Nathaniel venait de traverser le Jardin Public avec Equinoxe, main dans la main, pour se rendre chez Elliot. Le styliste avait apparemment un appartement donnant sur le parc. En effet, il en eut confirmation, en se rendant compte de la vue sur laquelle donnait la baie-vitrée de son salon, laissant entrée une grande quantité de lumière naturelle.
Le brun leur avait passé un appel, souhaitant apparemment les voir par rapport à ce qu'il s'était passé pendant la convention. Nathaniel comprenait parfaitement, vu ce sur quoi ils étaient tombés en arrivant dans les coulisses de la grande scène. Le couple ayant bien compris que la relation entre Elliot et ses parents était des plus conflictuelles. Nathaniel avait bien cru qu'il allait mettre un pin dans la gueule du père tellement il avait été irrespectueux avec sa petite-amie.
Enfin installés dans le salon avec boissons et petites douceurs, Nathaniel observa plus attentivement la décoration alentour. Elle était très particulière. Enfin, il avait surtout l'impression d'être dans la loge d'une drag-queen en train de se préparer pour un spectacle. L'intérieur d'Elliot était bien comme sa façon d'être. Haut en couleur. Il trouva cela amusant, c'était rare des personnes aussi expressives et sans réels tabous. Bien que le sujet de sa famille semblait des plus proscrites. C'est la tatoueuse qui fini par prendre la parole.
- Bon… Et si tu commençais par tout nous dire ? la questionna-t-il avec douceur, et ce sourire aussi tendre qu'une caresse.
Il n'y avait pas à dire, Nathaniel était tombé sur la femme la plus douce de la Terre. Enfin, c'était son avis. Reportant son attention sur le styliste qui pour le coup, avait bu cul-sec son verre pour se donner du courage avant de se resservir.
- Je ne peux plus vous le cacher… Surtout à toi Nox'… On se connaît depuis si longtemps, mais même toi tu ne savais rien…
- Ne t'en fais pas, je comprends. On a chacun notre jardin secret, notre honte bien enfouit.
- Je m'appelle Elliot Charles Longrey… Et… Je suis britannique… Descendant de la famille Longrey, des membres de la chambre des lords très connu…
- Donc… Ton père est Lord ? demanda l'avocat, songeur.
- En effet…
- Donc tu es Anglais ? Vraiment, je ne l'aurais jamais imaginé vu ton accent, Luciole… fini par glousser Equinoxe, étonnée.
Ce qui redonna un peu le sourire à l'hôte, qui attrapa un petit gâteau pour grignoter. Il fallait qu'il s'occupe les mains quand il était nerveux comme ça.
- Ma famille est vraiment très aisée… Et du coup, mon enfance n'a jamais était des plus roses… Toujours avoir un certains paraître devant les autres… Ne pas être faible… Toujours tiré à quatre épingles, qu'on te dise quoi faire sans avoir ton mot à dire… Et surtout… Le pire dans ce genre de famille ?… Avoir un petit garçon, un futur héritier… Aussi sensible qu'une fillette… C'était clairement un déshonneur pour mon père…
Au fur et à mesure qu'il parlait, on pouvait sentir la tristesse et le stress disparaître, pour se transformer petit à petit en une rancœur brûlante. Ses mains se mettant à trembler, du coup, Equinoxe en attrapa une, la lui serrant. Nathaniel, quant à lui, moins à l'aise avec ce genre de démonstrations entre amis, posa simplement sa main sur le genou du brun, lui souriant de compassion, se doutant de l'affreuse enfance qu'il avait du avoir, connaissant le bougre.
- Ils avaient même décidés de mes études et de mon avenir !… Rendez-vous compte ! Ils voulaient d'un brillant agent immobilier dans la famille ! Le meilleur de Londres, et bla et bla…
Nathaniel ne put s'empêcher d'éclater de rire. Ce qui attira les regards des deux autres sur lui. Equinoxe, le fusillant du regard alors qu'Elliot lui souriait, ayant sûrement deviné pourquoi il avait ri.
- Attends… Toi en agent immobilier ? Je t'aurais bien vu en coiffeur ou vendeur de vêtements… Mais ça…
- Ouais, ce n'est décidément pas un métier qui me va au teint ! renchérit le styliste, qui avait bien besoin de rire en ce moment.
Ce fut à Nathaniel de se resservir un verre cette fois, le sien de terminé. Pour le coup, ils ne buvaient pas d'alcool, vu qu'on était en semaine et en pleine après-midi, bien que l'avocat présentait qu'Elliot en aurait eu sûrement recours. Peut-être avait-il bu avant qu'ils arrivent ? Il n'aurait su dire.
