J'ai tant voulu te plaire. J'ai parfumé mes chaussettes et mes slips. Pour que tu trouves ça gai, que même en été, je sente bon de haut en bas. Quand tu faisais main basse sur les bijoux de mes ancêtres - petite héritage sans grosse plus-value - j'y croyais dur à notre histoire. Tu m'as dit, je m'en souviens, que rien n'est plus important dans la vie que la meringue au citron ; on en a avalé encore, et encore plus, jusqu'à ce que nos baisers jaunissent. L’été devint froid comme un macchabée. On avait plus grand chose à dire. C'était l'hiver.
Et le silence fut. Les caramels se sont fanés. Et ce jour vint. Ce mardi, j’ai vieilli de mille ans. Quand t’as filé à l'anglaise aux bras d'un milord mi-gratin mi-gratteur. Rien qu'un chacal grimé en lévrier afghan. J'ai pris mes cliques et toutes tes claques. J'ai cherché une maison Phénix pour renaitre de mes cendres. C'était bien le banal, le régulier, le Perrier éventé, j'avais besoin de remonter le bas de l'échelle ; et de côtoyer des mecs qui s'appelaient Michel. C'était pas si facile de laisser filer mes sentiments aux oubliettes. Et quand tu m'as appelé pour me demander si je pouvais te rendre la télécommande de la box, j’ai replongé. J'ai repensé aux popcorns qu'on dégustait en regardant le Petit Journal. Entre deux réclames on se gondolait aux conneries du petit Barthés. Tu le trouvais si beau en 2015. Tu te laisserais choper sans la ramener, que tu m'as dit un soir à Austerlitz. T’étais une bombe, tellement sensass avec tes bottines noires et ta jupe en cuir. Je me suis mis à chialer comme une grosse madeleine débile. J’étais fou ou naïf d’avoir cru que j’étais de la trempe d’un Marc Antoine, que t’étais à moi, ma Cléo, que toi et moi c’était jusqu’à la fin des pyramides. Quand tu m’as débranché, j'ai eu un gout de plus rien. Des envies de pas de lendemain.
Ma mère m'a secoué les bretelles je l'ai écoutée, j'ai déménagé à Mulhouse au pays du bretzel et des mauricettes, tout près d'un canal sans histoire. Je suis passé à autre chose : de pas grand chose à mieux que rien. J'ai des potes qui font du sport. J'ai appris la salsa et j'ai résilié notre abonnement à Télé Loisirs. J'arrive parfois à me laver les dents sans chercher ta brosse dans le petit verre où ma grand-mère faisait tremper son dentier de marque allemande. Parfois je me dis que je devrais t'appeler. Je m'inquiète pour toi : quand les toilettes sont bouchées, je sais que tu stresses à mort. Et ton transit fout le camp. Je voudrais savoir si tes waters sont enfin au niveau de tes espérances. Mais je n'ose pas. Mes doigts s'arrêtent au dernier numéro de ton 06. Pour me calmer, je commande des betteraves. J'ai voulu t'écrire des tonnes de lettres, mais moi et les mots, c'est jamais beau, je fais des ratures et j'abandonne. C'est la vie comme on dit quand on sait plus quoi dire. Je te souhaite d'être heureuse. Et tu dois être contente, ils ont remis Sabatier le vendredi, comme ça tu pourras faire ta gym et arriver à temps pour son émission. Il dit toujours bonsoir mesdames bonsoir messieurs à la façon que t'aimais bien, rapide mais citadin.
Si un jour je trouve le courage de repasser rue des Anciens Combattants d'Afrique du nord, que je me le fais ce pèlerinage là où j'ai été le plus heureux de tous les hommes de tous les quartiers de la francophonie, je caresserai l'espoir de tomber sur toi. Par hasard, et que tu me demandes quels goûts y ont les nouveaux Miko. Et moi je les connaitrais par cœur tous leurs parfums. Et on sait jamais c'est possible, tu me proposeras peut-être avec ton sourire en bouquet de fleurs d'aller en lécher deux ou trois au petit parc, tu sais celui où on jetait nos papiers par terre pour que les travailleurs qui blanchissent les rues ne s'ennuient jamais, même le dimanche. J'y crois toujours tu vois, car on peut se jeter deux fois dans le même volcan, ça arrive, tiens regarde-moi, je vis maintenant à deux pas d'où j'ai grandi. Je suis revenu sur la ligne de départ. Ça peut arriver oui, un peu comme les rediffusions en juillet ou au mois d'aout, Alors j'y crois, un peu, comme on joue à l'Euromillion le mardi et puis le vendredi.
Blagues à part, cette histoire-là a un ton vraiment particulier, et qui m'a tout de suite plu. Ya de la poésie, un arôme aigre-doux, du biographique, et le blues classique de la fameuse rupture, celle qui inspire les textes les plus beaux.
Et le tien en fait partie, c'est sincère.
Juste 2 trucs qui m'ont buté dans ce passage : "Par hasard, et que tu me demandes quels goûts y ont les nouveaux Miko. Et moi je les connaitrais par cœur tous leurs parfums.". Le "y ont", j'aurait écrit "ils ont" ou limite "y z'ont", pour la liaison, et j'aurais enlevé le "les" dans la deuxième phrase.
Continue de te faire larguer, c'est magnifique
merci du conseil vieux, je vais faire de mon mieux pour n'être plus qu'une vieille amarre.. qu'on largue encore et encore...
.. jusqu'au jour où - je le sens sous mon pompon que ce jour existe - jusqu'au jour où je monterai à bord du bateau, et moi et la figure de proue, nous filerons droit vers le ponant.. en riant de ces bâtonnets de miko engloutis par le sable..
J'ai beaucoup aimé et ne suis pas déçue de l'avoir ajouté à ma PAL ;)
C'est touchant, drôle et très bien écrit. Sans doute inspiré du vécu, tu y retraces beaucoup de souvenirs et d'anecdotes en images, cela donne un effet nostalgique qui s'y prête bien :)
C'est très agréable à lire et la fin sonne en espoir, un espoir réticent car il se ravise à chaque fois de la recontacter... Quand tu dis "moi et les mots, c'est jamais très beau", je pense au contraire que tes mots seront ce qui pourraient faire changer son avis, et que la lecture de ce texte pourrait amener à réfléchir car il est sincère et reflète un état d'esprit perdu sans cette personne...
(Ce n'est que mon point de vue bien évidemment ^^)
J'aime beaucoup le rapport avec la tarte au citron et l'allusion aux baisers jaunis, ainsi que quand tu racontes que vous jetiez des papiers par terre pour ne pas que les travailleurs ne s'ennuient...
Bonne continuation à toi ;)
Au plaisir de te lire,
Fy
Au plaisir !
Edgar