Lorsque j’entrais dans la Résistance, je participais dans Nantes encore occupée aux émissions clandestines de la radio bretonne. J’habitais la commune libre de St Joseph et après la Libération je fus déçu qu’un Etat Breton ne soit pas créé. Mais la force des choses montre que la révolution a de multiples causes et je m’insurge contre la voie unique de l’histoire. Comme les Templiers un 18 Brumaire au milieu des préjugés partisans. Mais après mes études de lettres, je suis devenu jardinier dans les bas fonds et j’ai été confronté à une autre culture car j’étais en quête de la différence. Pas de passerelles dans ces aventures coloniales. Mais un jeu d’enfants pour un voyage au centre de la terre. Je mets désormais en scène mon été indien dans ce maintien de l’ordre, en effet la mémoire est falsifiée. Moi je suis un astronaute ayant déserté sa planète natale à cause des recherches archéologiques à faire dans le Yucatan. Fables sous rêve ou sous cannabis. Mon histoire est illisible dans les lignes d’un dessin truqué. Mais je n’ai pas fait les jardins de Versailles pour avoir la certitude morale de ma philosophie de chercher la lumière avec la lumière. Pour échapper à la société de Jésus, mes parents ont émigré en centre Bretagne, alors que je grandis en étudiant la médecine universelle des druides dans un univers rural où je ne me séparais pas de la source. Je commençais à fréquenter les musiciens bretonnants et j’étais partisan de la paix, de la sécurité et du bonheur des hommes. Mais mes brèves expériences dans l’enseignement du breton et dans l’activisme politique au sein du FLB me faisaient faire des maisons dans les dunes pour accueillir les touristes. La récolte est perdue dans cette terre d’harmonie. Les petits bourgeois ont bâti un monde rural en gagnant sur les terres sablonneuses de la riviera. Moi j’ai grandi entouré par la grande misère des paysans bas-bretons alors que la mortalité est énorme comparée à une émigration étonnante. Tout m’a touché ou plutôt tatoué dans mon rôle d’apprenti sorcier. Je dénonce depuis lors les injustices sociales des régimes en place. Pour déchiffrer la Bretagne et les hommes qui la peuplent, le mystère de la nature c’est que le paysage crée l’homme et que l’homme crée la nature pour que s’accomplisse l’œuvre de Dieu. Dans le Finistère naissant, depuis que j’ai étudié la botanique et la pharmacopée, je ne cesse de refuser d’entrer dans la vie publique pour mieux être romantique dans mon septentrion en compagnie de l’armée rouge du pays de Galles. J’ai combattu trois gros bonshommes anglais. Ils étaient envieux de la tempête humaine avec leur progrès technique. Croissance du bien-être matériel ou création artificielle des besoins de consommation ? Je suis triste de la démission de l’homme et de la dignité humaine. Seule compte le triomphe de la fabrique de saucisses. Mais il est impossible de transformer les chiffres en fleurs. Dans cette conspiration des sentiments, l’envie des riches fait scandale. La liste des bienfaits dont ils s’abreuvent n’est qu’éphémère comme la carrière des actrices qui cherchent à s’incorporer à la société du spectacle. Ce noyau de cerise sur lequel je glisse, c’est celui d’un jeune homme sévère qui a gardé l’idéal d’un héros moderne. Dans l’inutilité de garder le silence pendant quinze ans, chaque jour une ligne. Moi j’ai préféré la mort civile à la prostitution de mon art. Je fais de la musique depuis l’âge de neuf ans avec la volonté de mettre sur bande son mes idées de cathare. Le bûcher de Montségur ne me fait pas plus peur que les grands brûlés des cités charnelles. Aussi en Bretagne c’est une vieille dame qui prêcha la croisade. Je plonge dans le temps comme je plongeais autrefois dans la baie de Concarneau. Mais cette fois-ci c’est la civilisation qui manque de souffle et s’étiole. Les choses s’enchaînent de façon prodigieuse : voyages, moeurs, amours, meurtres. Bientôt le passage du temps rendra incompréhensible mon passage sur terre. Alors que les héros saisis dans le temps de l’histoire vieillissent douloureusement dans l’intimité. Cet effet de proximité est visible dans l’argile du premier homme qui renait de ses cendres. Mais moi je me frotte le corps de lavande et de genêts car ma vieille servante a les mains rugueuses comme des brosses. Peu importe, il ne me reste que la joie des pauvres, alors que les mouvements de foules obéissent aux prédications des ermites. Mais à quoi bon admonester les pauvres de Dieu alors que la boutique appartient aux riches ? Dans ma famille, nous sommes tous issus du Finistère breton ou presque. Mais les armées qui s’en vont aujourd’hui délivrer Jérusalem sont toujours sous le commandement d’Alan Fergent et constituées de longues cohortes de loqueteux de chez nous, qui ne se mêlent pas à l’armée des princes Francs. Dans les rêves des bretons on pénètre en Terre sainte pour disputer aux fils de Mérovée la descendance du Christ. Rêves et déceptions. Même l’horreur succéda à l’enthousiasme. Cette pierre angulaire a été achoppée pendant la guerre de Troie et tous les petits seigneurs des environs de Quimper ont envoyé des chevaliers en Terre sainte alors que les petits nobliaux de province avec leurs tournois, leurs moeurs grivoises et leurs sanglants règlements de comptes nous ont spolié de la Bibliothèque bretonne. Autoportrait en manuscrits de notre pays.