Préambule

  C'est assez rare, je vous l'accorde. C'est pas tous les jours que vous rencontrerez quelqu’un à l'âme biscœurnue. Certains peuvent le voir comme un défaut, d'autres comme une considérable qualité. D'après moi, ce n'est ni l'un ni l'autre. Je ne saurais trop en décrire les propriétés mais ce que je peux vous dire, c'est que ce n'est pas toujours facile à accepter. C'est de naissance, en général. Tout part de là, de cette fragilité de cristal que conserve notre coeur. C'est à cela qu'est due notre sensibilité à nous, les biscœurnus.

  "On ne voit bien qu'avec le cœur", c'est ma devise.

  Les émotions débordent, tellement j'en ai. Tantôt de la tristesse, nostalgie, colère ou peur, tantôt de la joie, du bonheur, du rêve ou de l'amour. Ça oui, beaucoup d'amour ! Une tendresse du coeur infinie à communiquer. Une bienveillance et une écoute toujours à l’affût. Un besoin irrépressible de douceur aussi, car si les biscœurnus ont beaucoup d'affection à donner, il est vital pour eux d'en recevoir.

  Je suis dotée d'une sensibilité absurde. Un rien suffit à m'ébranler, à emplir mon cœur de larmes de joie ou de détresse, et faire basculer d'une pichenette toute l'impassibilité que j'affiche sur l'expression de mon visage. Les émotions qui m'arrivent se voient multipliées par 100 000, m'arrivant en pleine poitrine sans filtre protecteur. Je peux soudainement me mettre à larmoyer sans en avoir aucune raison, ou être heureuse et respirer la joie à pleins poumons, le tout sans que j'en aie le moindre contrôle. Je ne suis pas lunatique. Ce sont deux choses différentes. C'est une autre affection, qui ne se soigne pas.

  Quelqu'un qui a l'âme biscœurnue, en soi ça ne se voit pas. Ce n'est qu'en apprenant à la connaître que vous vous en rendrez compte. Mais cette sensibilité n'est pas une faiblesse. Il suffit de savoir la détourner.

  Un biscœurnu ne se séparera jamais de son journal, car il est tellement débordant d'émotions qu'il lui faut les coucher sur le papier pour ne pas se noyer sous leur flot. 

   Voici mon histoire, je vous ouvre mon âme. Mon âme biscœurnue...

H.