Le vent souffle dans les feuilles de l'érable à côté de moi. L'écoulement de l'eau de la fontaine m'apaise. L'herbe humide et douce me caresse les jambes. La brise de printemps fait gracieusement danser mes cheveux.
Ce paysage semble irréel.
Le ciel azur est parsemé de pointes de blanc qui sont comme déposées au pinceau ou à l'aquarelle. Le mélodieux chant des oiseaux donne de la vie à ce lieu.
Je me demande quand je vais quitter cet endroit.
Le soleil me réchauffe agréablement la peau. Je ferme doucement les paupières, détendue, comme à chaque instant que je passe ici.
Mes jambes ont envie de se promener. Mes pieds quittent l'herbe fraîche, mes mains quittent la terre humide. Je m'avance sur un chemin de pierre. Mes pieds, l'un après l'autre, me portent vers l'avant, sans jamais s'arrêter. Je suis le rond parfait que forme le chemin, sans fin.
Je connais cette scène par cœur. Je l'ai vécue des dizaines, des centaines de fois.
Je quitte le chemin pavé et me dirige vers le petit pont japonais qui enjambe la rivière traversant le jardin. En face de moi, une silhouette m'observe de loin. Habillée en jeans troués et en t-shirt noir, cette femme détonne du reste du jardin zen.
Pas à pas, je m'approche d'elle. Ses yeux perçants, le seul détail que j'arrive à visualiser de son visage, me fixent sans ciller. Non, en vérité, ils me transpercent.
– Quel est ton nom ? je demande d'une voix que le vent porte vers elle.
Je sais qu'elle m'entend. Je sais qu'elle me répond, mais je ne sais jamais comment elle s'appelle, même après avoir vécu cela tant de fois, car c'est à ce moment-là que j'ouvre les yeux.
Et que je reviens à la réalité.
Mes yeux, grands ouverts, fixent résolument le plafond blanc de ma chambre. Mon corps ne semble pas décidé à sortir du lit. Il faut pourtant que je me lève.
Patiente, je promène mon regard sur la pièce. Mes yeux passent sur ma lampe de chevet, sur mon bureau, sur mon étagère couverte de livres, sur ma porte, sur mon armoire entrouverte et sur ma fenêtre aux rideaux tirés.
J'ai encore fait ce rêve ? Peu à peu, les souvenirs du jardin zen et de la femme aux yeux d'acier me reviennent en mémoire, transformant ma question en affirmation. Oui, j'ai encore fait ce rêve. Et je ne connais toujours pas le nom de cette femme.
Mon corps active le mode automatique. Comme chaque matin, mon bras glisse vers mon téléphone portable, posé sur ma table de chevet et l'allume. L'écran me brûle la rétine et il faut quelques secondes à mes yeux pour s'y acclimater. Sur le fond d'écran, le museau de mon berger australien me salue. Je lis l'heure, écrite en gros chiffres blancs. 7h19.
– Merde, je souffle.
Je supplie mon corps de se lever. Heureusement, il accepte enfin. Je m'approche de mon bureau et attrape un mouchoir dans la boîte prévue à cet effet. Je me mouche plusieurs fois dedans sans réussir à déboucher mon nez. Vive le printemps et ses allergies !
Quelqu'un toque à la porte de ma chambre. Me rendant compte que je suis en sous-vêtements, j'attrape un t-shirt et un legging sur ma chaise.
– Attends deux secondes ! je m'écrie.
Dans mon empressement, j'enfile mon t-shirt à l'envers. Je veux le remettre à l'endroit, mais la porte s'est déjà ouverte.
– Grouille, Lune. J'ai pas tout ton temps, moi.
Sam, mon colocataire et meilleur ami, passe la tête à travers l'entrebâillement de la porte et jette un coup d'œil septique à ma tenue débraillée et à mes cheveux en bataille.
– Si dans dix minutes t'es pas prête, je pars sans toi. Et, tu feras gaffe, t'as mis ton t-shirt à l'envers.
– Je sais.
Il quitte ma chambre sans fermer la porte, ce qui m'énerve. Et il le sait très bien. Je tourne la poignée et enfonce bien fort la porte dans le mur pour le lui faire comprendre.
Cela fait deux ans qu'on est en coloc', je le connais depuis le collège et il ne sait toujours pas fermer une porte après son passage, malgré mes nombreux enseignements.
Je retire mon t-shirt pour le remettre à l'endroit, puis j'attrape mon sac en tissu et je glisse deux-trois affaires dedans. Je regarde une dernière fois mon portable. 7h26. Aucune notification. Je peux y aller.
Je ne comprends toujours pas pourquoi Sam tient tant à arriver en avance à son boulot. Le problème, c'est qu'on n'a qu'une seule voiture et je n'ai toujours pas le permis. Résultat des courses, je dépends de lui pour tous mes trajets.
– Luuune ! m'appelle Sam, qui s'impatiente.
– Oui, j'arrive ! je crie à m'en briser la voix.
J'enfile un pull noir par-dessus mon t-shirt. J'aime le noir, c'est simple et passe-partout.
J'ouvre la porte et arrive dans la pièce de vie de notre appartement, qui est séparée en deux parties par une fine cloison de bois : le salon et la cuisine. Sam, accoudé au bar de la cuisine, joue avec sa tasse d'un geste impatient.
– Ah, enfin ! s'exclame-t-il en m'apercevant. J'ai une réunion aujourd'hui et j'ai pas envie d'arriver en retard alors dépêchons-nous.
