Le manoir du Dr Daskove

Je longeai l'allée en grelottant et pus bientôt distinguer à travers la brume les hautes tours du manoir, tels des pics acérés. Mes pas crissèrent sur les graviers et lorsque je toquai à l'imposante porte, le bruit sembla résonner dans toute la demeure.

A vrai dire, je n'étais pas rassuré à l'idée de passer cette soirée ! Amélia avait prévu un film d'horreur comme je les déteste et des jeux sur le même thème ! Elle avait d'ailleurs insisté pour que je vienne chez elle et avait ajouté, qu'ils seraient seuls et que le manoir serait plus approprié au thème de la soirée.

Mais ne croyez surtout pas que j'ai peur de ce genre de film ou de ces vieilles légendes que l'on se raconte à Halloween à propos de cette maison.

La porte émit un effroyable grincement lorsqu'elle s'ouvrit . 

Amélia m'accueillit avec grand sourire.

-Entre! J'étais à la recherche du DVD que je voulais regarder : ce serait dommage que je ne remette pas la main dessus... mais maintenant que tu es là, tu vas pouvoir m'aider !

Je traversai le grand hall en baissant les yeux : l'immense statue de marbre qui soutenait le plafond me donnait des frissons rien que d'y penser ! L'homme semblait me fixer et je suis sûr de me rappeler en avoir fait des cauchemars!

Amélia me conduisit à l'étage, dans la vieille bibliothèque, les étagères semblaient prêtes à céder sous le poids des livres .

-Je ne suis jamais entré ici ? Lui dis je.

En fouillant dans une étagère du fond elle déclara :

-J'évite d'y aller... Mon arrière grand père est devenu fou et toutes ses recherches sont ici entre de vielles paperasses...

-Quel style de recherches ?

Je m'emparai d'un lourd volume et le feuilleta . Un nuage de poussière s'en échappa.

-Des recherches... pour la science on va dire... grimaça Amélia .

Je tombai sur un page écrite à la main, en bas figurait des croquis de dents de chauve-souris ou un cœur de chat et ma main tomba sur des pâtes d'araignées. Je rangeai rapidement le livre avec dégoût...

-Pour la science ? Je ne le connais pas mais je suis ravi de ne l'avoir jamais rencontré.

Le visage d'Amélia apparut entre les livres ce qui me fit sursauter.

-Tu voudrais peut être que je te raconte ce qu'il s'est passé ? sourit elle.

-Sans façon merci !

Elle pouffa, puis pris un air grave :

-De ce qu'on m'a raconté mon grand-père, Dr.Daskove , était une sorte de scientifique qui faisait des expériences et des recherches sur les animaux afin d'aider l'humanité à se reconstruire après la guerre...Mais ses objectifs ont complément dévié et les armes et la technologie qu'il concevait servaient plus à son titre personnel pour tuer tout les malheureux qui croisaient sont chemin plutôt que pour le reste du monde.

Amélia continua :

-Il devint complètement fou et alla jusqu'à tuer ses proches pour faire des expériences sur eux! Ma mère s'est enfuie à temps...

-Mais... il est mort?

- Assassiné. Mais, la légende court que... (Amélia baissa le ton), l'âme errante de mon grand-père court toujours dans les couloirs du manoir la nuit pour poursuivre quiconque le croise afin de pratiquer de nouveau ses expériences...!

Je me retournai vers elle et lui montra que je m'étais bouché les oreilles mais Amélia avait disparu.

-Amélia ? 

Je parcourus les allées de la bibliothèque sans la trouver.

-Si c'est une blague ce n'est absolument pas drôle !!!

Ma voix trahissait ma peur de me retrouver seul ici.

Je tentai de l'appeler mais en vain seul le silence me répondit...

Un frisson me parcourut, j'avais l'impression d'être observé derrière chaques étagères.

Je tendis l'oreille, espérant entendre mon amie.

Le calme était absolu, pesant dans la pièce.

Soudain je capta un son infime...Des pas s'approchaient à vive allure. Ce n'était pas ceux d' Amélia: celui ci s'accompagnait d'un son métallique, telle une canne contre le plancher.

