Partie I - Chapitre I

Notes de l’auteur : TW ! Pour un public averti, c'est une histoire sombre où chacun pourrait se reconnaître, quand les maux côtoient les mots, faites attention à vous, et prenez garde à ce que vous pourriez lire. Car je ne peux mettre d'avertissement à chaque chapitre, ni à chaque phrase. Je peux seulement vous mettre en garde en avance.
Bonne lecture à toutes et à tous, j'ai hâte de lire vos possibles retours.

Partie I : L’Echo du présent 

Tout le monde a des secrets inavouables mais face aux drames les langues se délient et les secrets refaçonnent la réalité pour aboutir sur une vérité criante d'injustice.

CHAPITRE I

Les silences de Doel

Au-dessus des toits gris des maisons aux murs remplis de graffitis en tout genre, la brume s’étirait lentement, enveloppant le petit village de Doel, situé au nord de la Belgique, à deux pas de la frontière des Pays-Bas. Le silence oppressant s'infiltrait dans les habitations où logeaient à peine 800 habitants en tout et pour tout, était accompagné d’un vent froid, mordant la peau. La brise apportait avec elle l’air marin venant du port, installant ainsi une atmosphère de village fantôme qui englobait toute l’atmosphère.

Mais au détour d’une rue autrefois commerçante, une silhouette féminine, drapée d’une doudoune bien chaude d’où sortait une tête rousse, un sac à dos rouge, élimé et usé, sur les épaules, bravait courageusement l’hiver en ce mois de février. Marion réajusta son sac, celui qui la suivait partout même à travers le monde et à chaque exploration qu’elle débutait. 

Elle conservait ainsi son précieux matériel électronique, composé d’un petit trépied, d’une caméra dernier cri, d’un micro et d’une lampe frontale, en somme l’apanage d’un bon vidéaste. Arpentant ces rues qu’elle connaissait depuis des lustres notamment pour y avoir joué des centaines de fois avec ses amis,la jeune trentenaire marchait d’un pas vif en s’approchant d’une petite clairière. 

Depuis longtemps laissée à l’abandon, la végétation rendait le périple fastidieux. Mais rien qui puisse rebuter Marion qui était en proie à une excitation galvanisante  en voyant de loin les ruines de l’ancienne piscine municipale qui se dessinait à travers le brouillard, comme une ombre familière, apaisante et réconfortante.

Ce n’était pas la première fois que l’enseignante s’y aventurait, elle pourrait s’y rendre les yeux fermés  vu le nombre de fois où elle avait parcouru l’installation à la recherche d’une ouverture pour s’y glisser et ainsi pouvoir faire une exploration vidéo qu’elle pourrait mettre sur son compte Youtube. C’était en quelque sorte, son complément de revenus.

Les vidéos de ses explorations connaissaient un franc succès, surtout depuis celle où, en explorant un ancien laboratoire aux États-Unis, Marion avait découvert toutes sortes de documents, d’installations de recherches... Mais le plus fou, c’était les bocaux de formol dans lesquels , on pouvait encore y voir flotter de petits animaux. Le plus étonnant fut ,bien sûr, le corps d’un serpent entier qui avait la gueule grande ouverte laissant ainsi apercevoir ses impressionnants crochets. 

Dans cette exploration bien qu’elle fut l’une de ses préférées, il s’était avéré que ce fut également celle qui avait été la plus dangereuse. En montant l’immense escalier en colimaçon qui menait vers les salles de recherches, la jeune femme avait failli passer au travers du vieux plancher, elle ne dut son secours qu’aux réflexes rapides de son fiancé, également urbexeur.

Ainsi, même si les États-Unis l’avaient conquise par leurs nombreux bâtiments laissés à l’abandon, c’est dans son village natal qu’elle revenait toujours, comme si les fresques fissurées et les carrelages cassés de cette piscine municipale abandonnée pour faute de budget, pouvaient lui offrir des réponses à son obsession pour les lieux oubliés et pour cette adrénaline toujours présente lors de ses explorations illégales et sauvages. 

Ses bottes faisaient craquer le sol gelé tandis qu’elle s’avançait prudemment, attentive au moindre son. Bien que laissée pour compte, l’installation accueillait encore des SDF qui cherchaient un endroit pour passer la nuit à l’abri ou encore des squatteurs qui profitaient de l'éloignement du site pour se piquer et s’infligeaient leurs doses quotidiennes de drogue. C’est ce qui rendait l’endroit dangereux à bien des égards. Pour Marion, le risque qu'elle redoutait le plus était de tomber à cause d'affaires oubliées par les anciens occupants et ainsi se couper avec une seringue usagée. Les risques humains ne l'effrayaient pas de la même manière...

