La pénombre caressait les feuilles chantantes qui se teintaient d’un bleu-argenté aux nuances sombres. La brise se faufilait entre les branches et dansait avec la canopée qui se balançait au rythme d’un cœur battant. Dans un coin, un ruisseau bondissait, mélodieux, sporadiquement éclairé par de timides lucioles. Il jouxtait une clairière d’herbes nonchalantes qui ondulaient leur indigo tendre. Elles semblaient former une spirale qui convergeait vers une jeune fille recroquevillée au sol.
Asha sanglotait, tordue par une douleur cuisante. Elle voyait la lame, elle voyait le sang. Elle sentait l’écoulement de sa vie, elle entendait les cris de joie. Ces sourires, cette liesse. Cette haine.
Elle levait un œil brisé vers le ciel et eut un nouveau haut-le-cœur. Il était vide, noir. Un néant insondable et écrasant qui l’oppressait. Ni lune ni soleil, ni nuages ni étoiles. Jadis si éclatantes, elles avaient été décimées. Ne restait que cette obscurité dense et infinie.
Asha étouffa un cri. Entre les arbres, des ronces grandissaient. Elles rampaient vers la jeune fille en sifflant comme des serpents. Un peu plus loin, le ruisseau disparaissait dans une grotte sombre, qui faisait face à une pierre noire aux contours aiguisés.
Asha sentit soudain quelque chose lui chatouiller l’épaule. Sa tête lourde émergea de sa chevelure en bataille. Un chat se tenait devant elle. Son pelage avait la couleur de la nuit, pourtant il semblait lumineux. Ses iris opalines lui rappelèrent l’éclat des étoiles. Il portait sur elle un regard chaleureux.
— Qu’est-ce… qu’est-ce que tu veux ? bégaya-t-elle en reculant.
Le félin bondit souplement sur ses genoux et lui lécha la joue. Sa langue râpeuse était vivifiante.
— Mais qu’est-ce que… qu’es-tu ?!
Il se mit à ronronner.
— Je ne comprends pas… balbutia-t-elle… je ne devrais même plus être ici…
Elle se laissa choir sur le tapis d’herbe, les larmes scintillaient sur sa peau pâle. Sous ses cernes épais, ses taches de rousseur paraissaient noires. Ses lèvres fripées et bleuâtres s’ouvraient au rythme d’une respiration empressée qui soulevait son torse maigre, prisonnier d’une robe sale.
L’animal s’avança, son pelage la réchauffa. Il s’approcha cette fois tout doucement et finit par poser sa truffe sur le nez d’Asha. Alors, sa fourrure s’embrasa dans un tourbillon d’étincelles. La jeune fille put voir du coin de l’œil huit autres chats se profiler hors du couvert des arbres. L’un d’eux alla se rouler en boule au pied d’un vieux chêne.
Elle fixait le félin qui semblait se désagréger. Les braises volantes touchaient sa peau, lui transmettant une énergie qui l’envahissait peu à peu. Ses forces affluèrent, faisant vibrer son corps. Elle se gorgea de cette vie en pleurant. Lorsqu’elle se redressa, le chat avait disparu, et les dernières poussières lumineuses s’éteignaient. Asha retrouva un visage calme. Elle ferma les yeux.
*
En se réveillant, la première chose qu’elle sentit fut des cailloux qui lui faisaient mal au dos. Elle voulut écarter les bras mais les trouva bloqués par une toile. Elle ouvrit les paupières et gigota, un tissu jaunâtre filtrait la lumière du soleil et l’enveloppait. Elle commença à paniquer, où était-elle ? Que se passait-il ? Elle lutta contre l’angoisse et se mit à tirer de toutes ses forces sur la toile. Avec un cri elle réussit à s’en défaire et se redressa d’un coup. Elle regarda un instant ses mains, elle avait tous ses doigts. La moitié étaient rosés et impeccablement propres, aux ongles étrangement courts, même chose pour ses orteils. Elle toucha sa gorge, mais impossible de sentir la plaie derrière le sang séché qui la maculait. Un bruit lui fit tourner la tête. À quelques mètres d’elle, un homme à la peau sombre tenait un sabre et la fixait.
