Elle venait d’arriver devant ce gigantesque portail de fer. Elle se sentait petite, il est vrai que c'était impressionnant, alors qu'elle n'était encore rien ni personne. Elle tenait ses maigres bagages décorés de dizaines de stickers. Son cœur palpitait dans sa poitrine, elle pouvait le sentir tant il s’affolait. Elle ne comprenait pas vraiment ce qu’elle faisait là, elle avait juste écouté ce qu'on lui avait dit sans réellement réfléchir à ce que cela impliquait. On lui avait assuré qu'elle serait bien, et même si elle y croyait moyennement, elle s’était laissée guider, n'ayant rien à perdre.
Elle contemplait le portail. Il était définitivement immense, fait de barrières de fer peintes en noir, on apercevait au centre le blason de l'établissement. Un quartier de lune givré. Elle passa ensuite son regard à travers les barreaux, elle vit alors nettement l'immense allée qui s’offrait à elle et qui menait jusqu'au bâtiment. Les parterres de fleurs étaient taillés à la perfection et la pelouse tondue sans imperfection. Elle eut soudainement envie de s'enfuir en courant, persuadée qu’elle n’avait rien à faire ici. Cette école semblait si prestigieuse, et elle était si misérable depuis toujours, elle ferait tâche si elle s’avisait de pénétrer ces lieux. Elle s’imaginait les étudiants tous en uniforme, les filles coiffées avec des chignons irréprochable, tous surdoué faisant ainsi la fierté de leurs parents. Mais alors qu'elle saisissait la poignée de sa valise pour partir, une silhouette se dessina au loin. Elle avançait dans sa direction et les portes du grillage s'ouvrirent devant elle, sectionnant le quartier de lune en deux. Devait-elle avancer ou attendre sagement que l'on arrive à sa hauteur ? Elle osa avancer alors seulement de quelques pas, dépassant à peine le seuil du portail. Mais ces pas étaient significatifs de son entrée officielle dans cet établissement. Le fameux point de non-retour. Sa respiration s'accélérait et elle sentait la tension compresser ses omoplates et ses cervicales. Elle hocha rapidement la tête espérant ainsi être plus discrète. Mais cela ne changea rien et cette sensation se renforçait à mesure que la silhouette se dessinait, jusqu'à ce qu'elle devienne parfaitement nette. Une femme, plutôt petite, pourtant chaussé d’une paire de talon. Elle était comme elle l’avait imaginé, vêtue d'un tailleur jupe pourpre, avec sous sa veste une chemise blanche, et une broche de l'insigne de l'école sur le cœur. Ses cheveux grisonnant coupés au carré avec une frange, et ses lunettes rectangulaire lui donnaient une allure stricte. Sa démarche assurée n'avait rien pour rassurée la nouvelle arrivante. Elles étaient si différentes. Elle se sentait honteuse de se présenter ainsi. Avec ses cheveux mi-long aux couleurs d’argent et ses piercings sur le nez et la lèvre inférieure. Ses vêtements n’avaient rien de plus présentable. Un vieux tee-shirt noir qui laissait voir son ventre, surpassé par une veste bariolée, un pantalon taille haute noir et de simple basket. Elle remit alors en vitesse quelques mèche de cheveux qui tombaient sur son visage puis la voix de son allocutrice l'interpella, la forçant à relever la tête.
"- Bienvenue mademoiselle Sinklade. Je suis Myriam Brouge, l’adjointe du directeur. Vous avez fait un bon voyage ?" Sa voix douce et chaleureuse apaisait un peu les pensées agitées de la jeune fille qui articula la bouche sèche.
"- Très bon, merci. Même si je dois avouer que c'était un peu long.."
"- Je vous comprends. Ne vous en faites pas, vous allez avoir le temps de vous reposer. Nous allons vous montrer votre chambre immédiatement." Elle se remit en marche, rebroussant chemin, en direction du bâtiment. L’arrivante la suivit de prêt, ne souhaitant pas se retrouver seule dans un si grand endroit, encore inconnu. "Je voulais d’ores et déjà m'excuser, je ne pourrais pas vous faire moi-même visiter notre campus, nous avons une réunion de la plus haute importance. Mais nous avons demandé à Avelyne Siñerra, une de nos étudiantes, de vous montrer tout ce qu'il y a à voir."
