Point de vue : acrux
*Je tire une dernière bouffée de ma cigarette avant de l’écraser. Sans déconner, c’est légal un froid pareil ? Putain, chaque journée me paraît encore plus froide que la veille. Bon, je vais rentrer voir les filles, on a un débriefing à faire. * Je me dirige d’un pas décidé vers le repaire, les traces de mes pas laissent une marque indélébile dans la neige immaculée, le bout de mes doigts, bien qu’ils soient dans mes poches, est rouge sang. Une fois arrivé devant la porte, je prends une grande respiration et je l’ouvre.
« Salut les filles, réunion. »
Sans ajouter un mot de plus, je me dirige vers la salle de réunion. La table à neuf chaises est encore vide, tandis que je m’installe impatiemment en bout de table. *Ça fait déjà deux minutes que j’attends et personne ne s’est encore bougé le cul. Ils attendent le déluge ou quoi ? * Après cinq longues minutes d’attente, je vois Kaff arriver d’un air ennuyé, ses cheveux noirs couvrant une partie de son œil gauche. Il s’assoit à la deuxième chaise à ma gauche, son mètre quatre-vingt-dix paraissant moins impressionnant une fois assis. Dix minutes passèrent, et le dernier finit par arriver. Nous sommes donc six dans cette salle.
« C’est bon Acrux, tu peux commencer », m’indique Zaurack d’un ton impatient.
« Eh jeune branleur, j’ai attendu dix minutes pour rassembler six personnes, alors viens pas chialer parce que je te fais attendre trente secondes, tu veux ? » Sérieux, ils commencent tous à me les briser. *On n’est pas un putain de bar, faudrait qu’ils apprennent la ponctualité.*
« Bon, comme vous le savez, on a réussi à tuer un prêtre. On peut s’en féliciter, surtout qu’il faisait partie des plus influents. » Après cette phrase, je vois des mots de satisfaction parcourir la pièce. « Néanmoins, je vais probablement casser l’ambiance, mais c’est loin d’être suffisant. »
« Pardon ? » s’interroge presque violemment Kraz.
« Ce n’est pas suffisant pour toi d’avoir éliminé l’un des prêtres les plus influents et puissants de l’Église ? » continue-t-il.
« Non. Putain, t’es con ou quoi ? Les prêtres comme ça, ils en auront à l’infini. Dans deux semaines, il est remplacé à coup sûr. »
Kraz me lance un regard noir après ma réplique et sa réponse ne se fit pas attendre.
« Et donc, on ne peut pas se féliciter de cette victoire ? On est au courant que notre attaque ne va pas faire s’effondrer l’Église mais j… »
Sans le laisser continuer, je lui coupe la parole et me lève de ma chaise.
« Mais quoi, Kraz ? Hein ? Dis-moi, t’es là pour tuer deux ou trois prêtres, toi ? Désolé mais on ne se réjouit pas avant d’avoir atteint l’objectif. Notre PUTAIN D’OBJECTIF, si t’as oublié, c’est de crever tous ces chiens de l’Église et de rendre leur évangile aussi réaliste qu’une putain de fable ! Alors maintenant, si tu veux continuer à bander dur parce qu’on a buté un prêtre, vas-y, mais moi, ce n’est pas ça qui me contente. »
Kraz me regarde, visiblement colérique mais aussi convaincu.
« Enfin bref, tout ça pour dire : tenez-vous prêts, j’aurai une surprise pour vous à la fin de la semaine. »
Après cette altercation, je pars dehors faire un tour pour me vider la tête. J’entame ma balade dans cette neige presque menaçante. Après cinq minutes, je sens quelque chose me rattraper. C’était Kaff qui m’avait suivi.
« Tu pourrais arrêter d’employer tes pouvoirs de discrétion pour me suivre, c’est presque flippant », lui dis-je d’un ton ironique.
« Désolé, mais si tu m’avais repéré à la sortie du repaire tu m’aurais envoyé me faire foutre. Je trouve que t’es allé trop loin avec Kraz, tout à l’heure. »
« Putain, tu vas pas me faire la fillette toi aussi. Tu sais très bien que j’ai raison. Désolé, mais c’est comme ça que ça fonctionne : pas de relâchement tant que l’objectif n’est pas rempli. »
« Acrux, ça fait déjà trois ans qu’on lutte tous ensemble. Si tu n’arrives pas à offrir quelques moments de répit aux autres, ils vont juste complètement imploser. Écoute, tu sais bien que j’ai tout autant envie de me venger de l’Église, mais je pense sincèrement que tu devrais lâcher du lest. »
J’affiche un sourire de façade et je lui réponds :
« Écoute, ça c’est ton boulot, tu vois. Moi je dirige, et toi tu les rassures. Désolé, mais je peux pas diriger et faire psy en même temps. »
Kaff soupire, ses yeux noirs formant un contraste saisissant avec la neige qui lui tombait dessus.
« Bon, j’y retourne en ce qui me concerne. Tarde pas trop non plus », me dit-il avant de repartir d’un pas assuré vers le repaire.
Je m’allume une cigarette, tandis que l’odeur du tabac vient couvrir celle de la neige. Le vent siffle dans mes oreilles, et en réaction à cette vague de froid, elles se colorent d’un pourpre infini. *La prochaine étape va bientôt se dérouler. J’en ai marre de perdre mon temps à dilapider quelques églises de bas étage. Il faut absolument tuer un archevêque. Tant pis si l’on connaît des pertes, peu importent les implications : tant que je vivrai, l’Église ne sera jamais absolue.*