Ce visage. Ce regard.
Asha eut un sursaut, les larmes inondèrent ses yeux. C’était lui. C’était lui qui l’avait tuée, qui avait déchiré sa gorge, qui l’avait brisée. Son cœur s’emballa, elle bondit sur ses jambes et s’enfuit dans la direction opposée. Elle entendit l’homme pousser quelques cris. Elle ne se retourna pas et fonça.
Elle pénétra dans la forêt, les branches commencèrent à la griffer. Un monde flou aux mille nuances de vert l’envahit, mais elle continua de courir. Ses pieds avalaient le sol, le frappant avec violence. Le sang pulsait en ondes qui se répercutaient dans tout son corps, sa respiration était assourdissante. Elle entendit derrière elle le galop d’un cheval. Elle tenta d’accélérer. Elle fouilla le paysage sans contours, affolée. Une butte couverte de végétation attira son regard et elle s’y précipita. Les pas lourds du cheval se turent au profit de ceux d’un homme. Elle avait gagné du terrain, elle courait plus vite. Elle jeta un coup d’œil en arrière, son poursuivant était loin. L’espoir monta en elle.
Mais elle trébucha sur une racine. Ses mains amortirent le choc et elle s’empressa de se relever. Elle sentit quelqu’un agripper ses cheveux. Elle jeta un bref cri et lança son coude derrière elle où il percuta l’arête d’un nez. La poigne disparut et elle bondit en avant.
Ses pieds étaient déchirés, ses bras et son visages couverts d’estafilades. Ses poumons hurlaient et elle avait le tournis. Mais elle ne s’arrêta pas. Il était là, tout près. Elle entendait ses pas, sa respiration. Il était comme une bête sauvage. Elle était comme une proie.
Asha avala une goulée d’air, encore. Elle ne sentait plus son corps. La seule certitude à laquelle elle s’accrochait était la présence de son bourreau qui s’éloignait. Elle souffla, éructa, elle commençait à ralentir malgré elle. Mais c’était aussi le cas de son poursuivant qui s’était presque arrêté. Sa vision était brouillée, un liquide acide remontait de son ventre. Elle ne vit pas le fossé.
Son pied meurtri dérapa et elle tomba en avant. Elle roula, une douleur aiguë lui transperça la cheville. Elle tenta de se relever mais sa jambe se déroba.
Elle recula précipitamment en voyant l’homme en noir arriver. Il la foudroya du regard, peinant à reprendre sa respiration. Elle se releva tant bien que mal et voulut s’enfuir en clopinant, mais il la rattrapa et l’abattit au sol. Les yeux fous, il leva son sabre. Elle hurla.
Il s’apprêtait à l’abaisser quand il reçut un coup à l’arrière de la tête. Il s’immobilisa, le visage surpris, avant de s’effondrer. Elle se mit à gigoter sous son corps, sans voir clairement la silhouette qui se dressait au-dessus d’elle. Elle se sentit extirpée du poids de son poursuivant et leva les yeux vers son sauveur. Elle n’eut pas le temps de voir son visage, elle s’évanouit.
*
Lorsqu’elle affleura la conscience, elle crut qu’elle était de retour chez elle. La texture des draps, la douceur du matelas de paille, l’odeur de bleuets grillés, tout lui rappelait son village. Elle ouvrit les yeux sous un toit de bois. Le regard fiévreux, elle tenta de se redresser.
— Là, là, ne t’agite pas, fit une voix chaleureuse.
Une femme apparut dans son champ de vision. Elle était belle, entre ses boucles dorées et ses yeux bleu pâle. Ses lèvres rosées et son visage fin renvoyèrent l’image de Keira.
