Poésie Perdue

Notes de l’auteur : Qu’est-ce que la poésie perdue, vous vous demandez ? C’est bien simple... c'est faire de la poésie dans sa tête, sur un chemin en écoutant de la musique. C’est de la poésie que l’on ne partage pas, que l’on n’écrit pas et qui tombe malheureusement dans l’oubli.

Pas de bloc-notes à portée de main

et mes stylos sont loin.

Essayer serait vain

alors, avec espoir, je me souviens.

 

La plume et l’encre à la maison,

ainsi je découvre ma région.

À des kilomètres d’un clavier,

plus tard, me faudra-t-il tout rédiger ?

 

Serai-je capable de me rappeler,

de ne pas tout modifier,

défigurer, une fois rentré ?

Il n’en faut point douter.

 

Divaguer n’est pas permis,

Se concentrer est un prérequis.

Là se trouve la clé du succès mais,

plus que tout, je me dois d’observer.
 

La nature, ses paysages, ses traits,

la finesse de l’artiste qui l’a dessinée,

la beauté du ciel, ses nuances bleutées,

j’aime tellement les regarder.

 

La texture des nuages, leur vapeur blanche,

ces merveilles m’éblouissent.

Mon coeur chavire, je m’accroche à une branche,

souhaitant que les pages noircissent...

 

La magie de la poésie perdue,

le fondement de son existence incongrue,

est qu’elle se définit par son manque de substance,

davantage que par sa simple présence.
 

Vous ne pourrez la lire, je le regrette,

car non conservée, elle a fini aux oubliettes.

Perdue certes pour son lecteur,

elle ne l’était pas pour son créateur.

 

Celui-là l’a certainement savourée.

Chaque mot, chaque vers, chaque rime,

tout cela il l’aura pesé, apprécié,

jusqu’à cet instant ultime.

 

Cet instant irrévocable

où le poème a quitté ses pensées,

naissant finalement, effleurant la réalité...

et devenant insaisissable.

 

La poésie perdue est telle la vie,

elle naît, elle grandit puis,

naturellement, elle tombe dans l’oubli.

Vient une sombre nuit, un beau matin.

Elle s’éteint ainsi tel l’humain

s’endormant à la croisée des chemins.

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Fy_
Posté le 26/09/2024
Hey !
Cette lecture fut très douce, je ne sais pas si elle est due à la police en italique, ou si c'est essentiellement les mots que tu as choisis (je penche surtout pour la 2ème option x). Je l'ai trouvée très délicate.
Le tableau que tu dépeins s'apparente à une rêverie, une exploration merveilleuse de la forêt à travers à la fois des yeux, mais aussi des mots. Tes métaphores sont choisies soigneusement, et moi qui ne suis d'habitude pas fan des rimes aaaa, je trouve l'ensemble très harmonieux !

Je me demande alors comment as-tu fait pour écrire ce poème, si tu n'avais ni carnet ni stylo ? J'imagine que tu dois avoir une bonne mémoire...

J'aime aussi beaucoup le message que tu fais passer à travers tes mots, je le comprends comme une invitation à contempler, mais aussi une invitation à le faire seul, sans rien ni personne. Une sorte de gage de simplicité, réapprendre à s'ennuyer, observer, se concentrer sans faire deux choses à la fois. Tu exclus même l'écriture, comme si tu avais fait exprès d'oublier ton matériel pour t'obliger à t'imprégner de quelque chose de pur. Et tu as bien raison, la nature est si belle qu'elle mérite toute notre attention, et qu'une promenade ne suffit pas à en saisir toute la beauté.
J'ai senti aussi que par l'éloignement, tu crées ce désir d'écrire, et comme ton poème qui est en deux parties (la première sur la nature et la seconde sur la poésie), tu instaures d'abord la contemplation de la nature pour faire naître ce désir d'écrire.

Merci à toi pour ce partage, au plaisir de te lire !
Fy
Phil Wayne
Posté le 26/09/2024
Salut Fy ! :)

J'adore ton analyse. Vraiment. Tu as bien cerné la question. C'est extraordinaire car l'existence même de ce poème est un paradoxe. J'en ai écrit un autre pour définir plus précisément la poésie perdue et on comprend bien à quel point l'idée même d'écrire sur ce concept est paradoxal. Sa beauté réside dans sa non-existence, le fait que personne n'ait jamais pris le temps de l'écrire... l'idée s'est imposée à moi il y a très longtemps, au collègue, et j'ai mis beaucoup de temps à formuler ce poème. Pendant des années, l'instant que j'ai vécu appartenait à la "poésie perdue" et maintenant... j'ai mis des mots dessus. Est-ce que ça compte encore ? Je ne sais pas. Honnêtement.

