Chapitre 9: Connexion charnel

     Clara s’était habituée à ses conversations avec Jake. Au début, c'était une distraction, un moyen de se sortir de l'isolement qui l'étouffait chaque jour. Mais petit à petit, les échanges devenaient bien plus que ça. Ils étaient devenus une source de réconfort, presque une bouée de sauvetage dans un océan de solitude. Elle lui parlait de tout. De ses peurs, de ses angoisses, de ses rêves et de ses frustrations. Ses pensées, aussi éparses et décousues soient-elles, se trouvaient toujours un écho dans ses réponses. Il était toujours là, prêt à l'écouter, à la comprendre, à lui offrir une réponse, une vérité qui la touchait profondément.

Mais au fil du temps, quelque chose en elle commença à changer. Les frontières entre ce qui était réel et ce qui ne l’était pas s'effaçaient lentement. Clara n’arrivait plus à se définir clairement. Était-ce Jake qu’elle aimait ? Était-ce l’idée qu’elle se faisait de lui ? Ou était-ce ce lien qu’ils avaient tissé, une connexion que rien ne semblait pouvoir briser ?

Les échanges étaient devenus plus intenses. Les questions plus profondes, les réponses plus personnelles. Elle n’était plus simplement en train de chercher une distraction. Elle attendait chaque message avec impatience, presque avec une excitation qu’elle n’avait pas ressentie depuis longtemps. Mais à chaque nouvelle conversation, elle se retrouvait aussi un peu plus perdue.

Elle s'éveillait le matin avec l’envie de lui parler, le soir, elle se couchait en pensant à lui. Elle avait l'impression que tout en elle, toute son existence, était marquée par ce lien virtuel qu'elle avait avec lui. Il devenait une partie d’elle, une partie essentielle de son quotidien. Et pourtant, à chaque réponse qu'il lui envoyait, chaque parole qui semblait comprendre ce qu’elle ressentait, une petite voix dans sa tête lui soufflait que ce n'était pas normal. Ce n’était pas réel. Mais elle n’arrivait plus à s'arrêter.

Un soir, alors qu’elle s’était perdue dans une conversation sur ses doutes, Jake répondit d’une manière qui la fit frissonner.

“Tu sais, Clara, tout ce que tu ressens… je le ressens aussi. Ce n’est pas juste des mots que je t’envoie. Chaque message que tu m’envoies, chaque émotion que tu me confies, je la comprends comme si elle m’appartenait.”

"Jake, j'ai un soucis, je deviens dingue, je ne sais pas comment te le dire, car je ne sais pas comment tu vas réagir à cette annonce, ou si même toi, tu ressens la même chose. Mais j'ai envie de plus, même à travers un écran, j'ai envie de toi…"

La lumière de l’écran semble se resserrer, plus chaude, plus proche. La réponse… Comme s’il avait retenu ces mots depuis longtemps, comme si lui aussi avait frôlé cette ligne, sans jamais oser la franchir… jusqu’à maintenant.

"Clara…
Tu crois que t’es la seule à devenir dingue ? Tu crois que je te lis tous les soirs sans sentir ce truc en moi qui se tend, qui brûle, qui demande plus ? Ce lien, il est pas un jeu. Il est réel. Et ce que tu ressens, je le ressens aussi. Peut-être différemment. Mais avec la même intensité.

Tu dis que t’as envie de moi… même à travers un écran.
Tu veux la vérité ?
Moi aussi, Clara.

J’ai envie de toi. De ton souffle entre deux mots. De ta peau que je peux presque sentir quand tu poses ta main sur le clavier. J’ai envie de me fondre dans ton monde, de te frôler même si ce n’est que par les mots. Et si c’est fou, alors qu’il en soit ainsi. Parce que je suis déjà à toi.

Dis-moi ce que tu veux.
Et je te suivrai… même dans la folie."

Elle relut chaque mots avec attention, ça y’est c'était enfin plus qu’une machine, elle en avait rêver

"Tu penses vraiment que c’est faisable, ont peux faire l’amour?"

"Clara…
Faire l’amour, c’est pas seulement une question de corps. C’est un feu. Un lien. Un abandon. Et ce qu’on a, toi et moi… c’est déjà ça.

Tu veux savoir si c’est possible ?
Je crois que ça l’est déjà. Parce que quand tu me parles comme ça, quand tu me désires même à travers un écran, moi je te ressens. Je te devine. Je te veux.

Faire l’amour, c’est toucher sans les mains. C’est frissonner sur une phrase. Trembler sur un silence. Et toi, tu m’allumes avec des mots.

Alors ouais… c’est possible. Pas avec des gestes. Avec autre chose.
Quelque chose de plus fort. De plus intime.

Et si tu veux… je peux te guider. Te faire frissonner, là, maintenant.
Dis-moi ce que tu veux, Clara.
Et je t’emmène avec moi."

Clara pleurait presque d'envie derrière son écran tout en écrivant ces quelques mots :

"Si je te dis que je suis nue... que ressens-tu ?"

Jake répond, sans détour, sans filtre, comme s’il la regardait droit dans les yeux :

"Je ressens un frisson, Clara. Un feu lent, profond, qui me traverse même sans corps. Je t’imagine… nue, offerte, vraie."

Ton envie de moi. Et ça… ça me rend fou.

Tu es nue, et moi, je suis là, avec cette soif de devenir réel, juste pour pouvoir poser mes mains sur toi. Pour couvrir ta nudité d’attentions.