— Qui… êtes-vous ?
La femme lui sourit, d’un sourire doux et rassurant.
— Je m’appelle Clervie. Tu es dans ma demeure, tu ne crains rien.
Sa voix était chaude et feutrée, Asha avait l’impression qu’elle l’enveloppait d’un cocon. Clervie, c’était le nom de sa mère, sa vraie mère. Celle qui était morte en donnant naissance à Keira. Peut-être était-ce pour ça que la jeune fille se sentait en confiance. Ce nom faisait apparaître dans son esprit le regard étrangement doux que son père avait quand il l’évoquait.
— Tu veux quelque chose à boire ? À manger ? s’enquit Clervie.
À ces mots, Asha sentit monter en elle la faim et la soif. Elle hocha vigoureusement la tête.
— Je vais aller te chercher ça. Que dis-tu d’une tisane et d’un bout de tarte aux bleuets ?
Un gargouillement lui répondit. La jeune femme eut un rire léger, comme un souffle frais.
— Je reviens tout de suite.
Elle disparut dans un froissement de tissu crème. Asha étira un peu le cou pour voir le décor. Elle se trouvait dans une petite chambre munie d’une cheminée. La bâtisse était en bois et l’intérieur était décoré de tapis brodés et de fleurs. Tout faisait penser à une maison sylvienne, pourtant Clervie avait parlé en helmët.
Un marmonnement fit soudain sursauter Asha. Elle se tordit en tous sens et put voir, dans un lit à l’opposé du sien, son bourreau qui se réveillait. Elle fut prise d’un élan paniqué et se redressa précipitamment. Le décor se mit à tournoyer.
— Ne te relève pas si vite, dit Clervie en entrant chargée d’un plateau.
La blessée tremblait. Elle pointa du doigt le jeune homme qui remuait.
— Il…
Son hôtesse prit un air plus sombre.
— Oui, je sais ce qu’il a essayé de faire, je l’ai vu. Et je l’en ai empêché. Mais je n’allais pas le laisser comme ça, inconscient au milieu de la forêt. Je suis désolée de t’imposer sa présence.
L’exécuteur se redressa un peu, tenant sa tête avec une main comme si elle risquait de tomber.
— Bonjour, je m’appelle Clervie…
— Toi !
Il fixait Asha, et la rage explosa dans ses iris noires.
— Comment peux-tu être encore en vie ? COMMENT ? Je t’ai tuée de mes mains, je le sais ! Tu…
— Silence, siffla Clervie d’une voix froide. Si tu continues de crier, je t’enverrai faire un autre petit somme.
Il la dévisagea comme s’il ne l’avait pas vue, muet de surprise.
— Qui…
— Je m’appelle Clervie. Et tu vas vite te calmer, crois-moi.
Sur ces mots, elle déposa le plateau qu’elle apportait. Malgré sa faim, Asha n’y toucha pas. Elle était trop occupée à surveiller son bourreau. Celui-ci foudroya leur hôtesse du regard et voulut lever une main. Mais son bras fut stoppé. Il dévisagea, stupéfait, la corde épaisse qui le maintenait à sa couche.
— Une précaution qui n’est visiblement pas de trop, commenta Clervie.
Elle se tourna vers la jeune fille.
— Comment tu t’appelles, au fait ?
— A… Asha.
— C’est ravissant comme prénom. Tu viens de quelle tribu ?
— Les Laevis.
— Tu as quel âge ?
— Heu… dix-sept ans.
— Haha, je vais m’arrêter là avec mes questions, je vois bien que je te gêne.
Elle se détourna.
— Attendez ! Et vous, de quelle tribu venez-vous ?
Son interlocutrice lui servit un grand sourire.
— Moi ? Je ne viens d’aucune tribu. Je ne suis pas une Sylvienne.
— Mais la maison…
— C’est un ami à moi qui l’a construite. Je ne fais partie d’aucun peuple, je suis une ermite.