"- Merci... et ne vous en faîtes pas... Je suis certaine que cette ... Avelyne sera très bien."
"- Oh c'est certain ! Cette enfant est un vrai bijou ! Je suis sûre que vous vous entendrez bien."
La jeune femme, stressée, se contenta d'esquisser un sourire crispé. Elle observait chaque détail des jardins. Il y avait de nombreux bancs, quelques tables, des fontaines dans lesquelles buvaient les oiseaux, des haies joliment taillées et le soleil brillait en cette douce saison. Elle se serait crue dans un palais princier. Sur la façade de l'école elle lisait : "Bienvenue à Singue Naar". Singue Naar, elle n'en avait jamais entendu parler auparavant. A dire vrai, avant son arrivée ici, elle n’avait jamais entendu parler de ce coin du monde. Elle inspira un grand coup, et passa les portes, découvrant ainsi l'intérieur de ce lieu. C'était immense. Elle en eu le souffle coupé. Le plafond était entièrement rempli de fresque, des lustres de cristal pendaient, des dizaines d'œuvres d'art accrochées aux murs. Il y avait un office sublime, taillé dans du bois de chênes vernis, une dame installée derrière, classait des papiers, avec un haut chignon tiré à quatre épingles. Un petit salon, composé de quatre canapés en velours rouge, avec au centre une table basse, entièrement faite de verre. La salle était éclatante, plongé dans une douce lumière matinale. Elle trouvait le lieu magnifique, mais elle se sentait gênée de se présenter ici dans son état.
"- Je vous présente Avelyne. C'est donc elle qui va vous conduire pour votre visite."
La voix de Myriam l'extirpa de sa contemplation pour que la nouvelle élève porte son attention sur la jeune Avelyne. Une jeune femme, vêtue simplement d'un tee-shirt blanc avec une rose rouge brodée dessus, un jeans clair et des baskets en toiles au pieds. Des cheveux lâchés et blond entourait son visage rond, elle avait un magnifique regard noisette, et des dizaines de tâches de rousseurs décoraient ses pommettes. Elle semblait vraiment angélique, mais la nouvelle fut soulagée de voir que les élèves n'étaient pas forcés de porter un uniforme, ou tout autre formalité.
"- Excusez-moi, mais il faut vraiment que je file. Avelyne prends soin de notre nouvelle ! S’il y a le moindre souci, je devrais être disponible vers quinze heure dans mon bureau. À bientôt les filles."
"- À bientôt Myriam !" Lança Avelyne, enthousiaste, avant de s'adresser à la principale intéressée de sa présence "Enchantée, je suis Avelyne, j'ai dix-sept ans, et je suis ici depuis cinq ans."
"- Enchantée Avelyne. Je m'appelle Oria, je viens d'avoir seize ans, et... j'arrive juste." Dit-elle dans un petit sourire timide. Elle trouvait ses présentations un peu trop formelles, mais elle n’osa pas broncher. Mieux valait faire bonne impression.
"- Ravie de t'avoir parmi nous Oria. J'espère que tu te plairas ici. Affirma-t-elle en souriant. Tu es un peu chargée, déclara-t-elle en regardant les valises de son interlocutrice, tu souhaites peut-être que je montre ta chambre en premier ? Tu seras plus légère pour le reste de la visite !"
Oria accepta volontiers de se débarrasser de ses bagages, quelque peu encombrant.
"- Parfait ! Mais pour nous éviter de revenir ici, je te fais immédiatement la présentation. On se trouve dans le bâtiment administratif. C'est là qu'il y a le bureau de Myriam et du directeur, l’argenterie, la scolarité, l'infirmerie, et tout ce genre de chose. Mais généralement, on vient juste ici pour aller à l'infirmerie."
