Honorable Grand Chambellan Ugmar,
Les dragons se montrent de plus en plus vorace ! Le bétail que nous envoyons continuellement dans la frontière intérieure semble disparaître instantanément. Conformément à votre demande, j’ai rapatrié toutes les espèces primordiales à la bannière de Batum-Khal. Les derniers nés de Nunn demeurent les seuls habitants de la nouvelle colonie de Limitum. Ils sont libres mais leur espérance de vie se limite à une année, deux tout au plus.
La promotion de Bordura que vous effectuez jusqu’aux confins du royaume portent ses fruits. Nous connaissons un afflux constant de derniers nés de Nunn et par conséquent, la nouvelle colonie de Limitum ne manque pas de bras. Je pense même que nous pourrons bientôt cesser d’envoyer du bétail. La moitié des dragons se nourrit déjà de la chaire de la grouillante population des derniers nés qui jouent aux colons sans que cela n'émeuve outre mesure l'opinion publique. Votre plan se déroule donc à merveille.
Je vous pris d’agréer, Monsieur le Grand Chambellan, l’expression de mes considérations distinguées. Gloire à Batum-Khal.
Colonel Tristan, Comte de Bordura
Lettre envoyée par pigeon voyageur
Slymock emmena son protégé aux écuries situées aux abords du château. Après avoir mis pied à terre, le garçon se retourna et compris pourquoi les elfes s’étaient installés ici. Sans s’en rendre compte, depuis son entrée dans Zulla, Ome avait cheminé sur une pente doute et progressive. Il se trouvait à présent sur un promontoire. De cet endroit, il était possible d’observer l’horizon, au-delà du fourmillement d’habitations, au-delà des imposantes enceintes de la capitale. On distinguait parfaitement la forteresse des trois oliphants au Nord-Ouest. Avec une telle visibilité, aucun ennemi n’était en capacité de surprendre la cité. Comment la sauvagerie des orcs ou l’abnégation des nains pourrait venir à bout de la démesure de cette ville ?
Slymock sortit le garçon de ses réflexions. « Tu vois, mon garçon, ce grand bâtiment en briques rouges, à côté du temple, c’est le campus qui regroupe l’université tenue par la deuxième caste et l’école militaire tenue par la troisième caste. C’est là que tu suivras ton enseignement. »
Cette explication décontenança le jeune aspirant qui se mit à bredouiller. « L’université … mais...c’est...impossible !!! Lorsque vous parliez de formation... »
Le maître espion coupa net. « Nous entendions par formation la meilleure qu’il soit ! Tu es brillant. Tu es le premier de ta race à avoir l’honneur d’être choisi. Mais tu seras bientôt exposé aux pires menaces ! Nombreux sont ceux qui guetteront ta moindre défaillance. Les ennemis du grand chambellan ne veulent pas te voir réussir. Les elfes exècrent ceux de ta race. Les peuples associés n’acceptent pas le privilège d’un nouveau corps de fonctionnaire offert aux derniers nés de Nunn. Tes semblables vont te jalouser pour ton ascension. Il te faut mettre toutes les chances de ton côté en suivant l’enseignement des professeurs les plus prestigieux. L’instruction est ta seule planche de salut. »
Ome était dépité. « Alors je me retrouve seul contre tous ! Avant nous étions deux avec ma mère ! »
Slymock reprit son explication. « Où est donc passé la détermination que tu affichais au cours de notre voyage ? Tu baisserais les bras au premier obstacle ! Sache que tu n’es pas tout seul ! Tu te retrouves dans le camp du baron Ugmar, l’elfe le plus puissant du royaume. Et c’est moi, son maître espion, qui suivra ton évolution dans ce nouveau monde. Nul n’osera s’attaquer à toi, mais il faudra faire attention aux faux pas. C’est pourquoi toi et ta mère vous serez plus forts seuls. Vous êtes le point faible l’un de l’autre. Il est impératif que vos ennemis ignorent vos liens de parenté. Tu ne dois plus jamais l’évoquer. Pour tout le monde, tu es un orphelin. » La tête baissée, fixant ses pieds, Ome opina du chef puis Slymock poursuivit. « A présent suit moi. Le grand chambellan désirait te revoir dès notre arrivée. Ne te formalise pas pour son apparence rigide. Le poids de ses responsabilités lui impose cette posture. Un personnage de sa stature n’a pas le droit d’afficher ses faiblesses ! »
Ome trouvait la situation et la réflexion risibles. « En fait, tout le monde doit se montrer fort et impassible en permanence. »
Tout en guidant son protégé dans les couloirs du palais, le chef du cabinet secret rétorqua. « Parfaitement. Tu rentres dans un monde de politique et d’intrigues de cour. Si tu veux devenir quelqu’un, tu devras apprendre à ne laisser aucune prise possible à tes adversaires... »
« Et je dois me méfier de tout le monde, j’ai bien compris maître Slymock. Vous me rabâchez cette règle depuis notre départ de Panamantra. » L’aspirant fonctionnaire ne cachait pas son exaspération, mais c’était la preuve que l’enseignement s’infusait dans son esprit.