– Tu n'arrives jamais en retard, Sam. Aujourd'hui ne sera pas différent des autres jours, je rétorque, mi-amusée, mi-agacée par ses petites manies.
Je me tourne vers Praline, mon chien, lovée dans son panier. Je m'approche d'elle et lui caresse doucement le dos, puis je me retourne vers Sam, lui prends sa tasse des mains et finis son café. Il me regarde d'un air outré.
– Allez, Monsieur-Je-Suis-Pressé, tu vas être en retard à ta réunion, je lui lance avec un sourire taquin.
Nous sortons dans le couloir et prenons l'ascenseur pour rejoindre le parking dans le sous-sol de l'immeuble. J'ouvre la portière de droite de la voiture et m'assoie sur le siège passager. Sam m'imite sur le siège de gauche. Il regarde son téléphone portable, et, aussitôt, un large sourire éclaire son visage.
– Un message de ton chéri ? je ricane.
Sam sursaute, rouge pivoine.
– Arrête de l'appeler comme ça !
– Oh, allez, ça fait presque un an que vous sortez ensemble avec Orion. Et vu comment t'as la banane à chacun de ses messages, tu l'aimes vraiment, je souris.
– Bien sûr que je l'aime, s'indigne mon coloc'. Quand tu tomberas vraiment amoureuse, tu comprendras.
Je lève les yeux au ciel, exaspérée. Je sais cependant qu'il a raison. C'est de notoriété presque publique que je n'ai jamais été en couple. Mes histoires amoureuses n'ont jamais été plus loin que deux crush au collège et qu'un râteau pris entre les dents au lycée.
Je me suis toujours sentie vide, incomplète, comme s'il me manquait une part de moi. Plus le temps passe, plus le trou en moi se creuse. J'espère qu'il se remplira un jour.
Voir Sam sourire à la vue des messages d'Orion ne fait qu'agrandir ce trou. Sans que je le veuille, mon visage se couvre d'un sourire forcé.
Après à peine cinq minutes de trajet, Sam me dépose devant la maison d'édition, là où je travaille depuis le début de l'année. Je cherchais un boulot en rapport avec mes passions, l'écriture et la lecture, depuis longtemps. Je suis contente d'avoir enfin trouvé.
– À ce soir, me salue Sam.
– À toute, et dit bonjour à ton chéri de ma part.
– C'est ça. Allez, je me dépêche. Tu prépareras le repas en rentrant, Lune !
– Ouais, ouais.
Avant de poursuivre Nausicaa, je me suis dit que j'allais commencer par ça ! Vu que j'avais pas beaucoup de temps avant de partir, je me suis dit "allez je donne tout sur ce petit chapitre et après je file" mais... bah j'ai rien à dire ! D'habitude je note toutes les phrases problématiques pour faire un retour détaillé dessus, mais là... Il n'y a point grand-chose, s'il en est...
Je finirai avec les compliments que j'ai à dire. Pour le moment, je vais digresser avec mon avis général. Mes seules critiques ne sont que de la subjectivité sans une petite once d'objectivité. Je préfère les histoires fantastiques et le vocabulaire qui y est en lien, donc forcément je suis dépaysé face à la modernité ! Raison qui me fait adorer la première partie du rêve, d'ailleurs. Pour autant, le langage moderne s'intègre bien avec l'ambiance, quoi que j'en pense, donc... donc derrière ma critique se trouve un compliment ? Hmm...
Eh bien poursuivons. Les descriptions sont folles, effectivement, c'est un véritable plaisir à lire ! Un velours de lettre qui s'appose sur l'écran de mon ordinateur pour me mystifier en me chuchotant que je suis dans un univers plein de jolies formes et métaphores, ce genre d'idées, en sommes. Idées que j'aime beaucoup beaucoup. Bref, tu t'en sors très bien pour les descriptions, donc tu n'auras, je l'espère, plus aucune retenue à les utiliser !
En sus des descriptions, tu dialogues bien. C'était tout aussi agréable à lire. La crédibilité et la fluidité étaient bien conjuguées. En vrai, après réflexion, c'est peut-être aidé par le fait que le cadre soit lui-même crédible. Difficile de faire des dialogues réels dans de la fantaisie, donc c'est un compliment valable pour cette nouvelle, mais qui perd son sens dans tout autre genre d'œuvre. ca reste un compliment, et je loue ta force de dialogue dans tous les cas.
A la rigueur, seule critique que je puisse vraiment faire, c'est le prénom Lune dans un univers à priori réel, qui fait un peu sourire, mais là encore, c'est léger.
En sommes, tes progrès littéraires sont fous et trop bien à suivre !
Contente que tu passes par ici !
Que répondre à cela ? Eh bien... Merci beaucoup !
Je suis vraiment satisfaite de cette nouvelle, et je suis super contente qu'elle te plaise !
Merci de ta lecture et de ton retour :)
À bientôt !
Merci pour ce moment de lecture.
Contente que ce début t'ai plu.
À bientôt peut-être !
J’ai beaucoup aimé ce début de nouvelle ! L’histoire est très agréable à lire et assez reposante.
La scène du rêve est très bien écrite, c’est classique, mais ça marche toujours ! Pour l’instant, il n’y a pas beaucoup de suspens mais l’histoire est quand même captivante, j’adore ce type de passage dans les livres.
Merci pour ce bon moment de lecture !
À bientôt !