Abigael, le père Archibald, le docteur et Maureen étaient inquiets. Depuis quelque temps, Murray avait perdu le goût de la vie. Il se morfondait, un plaid en tweed posé sur ses genoux. Les affaires, le négoce, rien, plus rien ne l’intéressait. Il se balançait du soir au matin sur son rocking-chair en osier, les yeux dans le vague. Tout juste s’il s’alimentait. Aby ne reconnaissait plus son mari ; de jovial et facétieux, il était devenu, morne, éteint… Le visage fermé, le regard dans le lointain, il hantait cette demeure désormais !
Maureen, intelligente et vive, s’était interrogée sur les causes de cette subite dépression. Elle croyait en connaître la raison !
Elle s’en ouvrit à sa tante
— Vous savez ma tante, tout cela à commencé le jour où mon bienfaiteur m’a déposé dans la charrette ; quand j’ai dit adieu à mes parents… Vous êtes devenus ma famille désormais… mon oncle était déjà bizarre ce jour-là. Il pensait que je dormais, j’étais juste assommée par la fièvre et le chagrin. Entre deux cahots je l’entendais, il parlait seul, il se lamentait… Il s’est même mis à pleurer ! Il tenait des propos incohérents… Qu’il ne pouvait avoir d’enfants ! Que c’était Dieu qui m’avait envoyée! Que toute cette misère qui s’étalait dans les rues du bas Liverpool lui était devenue insupportable ! Que si Dieu le voulait, il ne boirait plus une goutte d’alcool ! J’ai entendu le docteur qui le disait hier… le spleen peut être dû à l’arrêt brutal du gin et du whisky !
Abigael regardait avec dévotion cette enfant si intelligente. Dieu ou la nature n’étaient pas justes. À certains, il refusait la richesse, mais accordait une myriade de gosses qu’ils ne pouvaient nourrir… à ceux qui en avaient les moyens financiers, ils leur interdisaient d’être parents… Maintenant que cette fillette était rentrée dans leur vie… Non, elle ne supportait pas… Faisant fi des conseils du pasteur et du praticien elle décida qu’il était temps de bousculer son homme.
— Tu es adorable Maureen ! Tu es un soleil ! Je vais te demander à toi au père Archibald et au bon docteur de quitter cette pièce. Vous sortez et vous fermez cette porte, je vais causer avec mon mari. La comédie a assez duré.
Alors, la lourde du salon tout juste poussée, un déluge, un violent orage s’abattirent sur le cottage !
— Debout, Murray ! debout ! Un homme, ça se tient droit ! Un homme, ça prend ses responsabilités ! Si tu as des soucis des problèmes, tu m’en parles ! Cesse de te retrancher derrière ce regard vide ! Affronte la réalité, ou bien tu auras affaire à moi ! DEBOUT ! ALLEZ HOP ! LÈVE-TOI !
Petit miracle… une voix timide et fluette répondit enfin !
— Pour l’amour de Dieu, Aby, ne crie pas si fort, je ne suis pas sourd !
Alors, radieuse Abigaël entrouvrit la porte et demanda
— Maureen va faire un tour s’il te plait ! Mes amis, venez me rejoindre ! Nous allons un peu discuter !
***
Le brave docteur Carpenter, ouvrit une bonne bouteille de scotch. Il en servit une rasade à Aby au Pasteur et au déprimé.
— C’est une boisson bénie des dieux ! Un petit gobelet n’a jamais fait de mal à personne ! Alors, mes amis, trinquons ! À la santé de Murray !
Puis, se tournant vers le malade qui hésitait à prendre son verre !
— Bien, très cher ! Prends-le ce verre ! Vide-le cul sec ! Et tu me racontes ce qui ne va pas…
La bouteille y passa finalement ! Murray avait retrouvé le sourire. Edwards Carpenter en avait déduit que le mal-être de son patient provenait d’un surmenage !
Il lui proposait, comme traitement, un changement de vie. Le couple avait largement les moyens de vivre de ses rentes désormais. il le lui dit :
— Murray ! Ton activité est florissante ! Ton négoce te permet de subsister dignement. Tu as accumulé assez de richesses maintenant ! Va les dépenser avec ta femme ! J’ai un cousin qui a épousé une petite fille du docteur Smollet, il demeure six mois à Londres, six mois en Italie ! Nizza, s’appelle la ville ! il paraît que c’est un paradis, l’hiver il y fait doux, ils ont une cheminée, ils ne l’allument jamais ! Ils mangent des oranges sur la plage !
Tu vas le voir de ma part ! Si ça te plait, les maisons la-bas, ça coute une bouchée de pain Et puis, tu ne seras pas dépaysé, la moitié de Londres hiverne dans cet éden !
***
Il avait exhumé un vieux livre de sa bibliothèque.
Travel Throught France and Italy
Un ouvrage de Tobias G Smollett, son père le lui avait offert pour ses 20 ans, il s’était toujours juré de faire ce voyage, visiter l’Europe ! Son périple commencé à Édimbourg s’était terminé à Cork en Irlande. Il en avait ramené comme souvenir une jolie rousse volcanique. Avec elle, il avait oublié, ses envies de voyages.
Puisque ce bon docteur le voulait, il allait la continuer son aventure , sous le soleil italien. Mais son ami, Edwards, le savait également, ses soucis de santé n’étaient pas, juste un peu de spleen ou un simple surmenage. Cette toux qu’il avait réussi à cacher à son épouse, il irait la soigner au bord de la mer Méditerranée.
J'ai bien aimé le passage du voyage avorté pour les beaux yeux d'une jolie rousse, je l'ai trouvé amusant. Maintenant, cette histoire de toux est inquiétante, espérons que l'air du sud l'aidera à se remettre.
C'est bien de voir le pdv de Maureen sur son bienfaiteur, on a le pdv des 2 côtés comme ça.
Mes remarques :
"Elle s’en ouvrit à sa tante" -> tante :
"à Aby au Pasteur et au déprimé." virgule après Aby
"pain Et puis," point après pain
"il avait oublié, ses envies de voyages." virgule de trop
Un plaisir,
A bientôt !
toujours un plaisir !