Au fil de la discussion, leurs pas les avaient menés à la porte du bureau du grand chambellan. Slymock connaissait parfaitement l’emploi du temps de son maître. Il expliqua à Ome qu’à cet instant de la journée, il était probable que celui-ci consulta sa correspondance. Il y consacrait une heure le matin et une autre l’après-midi. L’espionnage requerrait de la réactivité. Être le premier à connaître une information permettait d’avoir un coup d’avance. Savoir avant les autres permettait de les prendre en défaut. Et le grand chambellan était passé maître dans cet art grâce à sa rigueur dans le suivi de ses correspondances secrètes. En dévoilant cela à son apprenti devant l’impressionnante porte, le chef du cabinet secret cherchait à gagner encore un peu plus ses faveurs. Lorsque l’elfe porta sa main à la poignée en forme de tête de lion, le garçon, quelque peu angoissé inspira profondément, puis les deux pénétrèrent dans le bureau.
A cette entrée, le grand chambellan leva les yeux du message qu’il analysait. « Mon bon Slymock, vous voici de retour ! En avance sur les prévisions de votre dernière missive, comme d’habitude ! C’est tant mieux, nous avons une multitude d’affaires en suspens que vous allez devoir traiter. » Ugmar était décidément un elfe allant droit au but. Il ne s’était pas renseigné de l’état de son assistant, ne lui avait pas donné le bonjour. Cette absence de civilité choqua le jeune garçon. Le grand chambellan poursuivit. « Mon garçon, vous êtes pétri de qualités, c’est pour cela que nous vous avons sélectionné. Mais, dites-moi, mon cher Ome ; avez-vous enfin réellement pris conscience de ce qu’engendrait votre nomination dans le futur corps de fonctionnaire réservé aux derniers nés de Nunn ? »
« Je le pensais … avant notre arrivée à Zulla. » Droit comme un i, adoptant une attitude rigide similaire au maître espion, Ome avait plongé son regard dans celui du baron. Les reflets jaunes de ses iris donnaient aux yeux du grand chambellan une dimension hypnotique qui le troublaient. Il poursuivit néanmoins. « Le gigantisme de la capitale n’a rien à voir avec Panamatra. Je ne pensais pas que mes semblables étaient si nombreux et si misérables ! Et tout le monde me jalousera et cherchera ma perte ! A présent, je suis seul et je doute. Je ne sais pas si je serais à la hauteur. »
« Non, mon garçon ! Slymock et moi-même serons toujours là pour te venir en aide. » Ugmar détestant les jérémiades coupa court aux plaintes de son potentiel futur allié. « Ne te laisse pas submerger par tes émotions face l’importance de la tâche qui s’annonce ! J amais ! Sinon tu ne parviendras jamais au but que tu t’es fixé. Prends mon exemple. A l’origine, je ne suis issu que de la petite noblesse et c’est à force de volonté et de sacrifices que je suis parvenu à devenir l’homme le plus puissant du royaume derrière le roi. Malgré sa basse extraction, Slymock à connu un parcours similaire et c’est pourquoi je le respecte plus que tous ces nobliaux qui n’ont jamais connu la difficulté. A priori, tu es fait du même bois que nous mon garçon. Mais tu restes encore à sculpter à la force de ta conviction. C’est à toi de choisir ; soit tu geins, en te plaignant que la vie est trop dure et trop injuste ; soit tu saisis toutes les opportunités qui s’offrent à toi pour te construire une grande destinée. Quoi qu’il en soit, c’est la première et dernière fois que tu affiches tes vagues à l’âme devant moi mon garçon ! J’exècre la faiblesse ! J’ai de grandes ambitions pour toi, mais il va falloir t’en montrer digne. »
Ome acquiesça puis releva fièrement son menton. C’en était fini de son enfance insouciante. Il avait envie de pleurer, mais sa mère ne viendrait pas le cajoler pour le réconforter. Elle ne viendrait plus jamais ! Fort et inflexible, voilà ce qu’il devait devenir pour affronter ce nouveau monde, intraitable avec les pleutres ! Le grand chambellan venait de lui montrer le chemin, c’était à lui de le suivre.
