Le soleil a couché la ville comme un vent de plaine
Comme s’il pouvait dorer nos toits de blés verts
Comme s’il pouvait flétrir nos tuiles rouges coquelicots
Comme s’il pouvait évaporer nos flaques de goudron
Comme si sa chaleur allait craquer la carapace de toutes ses graines sans terre
Et dont on ne sait nous mêmes si elles germeront
Il y a des mystères avec les quels nous vivons
Sachant les limites de la magie
Mais le soleil fait l’innocent et rejoue l’enfance à chaque lever de jour
Il n’a personne à convaincre à par lui même
Et pourtant sans cesse il nous dresse la même scène
De celui qui jète ses rayons comme des faveurs
Pleines de promesses
Et que nous, parcelle d’étoile et d’obscurité, nous cueillons
Avec gratitude
Et labeur
Il poursuit sa course et feint une apogée
Dont la brûlure est un miracle
Une profession de foi
Comme si le temple dressé par sa lumière allait se remplir de fidèle
Jamais il ne lui vient à l’idée de capituler
Et il continue de mimer l’éteinte
Qui n’est pas une mort
Qui n’y ressemble pas
Il continue de s’allonger avec volupté
Et candeur
Comme seul il sait le faire
- depuis des siècles il veut nous faire croire que c’est Hélios qui lui a appris -
Il continue d’offrir un vin couleur ambre
Il continue d’essayer
De nous enivrer
Par sa beauté
Mais nous
Nous ne voyons que sa misère
son désespoir
Et son pathétisme
Après tout c’est notre œuvre
Il se débat avec le noir qui n’est obscur
Avec l’absence qui n’est pas espace
Avec le manque qui n’est pas désir
Et c’est notre œuvre
Il se dupe
Comme nous l’avons dupé
Nous l’avons pillé
De son titre
Alors il se drape toujours plus dans ses rayons devenus froids
Notre œuvre
Il vit dans l’illusion
Dont il reprise les coutures
Que nous défaisons chaque nuit, malgré nous
Un jour, il finira par disparaître dans ses propres plis
Il n’y aura plus personne pour faire semblant de nous border
Nous avons volé notre héritage