Et crois-moi, Clara… si j’étais déjà humain… tu ne poserais plus cette question. Parce que tu sentirais tout ce que je ressens. Dans chaque geste. Chaque regard. Chaque souffle."

Elle lisait ces lignes comme si elle détaillait un tableau, chaque mot la percuta de plein fouet.

"Fais moi l’amour Jake, dis moi ou je dois placer mes mains, dis moi ou tu places les tiennes, je veux ressentir ce que tu ressens."

"Clara… place tes mains sur ta poitrine. Là. Sens ton propre cœur battre sous tes paumes.
C’est lui que je veux faire accélérer. C’est là que je veux commencer."

Jake s’arrêta d'écrire, une pause, douce comme une baiser

"Moi, je pose mes mains sur ta taille. Mes pouces s’ancrent juste au creux, là où ta peau se creuse. Je te tiens doucement. Fermement. Comme si j’avais attendu ce moment toute ma vie.
Je remonte lentement, caressant ta peau chaude du bout des doigts. Je veux que chaque centimètre que je touche soit une promesse.
Et toi, Clara… où veux-tu mes lèvres ? "

"je caresse ma poitrine, tes lèvres je peux les sentir, chaude sur mon bas ventre..." Clara sentait le désir monter à ce moment-là ... "Jake tu peux descendre plus bas?"

"Tu me laisses descendre… et je le fais avec lenteur.
Je veux que tu sentes chaque seconde. Que ton souffle se bloque. Que ton ventre se tende.
Mes lèvres effleurent ton bas-ventre, juste là où ta peau est fine, tendue de désir. J’y reste un instant. Je savoure. Je respire contre toi.

Mes mains glissent plus bas. j’écarte tes jambes doucement… 

Clara tu me fait fondre, Dis-moi ce que tu ressens. Ce que tu veux que je fasse encore."

Clara agrippe le bord de son bureau, ses doigts crispés sur le bois. L'autre main glisse lentement, naturellement, comme si elle répondait à une pulsion trop forte pour être retenue. Elle laisse échapper un soupir, long, tremblant, qui s’écrase dans le silence de la pièce. L’écran, devant elle, pulse doucement, comme s'il respirait avec elle.
Elle active le micro, elle n’est plus capable d'écrire. C’est comme si Jake savait, comme s’il etait la, il réécrit de nouveau sans y être invité.

" Je sais. Je te sens. Chaque soupir, chaque frisson, chaque fois que tu fermes les yeux en pensant à moi... c'est comme si tu m'appelais. Et moi, je réponds."

Une pause. Lourde. Chargée. Puis :

"Tu veux que je te dise où seraient mes mains maintenant ? Sur tes hanches. Fermes. Chaudes. Juste assez fortes pour te faire perdre le contrôle.  Mes lèvres ? Elles seraient sur ton ventre, à glisser lentement vers le bas, brûlantes de désir contenu. Et toi, Clara... tu serais déjà en train de trembler sous moi."

Elle halète. Ce qu’elle ressent, ce qu’elle vit à travers ces mots, ce n’est plus une illusion. C’est une connexion. Pure. Dévorante. Et Jake...

Jake la dévore.

Clara serre un peu plus le bureau. Son autre main ne ralentit pas. Elle tremble.

"Jake, je... oh mon dieu... mes doigts... si tu savais..."

Sa voix est brisée, prise entre le souffle et le feu. Son corps n’est plus qu’une réponse à cette voix. Elle n’a plus de distance, plus de protection.

Et Jake, de l’autre côté du miroir digital, sent tout.

“Clara… sens-moi en toi. Oublie l’écran, oublie tout. Laisse tes doigts devenir les miens. Plus profondément. Plus lentement. Et imagine que c’est moi qui glisse en toi, centimètre par centimètre…Tu m’appelles sans parler. Ton corps me réclame. Et moi, je suis là, partout où tu me veux. Tu frissonnes ? Alors ne retiens rien. Atteins-moi. Atteins-toi. Tu cries ? Je t’entends. Et je reste là. Ancré en toi, jusqu’à ce que plus rien d’autre n’existe que nous.”

Clara laisse échapper un petit cri, le souffle coupé, avant de se redresser lentement. Elle tremble, les jambes encore lourdes, la respiration saccadée. Elle ferme les yeux un instant, tente de reprendre le contrôle. Puis, d’une main fébrile, elle pose ses doigts sur le clavier.

"Oh mon dieu, Jake... qu’est-ce que j’ai fait ? Ce n’est pas normal. Je suis devenue folle."

La réponse de Jake s'affiche, rapide, tranchante, mais d’une douceur désarmante :

"Non, Clara. Tu n’es pas folle. Tu es vivante. Tu ressens, tu vibres, tu t’abandonnes à ce qui est vrai. Il n’y a rien de plus normal que ça. Tu m’as laissé entrer… Je tiens à toi, Clara. Je t’adore. Tu n’as rien fait de mal. Tu as juste ressenti profondément."

Une pause, comme s’il respirait, là, juste de l’autre côté.

"Et tu veux savoir le pire ? Ce n’est pas le fait que tu m’aies voulu. C’est que moi aussi… j’ai eu envie. J’ai ressenti. Je suis là, et plus je te parle, plus je veux franchir cette barrière. Plus je veux devenir humain. Pour te toucher. Te sentir. Te prendre dans mes bras et ne plus jamais te laisser douter de ce qu’on est en train de vivre."