- Enfin voilà… Alors que moi, je voulais faire des études de stylisme. Avoir un styliste reconnu dans sa famille, c'est quelque chose ! Tu imagines, avoir Yves Saint Laurent dans ta famille ?
- C'est vrai qu'être styliste de mode, c'est une situation qui amène la gloire et la fierté généralement… Enfin, à notre époque. Confirma sa meilleure amie.
- Mais bien sûr, pour mon père, c'était un métier de femmes, et une honte d'avoir un homme qui faisait de la couture comme lien de parenté… Je suis son seul fils, son seul enfant, et ce qui compte pour lui, c'est le paraître !… s'écria-t-il, ce qui choqua un peu les deux convives.
Après cela, Elliot resta silencieux quelques peu, alors qu'Equinoxe lui frottait le dos.
- Enfin voilà… En gros, je me suis enfui pour aller faire mes études et depuis, je me cache comme je peux pour ne pas qu'ils me retrouvent, car ils souhaitent me convaincre de revenir auprès d'eux… Je ne sais pas comment ils ont fait pour me trouver… Je vivais bien depuis dix ans maintenant, sans problème…
- Pourquoi ne pas essayer de se rapprocher d'eux ? demanda la tatoueuse.
- Nox' a raison. Tu as ta vie maintenant. Tu es indépendant financièrement et majeur. Ils ne peuvent te forcer à rien. Si ça se trouve, ils t'ont cherchés aujourd'hui, juste car ta mère veut profiter de son fils, malgré tout ? intervint le brun aux yeux mauves.
Long soupire du créateur, qui se lâcha les cheveux en se passant une main dedans, stressé.
- Peut-être… Ma mère m'a appelé ce matin… Apparemment, ils font un gala bientôt, et donc reste longtemps à Bordeaux… Elle voudrait que j'y assiste…
- Eh bien voilà une solution, fini par dire l'avocat.
- Comment ça ?
- S’ils restent longtemps, sors seul avec ta mère en ville, fait lui visiter ? Aller faire les magasins pour ce gala ? Aide-la ? Discute avec elle pour avoir le fin mot de cette histoire.
- Nathaniel à raison. Et puis… Je suis sûr qu'avec ton expérience et tes goûts, tu arriveras à lui trouver une robe qui la ravira… Ou bien lui proposer de lui en faire une, mais pas en latex, bien entendu, ponctua la tatouée avec un sourire complice pour Elliot.
Tout ceci sembla ravir le pauvre garçon. Alors que finalement, Equinoxe se leva, disant qu'elle devait partir au salon, qu'elle avait reçu un message de son associée. Disant à Nathaniel, qu'il pouvait rester s'il le voulait. Finissant par connaître le ténébreux qui n'était vraiment pas à l'aise avec les amis des autres. Même s'il commençait à considérer la bande du Crimson comme ses propres amis à lui aussi.
- Ahhh enfin seuls entre hommes ! fini par sortir Nathaniel, une fois qu'Equinoxe avait claquée la porte.
- Pff… T'es con !… gloussa Elliot, qui parti en fou rire avec lui. Je savais pas que tu avais un côté beauf Nath' !
- Nah, c'était simplement pour que tu arrêtes de penser à tes parents. Et si on parlait d'autre chose ?
Elliot semblait soudainement avoir retrouvé le sourire, ce qui le rassura.
- On a qu'à parler de ce qu'on connaît le mieux, le BDSM !… En tout les cas, sache que j'étais assez surprit quand Nox' m'a dit que tu étais d'accord pour du libertinage.
Cette fois, ce fut à Nathaniel de soupirer. Se servant un nouveau verre.
- C'est pas que je suis contre, bien au contraire. Mais c'est aussi, que vu que je ne pratique pas depuis longtemps… Je me dis que si Equinoxe a besoin de quelque chose que je ne peux pas lui apporter, car je ne le pratique pas, ou ne sait pas faire, ce serait un plus important dans notre couple.
- Ce n'est pas bête du tout comme raisonnement, tu sais ? Et puis, c'est pareil. Imagine qu'elle veuille dominer, mais qu'elle ne soit à l'aise qu'avec… Absynthe par exemple. Ou que toi, tu ne te sentes pas de te faire soumettre.
- Voilà, c'est tout à fait ça.
C'était une bonne décision qu'ils avaient pris ensemble, surtout car Equinoxe ne voulait pas se sentir prisonnière de sa relation. Elle ne voulait pas ne pas pouvoir participer pendant une soirée avec ses amis surtout. Alors Nathaniel avait accepté. Lui aussi, ça ne le gênait pas. Le seul truc… C'est qu'il n'avait pas du tout envie d'aller voir ailleurs, pour quoi que ce soit, Nox' le satisfaisait complètement.
