Tous a commencé quand quelqu'un à laissé la fenêtre ouverte...
Cette année là, mes parents et moi venions d'aménager à St. Laurent sur Mer, un petit village de Normandie. J'avais alors 14 ans. Après nôtre installation, nous avons fait connaissance de nôtre seule voisine, Mme Lynden. Je me souviens très bien de cette rencontre.
Nous avons trouvé Mme Lynden sur le pas de sa porte, comme si elle attendait nôtre venue . C'était une femme d'un certain âge déjà, vivant seule à l'écart du village. Elle habitait une belle et grande demeure, donnant vue sur la mer. L'édifice semblait très accueillant. La lumière du généreux soleil de l'après-midi filtrait par les fenêtres grande ouvertes et éclairait le jardin magnifique, entretenu par les soins de la propriétaire. Seule une fenêtre transgressait la nature bon-vivant de la maison ; ses volets au bouts métalliques et rouillés étant clos.
La vielle femme nous fit entrer sans hésiter. Nous prîmes place dans un des confortables fauteuils de son immense salon du style XIXe siècle. Elle et mes parents ce mirent aussitôt a discuter, de chose qui ne m'intéressaient surement pas à l'époque. J'étais plongé dans mes pensés, regardant le temps passer. Ou alors, j'observais Mme Lynden. Elle parlait avec beaucoup de gaieté, et parlait beaucoup, accompagnant chacune de ses paroles avec de grands gestes. Mais, parfois, dans le silence suivant ses longues tirades, il me semblait voir une ombre passer sur son visage.
Dans la nécessité de faire quelque chose, je demandai à Mme Lynden si je pouvais explorer la maison ; j'ai toujours aimé la nouveauté, l'aventure en quelques sorte.
Le rez-de chaussée sans grand interêt (le salon,la cuisine, et la salle à manger), je décidai de monter à l'étage. Je découvris en premier lieu la chambre de nôtre hôte. Elle était d'une grande simplicité. Sur sa table de nuit trônait une petite photo d'une jeune femme. Sans doutes Mme Lynden dans sa jeunesse. Ne voulant pas déranger son intimité plus longtemps, je passai à la pièce suivante.
Au bout du couloir, j'arrivai devant la dernière porte, dont la peinture bleu s'écaillait. Je ne sais pourquoi, mais ce jour là cette porte m'avais beaucoup intrigué. Constatant qu'elle était close, je tentai d'apercevoir quelque chose par le trou de la serrure ; une pièce plongée dans la pénombre. La pièce au volets fermés. Je tentai une nouvelle fois de forcer la porte, sans succès.
J'entendis alors mes parents m'appeler depuis l'escalier. En m'en allant, je ne pus m'empêcher de jeter un dernier coup d'oeil derrière moi.
※
Un jour que je passai devant la maison de la vielle femme, je remarquai quelque chose...tout d'abord je ne sus quoi, mais une chose avait changé. Je ne tardai pas a comprendre. La fenêtre. Elle était désormais ouverte. Furtivement, je regardai à droite ou a gauche, puis, je poussai le vieux portique du splendide jardin et, sans un bruit, j'entrepris l'escalade de la façade de l'édifice, m'aidant des interstices et des plantes grimpantes. J'arrivai non sans peine dans la chambre ; la pièce était spacieuse, bien qu'étouffante. Un lit poussiéreux recouvert d'une couverture se tenait dans un coin. Près de la fenêtre, une petite commode était appuyée contre le mur, orné d'une jolie tapisserie : des oiseaux blancs sur un fond bleu. Il en manquait un, au centre. Sans doute avait-il déteint. Je voulu m'approcher plus près quand un bruit me fit sursauter. Me retournant je découvris Mme Lynden sur le seuil de la porte. Je tentai, confus, de m'excuser :
- Désolé, je... je peux vous expliquer... c'est...
- En t'en fais pas, me coupa la vielle femme, je sais ce que c'est, la curiosité à ton âge.
Elle regarda autour d'elle puis poussa un long soupir et poursuivis :
- C'était la chambre de ma fille. Elle est morte très jeune. Je n'étais pas rentrée ici depuis au moins dix ans.
- Oh, je...désolé. Dit-je un peu ému. C'était donc elle la fille de la photo ! Pensai-je.
- Au fait, comment est-tu entré ici ? Bon ça ne fait rien. Ça te dit un chocolat chaud ? Me proposa Mme Lynden.
J'acceptai de bon coeur et nous descendîmes dans la cuisine, prenant bien soin de refermer la porte derrière nous.
※
Les années passèrent, et j'oubliai peu à peu cette histoire. Ma famille et moi devinrent très vite amis avec nôtre voisine. Il y avait souvent des fêtes dans sa grande demeure car son caractère enjoué était très apprécié de ceux qui la connaissaient. On lui rendait service, lui demandait conseils pour s'occuper de son jardin, tout en s'émerveillant devant le sien...C'est ainsi que j'ai grandi avec Mme Lynden. Comme elle commençait à se faire vielle (elle n'a jamais avoué son âge exact), on lui apportait souvent ses courses ou le pain.
Ce jour là, c'était mon tour. Je sifflotait sur le chemin, pas forcement ravi de m'y coller mais il faisait beau et j'étais content, enfin le week-end. Je toquai à la porte :
- Mme Lynden ! C'est moi ! Je vous apporte vos courses. Il y a les légumes du marché et la lessive que vous aviez demandé.
Pas de réponse.
- Mme Lynden ?
Comme à son habitude elle devait ronfler sur un fauteuil du salon. La porte n'étant jamais fermée, les gens se connaissaient et se faisaient confiance, j'entrai, un peu hésitant.