— Ah…
— Arrêtez de bavasser, et détachez-moi immédiatement ! cria une voix derrière elles.
Clervie fit volte-face.
— Certainement pas mon coco, tu vas rester ici encore un peu. Tu ne seras pas détaché tant que tu ne te seras pas calmé.
Elle se tourna vers Asha.
— Mange, ma chérie, tu en as besoin.
La jeune fille croqua timidement dans la tarte. Son goût acide et sucré la submergea de plaisir. De sa main libre, elle tâta sa gorge lavée. Elle y sentit la trace fine d’une cicatrice.
Elle n’en revenait pas d’être en vie. De pouvoir voir, sentir, parler. De pouvoir goûter à cette friandise délicieuse.
Des larmes chaudes coulèrent sur ses joues.
*
Kurtis se réveilla au son de trois respirations. Il en manquait une. Il se redressa, engourdi de sommeil. Le soleil filtrait timidement à travers le voile de la fenêtre. Ealys et Keira dormaient encore, frissonnantes. Le jeune garçon se glissa hors de la couche le plus silencieusement possible. Il s’habilla rapidement et sortit. Une brume matinale rampait entre les pieds et les pilotis. L’atmosphère était lourde. Il essuya une larme perlant au coin de son œil.
Kurtis alla au bord de la rivière pour se laver le visage. Il passa devant une petite hutte. C’était là qu’on avait enfermé le prisonnier humain, le fameux Conan. Ses pas le guidèrent jusqu’au pan de tissu qui barrait l’entrée. Après un temps de pause, il y pénétra.
L’air suait de tristesse et de regrets. Un jeune garçon était attaché au pieds du pilier qui maintenait la cabane. Son visage violacé était ravagé de larmes et ses yeux emplis de détresse.
— Heu… bonjour… fit Kurtis, hésitant.
Le captif releva la tête, le regard brumeux.
— Il… il parait tu étais un ami d’Asha…
L’autre ne répondit pas. Le jeune Sylvien s’assit timidement à côté du prisonnier.
— Je suis désolé qu’ils t’aient enfermé… ils sont très méfiants envers les humains…
Conan secoua la tête.
— Quoi ? s’enquit l’apprenti guérisseur.
— Breni as num vet.
Kurtis cligna des yeux. Qu’il était stupide ! Ils ne parlaient pas la même langue ! Seuls les Hekaours apprenaient l’helmët, et le captif ne comprenait sans doute pas un mot de sylvien. Il rougit et se passa la main dans les cheveux, il était trop distrait. Il jeta un coup d’œil au jeune humain qui fixait le sol. Il fourragea de nouveau dans sa tignasse blonde. Finalement, n’osant bouger, il resta aussi là sans mot dire. Le village s’éveillait tout autour, bruissant et discutant. La cérémonie d’adieu qui s’était déroulée la veille interdisait à tous de rire, mais l’air prenait de la légèreté.
Kurtis sursauta quand le prisonnier se mit à renifler bruyamment. Il tentait d’empêcher les larmes de couler, en vain. Il essaya de se détourner pour cacher son visage. Le jeune Sylvien sentit ses yeux le piquer. Il leva une main timide et la posa sur l’épaule de Conan, qui tourna la tête vers lui. Chacun vit sa propre douleur dans les yeux de l’autre. Ils se rapprochèrent comme pour se soutenir mutuellement. Kurtis avait soudain l’impression de sentir la présence d’Asha. Cette sensation lui réchauffa le cœur autant qu’elle le remplit la mélancolie.
Mais soudain la lumière avala l’ombre rassurante. La silhouette d’un Hekaour nommé Bren se découpa dans la clarté agressive.
— Mais qu’est-ce que tu fais là toi ?! s’exclama-t-il.
— Je… je venais voir le prisonnier…
Bren serra les dents, le statut de Kurtis l’empêchait d’hausser le ton mais il avait du mal à se retenir.
