(fin) Au kévrien qui recevra ceci,

Notes de l’auteur : Et voilà, c'est le tout dernier passage de ce (très) long roman ! Merci d'être arrivés jusque là :D
Comme je l'indiquais au tout tout début, il s'agit d'un premier jet, qui subira encore des corrections/réécritures/rectifications d'incohérences et autres transformations. Je ne sais pas quand ça arrivera, mais en attendant, si vous avez quand même survécu jusqu'ici, un gros merci, que vous ayez lu discrètement ou laissé un commentaire à chaque chapitre :)
A bientôt pour de nouvelles aventures ?
PS : si vous avez lu le prologue il y a longtemps, jetez-y un oeil avant de lire la lettre d'Edgard !

Au kèvrien qui recevra ceci,

Mon nom est Edgard Dune, et je suis le médecin attitré de l’éminente famille Mazteroff, et de tout ceux qui croisent ma route.

J’ai le regret de vous annoncer que la personne qui portait ce pendentif, une valeni dont le nom m’est inconnu, est morte sous les griffes de plusieurs Féroces. 

Je ne sais pas la nature de votre relation, ou même si vous teniez particulièrement à cette personne. Je ne sais même pas quel est votre nom, ni si cette lettre parviendra entre les mains du bon destinataire. Peut-être ce pendentif a-t-il été volé, ou arraché à un ennemi, après tout. Mais je crois qu’au contraire, elle avait une juste motivation pour le porter. Et que, si j’ai raison, il ne sera sans doute pas si difficile de trouver le Kèvrien à qui annoncer la triste nouvelle.

J’aimerais que vous sachiez qu’elle s’est battue vaillamment. C’est de peu de réconfort, je le sais bien. J’ai déjà perdu quelqu’un qui m’étais cher, et je m’en suis arraché le poil pendant des mois. J’ai aussi, à ma plus grande honte, mordu tout ceux qui cherchaient à m’apaiser. Les morsures cicatrisent, cependant - j’en ai fait une de mes spécialités.

Non, j’aimerais plutôt que vous sachiez que la dernière pensée qui l’a traversée, avant que sa voix ne s’éteigne pour toujours, a été pour des êtres qui lui étaient précieux. Elle a parlé d’une promesse, qui, je le crains, ne pourras désormais plus être tenue. Ne lui en tenez pas rigueur, je vous prie. Les promesses sont faites pour qu’on y croit, même lorsqu’on ne peut les mener à bout ; je suis même convaincu que certaines sont destinées à être brisées dès qu’elles sont émises. Cela n’en fait pas de mauvaises choses. 

Si cela peut vous apaiser, ou vous distraire quelques instants, ou vous faire sentir moins seul, je peux même vous parler d’une promesse que j’ai moi-même faite, et que je ne tiendrais jamais. Si au contraire, vous n’avez pas le temps pour les sottises d’un lapin docteur, vous pouvez sans regret chiffonner cette lettre et la jeter dans le désert pour qu’elle y soit dûment dévorée.

J’ai deux frères - l’un est un maegis, à qui j’ai servi de grand frère, comme il est de tradition chez notre peuple ; l’autre est un oranimus comme moi, qui a été élevé pour lui-même, parce que notre mère en a eu envie et que, lorsque Fanom Mazteroff a une idée en tête, il est difficile de l’en détourner. 

Voyez-vous, tous les quatre, nous nous étions promis, dans le cas où nous serions séparés, quelle qu’en soit la raison, de toujours nous retrouver avant le prochain Tremblement.

Alors même que je pose ces mots sur ce morceau de papier trop épais, j’ai l’envie pressante de ranger ma plume, et de prendre la route vers le désert pour vous parler moi-même, et supplier que vous me donniez passage de l’autre côté. Parce que, voyez vous, mon oranimus de frère s’y trouve, et je ne sais même pas s’il est en vie, et s’il est seul, et s’il a besoin de moi.

J’ai, dans la même mesure, le désir de reprendre la route à grands bonds, pour courir après mon frère qui a été pris par le mal, et de surveiller ses moindres faits et gestes, de vérifier qu’il ne se fait pas inutilement de tord, de le ramener quelque part en sécurité, de chercher un remède aux visions qui le tourmentent.