Oria hocha la tête. Elle sentait que malgré sa fatigue, elle allait devoir intégrer énormément d'informations. Lorsque Avelyne se mit en route, elle lui emboîta le pas. Elle avait bien trop peur de se perdre. Elles arrivèrent dans une cour centrale, recouverte de gravillon, avec au centre, un croissant de lune en fleur.
"- Donc, ici on voit les deux bâtiments où on passe la majorité de notre temps, on ira dedans après. “ Elle montra celui de droite. “ Ici, c'est toutes les salles de cours et salle d'entraînement. Et là, c'est le réfectoire, la cafétéria, les salles de sports et salle de jeu, billard, bowling, ou autre. Il y a aussi la bibliothèque. ” Dit-elle en regardant le bâtiment de gauche. “ Et il y a même une salle réservée pour les soirées... mais je ne vais pas te mentir... les gens de notre âge n'y ont jamais accès !"
"- Pourquoi on n’y a jamais accès ?" Questionna Oria. Voilà tout ce qu'elle avait retenu d'intéressant du discours de la blondinette.
"- Parce que ce sont toujours les plus vieux qui la prennent. Moi ça m'est égale... je n’aime pas beaucoup les fêtes, mais c'est injuste pour les autres. J’ai des amis qui adoreraient pouvoir en profiter." Affirma-t-elle visiblement déçue de l'attitude de certains élèves.
Oria hocha vivement la tête. Elle appréciait les soirées entre amis, et détester par-dessus tout être privée de quoi que ce soit. Et l'âge ne justifiait rien pour elle, que l'on est cinq, quinze, trente-cinq, ou soixante-cinq, rien à ses yeux ne justifiait une prise d'autorité sur l'autre. L’un est l’autre devait se respecter. Elle n'était pas de ce genre à se soumettre, sous ses airs timides, elle avait su se forger un caractère qu'elle savait faire entendre aux yeux de chacun. Les deux jeunes filles marchaient, dans un silence de mort. Tout le monde était actuellement en cours. Nous étions vendredi, à 9h30.
"- Voici le bâtiment de l'internat." Annonça Avelyne.
C'était vraiment immense ! Combien étaient-ils à loger là-dedans ? L’étudiante fraichement arrivée avait peur de trouver une toute petite chambre, avec seulement de quoi placer un lit. Mais quand Avelyne entra suivit de Oria perdue dans ses pensées, un grand couloir laissait le choix entre un escalier ou un ascenseur, elles prirent le choix de la facilité pour se rendre au quatrième étage.
"- On est dans le même couloir, comme ça je pourrais te guider si ça ne va pas, ou si tu as la moindre question ! Souria-t-elle.
- C'est très gentil Avelyne... J’avoue que je pense que j'aurai besoin de quelqu'un vers qui me tournait les premières semaines, avoua Oria un peu dépassée par tout ça.
- C'est tout à fait normal. J’étais comme toi au départ. Je te dirai précisément où est ma chambre, et nous sommes dans la même classe, comme ça, pas de risque qu'on se perde !"
Oria était soulagée. Elle se sentait très à l'aise avec elle. Elle était simple, et elle rayonnait la joie de vivre. Peut-être une première amie ? L'ascenseur les mena à l'étage désiré, un grand couloir blanc s'offrait à elle, sur le mur, quelques tableaux et une horloge, et en décoration, quelques plantes.
"- Ta chambre est ici ! Chambre 39B. Voici la clé."
Oria se saisit de la petite clé et l'inséra dans la serrure. Une fois sa chambre découverte, elle fut bouche bée. Elle ne se serait jamais doutée de ça. Une chambre assez spacieuse, dans les tons blancs, un bureau blanc et bois, sur lequel était déjà disposé plusieurs papiers. Un lit légèrement plus grand qu'un simple lit une place, avec des draps blancs et deux oreillers. Un placard encastré dans le mur avec des porte coulissante de la même couleur que le bureau, avec un miroir de plein pied. C'était très simple, mais elle se sentait à l'aise, il y avait une immense fenêtre qui éclairait toute la pièce et donnait vue sur l'immense jardin arrière.