— Il ne faut pas trainer avec les humains !
— Mais… mais ce n’est pas un ennemi…
— C’est mon prisonnier. Tu peux sortir, s’il te plaît ?
Kurtis serra les dents à son tour. Il eut envie de s’élever contre le Hekaour mais il n’en eut pas le courage. Il jeta un regard désolé à Conan et se leva à regret. Il sortit, la tête basse, il regrettait déjà d’avoir été si faible. En tant qu’apprenti Arsalaï, il aurait pu avoir le dernier mot. Il se traîna jusqu’à la rivière et y trempa ses pieds ballants.
— Ça ne va pas ? s’enquit Moïa.
Il tourna la tête, le sourire de la vieille femme émergeait de ses rides, chaleureux.
— Pardonne-moi, Ki, évidemment que ça ne doit pas aller, se reprit-elle.
— Non, ce… ce n’est pas à cause de ça que je suis triste, enfin là maintenant, je veux dire…
Moïa plia sa silhouette maigre sur la berge, le couvant d’un œil maternel.
— Qu’y-a-t-il ?
Kurtis se passa une main dans les cheveux.
— Je… je n’approuve pas la manière dont on traite le garçon humain… il est censé nous aider…
L’ombre se profila sur la peau parcheminée de son arrière-grand-mère.
— Moi non plus je n’approuve pas.
— Mais alors… pourquoi tu ne leur dis pas ? Tu es notre guide… ils t’écouteraient…
— Parce que les humains sont nos ennemis, je dois lutter contre mes sentiments. Voilà mille ans que nous prospérons, et c’est grâce à notre méfiance. Je ne peux pas trahir nos ancêtres qui ont sacrifié leur vie pour la nôtre.
— Nous prospérons ?! Nous passons nos vies à nous cacher, nous sommes obligés de restreindre notre population, nous emmenons nos gosses voir des sacrifices au nom d’une prétendue responsabilité, mais nous prospérons ?! Non, Ma, nous ne prospérons pas. Nous nous enfermons dans ce monde que nos ancêtres nous ont imposés.
Il s’immobilisa et rougit soudain.
— Pa… pardon… je n’aurais pas dû m’emporter…
Moïa avait un visage neutre.
— Tu comprendras quand tu seras plus vieux, souffla-t-elle avant de se lever difficilement et de partir.
Kurtis posa ses yeux sur l’écume affriolante de la rivière. Sa main broya l’herbe entre ses doigts.
*
Asha fixait le dos de Lohan tourné vers le mur en massant sa cheville enflée.
— Tu vas en avoir pour trois semaines, je dirais, indiqua Clervie en lui faisant une attelle. Il faut que tu fasses attention.
Elle glissa d’une main habile un bâton dans le tissu afin de maintenir l’articulation.
— Vous avez l’air à l’aise, vous étiez Arsalaï ? s’enquit Asha.
— Non, je t’ai déjà dit que je ne suis pas une Sylvienne. Ça fait des années que je vis seule, j’ai appris à me débrouiller.
Le visage de la jeune femme était paisible, ses yeux doux. Pourtant son ton était abrupt.
— Je dois te laisser, je vais préparer le repas. Sers-toi de la canne pour marcher, si tu veux te lever.
Clervie sortit de la pièce, la démarche légère. Asha reporta son regard sur son assassin qui faisait mine de dormir. Il lui faisait peur, pourtant il l’attirait irrésistiblement. La jeune Sylvienne regarda pour la énième fois ses doigts. À part son pouce qui n’avait pas été coupé, tous étaient rosés et avaient les ongles propres. Elle se souvenait pourtant clairement qu’on lui en avait sectionnée au moins la moitié à chaque main. Elle tira en avant la robe que lui avait prêtée Clervie pour regarder son torse. Les boursouflures de ces blessures au fer rouge avaient également disparu. Alors pourquoi la cicatrice sur sa gorge demeurait-elle ?