Une part de moi, la plus couarde - et j’ai honte de l’écrire, mais il le faut bien - en a assez de tous ces voyages, et ne rêve que de rentrer dans les châteaux maegis, où Fanom essaie désespérément de secouer ses semblables pour qu’ils, et je cite, « se sortent les doigts du cul et aident à sauver le monde ». J’espère que vous pardonnerez ces grossièretés, mais ce serait travestir sa parole que de la rendre plus convenable, même dans une lettre.

Je ne suis qu’un lapin, cependant. Le monde est bien trop vaste pour mes minuscules mains. 

J’ai quelqu’un qui a besoin de moi, ici et maintenant, qui dort à mes côtés en ce moment même. La pauvre enfant est épuisée après la terreur de la journée, et elle a besoin de moi. Pas après que j’ai soigné mon frère maegis. Pas après que j’ai retrouvé mon frère oranimus. Pas après que je me sois reposé au bout du monde. Elle a besoin de moi, ici, et maintenant. Je ne suis qu’un lapin, et je n’ai pas beaucoup de pouvoirs, mais la protéger est le choix que j’ai fait, et je vais faire tout ce que je peux pour en tirer le meilleur. Même si cela veut dire briser ma promesse.

Car, voyez-vous, lorsque j’ai dit « je promets » à mes frères et à ma mère, je ne voulais pas dire « c’est ce qui arrivera, et c’est ce que je ferais ». Lorsque je leur ais dit, «je promets », ce que je voulais vraiment dire, et ce que j’espère qu’ils ont su, était : « je vous aime, et, foi de lapin, je resterais auprès de vous aussi longtemps qu’il m’est permis. » Il ne m’est pas permis de le faire, malheureusement. Mais l’essence de ma promesse tient toujours.

Je ne sais pas ce qu’elle vous a promis, ni même si c’est à vous qu’elle l’a promis - mais j’espère que vous savez ce qu’elle a vraiment dit, ce jour-là.

J’espère ne pas vous avoir ennuyé, avec mes petites sottises, ou pire, qu’elles vous en rendue plus triste. Mais j’ai le sentiment que vous comprendrez de quoi il en retourne.

Edgard Dune

PS : Après avoir lu cette lettre, je vous serais gré de la détruire ou la brûler, ou au moins d’en supprimer le passage sur ma personne, qui, vous en conviendrez, n’a aucun intérêt pour vos archives. Je serais en revanche terriblement embarrassé si l’un ou l’autre de mes frères devait la trouver de mon vivant. Je n’en entendrai plus la fin !

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Nanouchka
Posté le 21/08/2022
Finiiiiiiii.
Ça va faire trop bizarre de ne pas côtoyer au quotidien Sehar, Del, Lo, Nodia, et Zakaria. Ils me sont devenus très familiers.
Je ne suis pas certaine d'avoir compris l'épilogue, malgré une relecture du prologue, mais j'en ai bien aimé le ton, et j'ai apprécié la répétition du fait que c'est un lapin.
La résolution du roman dans le chapitre précédent est satisfaisante.
Je suis curieuse de savoir quelles modifications tu comptes faire pour la deuxième version.
Bravo pour ce trajet parcouru !
AnatoleJ
Posté le 29/10/2022
Je me suis totalement laissé happé par la rentrée et j’ai perdu toute notion du temps qui passe, mille excuses pour cette réponse plus que tardive !
Mais surtout mille merci pour être arrivée jusqu’au bout de l’aventure :D

J’aurais aimé avoir le temps de répondre à tous tes commentaires comme il se doit, mais ça aurait encore retardé ma réponse, je vais donc essayer de revoir les points essentiels :

- Premier point, au moment où j’écris ces lignes, je viens à peine de commencer la réécriture/version 2, qui commencera plus tôt et sera plus longue (probablement plusieurs tomes au lieu d’un seul mais j’en suis pas encore là, le découpage se fera après)

- Nodia aura toujours la place centrale d’héroïne comme tu l’as très justement remarqué (je suis content que ça puisse se voir, d’ailleurs, parce que c’est pas si évident que ça)

