Chapitre un : Le commencement

Par Alaska

Des rires… Cinq rires plus précisément. Cinq adolescents de quatorze et quinze ans qui riaient. Voici ce que nous étions, justes cinq personnes insouciantes qui n’avait conscience de rien… Nous étions assis sur un tapis blanc au milieu d’une pièce. Nous encerclions de la nourriture disposée dans des bols colorés. Je me souviens qu’à ce moment-là, je ne me sentais pas réellement à ma place. Je les avais regardés un par un. A ma gauche se trouvait Mélissa, une jeune fille de quinze ans. Elle était grande et fine. Ses cheveux blond vénitien ondulés brillaient à la lumière du soleil. Sa peau blanche comme de la porcelaine faisait ressortir ses yeux verts. Sa bouche rosée et brillante riait aux éclats. Ce jour-là, elle portait un jean cargo beige et un débardeur blanc. A côté d’elle se trouvait Lucas. Il était un adolescent de quinze ans également. Il était petit et mince. Ses cheveux bruns étaient coupés en « coupe casquette » comme il l’appelait. Il avait la peau bronzée et les yeux bruns. Son nez était droit et sa bouche était fine et souriante. Il portait quant-à-lui un débardeur noir et un short de la même couleur. Il regardait Mélissa, je l’avais toujours soupçonné d’avoir un faible pour elle. A sa gauche, il y avait Loane. C’était une jeune fille de quatorze ans. Elle était petite et enveloppée. Ses cheveux frisés étaient d’un brun très foncé. Ils lui arrivaient aux épaules. Sa peau mate et lisse était parsemée de tâches de rousseurs. Ses yeux étaient verts. Ses lèvres pulpeuses étaient brillantes. Elle avait un jogging et un t-shirt oversized. Maxime, un garçon de quatorze ans également était assis à sa gauche. Il était grand et robuste. Il avait des cheveux roux qui tombaient devant ses yeux bruns. Il avait la peau blanche parsemée également de tâches de rousseurs. Il portait quant-à-lui un t-shirt blanc et un jogging noir. Et puis il y avait moi… J’avais quinze ans et j’étais petite et fine, pour ne pas dire maigre. Mes cheveux châtains coupés au carré m’arrivaient aux épaules. Mes yeux bleus étaient à moitié caché par ma frange rideau. Mes petites lèvres rosées mimaient un rire qui paraissait réel mais ne l’était pas. Je portais un jean bleu large et un cop top blanc. Je pouvais apercevoir mon reflet dans le miroir. Je ne m’étais jamais considérée comme quelque chose d’autre. Juste un reflet sans vie. J’avais l’impression d’être dan un corps et de laisser quelqu’un d’autre parler et agir à ma place. Et quand je repensais à mon ancien reflet, celui de quelques années en arrière, je ne voyais aucune similarité.

 

Nous habitions dans le même quartier et nous étions les seuls enfant du même âge, nous avions donc grandi ensemble. Régulièrement nous nous retrouvions chez les uns les autres pour passer le temps. Nous nous connaissions depuis quatre ans à cette poque mais moi et Lucas nous connaissions depuis bien plus longtemps. Nos parents étaient amis depuis la fac et étaient restés en contact. Je le côtoyais donc depuis ma plus tendre enfance. En premier, il y avait moi et Lucas, les deux seuls jeunes de ce petit quartier. Puis, Mélissa était arrivée. Nous étions en sixième et en milieu d’année, nous avions accueilli une nouvelle dans notre classe. C’était une fille, belle, drôle et audacieuse. Je la haïssais en secret. Je voulais être comme elle, à mes yeux elle était parfaite, mais la vérité c’est que, on peut porter n’importe quel masque, en dessous on est qui on est et notre passé peut être très bien dissimulé. Mélissa était venue me voir et au bout d’un moment, elle s’était incrustée et nous formions un trio. Je ne lui en avais bizarrement jamais voulu pour cela. Mélissa était la voisine de Loane, dès le début elle était venue lui parler. Loane était introvertie et n’avait pas énormément d’amis mais évidemment, Mélissa l’avait intégrée. Nous étions à cette époque-là en cinquième, Nous n’étions plus le duo indestructible, Lucas et moi et c’est à ce moment que j’ai commencé à la détester. C’était une miss parfaite et tout ce qu’elle avait fait, c’était détruire un duo et continuer à le réduire en miettes de jours en jours. En plus de s’incruster, elle avait ramené Loane. J’appréciais Loane mais sa présence contribuait à la perte de notre amitié. Et en quatrième, Loane avait ramené un garçon timide, Maxime. On s’entendait bien tous les deux mais ce n’était pas comme moi et Lucas. Mais tout le monde aimait Mélissa. Sauf moi…