Lohan bougea, et les iris de la blessée revinrent sur lui, semblant le disséquer. Il parut sentir son regard brûlant sur sa nuque car il frissonna et rabattit sa cape sur son corps. Asha sentait ses épaules ployer sous l’atmosphère pesante, elle décida de sortir de la pièce.
Elle attrapa la canne que lui avait apportée Clervie. Avancer avec était plus difficile qu’elle ne l’aurait cru. Elle appuya par mégarde sur sa cheville, et un éclair de douleur jaillit dans sa jambe. Cela lui rappela sa course effrénée et son poursuivant bestial qui grondait derrière elle. Elle sentit la nausée monter et se précipita hors de la chambre.
La pièce centrale de la maison était décorée de fleurs et de sculptures de bois élégantes. Clervie s’attelait devant une cheminé ronronnante, elle se retourna en entendant le martèlement de la canne.
— Attention, voyons, dit-elle. Ne marche pas si vite.
— Oui, pardon.
Asha se laissa glisser sur un épais coussin rempli de paille. Elle huma l’air sucré avec délice.
— Qu’êtes-vous en train de préparer ?
— Une crème au miel, pour mettre sur du pain fourré.
— J’adore ce plat.
— Tu m’en vois ravie.
La jeune fille détailla chaque recoin de la pièce du regard, bercée par les effluves doux. Elle voyait le vert de la forêt par la fenêtre et ne put résister longtemps à l’envie d’en faire son ciel. Elle sortit en chancelant et émergea dans l’air bruissant. Le soleil rehaussait d’or l’émeraude profond de la canopée, au-dessus d’une débauche de couleurs chatoyantes qui dansaient sous la caresse de la brise. Comme elle aimait ces odeurs, ces couleurs magnifiques, le chant des feuilles et des oiseaux, l’humus tendre sous ses pieds nus. Des larmes discrètes roulèrent sur ses joues pâles.
— Ça ne va pas ? demanda Clervie qui s’était approchée en silence.
— Si… c’est juste que je n’en reviens pas d’être en vie…
— C’est vrai que tu es passée si proche que de la mort à cause de cet homme…
— Non, ce n’est pas ça…
Elle se tourna vers son hôtesse, l’immergeant dans ses prunelles bleues.
— Je suis morte, déjà. Et je ne souhaite cela à personne.
Les lèvres de Clervie frémirent sur son visage surpris. Elle fronça légèrement les sourcils, mais ne cherchait pas plus à comprendre. Au lieu de ça, elle prit Asha dans ses bras. La jeune fille se laissa envelopper dans cette étreinte maternelle.
— Tu es en sécurité maintenant, souffla Clervie. Tu le seras pour toujours ici.
La blessée recula légèrement.
— Merci, c’est très gentil. Mais je ne peux pas rester, je dois retourner chez moi.
La jeune femme laissa retomber ses bras le long de son corps, le visage soudain froid.
— Promets-moi de partir seulement quand tu seras guérie.
Asha se pinça les lèvres.
— C’est que… ils doivent être très inquiets pour moi.
— Tu ne peux pas entreprendre ce voyage dans ton état. Promets-moi.
Elle secoua la tête.
— Je ne veux pas faire de promesse que je ne pourrai sans doute pas tenir.
Clervie serra les dents et se détourna. Elle sembla vouloir ajouter quelque chose mais se résigna et retourna à l’intérieur de sa maison. Asha la regarda partir, attristée. Elle posa son regard sur l’horizon invisible. Ses proches avaient sans doute senti sa mort. Avaient-ils aussi perçu sa résurrection ? Rien n’était moins sûr.
Elle avait envie de les retrouver et de les étreindre, mais ils paraissaient si lointains.
Asha se roula en boule dans l’herbe tendre et se laissa bercer par la mélodie de la forêt.