Une partie de la réponse à tes questions se trouve aussi dans ce morceau de poème :

«
On repasse le seuil de l’entrée,
vient le temps de se reposer
mais aussi de coucher sur le papier
ce qui n’était que des idées.
Vient le temps de partager
la belle expérience qu’était
cette superbe randonnée.
»

Souvent, des vers ou des strophes complètes me viennent et je ne peux pas les écrire tout de suite. Je m'efforce de les mémoriser et je reconstitue plus tard les morceaux du puzzle quand j'ai accès à mon ordinateur. Des fois je suis trop inspiré et j'essaye de noter sur ce que j'ai sous la main mais en rando... je n'ai pas souvent grand chose pour écrire. Ça dépend de ce que j'attends de la rando. Mais globalement j'aime simplement apprécier l'instant dans toute sa splendeur.

Merci encore une fois d'être passée & à la prochaine,
Phil.
Fy_
Posté le 02/10/2024
Hey !

Je suis contente de voir que j'ai pu en comprendre le sens, c'est vrai que je me lance parfois dans des analyses sans être sûre de tomber juste, il m'arrive d'être à côté de la plaque x)

Merci pour tes éclairages, j'en saisis un peu plus le paradoxe.
J'aime bien la strophe que tu cites et je pense que c'est aussi cette frustration qui fait écho en moi, de voir quelque chose de magnifique sans pouvoir faire autre chose que contempler. Je me retrouve notamment frustrée, tout comme toi de ne pouvoir écrire, de ne parfois pas avoir mon appareil photo pour saisir une image, un instant. C'est un exercice difficile que de le faire après coup, de mémoire ou en retournant sur les lieux pour retrouver cet "angle", cette "fenêtre" qui s'est offerte à nous à l'instant qui nous a inspiré.

Je me demande alors, est-ce fait exprès de ne rien prendre de quoi noter en rando ? Est-ce justement pour stimuler cette frustration, mais aussi l'exercice de mémoire, de laisser mûrir les vers ? Je n'y ai jamais pensé mais il est vrai que ça peut apporter à sa pratique et stimuler sa créativité.

Merci à toi pour ta réponse, au plaisir !
Fy
Phil Wayne
Posté le 20/10/2024
Salut Fy,

Pour répondre à ta dernière question : Oui, c'est fait exprès justement pour cette raison. Des fois je fais l'exercice inverse et je m'efforce d'écrire pendant la "phase d'observation" mais en règle générale la frustration marche assez bien avec moi ^_^

