Je vends mes légumes à même le sol dans notre petit marché de village. Par pitié pour ma pauvreté quelques villageois m’en achètent mais je sait qu’ils ne les mangent pas.
Je vis dans une chaumière qui tombe en ruine, juste une pièce qui me sert de cuisine et de chambre. Mon puits ne donne plus d’eau, je récupère l’eau de pluie ou vais à la fontaine municipale. Je ne me suis jamais mariée mais j’ai eu un enfant que j’ai abandonné. La honte et la pauvreté, telle est ma vie.
Je n’ai pas de bêtes, je n’en ai pas les moyens, juste un minuscule jardin et 2 poules qui ne donnent plus d’œuf. Je n’arrive pas à les tuer, je les aime, je leur parle. Oui la folle qui parle aux poules, fille mère et vielle fille a la foi ! Il en faut bien une dans chaque village, une sur qui les enfants jettent des pierres. Je sort peu de chez moi mais ils m’attendent quand je vais au lavoir, quand je vais au marché dans mes vêtement rapiécés. Je ne me défends pas et ça les fait rire.
Je marche tête basse, voûtée, j’ai l’air d’avoir 80 ans mais je n’en ai que 30… La pauvreté, la faim auront raison de moi, je mourrai jeune et cela me satisfait. J’ai les jambes gonflées, je respire mal.
Pourtant j’ai été aimé et j’ai aimé follement. Ça n’a pas duré longtemps mais j’ai été heureuse plus qu’aucune autre. Et il est parti, je lui faisais honte je crois. J’ai porté son enfant sans avoir le moyen de me payer une faiseuse d’ange. Je me suis donné des coups au ventre mais il s’est accroché. Quelle vie aurais-je pu lui offrir? Une vie de malheur. J’ai accouché seule et l’ai confié au curé. J’espère qu’Il a été adopté par une gentille famille.
La raison pour laquelle les villageois ne mangent pas mes légumes est comble de la honte que j’utilise mes propres excréments comme engrais. Comment pourrais-je faire autrement? Je vous l’ai dit je n’ai pas de bête.
Je vais à la messe le dimanche même si les gens me regardent de travers. J’aime les paroles du curée, j’aime me convaincre que quelqu’un m’aime. Le Christ aime et pardonne à tous le monde et malgré mon erreur de jeunesse je ne suis pas une grande pécheresse.
-Ami remplis mon verre
Je suis l’ivrogne du village, je ne comprends pas comment j’ai réussi à être encore en vie à 50 ans. Je bois dès le matin, je bois le petit héritage que mes parents m’ont laissé. La plupart du temps je n’arrive pas jusqu’à chez moi le soir et dors dans un fossé. Comment un couple si travailleur a pu donner naissance à un cossard pareil ?
Je la vois passer la Claudine, la folle poursuivie par des enfants rieurs… Elle me fait peine, je lui achète des légumes que je mange. Je suis un gros dégeulasse. Je n’ai absolument pas entretenu la jolie maison que mes parents m’ont laissé. Elle est dans un état de saleté épouvantable et je m’en fout, tant que j’ai un toit sur la tête ça me va. Je suis le seul a lui parler, à être gentil avec elle, on peux dire qu’on est amis. Elle respire mal, quant je ne suis pas trop saoul je l’aide à porter ses légumes ou son eau. Avec moi les enfants ne l’embêtent pas.
Ma maison s’est effondrée ! Me voilà à la rue !
Les poules se sont enfuit, il ne me reste rien !
Marcelin viens à ma rescousse, il ne pourra pas rebâtir la maison et je sais que personne ne me viendra en aide!
Il me propose de venir vivre chez lui. Je n’hésite pas longtemps, je suis déjà couverte de honte alors ce ne sont pas les racontars des villageois qui vont me faire peur.
Elle a fait des miracles dans ma pauvre demeure! Elle a tout briqué, tous nettoyé. Elle me prépare a manger, lave mon linge. Elle a même réussi à faire un petit potager dans mon jardin plein de ronces. Quand je suis trop saoul elle viens me chercher et m’installe dans mon lit. Elle est forte malgré ses mauvais poumons!
Un jour je lui demande quel serait son plus grand rêve. Je voudrais la remercier.
-Je voudrais une vache, voila mon plus grand rêve, rien qu’une vache.
Ton récit est court mais émouvant. L'écriture est claire, sans fioritures, ce qui la rend facile à lire.
Est-ce que l'histoire se passe au moyen-âge ?
Je me permets de te donner un conseil pour rendre le texte plus compréhensible : Peut-être devrais-tu mieux espacer les paragraphes où on change de personnage, ou alors faire en sorte que le lecteur puisse comprendre immédiatement que le point de vue n'est plus le même.
Un récit de vie de village sans fioriture. La misère du quotidien, nue. Un récit à deux narrateurs. C’est une bonne idée bien qu’un peu déstabilisante au début. Je suis frappée par l’amertume et l’impuissance qui se dégage de ton récit, le fatalisme de cette pauvre femme. Mais comme tu le soulignes très bien, la misère est plus supportable lorsque l’on n’est pas seul.
J’ai été touchée par ton récit. En quelques phrases du expose et dénonce l’essentiel, tu ne cherches pas à nous imposer un jugement ou une morale, les faits parlent d’eux-mêmes. Je pourrais te conseiller de développer un peu ici ou là, mais je ne suis pas certaine que l’effet serait plus percutant.
J’ai un peu parcouru tes autres textes, de toute évidence, tu as des choses à dire.
Quelques coquilles :
- je sait : je sais
- a la foi : à
- Je sort : sors
- Pourtant j’ai été aimé : aimée ?
- Je me suis donné des coups : donnée
- et pardonne à tous le monde : tout
- Ami remplie mon verre : remplis
- je ne comprend pas : comprends
- Je boit dès le matin : je bois
A très bientôt