

– Mais attends comment tu voulais que je sache qu’il était aussi balèze ? me suis-je défendu.

– T’es complètement con en fait, lança-t-il.

– C’est toi qui es con, ai-je fait.

– Quelle répartie ! ricana-t-il.

– Ouai non, mais t’es chiant aussi ! ai-je dit, complètement exaspéré.

Il ne prit pas la peine de répondre, alors j’ai continué :

– Et pourquoi t’as dit ça au maître ? Sérieux c’est pas cool.

– Ho attends c’était super drôle, se défendit-il

– T’as vraiment trouvé ça drôle ? ai-je demandé

– Ouai bof pas tant que ça, fit-il en haussant les épaules. Ils font pas aussi peur les gens que j’insulte d’habitude.

– Ouai, j’imagine que dans ta petite société du 19e tu ne risques pas trop de croiser beaucoup de gens qui cassent de l’enfant à main nue, ai-je répondu un peu hargneux.

Valence tourna un regard noir sur moi, ouvrit la bouche, la referma, la rouvrit et dit d’une petite voix :

– Ouai, t’as surement raison.

J’ai tout de suite voulu m’excuser, ses petits yeux bleus baissés m’ont brisé le cœur. Pendant une seconde j’avais oublié qu’il y était mort, dans son petit 19e siècle. Et pour le coup je ne savais pas ce qu’il y avait laissé. Mais nous sommes arrivés au corps décapité du troll et Valence prit la parole :

– On prend chacun un bras ?

Je suis allé me positionner pour pouvoir poser le membre gigantesque sur mon épaule valide. Le petit artiste en fit de même.

– Un, ai-je commencé

– Deux, répondit Valence

– Trois ! avons-nous dit à l’unisson.

C’était lourd et très galère, mais le corps avançait, doucement, mais il avançait. En un bon quart d’heure, nous étions de retour près de mon maître qui avait enfilé une chemise mauve clair. J’ai lancé pour essayer de détendre l’atmosphère :

– C’est un chouette mauve, votre chemise !

– C’est lilas, répondit-il, toujours en colère.

J’ai pris une grande inspiration, je m’apprêtais à sortir ma meilleure arme contre la mauvaise humeur :

– Écoutez maître, je suis désolé de vous avoir induit en erreur, mais j’ai paniqué, et je ne m’attendais pas à ce que vous prendriez mon avis autant au sérieux.

Des excuses ! Mon maître baissa les épaules et craqua un sourire. YES!

– Ouai, je suis désolé de m’être emporté aussi, j’ai été surpris, fit-il.

J’ai lancé un regard insistant à Valence, ho si seulement il pouvait s’excuser aussi ce serait beaucoup trop bien.

– De toute façon cette chemise-là est mieux, lâcha-t-il en tournant le regard d’un air gêné.

Bon je pense que c’était le maximum de notre petit artiste teigneux, il faudrait faire avec, mais c’était déjà pas mal ! Mon maître se leva en frappant violemment dans ses mains, il était quand même vachement impressionnant.

– Aaron, dans la petite poche en haut du sac il y a des allumettes et un bottin téléphonique, tu me les sors, on va faire cuire ton monstre super dangereux, lança-t-il.

Il a fallu quelques secondes à mon cerveau pour traiter l’info. Ok.

– Et la teigne, tu vas aller nous trouver du bois, normalement y a plein de brindilles, et avec un peu de chance un arbre mort qui traine, demanda-t-il avec un grand sourire.

Celui-ci a filé sans demander son reste. Quand il est revenu, il a éclaté de rire en voyant mon maître couché sur le sol, souffler en jurant sur un petit tas d’herbe.

– Avec vos super-pouvoirs, vous savez pas faire une boule de feu ? demanda Valence.

Mon maître reprit sa respiration, soupira, puis dit :

– Évidemment que je sais faire une boule de feu, mais il n’y a pas la même satisfaction que de réussir à allumer soi même son feu. Tiens, ajoute-moi du petit bois.

Valence déposa très précautionneusement le petit bois en petite pyramide au-dessus de l’herbe fumante. Mon maître souffla encore quelquefois, puis le feu prit.

– Enfin ! s’exclama-t-il en mettant du plus gros bois.

Valence fit quelque applaudissement et pour ma part je fixai mon maître d’un air accusateur, je l’avais clairement vu cracher du feu. L’intéressé me fit un clin d’œil en remarquant que j’avais vu son tour de passe-passe.