 

 

Pendant que le soleil d’été se couchait, nous parlions et riions ensemble. Enfin, ils parlaient et riaient entre eux. Je n’étais qu’une spectatrice, je riais au moment où il le fallait et laissait croire que tout allait bien alors qu’intérieurement, je voulais juste partir d’ici. Me laisser guider par le doux et chaud vent d’été, et voler à travers les nuages, en oubliant la société stupide, en oubliant mes problèmes, en oubliant mon reflet, en oubliant Mélissa… Juste en volant. Mais évidemment, je ne pouvais pas m’en aller loin des normaux et leurs mensonges.

« Nous nageons tous dans une immense masse de superflu, de faux sourires, de faux, juste de faux. Pour être accepté, il faut être comme les autres qui cherchent eux aussi à être comme les autres. Il faut être « normal » mais dans le fond, personne n’est normal. Tout le monde s’invente un rôle pour cacher qui il est vraiment et paraître « normal ». Mais qui a décrété que quelqu’un était plus normal que quelqu’un d’autre ? Car la normalité un idéal qu’on ne pourra jamais atteindre, c’est juste un principe qui n’existera jamais. Les « pas normaux » sont justes des personnes qui osent montrer qui ils sont vraiment, et cette personne est méprisée par la société, c’est donc un « pas normal ». Et les « fous » ? Ils voient un monde différent des « normaux » mais qu’est ce qui nous dit qu’il n’est pas réel ? Les « normaux » sont juste une majorité de personnes, mais qu’est ce qui nous dit que la minorité n’a pas raison ? Ou même que personne n’a raison, que personne ne voit le vrai monde et tout le monde s’en invente un différent. » me dis-je, perdue dans mes pensées.

Le coucher de soleil me happa et m’hypnotisa. Dans le ciel se mélangeaient du rose, du violet et du jaune qui entouraient l’immense étoile qui m’éblouie. D’un coup, la lumière se fit trop claire et les couleurs trop vives. Ce mélange m’aveugla et me fit suffoquer, comme si elles m’empêchaient de respirer. Je me sentis étouffer, je me sentis vaguement tomber, j’entendis au loin des voix, comme si j’étais sous l’eau et que l’on parlait à l’extérieur. Je ne pensais plus, je ne ressentais plus rien, j’étais bien. Je ne savais même pas si mes yeux étaient clos, je savais juste que j’étais plongée dans une sorte de bonheur éternel. Je repensai à mes moments passés avec Lucas, à quand je riais vraiment, à quand j’étais heureuse. Je me sentis comme une plume, je virevoltais dans les airs, j’étais légère et joyeuse. Je riais aux éclats en slalomant parmi les arbres puis me posai sur l’eau. Je commençai à absorber l’eau et m’alourdir. Je quittai la surface de l’eau et commença à m’en aller et partir dans le but de toucher le fond. Je continuais ma progression en m’enfonçant toujours plus profondément dans l’eau. J’esquissai un sourire.

« Ça y est, j’ai bel et bien fini par couler… »

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