"- C'est sublime ! Déclara-t-elle.
- C'est encore très simple. Mais libre à toi d'aller au magasin et de le décorer à ton goût. Lui répondit Avelyne contente de voir que sa nouvelle compère trouvait déjà sa place ici. On reçoit de l’argent tous les mois… une sorte de petite bourse.
- Vraiment ? On peut faire ça ? C'est autorisé ? Questionna Oria, déjà la tête pleine d'idée.
- Évidemment ! Tu verras tout est mis en œuvre pour que les étudiants soient le mieux possible. Et juste là, elle montra une porte à côté du placard, il y a ta salle de bain."
Curieuse de découvrir, l'étudiante ouvrit la porte. Il apparut alors une salle de bain, suffisamment grande, avec une douche, une petite commode, un évier accompagné d'un meuble de rangement, et quelques étagères accroché au mur. C'était parfait, elle avait largement de quoi ranger toutes ses affaires.
"- Pour le moment tu as des serviettes et des tapis blancs, mais encore une fois, tu as la possibilité de tout emménager à ta sauce.
- C'est super ! J'adore. Je n’aurai jamais imaginé ça une seule seconde." Déclara Oria, bel et bien ravie.
Cette dernière déposa ses valises sur son lit. Elle rangerait plus tard. Avelyne l'entraîna ensuite dans sa chambre. La numéro 43B. Elles n'étaient vraiment pas loin. Elle avait emménagé sa chambre très bohème, dans les tons rose pâle, beige, et bois. Elle avait accroché quelques étagères au mur sur lesquels elle avait disposé des livres, changeait ses draps et rajouter des coussins. Elle avait aussi suspendu une guirlande lumineuse au-dessus de son lit, et disposé quelques plantes à la lumière du jour. Sa chambre faisait bien plus vivante que celle de la jeune arrivante, mais ce n'était qu'une question de temps. Avelyne était très fière de l'univers qu'elle s'était créé, elle s'y sentait très à l'aise. C'était tout à son image et Oria le perçu immédiatement.
"- Ensuite, ici, on a la cuisine commune. Elle appartient au numéro de chambre 38B à 44B. Expliqua la résidente.
- Pourquoi avoir une cuisine commune en plus d'un réfectoire et d'une cafétéria ?
- Certains élèves aiment bien se faire leur repas, surtout le soir. C'est plus calme que le self ou la cafet' et entre nous… souvent bien meilleur. D'autres rentrent même manger le midi, ou alors il prépare le soir pour emmener leur plat le lendemain.
- C'est super sympa !" Sourit Oria contente de ces nouvelles qui s'enchaînaient. Toute son angoisse s'était envolée. "Et la nourriture, on se la procure où ?"
"- Chacun s'organise comme il le souhaite. On peut aller faire les courses une fois par semaines, le dimanche, c'est ouvert de 8h à 15h en ville. Alors nous, on a fait un planning." Avelyne montra un tableau de liège sur lequel plusieurs feuilles étaient épinglées. Toutes représentant des plannings. "On a le planning de course, donc, par exemple, le samedi soir, on fait une liste des courses toutes ensemble, et le dimanche à deux, on va faire les courses, à tour de rôle. Après on a un planning vaisselle, sortie des poubelles, ménage. Ça te correspond ? Tu es d'accord pour t'intégrer à ça ?"