Le baron Ugmar coupa son jeune disciple dans ses réflexions. « Je vais déjà te donner une preuve de mon soutien inconditionnel en t’offrant le gîte et le couvert au sein même de ma maison. J’ai déjà tout organisé avec mon intendante générale, Cléandre. Elle t’expliquera tout ce qu’il t’est nécessaire de savoir. Pour les questions pécuniaires, tu t’adresseras à Slymock. Ma porte te sera toujours ouverte, malheureusement ma charge m’impose un agenda des plus chargés. »
Slymock intervint fort à propos. « Peut-être Ome pourrait-il assister au début de nos réunions quotidiennes traitant des affaires du cabinet secret. »
« C’est une excellente idée ! Mon garçon, tu pourras venir t’entretenir avec moi tous les matins, vers sept heures, avant de partir en cours suivre ta formation. D’ailleurs, fixons immédiatement deux jours où tu viendras systématiquement...Disons le mardi et le vendredi. Nous verrons ensuite à l’usage si cette organisation est suffisante. Cela te convient-il ? »
« Oui maître. » En s’entendant répondre ainsi, Ome se surprit lui-même. Il manifestait au baron Ugmar déjà une soumission totale dès leur troisième rencontre. Certes, le grand chambellan apparaissait comme son bienfaiteur, mais il possédait certainement quelques desseins politiques cachés. Non, Ome était seul car son « maître » pourrait un jour ou l’autre se retourner contre lui. Décidément il devait lutter contre son empathie naturelle et ne plus faire confiance à personne.
L’entretien se poursuivit par la présentation en détail des différents opposants politiques du grand chambellan. La plus grande difficulté serait d’éviter les manipulations du chef des gens de l’ordre, le baron Otto, à la fois chef du parti adverse et personne sous l’autorité duquel Ome serait placé. Puis le protocole coupa court aux échanges. Le baron Ugmar devait se rendre auprès du roi. Slymock emmena donc son jeune protégé dans l’aile du palais où se trouvaient les appartements de son maître et lui présenta l’intendante Cléandre. Le chef du cabinet secret donna une bourse à l’aspirant puis s’éclipsa rapidement, de nombreuses affaires nécessitant certainement son attention.
Ome avait choisi sa destinée. Pour un jour pouvoir se libérer du carcan de cette société de castes, il se retrouvait seul face au monde entier. Seul aux ordres d'elfes en qui il ne pouvait pas avoir totalement confiance. Seul face à une adversité dont il ignorait encore tout.Sa gorge se sera mais il refoula son angoisse. Sa conviction inébranlable en son destin serait son arme pour atteindre son but, la liberté.
Ome a peur de la vie qui l’attend, mais il se fait remonter les bretelles par le grand chambellan.
Comme ce chapitre est court, je me demande si tu ne devrais pas le coller au précédent qui était très descriptif. Niveau structure, ça ferait donc : description de l’arrivée, doutes, discussion avec le chambellan qui amène Ome à se dire qu’il est seul et ne pourra compter sur personne d’autre que sur lui-même. Bon, après, c’est des conseils inversés à ceux que tu me donnes lorsque tu me suggères de couper un chapitre, donc on a peut-être juste 2 façons différentes de procéder 😊 Sinon, c’était bien.
D’ailleurs, le garçon n’est pas une page blanche, il a un passé et des émotions cohérentes, donc rien d’affolant à l’horizon (rapport à son côté Mary Sue que tu me disais). Pour l’instant, ce côté un peu fébrile s’explique par sa jeunesse, mais aussi par sa méconnaissance du monde des Elfes dans lequel il vient littéralement juste d’arriver. Donc ça me paraît bien.
Mes notes de lecture :
« le garçon se retourna et compris”
> et comprit
“Ome avait cheminé sur une pente doute »
> une pente doute ? semée de doutes ? ou douce ? Il y a un soucis.
« au-delà du fourmillement d’habitations, au-delà des imposantes enceintes »
> Tu as 2 fois « au-delà »
« il était probable que celui-ci consulta sa correspondance. »
> Je me demande si le subjonctif n’est pas requis ici « qu’il consulte » ou « qu’il consultât » ?
« Ne te laisse pas submerger par tes émotions face l’importance de la tâche »
> face à
« J amais ! »
> un espace en trop
“tu es fait du même bois que nous mon garçon »
> Virgule avant « mon garçon » ?
