Je suis un monstre bicéphale et polymorphe, capable de rire, de paraître amusé, et même de transpirer le bonheur, tout en étant détruit et aride dans mon moi profond. Mon apparence n'est qu'un outil pour qu'on me laisse me consumer. Ce que je décris n'est pas constant, ce ne sont que des périodes, bien évidemment. En fait, pendant ces périodes, mon apparence parvient parfois à convaincre mon moi profond, et je me laisse perdre dans les fastes un peu insipides d'un bonheur artificiel. Mais cela ne dure jamais.
Je retourne rapidement dans la chaleur sucrée de la mélancolie. Je n'y fais pas ma vie et n'y construis pas mes espoirs, mais parfois je m'y complais pour mieux me retrouver, me rééquilibrer. Cela me permet de mieux ajuster mes forces et mes émotions, d'explorer mes abysses et de gravir mes sommets. Cette mélancolie compulsive m'aide à fabriquer cette carapace sans laquelle je ne me sentirais pas aussi bien.
Bien, mais aussi bien incapable d'esquiver les agressions incontrôlées des personnes non initiées et non initiables. Ces gens, sans odeur agréable, qui ne savent et ne racontent que de l'air chaud, sans aucune autre utilité que de rendre l'atmosphère moins respirable. Ils m'irritent, je ne peux les sentir, ils m'oppressent, me compressent, et ce stress m'amène à les ignorer. Ces gens, puants par leur non-odeur, s'immiscent dans tous les interstices, incrustés, on ne peut les déloger sans les blesser. Ils sont implantés.