II — XVII. — DE LIVIA

Par Hastur
Notes de l’auteur : Version 1 - 05/01/22
Bonne années à toutes et à tous ! Plein de bonnes choses !

Je sais que l’obéissance contrainte coûte à l’égo, mais tu as pris la bonne décision. Pour apaiser ta frustration, je glisse ce billet dans tes bagages. Ainsi, je reste un peu plus longtemps en ta compagnie.

Dans cette affaire, un tiers de la faute m’incombe. Il n’était pas raisonnable de t’emmener dans mon détachement. La suspicion imprègne encore trop les conversations de nos légions, et ce à tous les grades. Le deuxième tiers t’est imputable pour avoir accepté ma proposition sans plus réfléchir que moi-même. Le troisième et dernier tiers revient à notre cher père, qui semble avoir perdu tout bon sens politique depuis qu’il a posé les pieds sur la terre Astrusque. Les origines de sa bêtise remontent au jour où il a décidé cette campagne militaire, peut-être même avant d’ailleurs ; mais je divague, là n’est pas encore le sujet.

Avec le recul, ma requête était totalement inconsidérée. Aujourd’hui, je comprends parfaitement pourquoi une telle absurdité a pu advenir. L’émotion de nos retrouvailles, tout simplement. L’amour, la peur, le désir protecteur. Ta fragilité apparente m’a toujours émue, même charmée d’une certaine manière. Nous avons traversé des épreuves terribles, chacune et chacun. Je n’échappe pas aux lois de la nature. Moi-même, je suis exténuée, de corps et surtout d’esprit ; je me laisse plus facilement aller à mes envies qu’à mes devoirs. Et dans ce concours de circonstances tragiques, mes deux garde-fous habituels m’ont faillie. À croire que l’humidité a fait germer les pires champignons astrusques entre vos deux oreilles.

Quelle folie, alors que notre armée s’enlise encore et encore, amnésique des raisons qui l’ont menée de ce côté-ci de l’océan ! Il y a bien la gloire, le prestige, inscrire notre nom dans la Mémoire. Pourtant, aux heures sombres, une faiblesse, une lâcheté me pousse à penser que tout cela est ridicule ; que nous faisons du bruit pour un rien.

Mais qu’importe, je ne suis pas en position de décider. Je me contente d’obéir. Lorsque je ferai mienne la magistrature suprême, le temps sera à ces dilemmes d’esprit et de conscience.

Nous n’en avons pas véritablement parlé, alors je profite de la sécurité de ce billet pour te partager un important sentiment.

Je devine une faiblesse grandissante chez notre père. J’ignore s’il s’agit d’une sénilité précoce, mais depuis un certain temps, avant même la campagne, j’ai constaté des incohérences dans ses paroles et certaines décisions. À la villa côtière, je l’ai surpris plusieurs fois à déambuler dans les couloirs, hagard, perdu et agacé lorsque je le confrontais à son trouble. Son coup de sang dans son dernier billet est une parfaite illustration de tout cela. Il ne semble pas se souvenir d’avoir donné son accord, et prend ton absence pour une quasi-désertion…

Si un véritable mal le ronge, alors la pression qui pèse sur ses épaules aujourd’hui n’arrange certainement rien à sa situation.

Je ne m’en étais jamais ouverte à toi auparavant. Par bêtise, sans doute, pensant que ma présence seule pouvait pallier sa défaillance de plus en plus apparente. Aujourd’hui, je le regrette amèrement. Bien des choses auraient été toutes autres, si j’avais attiré ton attention hors de ta Nuit.

Enfin, il ne me reste plus qu’à réparer mes torts du mieux possible.

Je comprends bien que tu ne portes pas notre père dans ton cœur. Un destin ou un hasard a voulu que jamais ne naisse d’affection entre vous. Malgré tout, j’ai une certaine estime pour ce père rude et je le suis redevable à bien des égards, m’avoir tiré des rues de Vale n’étant pas l’un des moindres. Je te demande de veiller sur lui à ton retour. Faites la paix ensemble et épaule-le de ton mieux.

Un dernier point. Talia. J’ignore pourquoi notre père a choisi de la garder auprès de lui. Encore une fulgurance de sa folie ? En tous les cas, je n’ai su le détourner d’une telle décision avant mon départ. Après tout, il a toujours eu une fascination pour le pays Ignit. Mais en faire l’une de ces servantes…

Toute sympathique qu’elle soit, Talia demeure une pièce empoisonnée offerte par la reine Astrusque. Et malheureusement, je dois avouer que tu l’es tout autant. Au moins es-tu parvenu à dompter les étoiles étrangères de ta Nuit. Ainsi, tu devrais être davantage maître de tes émotions. Face à notre père, cela sera d’un grand secours.

Je te souhaite le meilleur, comme toujours.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Mathilde Blue
Posté le 06/01/2022
Coucou !

Voilà une lettre riche en révélations :)

La relation entre Livia et Scaevius est assez touchante ! On ressent bien son affection, mais également son « affection » pour son père, aussi dur soit-il. On comprends qu’elle enjoint Scaevius à faire la paix avec lui, même si je me doute que ce ne doit pas être un plaisir pour lui x) Et j’apprécie aussi le fait qu’elle n’hésite pas à étaler ses erreurs et ses faiblesses sur papier, c’est tout à fait louable de sa part ! Elle a un franc-parler (parfois un peu dur pour ses interlocuteurs) appréciable :)

Les informations qu’elle apporte sont très intéressantes, je ne m’attendais pas à ce que Titus soit atteint ainsi… Reste à savoir si c’est un mal d’origine naturelle ou non… Quant au fait qu’il ait pris Talia comme servante, je me demande bien où cela va les mener et quelles seront les conséquences.

Quelques remarques :

« mais je divague, là n’est pas encore le sujet. »
Le « encore » est-il nécessaire ? Je trouve qu’il casse un peu le rythme de la phrase :)

« Moi-même, je suis exténuée, de corps et surtout d’esprit »
J’ai un peu tilté sur la formulation « de corps et surtout d’esprit », mais je ne saurais pas vraiment t’expliqué pourquoi ^^’

« Il y a bien la gloire, le prestige, inscrire notre nom dans la Mémoire. »
C’est personnel, mais dans les énumérations présentées de cette manière (avec seulement des virgules), en tout cas dans ce contexte, car ce n’est pas la première que je vois dans cette lettre, je trouve que des points de suspension atténuerait un peu l’aspect « brut » de la phrase.

À bientôt :)
Hastur
Posté le 09/01/2022
R'hello !

Je dois avouer que le mal de Titus est une idée extrêmement récente. Le fait que le personnage n'ait pas été beaucoup dévoilé jusqu'à présent fait que ça ne devrait pas créer trop d'incohérences dans cette version.
Je réfléchissais à quelque chose qui puisse rationaliser ses décisions pas forcément brillantes dans toute cette partie de l'histoire et en même temps, être raccord avec l'image que le personnage renvoie dans le livre I, et l'idée d'une maladie m'a parue être une solution adéquat pour ça. J'ai creusé l'idée à la lettre suivante, et j'ai l'impression que ça fonctionne plutôt bien. ^^ Enfin j'espère ah ah !

Hu hu Livia et son franc-parler, je l'appelle Livia sans filtre. En tout cas avec Scævius qui est une personne de confiance :).

Pour le "encore", il indique qu'on va y revenir plus tard dans la lettre et c'est ce qu'elle fait du coup.

Je note pour les deux dernières remarques :). Je vais voir ce que je vais faire !

Merci beaucoup pour ton retour :).
Vous lisez