« J’exècre la faiblesse ! J’ai de grandes ambitions pour toi, mais il va falloir t’en montrer digne. »
> J’ajouterais un truc du genre « ou je te renvoie dans la fange dont tu es issu » Enfin, un truc bien déguelasse comme ça, pour mettre Ome plus mal encore que jamais
« Ma porte te sera toujours ouverte, malheureusement ma charge m’impose un agenda des plus chargés. »
> Je couperais « Ma porte te sera toujours ouverte. Malheureusement, ma charge m’impose un agenda des plus chargés. »
> D’ailleurs, le terme « agenda » fait un peu bureau et pas trop fantasy non ?
« Slymock intervint fort à propos. »
> C’est pas la première fois que je me dis ça, donc je te relève cet exemple, maintenant que j’ai le doigt dessus. Je trouve que tu donnes parfois une sorte d’avis, un jugement de valeur, comme ici. C’est un peu bizarre, car je ne m’imagine pas Ome penser ça. Et souvent, on dirait que ce n’est l’avis d’aucun personnage. Donc qui donne ce jugement ? Qui dit que c’est « fort à propos » ici ? Toi, l’auteur ?
Pour l’instant, l’intrigue est centrée sur Ome. Qu’en est-il des autres persos, Gal et la Naine par exemple ? Vont-ils rencontrer Ome ? Je me demande ce que tu nous réserves par la suite.
Oui, je me rends compte que parfois j’émets des jugements personnels qui sortent du cadre du point de vue du protagoniste. J'essaie de supprimer ça au maximum sur le premier jet mais il y en a pas mal qui passent quand même! C'est un de mes défaut qui nécessitera une relecture spécifique.
Pour les rencontres entre les différents protagonistes, tu te doutes bien qu'elle aura lieu au court de la confrontation final (la reprise de la nouvelle guerre lemniscate). L'important, ce n'est pas la destination mais le voyage.
Pour l'instant, il est vrai que je m'attarde un peu sur Ome car il arrive plus tard dans le récit. Mais ne t'inquiètes pas! Nomrad revient bientôt. Plus qu'un chapitre à attendre.
Il y a plusieurs protagonistes (dont un serpent de mer!). Le lecteur sent du départ que tout ce petit monde va se retrouver à la fin. L'intérêt c'est de découvrir comment ils vont faire. Par quelles péripéties vont-ils passer?
Voilà. C'était la pensée que m'a susurré ma nuit de sommeil.
> Je ne le relève que là, car j'étais pas sûre si tu voulais ainsi créer un effet comique. Dans le fond, ça ne serait pas impossible d'avoir une sorte de narrateur qui s'adresse au lecteur. Mais si tu pars là-dessus, ça devrait être plus assumé à mon avis. Tu peux imaginer que le récit est comme raconté par quelqu'un, un dieu par exemple, et qu'il donne ainsi son avis ? Mais si c'est pas ton intention, dans ce cas, vaut mieux ptêtre supprimer en effet.
Je n'ai jamais lu les Aventuriers de la Mer, honte sur moi ! C'est marrant, j'y pensais il y a pas longtemps, car je me suis rendu compte que je suis dans une sorte de phase "pirate" ou "mer" dans mes lectures. Je viens de me remater le film "Master and Commander" avec Russel Crow, j'ai regardé la série Outlander aves pleins de passages sur un bateau (pas tjs top cette série, il y a des hauts et des bas) et en plus, je suis en train de lire le dernier magazine Histoire sur les corsaires. Du coup, j'avais envie de me lire un ptit roman de pirates pas piqué des hannetons et je pensais justement aux Aventuriers de la Mer. Le seul truc qui me bloque, c'est que c'est vraiment une brique cette aventure. Tu es embarqué dedans pendant des mois et ça a donc intérêt à être bien !
Ce chapitre est assez court, ce qui fait que je n'ai pas grand chose à dire. Ome commence à réaliser ce que va être sa vie désormais. Je suis curieux de voir comment il va s'en tirer. J'aime toujours les passages en italiques du début. J'imagine que c'est la lettre qu'est en train de lire Ugmar lorsque Slymock et Ome arrivent.
Une petite chose, mais que je t'ai déjà dite je pense:
Je trouve dommage que tu conserves les vrais jours de la semaine. le simple fait de lire mardi et vendredi m'a fait sortir de ton univers pour me ramener brutalement dans la réalité^^
A bientôt!
Le chapitre semble court car la chapitre de départ trèèès long a été coupé en 3! On verra à la réécriture. A mon avis soit je redécouperai, soit je développerai.