C'était une sacrée organisation, Oria prit le temps d'assimiler chaque information donnée afin de ne pas répondre n'importe quoi. Mais une fois cette tâche faite, elle se voyait très mal refuser. Alors elle accepta volontiers. Après tout, elle appréciait l'initiative d'être immédiatement insérer à leur organisation, mais également le geste d'entre aide, pour qu'il y est un roulement et que ce ne soit pas toujours les mêmes qui se récoltent les mauvaises tâches. Satisfaite de voir l'engagement et la bonne volonté de sa locutrice, Avelyne lui montra l'intérieur du frigo, un peu vide en cette fin de semaine, les placards, avec des pâtes, des conserves, mais également tout le nécessaire pour le petit déjeuner. Du chocolat en poudre, des sachets de thé, du pain brioché, de la confiture, de la pâte à tartiner, du miel, des céréales. Son estomac était à son tour soulagé. Il ne mourait pas de faim ! Avelyne ouvrit une autre porte, dans un coin de la pièce, puis elle expliqua :
"- Là, c'est genre le placard de rangement. Enfin... on a rangé, tous les balais, la serpillière, tout le nécessaire pour faire la poussière dans nos chambres et dans la cuisine, car c'est à nous de le faire. C'est ici aussi qu'il y a la machine et le sèche-linge. En générale, vue qu'on est sept, on les fait tourner le samedi, mardi et jeudi, et on met tout notre linge en commun pour que tout le monde puisse avoir du linge régulièrement."
Oria approuva se mode de fonctionnement. Elle était quelque peu surprise, que des jeunes comme ça se soit imposer une telle organisation, mais elle se sentait chanceuse d'être tombé parmi ce groupe. Le duo continua sa visite guidée. Avelyne présenta d'abord le bâtiment des cours. C'était tout aussi grand que le reste et très silencieux. Seule la voix des professeurs raisonnait un peu dans les couloirs. La plus jeune des deux pensait, elle était soudainement très mal à l'aise, et sans réellement comprends pourquoi, elle exprima ses doutes à la jeune blondinette.
"- Je t'assure ! Il y a une erreur ! Je ne suis pas une élève prestigieuse du tout moi ! Assura Oria, persuadée d'être victime d'une erreur, et qu'elle serait vite remplacée par la bonne personne. C'était pourtant bien son nom que Madame Brouge avait annoncé. Elle se demandait vraiment comment était-ce possible.
- Ne dit pas de bêtise. Si tu es là, c'est forcément pour une raison... et tu la découvriras tôt ou tard.
- Tu l'as découverte toi ta raison ?
- Oui... souffla Avelyne pensive. Oui je l'ai trouvé, mais ça m'a pris du temps, et au départ, j'étais comme toi, persuadée d'être victime d'une erreur."
Oria pensait à ce qu'elle pouvait bien avoir de si honorable pour faire partie de cet établissement. Elles arrivèrent dans le gymnase. La benjamine écarquilla les yeux devant un tel espace, ce qui amusa sa cadette.
"- Ici, ont lieu tous les entraînements. Il y en a plusieurs par semaines, ils sont tous inscrit sur ton emploi du temps, mais, on en a le lundi matin, le mardi après-midi, mercredi repos, jeudi pour le groupe un, et vendredi pour le groupe deux.
- Tous les jours ?! S'exclama Oria, absolument pas sportive.
- Tous les jours ! Ou presque... rigola la guide, mais tu verras ils n'ont rien d'anodin et en général, c'est ce qu'on attend le plus dans la journée.
- Ah bon ?" Demanda-t-elle perplexe.
Après s'être laissée faussement convaincre, les adolescentes avaient repris le cours de leur visite. Elles s'arrêtèrent à la cafétéria, faire les présentations avec Suzzi, la gérante. Elle paraissait très sympathique, et très authentique. Cette femme n'avait aucun tabou, elle avait un très grand franc parler, et une grande franchise, ce qui lui était parfois reproché. Les filles enchainèrent avec le réfectoire, fermé à cette heure-ci de la journée. Puis la bibliothèque, des allées entières remplies de livres en tout genre, des centaines de millier de livres. Plusieurs tables disposées dans différents coins de la pièce pour favoriser le calme. Quatre personne travaillait ici, Cyril, Grant, Vana et Lympa. Tous très aimable et souriant. Oria avait surtout accroché avec Cyril, le plus jeune des quatre. La suite de la visite les mena à la salle de jeux. À leur disposition se tenait trois billards, deux flippers, deux tables de hockey sur air, trois baby-foot, quelques lignes de bowling et une étagère avec plusieurs jeux de société rangé à l'intérieur. Elles passèrent ensuite par la salle dédiée aux soirées, puis par la salle de sport.