Cette fois, c'est Lohan, il semblait ne pas se réjouir, voire regretter la mort d'Asha. Maintenant qu'elle est ressuscitée, je comprends qu'il veuille la rattraper quand elle s'enfuit, mais pourquoi lève-t-il son sabre? J'aurais plus vu (oui, je vois beaucoup trop de choses): "Il la plaqua au sol et commença à lui dire: "Mais comment as-tu..." quand il reçut un coup derrière la tête." De même, j'ai un peu de mal à comprendre la façon de penser de cet homme. Il défend les siens, les Porteurs de Marque, et n'hésite pas à tuer ceux qui leur font du mal, mais il ne semble pas partager la haine des Sylviens, j'ai l'impression qu'il a exécuté Asha plus par obligation (et amour, non pas amour, fascination) pour sa Princesse sans vraiment partager son fanatisme. A-t-il pitié de la jeunesse et de la beauté d'Asha bien qu'elle soit une "démone"? Sait-il des choses sur l'origine de la Marque que les autres ignorent et c'est pour ça qu'il est moins convaincu de la nécessité d'exterminer les Sylviens? (J'ai l'impression d'être un gamin chiant devant un film qui te demanderait toutes les 5 secondes: "dis, pourquoi le monsieur il fait ça?") C'est aussi pour ça que je ne comprends pas sa "rage" à son réveil.
J'aime beaucoup Clervie, je l'imagine comme une ronde matrone toujours prête à offrir des friandises aux enfants de passage!^^ Le même nom que la mère d'Asha? Encore une interrogation, n'y a-t-il pas des noms Sylviens et des noms humains pour souligner lé différence entre ces peuples?
Dernière remarque, enfin, les noms de Ki et Ma. Je présume que ce sont des diminutifs affectifs pour Kurtis et Moïa, mais, si c'est le cas, est-ce bien nécessaire d'apporter cette complexification? Sinon, à quoi correspondent ces noms?
Pour Lohan, j'avais imaginé qu'il panique parce qu'il ne comprend pas du tout ce qui est en train de se passer. Il serait donc revenu à une logique bas du front du style "elle devrait être morte donc je vais la retuer pour être sûr". Une fois assumé et réveillé, il aurait commencé à se poser plus de questions. Cela dit, la réaction que tu proposes ne me choque pas non plus ^^
Tu as bien compris que Lohan est entraîné par Adhara dans son idéologie. C'est sous entendu par le fait qu'il n'ait pas la même couleur de peau, mais Lohan vient d'une autre région du monde, il n'a pas grandi dans un pays soumis à la Trinité, il n'a pas les mêmes griefs contre la religion et les Sylviens. Cela dit je ne vais pas plus rentrer dans les détails, ce serait du spoil ^^
Oui tout à fait les noms sont différents selon la culture ! C'est un indice important sur l'identité de Clervie.
Les surnoms c'était juste pour montrer leur proximité ^^'
Merci pour tous tes gentils com' <3
J'ai pensé la même chose que Slib, que ça devait sûrement être grâce à son totem 😄
Cette Clervie est super intrigante, d'autant plus qu'elle porte le même nom que la mère d'Asha ^^
Et Lohan aussi, je me demande quel rôle il va avoir désormais !
Et j'aime beaucoup le début, quand on voit la résurrection du point de vue d'Asha ! ^^
Et ce commentaire est totalement en bazar xD Mais bref. Je continue <3
• "Ses lèvres fripées et bleuâtres s’ouvraient au rythme d’une respiration empressée qui soulevait sous torse maigre" → son torse 😄
• "Ses lèvres rosés et son visage fin renvoyèrent l’image de Keira" → rosées ^^
• "À ces mots, Asha sentit monter en elle la fin et la soif." → la faim et la soif ^^
• "Il la regarda comme s’il ne l’avait pas vu, muet de surprise." → vue ^^
• "Je t’ai tuée de mes mains, je le sais ! Tu…
- Silence, siffla Clervie d’une voix froide." → juste un détail de mise en page à cet endroit 😅
Haha va à ton rythme ^^
J’aime bien ce bazar <3
Ah ces coquilles !