– Tu me passes une de tes dagues ? me demanda-t-il

J’ai détaché une de mes trois dagues de ma ceinture pour la tendre à mon maître. Il alla couper des morceaux du troll.

– Et moi j’ai pas d’armes ! s’exclama Valence. Je veux bien une arme aussi !

– Hors de question que tu ais une arme, ai-je répondu.

– Aaron, passe-lui une de tes dagues ! Je préfère qu’on puisse tous se défendre ! cria mon maître toujours en train de découper le troll.

– Ha ! Valence fier de lui.

J’ai détaché ma deuxième dague de ma ceinture.

– Réflex ! ai-je fait en faisant semblant de lui lancer l’arme.

– WHO CALME GRAND MALADE ! hurla-t-il en se jetant sur le côté.

Mon maître ricanait en se cachant le visage et moi je me roulais par terre. Valence me lança un coup de pied dans le tibia qui me fit super mal, mais qui ne m’arrêta pas de rire. Il se leva et me tira la langue.

– Valence laisse Aaron tranquille et prends-moi une poêle dans la grande poche de droite du sac. Demanda mon maître.

Je commençais à comprendre pourquoi c’était aussi lourd à porter. Mais bon c’est vrai qu’une poêle c’était quand même utile.

– Et dans la grande poche de derrière il y a une grille avec quatre petits piquets en métal pour la mettre dessus ! ajouta mon maître.

Ça, c’était peut-être un peu moins utile.

– Maître, dans le sac il y a une poêle, une grille et des piquets, mais le seul truc à manger c’est vos barres énergisantes, comment ça se fait ? ai-je demandé un peu dubitatif.

– C’est un sac que je laisse dans mon casier céleste pour les missions. Il reste là tout le temps donc je peux pas y mettre de trucs périssables.

– C’est quand la dernière fois que vous êtes partis en mission ? demanda Valence.

– Ho bha vingt-cinq, trente ans pourquoi ?

Valence et moi avons réprimé un haut-le-cœur. Moi qui m’inquiétais de la comestibilité du troll.

– Holala des vraies princesses ! rigola mon maître en jetant trois gros bouts de viande dans la poêle.

Pour le coup c’était très étrange, même si c’était la première fois que je mangeais de la viande, j’étais sûr que de toute façon la viande était pas censée gouter comme ça. Mais après Valence mangeait sans commentaire donc j’ai fait de même. Une fois nos assiettes (oui elles étaient dans le sac aussi) nettoyées (avec les éponges et le produit vaisselle qu’on transportait) mon maître est parti se chercher une grosse pierre sur laquelle s’adosser. J’ai déplié les matelas puis je suis allé m’assoir à côté de Valence, couché dans la brousse en regardant des étoiles.

– Ça va me filer des vers un ciel comme ça, lança-t-il en souriant.

J’ai supposé que c’était une manière de dire qu’il trouvait le ciel très joli, je me suis couché à mon tour. Des milliers d’étoiles d’un blanc glacé parcouraient une voute céleste bordeaux, effectivement c’était très joli. Pourquoi il n’y avait pas d’étoiles au paradis ? Ou peut-être que je n’avais juste jamais pensé à aller regarder.

– Bha c’est bien, comme ça on pourra arrêter de porter les matelas, lança mon maître en nous voyant tous les deux couchés sur l’herbe.

– Venez vous coucher maître, c’est super beau, je suis sur qu’on en a pas un comme ça au paradis, ai-je répondu.

– Sur terre il est pas mal non plus, fit Valence, mélancolique.

Mon maître se coucha à côté de moi

– Y a pas à dire, même si c’est le pire des connards, Satan est un sacré artiste, lâcha-t-il, devant les étoiles.

– C’est le plus grands de tous, souffla Valence en réponse à mon maître.

Nous nous sommes tus. C’est vrai qu’ici les étoiles n’étaient pas des vrais.

– Vous pensez que c’est quoi la colonne de fumée ? demanda Valence de sa petite voix cristalline.

– Des damnés qui brûlent, répondit mon maître sans sourciller.

– Au moins on devra pas refaire apparaitre un troll, ricana le poète.

– Ho non ça Valence c’est horrible, me suis-je indigné.

– À ton avis le petit, c’est quoi la colonne ? fit-il en pouffant.