L’abandon avait alors suivi son cours, laissant la nature y reprendre ses droits, les vandales laissaient leurs graffitis délavés, des fenêtres en carton et des débris, énormément de débris que ce soit des seringues, du verre, des habits ou des canettes d’alcool, tout était éparpillé comme les souvenirs de moments révolus et oubliés. 

Marion parvenue à la brèche creusée dans le mur nord du bâtiment, s’accroupit afin de sortir de son sac, sa caméra qu’elle déplia, les mains, pourtant emmitouflées dans des mitaines marrons, engourdies et gelées par le froid. Une montée d’adrénaline, mêlée à une excitation familière qui précédait toutes ses aventures extra-urbaines, montait doucement en elle, électrisant sa colonne vertébrale.

Bien que la trentenaire avait déjà filmé cet endroit des dizaines de fois, cette fois-ci, c’était différent. Quelque chose, un pressentiment l'assaillait, l’ambiance du lieu semblait peser davantage comme une sorte de tension invisible qu’elle ne pourrait s’expliquer. Mettant de côté ce pressentiment qu’elle mit sur le compte de l’hiver qui rendait l’endroit encore plus sinistre, elle s’abaissa pour passer la brèche parvenant ainsi dans les anciens vestiaires. 

Dans  ceux-ci, il restait des maillots de bains, des cartons dont les sans-abris se servaient pour se fabriquer des lits sur les bancs longeant la pièce. Prenant une grande respiration afin de calmer le rythme effréné de son coeur, la jeune femme s’avança vers le seul et unique bassin. 

“ Cette fois, je suis seule…” murmura-t-elle en déclenchant l’enregistrement. A l’accoutumée, Philippe, l’accompagnait toujours pour ses sorties appréciant lui aussi le calme de cet endroit. Ce jour, ce n’était pas le cas. 

L’attendant dans le fauteuil moelleux de leur maison qu’ils avaient acheté ensemble, elle divaguait en regardant Poxy, leur loulou de Poméranie, jouait à attraper les ombres que projetait leur feu de cheminée. Son téléphone s’était mis à sonner. Philippe était retenu en salle d’autopsie et ne pourrait malheureusement pas l’accompagner pour son escapade. L’idée de venir seule ne l’avait pourtant pas freiné, d’un tempérament fonceur et entêtée, Marion avait vite occulté la recommandation de son conjoint de rester à la maison pour profiter de ses vacances pendant cette période de pause scolaire.

L’exploratrice urbaine avait besoin de cet endroit, retrouver la solitude qu’elle aimait tant quand encore adolescente, se réfugiant ici, la piscine lui offrait une étrange forme de réconfort. 

Ainsi, à travers son objectif, Manon balaya les lieux, se rapprochant de plus en plus du bassin où l’eau stagnante n’existait plus depuis bien longtemps laissant place à une cavité béante rongée par le temps et les feux que les squatteurs allumaient autant pour se réchauffer que pour faire fondre leurs mixtures qu’ils s'injectaient directement dans le sang.

La jeune femme s'aventura de plus en plus près, descendant même la petite échelle à l'extrémité droite du plongeoir, c’est en se tournant vers la gauche, à ce moment-là, qu’elle la vit. Une silhouette ballottait dans la brume de gauche à droite, doucement au bout d’une corde suspendu au plongeoir. C’était le corps sans vie d’un jeune homme, de tout de noir vêtu. 

Le froid s’empara d’elle, de son corps, son rythme cardiaque augmenta, son souffle se coupa. Le visage blême tétanisé par la découverte, elle recula tremblante, soudain elle heurta quelque chose de mou et bascula en arrière en laissant s’échouer sa caméra.

 Cette fois, ce n’était pas une exploration ordinaire.



 

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DSWritter
Posté le 17/03/2025
J’ai vraiment apprécié ce premier chapitre !
L’introduction du mystère est bien construite et laisse entrevoir un univers riche en secrets, ce qui pique réellement la curiosité. La manière dont tu introduis ton personnage est très fluide et pas forcée.
L’écriture est, elle aussi, fluide, et j’ai trouvé que les descriptions étaient suffisamment détaillées pour m’immerger dans l’ambiance sans être trop envahissantes.

Ce qui m’a particulièrement frappé, c’est la façon dont tu joues avec les non-dits et les éléments mystérieux qui se dévoilent petit à petit. Cela donne un rythme intéressant et rend la lecture très engageante.
J’ai hâte de découvrir ce qui se cache derrière tout ça. Surtout que j'aime beaucoup les enquêtes !