- Mme Lynden ? Répétai-je pour la troisième fois.
Je la cherchai par tout. Remuant de fond en comble sa vielle maison. Elle n'était pas dans sa chambre, ni dans aucune autre pièce du rez-de-chaussée. A l'étage, c'était la même chose. J'avais même cherché dans le placard à balai. Elle n'était nulle part. Sauf si... J'avais oublié une pièce. Celle du fond du couloir du second. La chambre de sa défunte fille.
Je poussai la porte sans un bruit, un peu hésitant :
- Mme Lynden ?
Mes yeux balayèrent du regard toute la pièce. Elle était là, me tournant le dos, face à la fenêtre de nouveau ouverte. Surement avait-elle voulu réveiller quelque souvenirs enfouis ? Je m'exclamai :
- Mme Lynden ! Je vous trouve enfin !
Elle tourna alors légèrement la tête vers moi. Mon sang se glaça. Son maigre et vieux corps debout restait immobile, ses mains se balançant légèrement. Sa bouche bée était sèche. Ses quelques cheveux gris s'agitaient doucement avec le vent aérant la pièce. Et puis, il y avait ses yeux. Ses yeux vitreux me regardèrent. C'était un regard vide, sans âme...sans vie. Je ne pûs même pas hurler ma terreur. Mon sang ne fit qu'un tour et je m'enfuis en courant. Avant de franchir le seuil de la porte, mes yeux se posèrent sur la tapisserie. Un deuxième oiseau manquait.
※
Cela fait plus de dix ans maintenant que ces yeux me reviennent en cauchemars chaque nuit. J'ai quitté depuis longtemps le petit village de St-Laurent sur mer pour aller faire mes études à Caen. Il y a quelque jours, j'ai appris que la maison de Mme Lynden allait être vendue. Il faut dire qu'elle tombait en ruine depuis sa « mort ». Je n'ai jamais osé en parler à personne de cette « mort ». Personne ne m'aurait cru de toute façon.
Toutes les affaires de Mme Lynden sont restées tels quels. Elle, n'avait plus de famille et donc personne pour s'en occuper. Après quelques recherches, quelqu'un m'a demandé si je pouvais m'en charger. J'ai accepté, surmontant les cauchemars qui me hantaient.
En revenant dans le petit village, je me suis revu arpenter les rues de mon adolescence. Je ne reconnaîtrai sans doute pas la moitié des habitants aujourd'hui. Je n'étais pas revenu ici depuis longtemps, trop longtemps.
La nuit commençait déjà a tomber, la saison étant bien avancée.
La demeure de Mme Lynden était sombre, froide. Je me déchainai sur les loquets des volets pour tenter de faire rentrer à nouveau la lumière dans cette bâtisse, en vain. Même résultat pour l'interrupteur. Mes yeux s'habituèrent peu à peu à l'obscurité et je pu enfin me déplacer dans toute la maison. Il s'agissait ici de faire l'inventaire de meubles et de constater l'état de la vielle demeure. Au passage, je pourrai rassembler quelques petites affaires. Comme à son habitude, l'escalier grinçait affreusement sous mes pas. Peut-être un peu plus que d'habitude. De nombreux courant d'air qui s'incrustaient à travers les fissures rendaient l'air ambiant si froid que de la buée s'échappait de ma bouche.
Un frisson me parcouru l'échine quand je poussai à nouveau la porte de la chambre du second. Rien n'avait changé. Les oiseaux avaient toujours disparus. Mme Lynden aussi. Je parcourrai lentement la chambre. N'osant m'assoir sur le lit, je me posai sur une chaise en poussant un long soupir. Les courants d'air se firent plus froid tout à coup.
Je me lève d'un bon. L'air est irrespirable, glaçant. Mon coeur bat la chamade. Mon sang bat sourdement dans mes oreilles. J'ai froid. Je me tourne vers la fenêtre quand un sentiment effroyable m'envahit...
※
Sur la tapisserie, un troisième oiseau s'envola par la fenêtre ouverte.
Nouvelle bien écrite dans le style de l'horreur. La fin est prévisible mais le texte n'en est pas moins agréable. La métaphore est intéressante. Les tableaux transportent souvent de la magie. C'est classique mais ça marche toujours.
Pour les fautes : notre ne prend pas d'accent circonflexe (et cela revient souvent)
Le rez-de chaussez-> Le rez-de chaussée
Madame : il faut choisir. C'est Mme (sans point) et même au milieu d'une phrase (et donc pas mme. ou mme). J'avoue préférer madame (et réserver Mme à mes correspondances).
J'ai beaucoup aimé la nouvelle. Tu as mêlé le fantastique avec un contexte familier, et fait monter la sensation de mystère et d'oppression tout le long du texte, avec en apothéose la scène de la découverte de la dame morte.
Si tu ne l'as pas déjà vu, je te recommande de regarder Psychose de Hitchcock, ça devrait te parler.
Merci pour ce moment.
Merci pour ton commentaire !
PS : N'hésite pas à te relire. J'ai repéré quelques erreurs d'accords ou d'orthographe en lisant.
À très vite !
Ouah, je pense que je viens de comprendre ce que c'est qu'une claque en littérature ! J'ai adoré ta nouvelle, et cette chute ! On a beau s'y attendre, ça surprend quand même !
J'ai tout lu d'une traite, je pense que je n'arrivais pas à décrocher tellement ta nouvelle m'a emportée. Je n'ai qu'un mot à dire, pour résumer ce commentaire : Bravo !
Au plaisir !