– Bha je sais pas, peut-être un four, quelque chose du genre, ai-je essayé, pas très sur de moi.

Un long silence passa.

– Et toi Valence, tu penses que c’est quoi ? demandais-je

– Un phare, souffla-t-il

– Ah bon ? fit mon maître.

J’étais un peu surpris aussi.

– Si sur terre les phares sont faits avec du feu, ça me semble logique que le phare des enfers soit de fumée, non ? expliqua-t-il.

– Pas bête.

Nous avons continué à discuter, calmes et contemplatifs, sans vraiment nous écouter les uns les autres, puis nous nous sommes endormis.

 

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Gabhany
Posté le 10/01/2020
Parce qu’ils vont pas à la messe, fit-il en haussant les épaules. => XD j'ai bien kiffé ce chapitre, les blagues d'Elios, le début de dégel de Valence, le coup du troll, les bisbilles entre Aaron et Valence je trouve ça trop mignon. On dirait deux frères qui se chipouillent.
Le "HO TOI TA GUEULE" d'Elios m'a fait exploser de rire. Aaron a une mauvaise influence sur lui je crois XD
La fin était émouvante, j'aime bien aussi quand tu écris des scènes comme ça, c'est touchant sans être mièvre.
A bientôt pour la suite !
El
Posté le 27/11/2019
Une poêle, c'est toujours utile. Ils ont jamais vu Raiponce ou bien ? Bref. J'ai beaucoup aimé. Le Wabbajack, le troll, les dégâts de poison, tu as gagné mon coeur x)
Et toute cette fin sur les étoiles m'a beaucoup plu, voire ému. J'ai un lien particulier dans mon coeur avec l'imaginaire des étoiles, alors quand on en parle comme ça, forcément ça me plaît.

Bravo !
cirano
Posté le 27/11/2019
Hooo merci tes deux commentaires me font trop plaisir, c'est trop chouette que ça continue à être drôle ^_^ je suis trop content que la dernière scène t'ai plu, j'adore vraiment la situation avec plusieurs personnes couchés sur le dos, à discuter en regardant les étoiles, c'est pas la dernière fois que ça arriveras dans l'histoire :D !!!

Encore un immense merci ça me fait trop plaisir !!!
El
Posté le 27/11/2019
De rien de rien, c'est normal ! Maintenant, je file essayer d'écrire un début de chapitre 5, il y a 2 semaines que je n'ai rien écrit >.<
cirano
Posté le 27/11/2019
Ho merci de me le rappeler ! je vais aller lire un de tes chapitres ^_^
Renarde
Posté le 23/11/2019
Coucou Cirano,

Bon forcément, j'ai adoré tout ce passage là :
"Ce chat passait son temps à se casser la gueule, c’était un miracle qu’il ne soit pas encore mort. Après pour le coup on était en enfer, ce qu’il voulait dire qu’en fait il était déjà mort. J’avais pas complètement tort quand j’ai dit que c’était un nom qui portait la poisse."

Mais le "Parce qu’ils vont pas à la messe" m'a achevée XD.

En fait, je pense que c'est presque un des chapitres où j'ai le plus ri (et toi qui t'inquiètes de ne plus être drôle...). J'adore les échanges d'Aaron, où il rebondit sans-cesse entre deux lignes, genre :

"Je sentais que notre artiste teigneux était de plus en plus à l’aise avec mon maître et moi, une seule réplique mal placée et ça risquait de bousiller le faible début de confiance qu’il pouvait avoir.

– Il est con ton chat ! cria mon maître.

Pourquoi est-ce que je me donnais de la peine déjà ?"

On connaît plus le trio, et du coup, on savoure d'autant plus leurs répliques.

Bref, un excellent moment passé à te lire, comme d'habitude !
cirano
Posté le 24/11/2019
Hooo tu n'imagines pas comme ça me fait plaisir et comme ça me rassure que j'ai réussi à autant te faire rire :D
Et merci pour ton commentaire, c'est toujours aussi chouette les petits extraits que tu met en évidence, en plus ça me permet de savoir quels sont les jeux qui marchent le mieux :D

C'est cool que les échanges d'Aaron te fassent rire, c'est un des trucs qui me fait le plus rire aussi xD

