Par-delà les montagnes, les ruisseaux, les plaines et les vallées, coulait une rivière. Une rivière d’eau si claire et de sable si fin, qu’elle portait en elle la vie infinie.
Derrière chaque pierre se cachait un résident, permanent ou passager. Sous les galets plats des profondeurs, petits poissons et escargots d’eau douce se côtoyaient. Au détour de cailloux ronds comme des pastèques, poissons de tailles moyennes et anguilles se mettaient à l’abri. A l’ombre des roches, loutres grises et libellules bariolées venaient s’abreuver.
Parmi tout ce petit monde, il y avait une résidente qui ne cherchait pas à se cacher.
Assise sur la plus grosse des pierres, au bord de l'eau, se trouvait une Grosse Dame. Tous les jours, elle venait se baigner. Elle enlevait sa toge et la posait sur l’herbe, bien au sec. Puis elle trempait un pied, puis l’autre, et enfin tout son corps. Elle s’avançait ensuite jusqu’à se trouver complétement immergée.
Quand ses cheveux mouillés redevenaient complétement secs, elle sortait et s’asseyait sur la grosse pierre. Le corps encore humide, elle s’adonnait, avec énergie et entrain, à son rituel quotidien.
Armée d’un gant en crin, elle se débarrassait des morceaux de vies passées qui encombraient son corps. D’abord les bras. Ensuite le tronc, les mains, les jambes, les pieds, le visage,… Ses gestes lents et maitrisés parcouraient chaque centimètre de peau. Elle regardait les déceptions, les doutes, les craintes, ces pelures familières, la quitter pour glisser dans la rivière.
Toute sa peau y passait, sauf son dos.
Elle ne parvenait pas à atteindre son dos. Elle avait un dos très épais et une peau très brillante. Un peu comme une carapace. Mais toute lisse, et faite de chaire.
Pendant qu’elle frottait minutieusement son corps (sauf son dos), elle racontait une histoire. C’était l’histoire de Moulia, la fermière qui devint riche en allant un jour à la rivière. Elle la racontait tout doucement et à voix basse, au début, pour les petits résidents du ruisseau. Puis elle la raconta un peu plus fort les jours d’après, pour les résidents de la forêt d'à côté.
Après quelques semaines, l’histoire avait atteint Nbarek, le village juste à l’entrée de la forêt. Mais les villageois étaient bien trop occupés à cultiver la terre, à broder, à coudre, à tricoter, à cuisiner, à boire, à manger, à dormir, à jouer, à vivre ensemble, qu’ils ne prirent pas la peine de trouver la source de cette histoire. Du moins, pas encore…
Le début de votre conte est très intriguant avec le personnage de cette Grosse Dame. J'aime beaucoup votre écriture fluide et les répétitions de mots ne me dérangent pas car elles servent le récit, je trouve. Je lirai la suite de votre conte avec plaisir.
Bonne continuation
Alors châpeau !
quel plaisir de laisser couler ce texte dans mon esprit. J'ai adoré ta plume, si précise et légère en même temps !
J'aime aussi l'originalité du personnage, effleuré par des accents de fantastiques, c'est parfaitement dosé ♥
Ça promet, j'ai hâte de lire la suite ^^
Merci pour ce gentil commentaire. Je suis contente que cela te plaise. :)
Le rythme est bon, il respecte la tradition orale du conte et je l'ai plus écouté à voix haute dans ma tête que lu.
Seul bémol, pas mal de répétitions de mots assez proches.