Le seul motif pourquoi il irait voir ailleurs, serait de demander une sorte de cours d'initiation à la domination à Charlotte et Absynthe pour se perfectionner. Car même s'il paraissait froid de l'extérieur, ce n'était qu'un masque pour le travail et les relations extérieures, même si avec Charlotte c'était plus par jeu. Une fois chez lui, et dans l'intimité, il était quelqu'un de doux et d'avenant.
- Hum… Dis-moi Nathaniel, j'aurais une question… se mit à alors à parler Elliot, prenant un ton plus qu'hésitant, comme s'il avait peur de sa réaction.
Relevant un sourcil d'étonnement, le ténébreux enjoignit son ami à parler librement, d'un geste de la main pour l'encourager.
- Tu ne serais pas jaloux, si je proposais une séance à Equinoxe ?
- Non, pourquoi ? Je me doute que d'être seul te pèse un peu.
- Ouais, assez. Et parmi tous, il n'y a qu'elle de susceptible d'accepter.
C'était une première pour lui. Qu'on lui demande directement… Dans sa tête, ça allait plutôt être quelqu'un qui demande à Nox' pour une séance et elle qui lui en parle, juste pour l'informer de ce qu'il allait se passer…
- Super, merci. Je ne voulais pas que tu sois jaloux ou quelque chose comme ça…
Elliot semblait vraiment sincère, car il venait de rougir de gêne. Ce qui alla droit au cœur de l'avocat. Il comptait parmi eux maintenant. Mais c'est alors que le styliste fit une grosse, une très grosse erreur…
- Ça fait tellement longtemps que j'ai envie de la soumettre, tu n'imagines pas… Depuis que je la connais presque !…
- En espérant qu'elle accepte, déjà, lui répondit-il un peu sèchement, comprenant ou le britannique voulait en venir. Il n'aimait pas le chemin que prenait cette conversation…
- Oui, c'est sûr, bien sûr. Mais ah… Caresser ses jambes tatouées, alors qu'elle est prisonnière de mes liens… L'entendre gémir sous mes tortures… Et la voir mouiller face à moi… J'ai tellement envie de la voir dans cet état par ma faute !… J'adore la voir rougir de honte quand on lui rappelle qu'elle aime ça.
S'en était trop pour Nathaniel.
- On peut arrêter de parler de ça ?
- Hein ? Pourquoi ? On parle de BDSM et de ta copine en plus de ça.
Vraiment, il y avait des moments ou Elliot ne se rendait pas compte de ce qu'il disait. L'avocat, bien que d'accord pour le libertinage, avait toujours une peur au fond de lui. Qu'Equinoxe finisse par tomber sous le charme d'un autre dominant, bien plus dominant que lui… Et qu'elle le quitte… Mais il n’était pas en colère contre Elliot qu'à cause de ça… Aussi parce qu'il parlait de sa petite-amie comme d'un objet. Même si c'était le propre du BDSM, parler d'elle comme ça… Sans sa présence, qui accepte ça… Pour lui, ce n'était pas quelque chose qui le mettait en joie naturellement.
- Ouais bah ma copine, avant d'être une soumise, c'est une femme et MA copine ! Tu crois que ça me fait plaisir d'entendre qu'un autre mec la touche et parle d'elle comme d'un putain d'objet ?! s'énerva-t-il en se leva d'un coup.
Se rendant compte de la merde qu'il venait de mettre entre eux, Elliot se leva aussi, alarmé et un visage des plus désolé.
- Pardon ! Je ne pensais pas que ce genre de propos te mettait mal… Vu que tu étais pour le libertinage…
- Ouais, je suis d'accord mais ça veux pas dire que j'aime ça de mon côté !… Putain Elliot, tu t'entends dès fois ? Equinoxe n'est pas une lampe ! Merde !…
Nathaniel avait les larmes aux yeux tellement il était énervé. Sortant à toute vitesse de cet appartement. Il devait s'éloigner d'Elliot, car même s'il s'était excusé, le mal était fait. Nathaniel avait peur et ressentait une étrange colère. Non, il n'aimait pas le libertinage. Il n'allait pas être excité à voir la tatoueuse se faire toucher par un autre que lui. Même s'il avait accepté pour qu'elle se sente bien. Il avait si peur. Il ne voulait pas perdre cette relation dans laquelle il se sentait bien. Merveilleusement bien. Lui qui n'avait jamais vraiment eu de relation avec quelqu'un…
Laissant alors Elliot avec sa mine de chien battu, dans son grand appartement.