Jean-Jacques me répète à l'envi, qu'il faut croire en l'espèce humaine. Que celle-ci a toujours trouvé des ressources pour se sortir de ses mauvais pas. Certes, quelquefois trop tard, ou en créant de nouveaux problèmes à vouloir résoudre les précédents. Qu'importe il faut avancer, toujours, regarder de l'avant, car ce n'est pas très joli ce qu'on voit dans le rétroviseur, alors, comme un grimpeur ne regarde pas le bas de la falaise, on monte, toujours plus haut, de façon toujours plus risquée. On sait que ce n'est pas raisonnable, mais il faut pourtant poursuivre, ne pas perturber la troupe qui ne regarde que le bout de son nez, que son confort immédiat et qui ne veut pas s'entendre dire comment vivre.
-- Laissez-moi libre, crie ainsi la cigale, d'aller choisir mes achats spontanément, de me fondre dans la foule des temples modernes, d'y remplir mon charriot et d'y épuiser mes crédits insolvablement. Peu m'importe que ces choses s'avèrent inutiles une fois rendues chez moi, d'autres achats toujours aussi impulsifs viendront les remplacer assurément. Mon frigo est à l'image de mon ventre, abondant, regorgeant de vivres, ainsi je me sens à mon aise dans le monde.
-- Jean-Jacques avait pourtant bien parlé, pour autant je crois qu'on ne s'en sortira pas indemnes cette fois-ci à outrepasser les limites planétaires. Leurs voitures sont à l'égal de leur égo, surdimensionnées. Leurs vacances sont au bout du monde, pour faire de belles images qui s'agglutinerons à des milliers d'autres, que personne ne regardera, les images des autres ne font pas envie. Leurs voitures sont devenues obèses, disais-je, à l'instar de leur vie au format SUV, quand le reste du monde crie famine.
Alors mon cher Jean-Jacques, je regarde mon frigo presque vide, et dans la lumière bleutée de ma frugalité, je trouve cet espoir que l'humanité survivra bien à l'âge du consumérisme, et j'entrevois serrés autour d'un feu, un groupe discuter du partage de leur maigre récolte, les uns optant pour un partage équitable à l'ensemble du groupe, d'autres insistant pour prendre en compte l'effort fourni, le consensus étant tranché par le mâle alpha qui s'accorde une part double, vient ensuite le débat sur la sécurité, où comment se protéger contre les raids que tentent encore à l'occasion les derniers hommes gras, à la chair si prisée.