En tout cas, bravo pour ce début prometteur ! J’ai hâte de lire la suite pour découvrir l’évolution de l’histoire.
M.P Lenoir
Posté le 19/03/2025
Encore merci ! C'est vrai que j'essaye toujours d'avoir une écriture la plus fluide possible même si il y aura toujours également des éléments à peaufiner.
Jouer avec la patience des lecteurs, c'est ce que j'aime. Juste de quoi lancer les premières hypothèses même si il est encore trop tôt pour savoir quoique ce soit. Cependant, j'essaye tout de même de laisser quelques indices de ci de là.

Je vais voir pour faire avancer un peu plus vite l'enquête pour passer au cœur de l'histoire et aux sujets qui me tiennent à cœur.

Hâte de te revoir traîner à Doel dans ce cas, promis je reviens bientôt dans ton univers !
ANABarbouille
Posté le 16/03/2025
Hello! Je trouve ton écriture fluide, les descriptions sont bien amenées et on est tout de suite dans l’action :)

Mes quelques remarques, qui ne sont que mon avis:

Mais rien qui puisse rebuter Marion qui était en proie à une excitation en la voyant de loin les ruines de l’ancienne piscine municipale se dessinait à travers le brouillard, comme une ombre familière, apaisante et réconfortante. —> j’ai eu de la peine à bien cerner toute la phrase

Bien que laissée pour compte, l’installation accueillait encore des SDF qui cherchaient un endroit pour passer la nuit à l’abri ou encore des squatteurs qui profitaient de l'éloignement du site pour se piquer et s’infligeaient leurs doses quotidiennes de drogue. C’est ce qui rendait l’endroit dangereux à bien des égards. —> pour moi ce n’est pas clair de comprendre en quoi c’est dangereux, je ne trouve pas les sans abris et les personnes droguées particulièrement effrayantes; au contraire je me serais dit que le lieu n’allait pas s’effondrer sur ma tête et que c’était rassurant ! Peut-être à développer pour qu’on comprenne bien ce qui fait ressentir ça à ta protagoniste

Quelque chose, un pressentiment l'assaillait, l’ambiance du lieu semblait peser davantage comme une sorte de tension invisible qu’elle ne pourrait s’expliquer. Mettant de côté ce pressentiment qu’elle mit sur le compte de l’hiver qui rendait l’endroit encore plus sinistre, elle s’abaissa pour passer la brèche parvenant ainsi dans les anciens vestiaires. —> j’ai trouvé dommage qu’on passe un peu vite du mauvais pressentiment à « oh bah c’est juste le froid » ; peut-être qu’il m’aurait personnellement fallu une petite indication de plus sur comment son état interne change (c’est très personnel)

L’attendant dans le fauteuil moelleux de leur maison qu’ils avaient acheté ensemble, elle divaguait en regardant Poxy, leur loulou de Poméranie, jouait à attraper les ombres que projetait leur feu de cheminée. —> juste eu besoin d’un peu de temps pour capter qu’on revenait dans le passé sur quelques lignes (après j’ai rapidement compris que y avait pas de canap dans sa piscine abandonné mais peut-être que ça rendrait le texte plus fluide encore)

Je trouve globalement les scènes bien amenée et la fin de chapitre intrigue et donne envie de lire la suite !

À bientôt donc ;)
M.P Lenoir
Posté le 16/03/2025
Bonjour !

Merci pour ton retour.
C'est vrai que la première phrase est assez disons, bâclée, j'ai dû faire une erreur en voulant importer ici mon fichier et j'ai trop vite relu. Je vais changer directement cela, merci pour cette remarque, à force de relire et relire on arrive à sauter quelques trucs.

En fait, ce ne sont pas vraiment les personnes qui seraient un danger mais plutôt ce qu'elles rapportent, comme les seringues etc, c'est vrai que je devrais éclaircir cela, dans ma tête ça paraissait clair. :,)

Je comprends tout à fait ! Toutes critiques sont bonnes à prendre. Je vais peut-être changer cela lors d'une réécriture, dans un premier jet comme ceux-ci, j'ai un peu peur d'alourdir le texte alors que ça peut très bien se passer.

Je suis plutôt d'accord avec tes remarques, le texte pourrait gagner en fluidité, en tout cas merci, vraiment pour ton retour détaillé, cela me motive encore plus à peaufiner jusqu'au bout mes chapitres et surtout mon écriture.

Hâte de lire tes prochains retours donc. En avance, bonne lecture et à très vite :)
Reglisse000
Posté le 07/03/2025
Très belle écriture... Pas un dialogue, mais ça n'en est pas moins intéressant . J'ai hâte de voir comment va évoluer ton histoire !
Ta dernière phrase « Cette fois, ce n'était pas une exploration ordinaire », est incroyable, elle donne très envie de continuer !
M.P Lenoir
Posté le 07/03/2025
Merci beaucoup, les dialogues vont bientôt faire leur entré, j'aime poser un cadre assez ambiguë dès le début, j'espère que la suite te plaira !
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