Mamita des montagnes.
Mamita remonte lentement la pente abrupte de l'oasis, les pas marqués par la vie. Le regard tourné vers le ciel, les mains également, comme souvent. En signe de gratitude à l'égard de la vie. Compagne auprès de qui Mamita apprend tellement après quelques soixante heureux printemps, automnes et hivers passés à fouler cette terre-mère qu'elle chérit tant.
C'est ici, en face du Mont Ventoux, ce Géant de la Provence, dans le pays des Baronnies, sur les côteaux abruptes et rocailleux de la Drôme provençale, que Mamita s'est ancrée avec Paul, depuis plus de vingt ans. L'oasis, c'est leur petit. Il est né dans la pensée imaginale de Mamita, elle qui fréquentait et s'inspirait des projets et aspirations portés par Pierre Rabhi, et du mouvement des colibris.
Et puis avec Paul, son tendre époux, façonneur de poteries et de paysages devant l'Eternel, elle allait pouvoir faire émerger de terre, cet îlot d'espérance. Sur ces vallons accidentés donc, au milieu d'une clairière faite de chênes verts, de genets et parsemés de ci de là par quelques majestueux cyprès qui délimitent souvent ici les rares zones d'habitation, une cabane centrale git. Tout de bois vêtue. Elle s'alimente en chaleur grâce à un bon poêle à bois qui siège en son sein. Au cœur de ce petit espace amménagé, s'érige une bibliothèque en pin massif, discrète, à côté de deux matelas posés à même le sol. Au centre d'une kyrielle de livres colorés, un petit cadre en bois s'adosse contre le mur blanc qui soutient la bibliothèque. Il y présente un portrait joyeux du saint soufi marocain Sidi Hamza qui a tant inspiré Mamita dans son parcours de vie.
De par et d'autre de cette cabane, ce chalet presque pourrait-on dire, douillettement aménagé, se trouve une cuisine ouverte et rustique, une sobre cabine de douche ainsi qu'une toilette sèche. Deux, trois espaces couverts permettent aux voyageurs de se reposer, de se prélasser, apprécier le silence parfois teinté des chants de cigales et autres grillons.
En contrebas, le verger planté par le couple local a fier allure : abricotiers et pêchers cotoyent des essences plus rustiques de pommiers et autres pruniers. Une oasis en effet dans cette région où les longues périodes de sécheresse estivales laissent des marques de plus en plus stridentes : les sources sont taries, les sols s'appauvrissent. Et pourtant, ici à Plaisians, la vie et l'optimisme restent les valeurs maîtresses. Alors, c'est en usant de systèmes tous plus ingénieux les uns que les autres que les deux colibris tentent quotidiennement d'apporter leur eau au Jardin.
A côté de cela à l'oasis, on y vient pour peindre, pour pratiquer le Qi gong, pour apprendre à cuisiner plus sainement et sereinement. Mamita se délecte d'organiser des séjours préparés spécifiquement pour les dames. Elles les accueillent, les bichonnent, les bousculent afin qu'elles apprennent à s'accueillir et aussi à s'affirmer, à poser leurs limites. Pour leur épanouissement personnel et par extension, au sein de leur vies de couples.
Mamita ne démord pas ; fidèle et à l'écoute de ses besoins, elle s'octroie parfois quelques temps de pause. Ces derniers se retrouvent souvent entrecoupés par des coups de fil de la famille, des petits enfants, des amis, de personnes migrantes que Mamita accompagne.
Il a été donné, à l'auteur de ces quelques nouvelles, de connaître cette grande dame, il y a dix années de cela, lors de premiers périples en Cévennes. Lui revient alors à la mémoire ces doux conseils et sa vision profonde qu'elle délivrait en amorçant constamment ses phrases par : « Ismaël (ou Samuel), mon petit frère... »
Et dix ans après, c'est toujours la même rengaine au bout du fil.
Si aujourd'hui Mamita a perdu un peu de sa santé physique, grignotée par l'âge et l'âpreté des hivers de montagne et des étés de Provence, elle n'en reste pas moins fidèle à ses valeurs. Toujours aussi aimante de son brave Paul, elle paraît une jeune adolescente lorsqu'elle se retrouve lovée dans ses bras fatigués, après une journée de travail.Ils représentent un espoir, un message pour les générations à venir. Une voie d'Amour inconditionnelle, une voie d'entraide et de partage, d'abnégation et d'hospitalité.
Et pourtant, elle revient de loin Mamita. Elle qui a connu l'exil depuis la Serbie d'où sa famille est native, puis depuis la Palestine où elle avait trouvé un temps refuge. Elle a su garder la force, les chants, et les savoir-faire des femmes rencontrées lors de ces étapes respectives. Elle s'en est imprégnée pleinement pour pouvoir les transmettre aujourd'hui. Puis, elle est arrivé en France. Elle y a connu la précarité en tant que femme seule à Paris avec trois enfants. Elle nourrissait déjà alors de grands idéaux mais difficile d'exprimer alors ses pleins potentiels, avec ses trois enfants à charge, de surcroît au sein d'une vie parisienne coûteuse en temps et en énergie. Démesurée, en tout cas, selon la mesure de Mamita. En effet, elle aspirait tant à retrouver ses terrains de campagne méditerranéens, ensoleillés, chantants, où la vie est moins chère, mais non moins précieuse.
C'est alors que la vision de la Drôme provençale se fit sentir en son être, et c'est là qu'elle s'établit et qu'elle rencontra Paul. Si elle ne se repose pas dans sa caravane, au moment du zénith, vous la trouverez arrosant les pêchers au sortir de l'été, repiquer un rosier vers une terre moins abrupte et plus accueillante, mitonner de succulents mets à base de produits frais et naturels, épouser le Qi au cœur d'un temps de reliance, ou encore exercer sa voix au diapason du son du vent bruissant dans les arbres et reliée à la Toute-Puissance de la forêt environnante.
Je vous invite à partir à la rencontre des personnages évoqués, ils sont encore plus beaux dans la réalité. Mamita se ferait un plaisir de t'accueillir! Je peux même te laisser le lien vers son site internet et sa newletter souvent rafaraichissante!