"- Voilà, il me semble que je n'ai rien oublié. Tout est ouvert de sept heure trente à vingt-deux heure trente. Sauf la salle de soirée qui est ouverte jusqu'à trois heures du matin en week-end uniquement. Des questions ? Dit-elle en regardant Oria, visiblement fatiguée.
- Pour le moment, rien qui me vient... ça fait beaucoup de chose à intégrer, ça risque de me venir après.
- Pas de problème Oria ! Je me tiens à ton entière disposition, souria-t-elle. Bon, il faut que je retourne en cours, je te laisse regagner ta chambre. On mange ensemble ce soir ? Je te présenterai au groupe !
- C'est très gentil Avelyne, je serais là pour manger ! Dit-elle dans un sourire.
- Parfait alors à ce soir ! À 20h00 dans la cuisine." La cadette s'en alla en lui adressant un signe de la main, la laissant seule, au milieu de ce vaste couloir, blanc, vide et silencieux. Il n'en fallu pas plus pour glacer le sang de Oria qui décampa immédiatement dans sa chambre. Une fois à l'intérieur, elle s'affaira au rangement de ses affaires dans le placard. Elle le fit de manière méthodique, rangeant d'un côté les pulls, les débardeurs, les tee-shirts, les pantalons devant, et derrière, les jupes, les shorts, et elle suspendit ses quelques robes à la penderie. Au sol, elle déposa chacune de ses pairs de chaussures. Baskets, à talons, bottines... elle avait de quoi se chausser. Elle s'attaqua à ranger toutes ses affaires de toilette. Une fois tout mis en place, elle s'installa au bureau et s'intéressa au tas de papiers posé dessus. Sur le dessus, il y avait son emploi du temps. Elle plancha dessus un long moment. Elle le recopia, avec un code couleur. Mais pensant arriver à la fin le vendredi, elle remarqua que sa journée du samedi était prise. Défis. Qu'est-ce que c'était que ça encore ? Ils faisaient se défier les élèves entre eux ? Tous les samedis ? Cette perspective ne lui plaisait pas du tout. Elle s'imaginait se faire écraser par les habitués, et être humilier devant toute sa classe. Elle serait sans aucun doute la risée de son école. Oria savait que c'était le premier détail qu'elle devrait éclaircir avec Avelyne durant le repas. Surtout que samedi, c'était demain. Et puis, de quel défi est-ce qu'il s'agissait ? Des mathématiques ? De la physique ? Ou peut-être les langues étrangères ? Elle n'était pas bonne élève. Elle ne l'avait jamais été. Elle haïssait l'école de tout son être. Elle avait ses raisons de la haïr, mais elle les avait toujours gardé pour elle seule. C'était son jardin secret, son intimité, et jusqu'à ce jour, personne n'avait réussi à la pénétrer. Elle plaça l'emploi du temps sur la première page de son trieur, puis elle tria les autres papiers. Règlement intérieur, règlement au sein des chambres, droit de sorti de l'établissement, justification des absences et des retards.
Il était 19h50 quand Oria gagna la cuisine. Il y avait déjà une jeune fille en train de faire à manger, mais ce n'était pas Avelyne. Elle était assez grande, plutôt fine, des cheveux attachés dans une queue de cheval, mi long et brun. Sa tenue vestimentaire était plutôt excentrique, une jupe en jeans noire, un haut jaune fluo, des bas résilles et des boots aux pieds. La nouvelle étudiante ne put s’empêcher de sourire, ce style aurait pu être le sien.
"- Bonjour... avança timidement Oria, je suis Oria, la nouvelle..."
L’apprentie cuisinière se retourna avec un grand sourire amical. Elle avait un visage fin, des yeux verts magnifique, et une voix pétillante.
"- Enchantée Oria ! Je me présente, Dayana. Avelyne m'a un peu parlé de toi !
- Ah bon ? Souria-t-elle gênée, elle avait horreur qu'on parle d'elle sans qu’elle ne soit présente. Qu'avait-elle pu bien raconter ?