Notamment parce-que des fois un vers te vient en randonnée ou en promenade et un autre encore mieux te vient plus tard. Écrire ne signifie pas forcément figer le vers non plus mais ça me force à faire un exercice de mémorisation et de retravail des mots déjà dans ma tête. Des fois c'est aussi pénible, je l'avoue, surtout quand tu vas en balade pour réfléchir à quelque chose pis c'est un poème qui te vient ou une idée intéressante à développer et tu dois passer l'essentiel de la balade à réfléchir à ça à la place... Bref, disons que ça a du bon et du moins bon.
Kout🔆
Posté le 26/09/2024
Hey !
J’ai un peu du mal a commenter un poème mais c’était juste pour te dire qu’il m’avais beaucoup plus et touché. J’ai beaucoup de mal à ne pas écrire les idées qui passent dans ma tête mais quand je ne le fait pas je culpabilise un peu. Ça fait du bien d’avoir un poème qui met à l’honneur ce qui n’est pas écrit, qui est beau mais qui ne peut pas être gardé.
Phil Wayne
Posté le 26/09/2024
Salut Kout ! :)
Merci d'être passé par ici et d'avoir pris le temps de commenter (j'apprécie d'autant plus l'effort en sachant que c'était difficile pour toi, c'est vraiment sympa de ta part et ça me touche).
Je comprends ce sentiment de culpabilité. Je le partage et n'aime pas laisser s'envoler mes idées... mais je crois que c'est aussi important d'apprendre à se détacher du texte parfois. J'ai déjà perdu des poèmes que j'avais écrit (quand une clé usb mourrait par exemple...) et le deuil n'a pas été simple. Pourtant ce que j'avais écrit était beau et cette perte n'y changeait rien. Je ne pourrai plus jamais lire certains de mes textes mais je l'ai accepté. Quand on n'écrit pas quelque chose, c'est un process similaire. On apprécie l'instant à fond pour ce qu'il est puis... on le laisse s'en aller. C'est beau et terrible à la fois. Pour moi, c'est un peu la magie de la poésie perdue. Le concept m'est venu un jour où j'appréciais justement un bon moment en pleine nature, loin de tout écran ou bloc notes pour rédiger mes idées. Il m'a fallu des années pour remettre des mots sur ce que j'ai ressenti ce jour là mais ça m'a permi de murir le sujet.
Bref ! Merci encore & peut-être à une prochaine !
Salut,
Phil.
coeurfracassé
Posté le 09/09/2024
Coucou !
Je suis venue voir, vu que tu l'aimes beaucoup ;-)
Et je dois t'avouer que je l'aime bien aussi, ce poème. Je t'en ai déjà parlé, je crois, mais le fait de garder sa poésie pour plus tard, je trouve ça vraiment génial. J'aurais souvent aimé le faire, et que toi tu le fasses, c'est vraiment chouette.
Ton poème est assez long, on passe par plein d'états différents. Au début, ça paraît assez simple, on ne se pose pas trop de questions, et puis les deux dernières strophes font vraiment contraste. Tu nous amènes gentiment vers cette "morale", cette conclusion. C'est très bien fait, bravo !
Clin d'œil particulier à la poésie qui devient insaisissable dès qu'elle touche le papier. Ça m'a particulièrement marquée, parce qu'on lit chaque fois un poème d'une manière différente.
Enfin, voilà =) et BRAVO !
Phil Wayne
Posté le 09/09/2024
Salut à nouveau Coeurfracassé ! :)

Ça me touche vraiment beaucoup, au risque de me répéter, donc merci d'être passé et d'avoir continué l'aventure pour un poème de plus. Que le poème t'ait plu, c'est un bonus extrêmement appréciable !

Je suis d'accord avec toi, il y a un réel contraste entre le début et la fin de ce poème. Les quatre premières strophes sont beaucoup plus légères. C'est assez extraordinaire d'ailleurs car ça m'est venu "comme ça". J'ai mis beaucoup de temps à vraiment m'asseoir et prendre le temps de définir ce que j'entendais par "poésie perdue". Je me rappelle très nettement la première fois, il y a très, très longtemps, que j'ai mis des mots sur cette idée folle. J'en étais même triste à l'époque de toucher du doigt toute cette poésie qui se perd parce qu'on ne l'écrit jamais ou parce qu'on l'écrit mais que l'on ne la partage pas et elle tombe dans l'oubli. Écrire un recueil de "poésie perdue" est quasiment paradoxal d'ailleurs, c'est terrible xD C'est aussi un peu ça que je voulais dire par "insaisissable". Une fois écrite, elle n'est plus tout à fait perdue, et pourtant on perd tout contrôle sur elle dès que l'on se met à la lire, à la partager... le poème n'est plus tout à fait à son auteur une fois publié, n'est-ce pas ?

Lorsque j'ai découvert la poésie perdue et que j'en étais un peu triste, je me souviens que je me suis justement dit qu'il y avait une raison d'être heureux que certains poèmes se "perdent". Tant que le poème n'est pas écrit, il n'est pas enfermé sur un bout de papier. Ce n'est qu'un air de liberté. J'aime vraiment cette idée que tout n'est pas destiné à être écrit ou lu un jour et c'est sa "potentielle existence" qui rend le poème encore plus beau. Enfin bref, je pars loin ^_^

Je ne parviens pas toujours à sauver les vers qui me viennent quand je me promène. Je m'y efforce mais on n'a pas toujours un crayon sous la main, ce n'est vraiment pas une mince affaire...

Merci encore de m'avoir lu et à bientôt ;)
coeurfracassé
Posté le 10/09/2024
C'est avec plaisir que je lis et commente tes textes. Alors tu risques de me revoir par ici...
Effectivement, après explication, ces poèmes perdus sont de véritables paradoxes... Mais c'est justement ce qui fait toute leur beauté, je pense !
Et j'ai toujours papier-crayon dans ma poche en hiver pour noter ce qui me passe par la tête XD
Mais j'aime bien ton idée de la poésie et la liberté <3
Phil Wayne
Posté le 10/09/2024
C'est une bonne habitude à prendre (je devrais prendre exemple).
À bientôt peut-être ! :)
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