Le Secret de la Famille

Par Adelia

En l’an 1453, dans le royaume de Druvaria, un chevalier nommé Hamers Delorier vivait paisiblement avec sa femme, Mora, et leurs deux fils. Druvaria était un royaume florissant, au cœur du Moyen Âge, où la prospérité semblait inaltérable. Les Delorier, nobles et respectés, jouissaient d’une position enviable au sein de la cour.

 

Hamers, un homme d’honneur et de devoir, avait épousé Mora, une noble belle et douce. Pourtant, derrière cette vie idéale se cachait une sombre réalité : sa femme était gravement malade. Depuis leur mariage, Mora souffrait d’une maladie mystérieuse, qui n’avait cessé de se dégrader au fil des ans. Malgré tous les remèdes que les médecins et guérisseurs pouvaient lui offrir, aucun ne semblait efficace. Hamers, dévasté par l’idée de perdre la femme qu’il aimait, se résigna au fil des années à l’idée que la fin était proche.

 

Cinq longues années plus tard, le sort fut implacable : Mora succomba à sa maladie. Le royaume perdit l’une de ses plus grandes dames, et Hamers se retrouva seul, le cœur brisé, mais aussi père de deux fils désormais adultes. L’aîné, Darius, âgé de 40 ans, était un homme de caractère et de principes, et il n’acceptait pas l’idée que son père puisse un jour prendre une nouvelle femme. Il était inconcevable pour lui que l’image de sa mère, noble et pleine de grâce, puisse être remplacée. Pour lui, Mora serait toujours la seule femme de la vie de son père.

 

En revanche, Americ, le plus jeune des deux fils, possédait une vision plus pragmatique de la situation. Conseillant à son père de ne pas laisser le temps s’égrener sans chercher une nouvelle compagne, il lui expliqua qu’il devait se remarier rapidement, non par désir, mais pour ne pas sombrer dans la solitude ou être emporté par les avances d’autres femmes, peut-être moins dignes de lui. “Tu n’as plus beaucoup de temps, père. Il est temps de reconstruire ta vie”, lui avait-il dit.

 

Hamers, bien que profondément marqué par la perte de sa femme, comprit la sagesse des paroles de son fils cadet. Mais il ne pouvait se résoudre à aimer à nouveau. Le souvenir de Mora était encore trop vif dans son cœur. Les mois passaient, mais aucun cœur ne venait combler le vide laissé par sa défunte épouse. Pourtant, après cinq années d’introspection, Hamers accepta l’idée de donner une chance à l’amour, non plus par désir, mais par nécessité.

 

En 1470, son fils Darius, bien qu’opposé à cette décision, prit les choses en main et sélectionna huit femmes possibles parmi les familles paysannes du royaume, toutes jugées dignes de devenir l’épouse du chevalier. Hamers ne connaissait aucune d’elles, mais il se laissa convaincre d’en rencontrer une. Par-delà son rang, chaque candidate était belle, mais c’est celle qui semblait la plus douce, la plus calme, qu’il choisit. Son nom était Helene, et son sourire éclatant fit fondre les dernières résistances d’Hamers.

 

Quelques jours après leur rencontre, une cérémonie fut organisée dans l’immense château des Delorier. Hamers se remaria dans l’espoir d’offrir à sa famille une nouvelle stabilité. Bien que l’événement fût joyeux, quelque chose de tacite demeura : le souvenir de Mora flottait toujours dans l’air.

 

Quelques années plus tard, Hamers et sa nouvelle épouse déménagèrent dans un autre village, plus calme, où le chevalier reprit son rôle dans l’armée du royaume. Mais l’ombre du passé continuait de hanter leur nouvelle demeure. Un jour, alors qu’il était en guerre, son second fils, Americ, entreprit de vider le vieux château familial, la demeure qui avait vu naître sa famille. Au détour d’une pièce oubliée, il fit une découverte étrange.

 

Dans un coin poussiéreux, dissimulé sous des draps sombres, un grand tableau était accroché au mur. L’image peinte dessus représentait un bébé aux traits délicats. Ses yeux, clairs et perçants, semblaient fixer celui qui osait regarder. Mais ce qui frappait le plus Americ, c’était l’air étrange, presque… connu, que dégageait ce bébé. Le petit visage, ces yeux, avaient quelque chose d’irréel, quelque chose qui faisait écho dans son esprit. Mais comment cela se pouvait-il ? Il n’avait jamais vu ce bébé auparavant.

 

Americ s’approcha du tableau, intrigué. Il s’agissait d’un portrait simple mais raffiné. Mais pourquoi ce tableau se trouvait-il ici, dans une pièce abandonnée, loin des regards ?

 

En touchant le cadre, il ressentit une étrange vibration, comme si l’image elle-même avait une signification cachée. Il savait qu’il devait parler à son père, mais une partie de lui hésitait. Ce tableau, cet enfant, semblait appartenir à un autre temps, un temps que son père ne lui avait jamais révélé.

 

Tout à coup, un bruit dans le couloir le fit se retourner. C’était Hamers, son père, qui venait d’entrer dans la pièce.

 

“Americ”, dit-il d’une voix basse, presque inquiétante, “je vois que tu as trouvé cette vieille image.”

 

Le chevalier s’approcha lentement du tableau, le regard fixé dessus. Un long silence s’installa entre eux. Americ, toujours sous le choc de sa découverte, brisa enfin le silence :

 

“Qui est cet enfant, père ? Pourquoi ce tableau est-il caché ici, dans une pièce oubliée ?”

 

Hamers se figea. Ses yeux se remplirent d’une tristesse profonde, et son visage s’assombrit.

 

“Cet enfant…”, murmura-t-il, “ce n’est pas ce que tu crois. Il appartient à un passé que je n’ai jamais voulu te montrer. Un passé que j’ai tenté d’oublier.”

 

Les mots de son père, lourds de mystère, restèrent suspendus dans l’air, et Americ sentit une étrange angoisse s’emparer de lui. Il y avait un secret, un lourd secret derrière ce tableau, et il était désormais plus déterminé que jamais à découvrir la vérité.

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