Mon cœur semblait battre à cent à l'heure et je réfléchis à toute allure. Sans hésiter, alors que la personne semblait être à quelques mètres, je me jetai sous un bureau dans un recoin sombre. J'avais l'impression de respirer si fort, que ma respiration pourrait trahir ma présence.

Je plaqua donc mes mains sur ma bouche et bloquai ma respiration le plus longtemps possible.

Le calme était revenu: avait-je rêvé ?

La tempête faisait rage dehors et j'entendai le vent souffler sur les fenêtres tels des fantômes déchaînés. Un tonnerre éclata au loin, surpris je sursautai et mon cœur sembla manquer un battement. Il fut suivit d'un éclair qui illumina la pièce projetant des ombres suspectes sur les étagères.

J'étais terrifié, je n'osais plus bouger, pas même cligner des yeux.

Je restais longtemps recroquevillé sous cette table. Mes bras s'engourdissaient et j'avais mal au dos à patienter ici.

J'avais des fourmis dans les jambes et de véritables crampes m'assaillaient.

Je regardai ma montre, il était 23h et cela faisait déjà une heure que j'attendais.

Il me fallait sortir d'ici. 

Délicatement, je pris appui sur mes pieds pour me relever et risqua un orteil dehors puis sortis la tête de sous le bureau. 

Je me relevai, regardant sans cesse autour de moi et courir au moindre mouvement suspect.

J'étais tremblant de peur.

-A... Amélia ??? Je tentais discrètement.

Je sentis un courant froid me parcourir le dos et me retournai vivement, mais il n'y avait aucune présence à signaler.

J'avançais prudemment dans les rayons, et regagna le couloir principal. 

Je marchais lentement, suspectant les moindres recoins sombres d'où j'imaginais en sortir des fantômes ou des statues animées.

Un tonnerre éclata juste à côté de la demeure illuminant l'étroit couloir où je me tenais.

Je sursautai, certain d'avoir vu bouger quelqu'un. Tremblant de peur je risquai un pas pour découvrir un immense miroir. Il y avait seulement mon reflet. Soudain un brouillard se forma derrière moi mon cœur manqua un battement et je me retournai d'un coup.

Il n'y avait personne, pas âme qui vive. Mais mon sang se glaça lorsque je sentis une main froide sur mon épaule. Alors sans réfléchir je m'élançai dans les couloirs du manoir. J'étais terrorisé , je ne réfléchissais plus , seules mes jambes me portaient.

Dans l'obscurité je ne vis pas les escaliers et m' étalai me cognant au passage la tête sur les marches. Je me retournai vivement, aux aguets...

Je n'en pouvais plus de toute cet effroi, j'aurais dû refuser l'invitation d'Amelia, rester chez moi...

Je me terra dans ce qu'il me semblait être un recoin.

Au loin le tic tac d'une horloge résonnait.

La lune émergea peu à peu, éclairant la pièce d'une lueur fantomatique. Je pus apercevoir le décor sinistre de ce vaste salon: au mur trônait des trophées de chasse et des sangliers empaillés. A côté rouillait un vieux fusil. Les fauteuils étaient couverts de poussière. Un détail m'accrocha le regard et je m'approchai du siège. Je retins un cri de surprise : un bout de velours, sans poussière formait la marque d'une main.

-Je t'ai retrouvé !!! susurra une voie fantomatique tout près de mon oreille.

J'hurlais et fis un bond trois mètres plus loin. Devant moi se tenait comme un brouillard à la forme humaine. Mon coeur battait à cent à l'heure. Mes jambes ne semblaient plus me tenir, prêtes à s'écrouler.

Soudain, l'horloge sonna le premier des douze coups de minuits. Le temps sembla s'arrêter. Le spectre paraissait peu à peu se transformer.

Dong, Dong...

Le brouillard se materialisa lentement laissant place à une jeune fille brune constellée de tache de rousseur avec ses grands yeux verts que je connaissais si bien.

Dong, Dong, Dong...

-Amélia !!! Je m'exclama.

Mes épaules s'affaissèrent de soulagement.

Dong, Dong, Dong...

Mon amie s'écroula sur moi, elle était si pâle, si tremblante!!!

-Il arrive Lyam, il arrive !!! s' écria t'elle.

Et les derniers coups sonnèrent.

Dong, Dong, Dong...