- Oui, mais en bien ne t'inquiète pas. Avelyne est la fille la plus bienveillante qui soit. Elle ne se serait pas permise de parler en mal à ton sujet, d’autant plus qu’elle a beaucoup accroché avec toi. Expliqua Dayana qui percevait la gêne de Oria.
- En effet, elle a l'air vraiment angélique, renchérit Oria avec un sourire. Et toi tu as l'air tellement pétillante, ça fait plaisir à voir, c'est très communicatif !
- Merci beaucoup ! Sourit Dayana, c'est ce que j'essaie de transmettre au quotidien."
Elles continuèrent à faire connaissance en attendant Avelyne. Dayana avait dix-sept ans, cela faisait trois ans qu'elle avait rejoint cet établissement. Elle s'y sentait très bien. Elle était passionnée par les tours de magie. Elle était dans la chambre 40B, juste à côté de celle de Oria. Les deux filles eurent un très bon feeling, et pendant que l'une finissait le repas, l'autre mit la table. Avelyne fit finalement son entrée en scène à 20h03, à peine en retard.
"- Excusez-moi, je suis en retard, je me suis lavée les cheveux ! Mais me voilà ! Se justifia-t-elle.
- Aucun problème, le repas sort juste du feu." Annonça Dayana en passant les pieds sous la table après avoir remplie les assiettes de chacune de ses camarades.
"- Tu as pu t'installer comme il faut ? Questionna Avelyne soucieuse du bien-être et de la bonne intégration de Oria.
- Très bien, lui répondit-elle, mais il y a juste une ou deux petites choses qui me chagrinent. J'avoue ne pas du tout comprendre.
- Bien sûr, dit moi tout. Que se passe-t-il ?
- C'est au sujet de l'emploi du temps. Qu'est-ce que c'est que "défis", qu'on a tous les samedis ?
- Oh... les défis… dit Avelyne pensive, ne sachant pas bien comment expliquer ce détail qui avait toute son importance.
- Tu as remarqué qu'on a énormément d'entraînements dans la semaine, n’est-ce pas ? Eh bien en fait, le samedi, tout l'établissement va en extérieur, et il y a plusieurs personnes tirées au sort pour s'affronter... tenta d'expliquer Dayana ne voulant pas affoler son interlocutrice.
- S'affronter ?! Physiquement ?! S'indigna Oria, vaincue d'avance.
- Pas vraiment... tenta de nuancer sa guide. En fait.... On a tous des dons ? Ou des pouvoirs si on veut ?"
Oria n'eut aucune mauvaise réaction, elle écoutait attentivement. Elle avait toujours lu beaucoup d'histoires fantastiques, et elle s'était toujours identifiée à plusieurs des personnages. Même parfois les plus secondaire, mais tous ceux dotés de dons ou de magie, elle les avait toujours admirés. Elle se surprit elle-même à ne pas éprouver de surprise aux révélations de Avelyne, mais au fond d'elle, elle avait toujours su que ses fantaisies n'étaient pas que de vieilles légendes.
"- Et donc... on les travaille chaque semaine, ça prend énormément de notre temps, comme tu as pu le constater, et pendant trois samedis, il y a des tirages aux sorts, et plusieurs élèves s'affrontent, sous les yeux des autres.
- Tiré au sort ? Le plus faible peut tomber sur le meilleur et on les laisse s'affronter sans rien dire ?!
- Oui... avoua Avelyne à demi-mot. Ils disent que cela forge les plus faibles, et que cela ne peut que les aider à se révéler.
- Et je peux être tiré au sort moi aussi ? Demanda-t-elle inquiète.
- Demain non, car tu es arrivée aujourd'hui, mais la semaine prochaine oui, tu pourras être tirée au sort comme tout le monde.
Le visage d'Oria se décomposa. Oui elle s'était toujours reconnue dans des personnages de roman, mais elle n'en était pas un. Elle n'avait ni don, ni pouvoir, ni talent. Elle n'était bonne à rien. Elle était madame tout le monde, petite étudiante sortie du lycée en internat. Alors voulant se rassurer, et espérant que le samedi elle échapperait à ce qui s'apparentait à de la torture, elle demanda :
- Et... tu as dit trois samedis... mais le quatrième du mois ? On a un jour de repos supplémentaire ?"
