Dans l'antre du Sphinx

L’œil fixe du sphinx le pénétra d'horreur, il venait de réaliser qu'il avait été l'objet d'une odieuse machination. Mais trop tard! La porte de la chambre funéraire venait de se refermer. Derrière la cloison, un bruit de pas qui s'éloignait lui fit prendre conscience de la situation.

Seul, à plusieurs mètres sous terre, au-dessus de lui, des milliers de pierres, et pour toute compagnie une dépouille mortelle surplombée d'un sphinx au regard menaçant.

“ Le silence qui pèse, la lumière qui vacille et l'angoisse qui serre la gorge, la mort peut-être, sacré scénario ! ” Pensa-t-il en se moquant de lui-même, tout en rafermissant sa main sur la torche. Son regard se porta sur le reste de la chambre mortuaire. Un amas d'objets utilitaires ou décoratifs lui firent un moment oublier le temps.

"Une sortie de secours, il doit bien y en avoir une quelque part, mais où ?"

De nouveau la peur le reprit :

"c'est trop bête de s'être laissé piéger de la sorte, à croire que je suis un débutant!"

Le sphinx qui l'observe, les murs qui ne recèlent aucun passage apparent, l'air qui se raréfie et la fébrilité de son comportement augmente d'autant. Il fallait qu'il se reprenne, qu'il respire posément, ce n'était pas le moment de faire une crise de panique. Du moins pas encore!...

Tout-à-coup, il pense au papyrus qu'il avait déchiffré lorsqu'il était étudiant, il y a de cela plusieurs années. C'est drôle comme la mémoire est capricieuse! Ce vieux document faisait état d'un sphinx et d'un passage menant vers la plénitude céleste. Longtemps il s'était questionné sur la signification de ces hiéroglyphes. Il s'approcha davantage du sphinx, et il lui apparut avoir perdu cet air menaçant, son œil refléta comme une complicité bienveillante.

De la main il toucha l'œil de la statue et il sentit qu'il pouvait le faire bouger. Comme par enchantement, la base de l'animal mythique pivota, laissant un passage qui s'enfonçait dans le sol. "Plénitude céleste! Tu parles! Une descente aux enfers plutôt."

Quoi qu'il en soit, n'ayant pas d'autres choix, il s'engagea dans l'ouverture. Sa torche à la main, il parcourut un dédale de couloirs, qui tantôt montait, tantôt descendait. Quand enfin, il aperçut la lumière du jour, sa torche venait de donner sa dernière lueur. Des pierres masquaient l'ouverture, un éboulement avait dû l'obstruer. Quelques minutes d'efforts suffirent à élargir le passage.

Il venait d'arriver dans la cave d'une maison dont le propriétaire, proxénète de père en fils, vantait l'origine et l'ancienneté.

Plénitude céleste, c'est une façon de voir!!