- Tu as tout à fait raison sur le fait qu’il faudrait clarifier les motivations de Fenara, surtout que c’est un des leitmotivs de l’univers de manière générale même en dehors de cette histoire : « la fin du monde est proche et il faut peut-être faire quelque chose, la provoquer ou l’empêcher ». Fenara est persuadée qu’elle a la solution pour empêcher une catastrophe (ramener tout le monde sur la Toile sans leur demander leur consentement parce qu’elle n’a plus vraiment le temps : en gros elle veut mettre tout le monde dans une boite le temps que le carnage écrase tout, pour pouvoir les remettre en place, sain et sauf, une fois que c’est passé et qu’ils puissent recommencer à vivre comme avant.)
Je n’avais pas vraiment développé cet aspect dans cette première version principalement parce que j’avais envie d’expérimenter une narration où on ne comprends pas forcément tout les enjeux, avec des héros qui se dépatouillent avec ce qu’on veut bien leur donner, mais ça retire un trop grand pan du récit et ce n’est pas forcément le plus intéressant pour la version finale. On verra donc davantage Fenara avant le début actuel du récit (surtout avec les jumelles et Zakaria, peut-être que j’introduirais aussi son point de vue à elle plus tôt pour renforcer son ambiguïté) mais j’ai aussi prévu que Sehar et elle passent plus longtemps ensemble (pour développer encore davantage la thématique du parent monstrueux et du pardon possible).

- C’est intéressant ce que tu as relevé aussi sur le fait que les personnages sont majoritairement dans une posture de demander de l’aide avant de chercher une solution par eux-mêmes (et que ça te chiffonne) parce que j’ai probablement mis un peu de moi là-dedans ! Je suis plus dans la team « pose des questions (trop de questions s’il le faut) avant de sauter », donc a l’inverse, quand dans un récit la majorité des personnages sont du genre « fonce dans le tas pose des questions plus tard si t’es encore vivant », je me dis souvent que l’histoire aurait été très différente s’ils avaient posé ne serait-ce qu’une toute petite question avant de partir à l’aventure x)
(cela dit dans le passage précis où tu l’as relevé, au moment où Del rencontre Jasper, tu as tout a fait raison : le dialogue doit être retravaillé, parce que même fatigué Del est team « fonce dans le tas », ça manque de crocs et de rébellion ! Le fait que Del fasse moins de choses physiques c’est aussi une conséquence de sa maladie chronique, il connait ses limites et là il est stressé, donc tant que rien ne tente activement de le tuer, il bouge moins)

- en plus du contenu supplémentaire sur la Toile, il y aura aussi du contenu supplémentaire sur l’ouest du désert, la région d’origine de Lo et Del : je reviens en arrière dans le temps et on commence par les rencontrer eux avant Sehar et Nodia. Je n’ai pas encore totalement décidé, mais il se pourrait même que Sehar n’arrive que dans le « tome 2 », il faut encore que je m’y retrouve avec le découpage de l’intrigue pour en être sûr. Nodia aussi aura droit à son retour en arrière pour qu’on apprenne un peu mieux à connaître sa famille adoptive, ça manquait un peu dans la version 1.

Pour finir, je laisse encore la version 1 sur PA un mois le temps que tu vois ce commentaire et que d’autres finissent de lire, ensuite j’archiverais parce que je n’ai malheureusement pas le temps de lire d’autres plumes et de répondre aux commentaires assez vite, et ça ne me parait pas très juste vis à vis des autres membres de PA si je ne suis pas en mesure d’être plus actif ! Bref tout ça pour dire que je ne sais pas ni où ni quand je posterais la version 2 si jamais tu te posais la question (de toute façon il faut encore que je l’écrive, mais soyons optimistes haha).

Merci encore pour tout tes précieuses remarques et encouragements, c’était un vrai plaisir de t’avoir dans l’aventure :D
Nanouchka
Posté le 29/10/2022
Yaaaay merci beaucoup pour ta longue réponse, c'était très chouette de participer à l'aventure ! Courage et bonne chance pour la deuxième version <3
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