Entre deux mondes

Par Alwenah
Notes de l’auteur :  

 

Je m’éveille brusquement, l’esprit parasité par un cauchemar dont je ne parviens pas à me souvenir. Je cligne plusieurs fois des paupières, en vain : le noir est total. D’un bond, je repousse le drap qui me recouvre et me redresse afin de chercher à tâtons l’interrupteur.

 

Le choc a été brutal. Je m’étais à peine relevée, que ma tête a heurté une surface plane et dure. Encore sonnée, mes mains retracent l’endroit où je me trouve. Exigu. Froid. Désespérément sombre… Ma respiration s’accélère tandis que je prends conscience d’être enfermée dans une espèce de rectangle étroit, à peine plus grand que moi. Et enveloppée de ténèbres… Une nuit opaque et sans étoile s’est pernicieusement infiltrée sous mes paupières.

 

Serais-je dans une chambre d’hôpital ? Non, impossible… Je n’ai pas le temps de me poser d’autres questions car déjà, un détestable sentiment de claustrophobie aigu se manifeste. Ma respiration se hache, siffle. Et mon cœur, effrayé, accélère ses battements. De plus en plus vite. Tellement, que je m’attendrais presque à le voir jaillir de ma poitrine. Mon envie de sortir de ce trou noir se fait rapidement viscérale et de toutes mes forces, je pousse contre chacune des parois qui me recouvrent… En vain. Elles tremblent à peine.

 

Ce n’est que maintenant que j’en prends conscience. Perdue dans ma frayeur, je n’ai même pas pris la peine de le remarquer. Le froid. Pernicieux. Immobile. Il est comme un millier d’aiguilles gelées me transperçant, me trouant la peau. Agit comme une brûlure toujours ravivée, sans cesse attisée. L’hiver s’est infiltré dans cet endroit, il côtoie les ténèbres. Dédaigneux et glacial. Désespérément hostile… L’angoisse me quitte peu à peu tandis qu’il engourdit mes membres.

 

Je peux alors tenter de réfléchir. La première chose qui me vient à l’esprit est un film, Kill Bill. Enfermée vivante dans un cercueil, elle parvient à s’échapper en le détruisant de son poing. J’ai alors l’envie subite de l’imiter. Je souffle sur mes mains pour les réchauffer et me concentre. Sûre de moi, je lance mon poing vers le haut de toute la force dont je suis capable.

 

Mauvaise idée. Très mauvaise idée.

Le craquement qui s’ensuit brise sombrement le silence qui m’entourait. Je ne retiens un cri de douleur qu’en me mordant violemment la lèvre. Mon poignet se trouve dans une position tellement improbable que je sens à peine ce goût amer et ferreux emplissant ma gorge. Quelques secondes durant, je maudis ma stupidité. Pourquoi diable avoir tenté de l’imiter ? Cette boîte exiguë n’est pas faite de bois, loin de là…

 

Puis je cesse tout mouvement. Soudainement. Je crois avoir compris. Ai peur de comprendre. Une boîte de fer… Brinquebalant légèrement mais désespérément close… Je ne me trouve pas dans un cercueil. Pas encore. Cet endroit… C’est une morgue !

 

*

 

La réalité de la situation m’a fait perdre conscience. Combien de temps suis-je restée endormie ? Quelques secondes, des heures, une journée entière ? Je ne saurais le dire.

 

Au milieu d’un silence morbide, j’attends. Epuisée, blessée, je lutte pourtant contre la fatigue. Je m’effraie à l’idée de ne pas me réveiller… Mon poignet me fait souffrir. Horriblement. Chaque innocent battement de cœur provoque une douleur fugace mais certaine. Battements qui, il me semble, deviennent de plus en plus erratiques et irréguliers. Et sans cesse ce silence… Il m’oppresse, m’obnubile. Il est là, tout autour de moi, m’écrasant les tympans. Je pourrais presque le palper ! La folie… Elle me guette. Attend patiemment le moment où je céderais, éternellement patiente… Le temps paraît filer à côté de moi. C’est comme si… Je n’existais déjà plus.

 

Soudain, un bruit de pas. Ténu. Étouffé. L’aurais-je rêvé ? La démence se serait-elle finalement emparée de mon esprit trop fragile ? Non, c’est bien réel ! Le bruit d’une clé déverrouillant une serrure se fait entendre. Cela fait si longtemps que j’erre au milieu du silence que ce son me paraît atroce, infiniment fort. Mais je me tais. Oh, comme j’ai peur que ma voix criarde et éraillée ne fasse fuir celui qui vient à mon secours !

 

Un nouveau bruit de clé retentit juste à mon oreille. Puis je me sens brusquement transportée, quelqu’un ouvre le tiroir dans lequel je me trouve, et je suis aveuglée. Comme si le soleil avait décidé d’élire domicile juste devant mes yeux. La douleur est intense, mais je la vivrais mille fois si elle pouvait me sortir de ce calvaire ! Doucement, mes pupilles s’habituent à la lumière omniprésente et je distingue enfin la silhouette de mon sauveur, penché sur moi. Je ferme les paupières un court instant puis les ouvre à nouveau.

 

Les traits de son visage m’apparaissent alors, un peu flous. Puis de plus en plus précis… Je distingue un sourire. Si à première vue il semble rassurant, il en est en vérité tout autre. Il est… Carnassier. Perfide. Sadique ! Désespérément sauvage. Son haleine fouette mon visage, elle a l’odeur amère du sang. Je n’ai à peine le temps de réaliser que cette personne n’est pas mon sauveur mais mon bourreau, qu’elle avait déjà violemment refermé le tiroir.

Définitivement.

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Fannie
Posté le 11/03/2018
Coucou Alwenah,
C’est vrai que j’arrive avec quelques années de retard, mais zéro commentaire, ce n’est pas sympa. Le sort de la narratrice ne l’est pas non plus, d’ailleurs.
Ce récit est bien écrit, mais je trouve que l’angoisse de mourir là n’est pas assez présente. Il me semble que cette situation d’enfermement devrait être terrifiante pour la narratrice. Pourtant, sa peur s’exprime principalement à travers l’observation des battements de son cœur.<br /> J’aurais préféré qu’à la fin, il reste un peu d’espoir. (Bon, je peux toujours me dire que tout cela n’est qu’un cauchemar...)
Quelques remarques :
Encore sonnée, mes mains retracent l’endroit où je me trouve [Après « Encore sonnée », il faudrait continuer avec « je ».]
Tellement, que je m’attendrais presque [Je ne mettrais pas de virgule ici.]
Agit comme une brûlure / Ai peur de comprendre. / Attend patiemment le moment [Je mettrais un sujet dans ces phrases ; si je trouve normal d’omettre le sujet après une virgule, je trouve le procédé dérangeant en début de phrase.]
Attend patiemment le moment où je céderais [où je céderai ; je mettrais le futur simple, à moins qu’il y ait un doute quant au fait qu’elle cédera.]
C’est comme si… Je n’existais déjà plus. / Il est… Carnassier. [Comme le point de suspension exprime une hésitation au milieu de la phrase, je le ferais suivre d’une minuscule.]
Je n’ai à peine le temps de réaliser que cette personne n’est pas mon sauveur mais mon bourreau, qu’elle avait déjà violemment refermé le tiroir. [J’ai à peine le temps ; on ne met pas de négation avec « à peine » / l'anglicisme « réaliser » pourrait être remplacé par « comprendre » ou « me rendre compte » / concordance des temps : qu’elle a déjà (…) refermé]
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