Et pour ce pauvre John, je t'assure que tu n'as pas fini d'en entendre parler ^_^
Joke
Posté le 22/11/2019
Ohhh cette fin ! Elle est trop belle !
C’est magnifique, cette idée du phare…
Il y a trois autres passages que j’ai trouvés vraiment beaux et touchants aussi :
- Ce que je veux dire, c’est qu’il s’était tellement imprégné de son sale caractère et de sa volonté d’être teigneux, qu’il était devenu un virtuose de la mauvaise humeur. Il ne se contentait pas d’insulter bêtement, il jouait avec ses réactions et ses réparties, les adaptant aux situations et aux interlocuteurs pour un meilleur effet.
- En y repensant, c’était quelque chose que je n’avais jamais fait au paradis, j’étais fatigué, courbaturé, j’avais faim, mon épaule me faisait un mal de chien, mes jambes étaient en compotes et mon esprit était embrouillé, mais je pense que ça avait un lien avec le fait que je me sentais aussi bien.
- Y a pas à dire, même si c’est le pire des connards, Satan est un sacré artiste, lâcha-t-il, devant les étoiles.

Et sinon je me suis encore bien marrée !
« Ce chat passait son temps à se casser la gueule » XD
« – Ha bon tu trouves ? Moi j’aime plutôt bien, c’est à la vanille.
J’étais sûr que non, mais bon »
« C’est un chouette mauve, votre chemise !
– C’est lilas »
« Mais bon c’est vrai qu’une poêle c’était quand même utile. »
« C’est un sac que je laisse dans mon casier céleste pour les missions. Il reste là tout le temps donc je peux pas y mettre de trucs périssables. »
J’ai tellement ri, merci 😊
cirano
Posté le 23/11/2019
Hooo c'est moi qui te remercie, ton commentaire me fait trop plaisir ^_^
c'est trop chouette que tu ai bien aimé la fin du chapitre, et je suis content aussi pour l'idée du phare, je trouve ça important que Valence ait un vrai côté poète, mais c'est plus compliqué à faire que le côté teigneux xD

ça me touche beaucoup les petits passages que tu as trouvés beau, et je suis super content de t'avoir fait rire ! Tes commentaires me font vraiment trop plaisir et j'espère que la suite continueras à te plaire ^_^
Hinata
Posté le 22/11/2019
Aw c'était tellement chill comme chapitre ^^
J'aime trop comment Valence se fait sa petite place dans le groupe ! C'est très cool aussi qu'Elios se mette à l'humour ! XD
Le passage du troll est juste parfait, c'est la dose d'absurde qu'il fallait ^^
Et cette fin sous les "étoiles", qui nous rappelle quand même où ils sont, c'est très très chouette, ça donne envie de s'endormir avec eux <3 (mais je peux pas ! il me reste un chapitre à finir ce soir haha > <")

Quelques erreurs de conjugaisons, d'orthographes sur des petits mots, et surtout de ponctuation (les virgules manquent pas mal), mais rien de vraiment dérangeant pour la lecture. Si un jour tu veux paufiner et que tu as besoin de corrections de coquilles, hésite pas à me demander ! (pas tout de suite parce que j'ai pas du tout le tps XD)

Et enfin, mes petites fav :
je me suis penché vers mon maître (mon maître faisait deux mètres cinquante, c’est une façon de parler)

"– C’est lilas" Haha je l'ai tellement entendu dire son truc dans ma tête XD Je suis morte !

"Mais bon c’est vrai qu’une poêle c’était quand même utile.
– Et dans la grande poche de derrière il y a une grille avec quatre petits piquets en métal pour la mettre dessus ! ajouta mon maître.
Ça, c’était peut-être un peu moins utile." J'adore quand les commentaires d'Aaron se font écho les uns aux autres XD (mais toujours avec légèreté haha, il est tellement génial)

Continue, continue ! ^^
cirano
Posté le 22/11/2019
Whaaa quel réactivité xD ça me fait trop plaisir :D !!
Oui j'ai essayé de faire un chapitre plus tranquille et aussi de souder un peu plus le groupe, je suis content qu'on remarque que Valence ce fait une place.

Vraiment désolé pour les coquilles, je suis malade et fatigué j'ai un peu corrigé ça n'importe comment ^_^' et c'est super gentil de proposer une relecture, ça me fait trop plaisir (je retiens ^_^' )
Et c'est trop chouette que la fin sous les étoiles te plaise j'avais peur qu'elle soit un peu trop courte ^_^

Et merci pour touts les petits passages que tu as épinglé, ça me fait trop plaisir, un immense merci !!!
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