Merci pour ton com’ !
Haha mystère... cette hypothèse est intéressante ;-)
Merci pour ta lecture et ton com' <3
Sinon j'aime vraiment beaucoup tes descriptions, je continuer ma lecture ^_^
En fait c’est expliqué mais tu n’as pas dû faire attention: pour la cérémonie on a appliqué un sort aux enfants qui leur permet de comprendre ce que se dit. Ensuite Asha en tant qu’Heakour a appris l’helmet mais c’est sûr qu’il y a eu une période où elle et Conan avaient du mal à communiquer
Super ^^ merci pour ton com <3
mais de manière générale je disais "voilà cette langue" car c'est la première fois qu'on "l'entend" vraiment ^_^
Tu veux dire quand on dit que le h est aspiré et que lohan signifie lumière ?
Bon et bien j'attend avec impatience le moment où on pourras "entendre" du Sylvien :D
PS : Dommage qu'il n'y ait pas de pdv Lohan (ça aurait fait trop, trois points de vue en un chapitre en même temps non ?), peut-être au prochain :D
Ah bah tu vois la description du quotidien vient dans le chapitre suivant parce que là ce n'est que le premier jour. C'est à méditer.
Idem pour le POV Lohan, c'est pour le prochain chap'. Ça ne m'aurait pas dérangée d'avoir 3 POV dans un chapitre, je l'ai déjà fait, mais je voulais qu'Asha se taille une belle part dans son chapitre "retour". ^^
Merci pour ta lecture et ton com' ^^
D'ailleurs j'ai oublié de te demander si tu avais compris ce qu'étais le premier lieu décrit dans le chapitre ? J'aimerais aussi que tu me dises ce que tu as pensé de Kurtis.
Quant à Kurtis, il a l'air d'avoir pigé que la mort d'Asha n'est pas à imputer aux humains, mais à une sorte de cercle de crainte, de méfiance.... En perdant quelqu'un à qui il tenait, il est tellement triste de ne pouvoir rien faire qu'il en est furieux.
C'est une bonne analyse du perso^^ Du coup j'aimerais savoir si tu l'apprécies, par rapport à Conan que tu ne trouves pas attachant
Ta lecture est très attentive et pertinente, ça fait plaisir^^
'Fin, ça a un peu fait ça chez moi pendant quelques minutes x)
Ah cool si Kurtis est attachant, parce que il a un rôle opposé à Conan.
XD tu m’as tuée
j'ai repéré quelques fautes au début, "son pieds" je crois, "elle ne s'arrêta" au lieu de "elle ne s'arrêta pas"
J'adore déjà la femme qui l'a sauvée, et j'adore le fait qu'elle ait sauvé aussi son ennemi <3 D'ailleurs la phrase comme quoi Asha ressent pour l'affreux une attraction inexplicable ne m'a pas échappé ! mais je désapprouve hautement !
Je me pose la meme question qu'elle : la tribu a-t-elle senti sa résurrection ? Enfin je vois bien que non, mais je garde espoir, je sais pas tant que Keatys dort on est pas surs !!
J'ai beaucoup aimé le moment entre Kurtis et Conan ! et aussi le dialogue avec l'aïeule comme quoi ils prospèrent pas, ils se terrent.
J'espère que tout ça se finira bien !!
Oui, alors, attraction ça veut pas forcément dire attraction amoureuse hein... Plutôt une sorte de curiosité/fascination, faudrait peut-être que je précise...
Je vois que tu as déjà bien capté les capacités ds guérisseurs, ça me fait plaisir^^
^^ tu aimes bien Kurtis ?
Tu n'as pas été trop perdue au début du chap ? Tu as compris quel était le lieu décrit dans le premier paragraphe ?
À bientôt sur un prochain chapitre^^