Le choix

Enfin rentrée. La journée s’était écoulée, longue et semée d’embuches. Comme toutes les journées. Sauf que celle-ci n’était pas encore terminée.

Elle jeta ses clés sur la table, négligemment, et se laissa tomber sur la chaise la plus proche. Elle sortit son téléphone à la coque salie, ancienne, et le déposa devant elle, comme un trésor, un trésor maudit. Normalement, l’appel ne tarderait pas.

5 min. 10 min. 15 min. 30 min. Il ne venait toujours pas. Anxieuse, elle appuya sur le bouton. Peut-être un bug informatique ? Mais non, rien. L’écran était lisse, vide. Bien trop lisse, bien trop vide par rapport à ses émotions. Son cœur n’était que relief, montagnes qui ne cessaient jamais de bouger, de se déplacer, de piquer. Décor au changement incessant. Elle bouillonnait. Comme un volcan, qui n’entrait pas en éruption. Parce qu’elle avait peur. Peur de ne pas savoir comment réagir. Elle se doutait qu’à un moment, elle finirait par exploser. Mais ce ne serait pas le bon moment. Ce n’est jamais le bon moment.

Ses doigts se tordaient, comme animés par leur seule volonté. Elle posa les yeux sur ses mains, ses poignets. Violacés, couverts de bleus et de coups, elle se disait que c’était nécessaire.

Le téléphone vibra, de sa sonnerie régulière, rappelant la réalité et la cruauté du monde. Elle s’empressa de le prendre, comme un enfant qui se jetterait sur la pâtisserie dans la boulangerie. L’écran noir indiquait deux boutons, deux boutons qui allaient décider de la tournure de la soirée. En réalité, elle avait déjà fait son choix. 

A l’instant où son index allait entrer en contact avec la surface dure, elle hésita. Elle n’avait jamais tenté d’appuyer sur l’autre bouton. Que se passerait il si elle essayait ?