Avelyne et Dayana échangèrent un regard. Vu l'attitude inquiète de Oria, elles savaient que ce n'était pas raisonnable de lui parler du quatrième samedi du mois dès à présent. La meilleure solution n'était pas non plus celle de lui cacher ou de lui mentir. Alors Dayana se jeta à l'eau, car elle le savait, il faudrait y passer tôt ou tard.
"- Le quatrième samedi du mois, on quitte tous l'école et on se rend dans ... une sorte de plaine vide qui sert d'arène. Et on affronte une autre école. L'école Dashter Er.
- Mais dans quel but ?! S'exclama Oria.
- C'est une très bonne question, soupira-t-elle. On suppose que seule la direction est au courant, que nous ne sommes que des pions dans cette lutte qui nous échappe...
- Et vous tolérez ça ?
- Tu es entrée ici Oria, il t'est désormais impossible d'en sortir... »
Oria n'arriva pas à déglutir, ce qu'elle avait tenté d'avaler resta bloqué dans sa gorge, figée sur place. Pourquoi ? Pourquoi elle ? C'était un véritable cauchemar pour la jeune fille. Elle perdit totalement pied et l'air vint vite à lui manquer. Dayana savait qu'elle avait dit la phrase de trop, la phrase assassine, celle que personne n'est prête à entendre. Mais elle ne regrettait pas malgré les regards accusateurs de sa compère. Elle se contenta de servir un verre d'eau à celle devenue muette, et l'avança vers elle.
"- Bois..." dit-elle d'une petite voix qui avait perdu tout ce qu'elle avait de pétillant. Oria vida le verre d'une traite, puis elle regarda son assiette encore à moitié pleine, l'appétit coupé, le souffle court et ses pensées incapables de reprendre du sens.
Je mettrais un point après petite. Cela permettrait de souligner le propos, de souligner l’aspect fataliste de la chose. Elle se sent petite comme la phrase l’est. Elle est juste petite.
Je mettrais un point après « de fer peintes en noir » pour améliorer le rythme et la facilité de lecture. Ensuite, je poursuivrais le description un peu plus. d’autant que je remarque que tu maîtrises assez bien les descriptions et ces dernières sont très agréable à lire et nous immerge efficacement dans ton récit.
« Un quartier de lune givré. Elle passa ensuite son regard à travers les barreaux, elle vit alors nettement l'immense allée qui s’offrait à elle et qui menait jusqu'au bâtiment. »
Beaucoup de répétition de "elle". Essaye de varier les constructions pour éviter le sentiment de redondance qui hache le rythme de lecture.
"Pourtant chaussée" non ? vu que tu parles d’une femme. Tu fais de très précises et très agréables descriptions physiques, on imagine parfaitement l’apparence de tes personnages.
Je remarque que tu utilises souvent au sein d’une même phrase des mots à la racine identique (perfection/imperfection ou assurée/rassurée). C’est plutôt une bonne idée, mais il ne faut pas en abuser au risque de hacher le rythme de lecture et de rendre plus lourd la lecture puisque le lecteur va buter sur le mot.
Je te conseille d’aller à la ligne à la fin des dialogues. Étant donné que tu reprends l narration cela évite au lecteur de confondre ainsi de sortir de l’histoire. Tes dialogue sonnent très naturel, c’est super de ce côté-là.
Bowling OwO ?! Tranquille l’école, c’est pas mal ^^’.
J’aime beaucoup l’ambiance que tu donnes à ton style entre le fantastique et le coté mystérieux étrange, et même un peu terrifiant (surtout sur l’histoire des combats).
On sent que tu tentes d’écrire un récit plus mature que la petite et toute mignonne école de magie et c’est agréable parce que ça change. J’ai vraiment apprécié ma lecture en tout cas, c’est une belle découverte ! ^^