Les funambules du cœur

Il est minuit.

Offre-moi un sourire

Qu’on en crée encore un monde,

Une autre planète, à s’évanouir

Sur tes draps froissés d’essais.

Il est mi-nuit.

Mains sur nos cœurs à vouloir détresser les fibres de nos douleurs

Et ton papier argentique que tu sors

Pour un rien, pour mes mots, un baiser, tous torts...

J'ai juré aux cieux de ne pas le déchirer, tout plutôt que de te briser.

Sur des pas turbulents, on s’envole,

Explorant les villes, les toits, tes bras,

Eprouvant les limites de nos désirs frivoles...

Je t’en prie, Âme-sœur, ne t’enfuie pas,

Quand à voyager, nos lèvres ignées finalement se repousseront,

Quand à consulter les autres, on se dira que l’amour, entre nous, n’est pas...

Il est minuit.

Et à ne pas dormir, on s’écoute

Rêver nos rêves, on s’égare à s’admirer.

Quand l’un fixe le plafond, l’autre rougit.

Quand tes mains photographient mon corps, les miennes tremblent de vie.

Il est mi-nuit.

Mon trouble s’éveille : tu m’as imaginée tisser ton cœur d’âme.

Doit-on vraiment, ami, nous sortir de notre quiet sommeil ?

Il faut encore voir passer le temps,

Car nous, amis et amants, c’est un jeu de funambule.

On m’a racontée, un jour, que les émois sont flammes.

Entre nous, je n’en vois pas l’or, et certaines pensent que c’est à se damner,

Puisque sous la soie, tout se sait.

Moi, je compte piteusement mes cartes : à roi de cœur fragile, dâme pique.

Au carreau, notre film noir et blanc tourne dans le vide.

Il est minuit,

J’essaie de raconter ton sourire aux étoiles.

Leur avouer qu’après toi, il n’y aura plus de moi qui tienne.

Que sans ta voix, je frissonne.

Âme-sœur, aime-moi sans brasier,

Embrasse-moi sans peur.

Âme-sœur, il est minuit.

Contemplons-nous jusqu’à ce qu’il soit l’heure de reconnaître

Tout ce qu'on a fui.