Le 5 septembre 20xx, l'après-midi.
En sortant du restaurant, la première chose que j'ai voulu visiter ici, c'était la bibliothèque universitaire. J'ai entendu dire que dans certaines universités, ces lieux étaient absolument magnifiques, et regorgeaient de livres. En même temps, c'est le rôle d'une bibliothèque, mais avec les humains, on ne sait jamais vraiment à quoi s'attendre. Le truc, c'est que la fac est immense. Les humains sont largement plus nombreux que les sorciers, c'est pourquoi leurs infrastructures sont de tailles conséquentes. Si le lieu de la réunion était parfaitement indiqué, le reste... un labyrinthe. La jungle. Un supermarché américain le matin du Black Friday. Oui, j'ai étudié ce phénomène pendant mes études. Atroce. Je ne veux même pas y penser.
Alors, j'ai tenté de lire une carte. Il y a généralement ce genre de choses à l'entrée d'une université, alors je me suis empressée d'aller la consulter. Déjà, il m'a fallu cinq bonnes minutes pour trouver l'entrée. A ce moment-là, j'ai compris que ça allait être un bordel monstre. Puis je suis arrivée devant la carte, et je me suis découvert un défaut tragique, qui m'était auparavant insoupçonné. Clairement, je suis incapable de lire une carte et j'ai la mémoire d'un poisson rouge pour l'orientation. J'avais repéré le chemin vers le supermarché, la ligne de métro et la fac en utilisant la magie avec un sort qui m'indiquait en temps réel le chemin à suivre. Mais là, il m'était impossible de lancer un tel sort devant des humains, j'allais me faire cramer direct et retour au bercail immédiat.
J'ai lâché un grand "Putain." avant de mettre ma tête entre mes mains. Le manque de magie, c'est désespérant, et ça rend aigrie. Je devais avoir un faciès atroce à ce moment-là. Je deviens intimement convaincue que si les humains sont aussi mauvais, c'est parce que la vie humaine, c'est vraiment trop chiant. Du moins, c'était jusqu'à ce que cette humaine me tapote sur l'épaule.
— Hé, ça va ? T'as l'air perdue, t'as besoin d'aide ?
Je me suis lentement tournée vers la voix enjouée. Une fille blanche, aux yeux verts et aux cheveux châtains, me regardait en souriant. C'est à cet instant que je me suis dit que les anges devaient exister. En plus d'être (selon mon point de vue) super jolie, elle avait l'air encline à me venir en aide, et à me sortir de ma situation désespérée. Ok, c'est exagéré, mais j'aime être dramatique. C'est quelque chose qui est normal chez les humains, mais pas forcément très apprécié chez les sorciers. Tout doit être juste et adapté à la situation. Parfois, c'est vraiment barbant. Ma langue s'était déjà réglée sur le mode "Anglais britannique", alors je n'ai eu aucune difficulté à lui répondre.
— Oh oui, je veux bien que tu m'aides ! Je suis une étudiante qui viens de l'étranger, et je viens tout juste d'arriver, et je voulais explorer un peu, mais ce truc est... confus.
J'ai pointé la carte du doigt. Pour une humaine, cette carte devait être très claire. Mais je ne suis pas humaine, et sûrement un peu stupide aussi, alors c'était réellement confus pour moi.
— T'inquiète, je fais partie du comité d'accueil des étudiants étrangers, je peux te faire visiter sans problème !
Oh, mon ange gardien, ma nouvelle lueur d'espoir dans ma vie tragique en tant que fausse humaine. Si j'avais pu, je l'aurais embrassée. Sur ses joues roses, car elle a vraiment une belle peau. Si je la recroise par la suite, je lui demanderai sa routine pour sa peau.
— C'est gentil, merci. Je m'appelle Opale !
Avant de nous envoyer dans le monde des humains, on a eu une réunion d'information à l'université Mara. Cette réunion nous a appris comment entrer en contact avec des humains, et notamment comment se présenter. J'avais tout noté soigneusement, et j'avais passé mes derniers jours à réviser tout ça. Sauf que là, j'ai un peu paniqué, et j'ai tout oublié. Alors, quand elle m'a dit son nom, j'ai improvisé.
— Ouah, c'est trop mignon comme prénom ! Moi c'est Agatha, ravie de te rencontrer !
Je euh, je l'ai prise dans mes bras. Je n'ai toujours pas compris pourquoi j'ai fait ça, et elle non plus ne semblait pas vraiment comprendre. Au moins, maintenant, je sais qu'elle sent la lavande.
— Oh, c'est comme ça qu'on dit bonjour en France ? Trop cool !
A ma grande surprise, elle m'a prise dans ses bras à son tour. Dans ma tête, j'étais juste "???", mais au moins, c'est passé.
Agatha a commencé son tour de présentation comme une professionnelle du tourisme. Vu sous un certain angle, on pourrait considérer que je fais effectivement du tourisme dans le monde des humains, mais ce ne serait pas correct. Ma mission est d'étudier les possibilités concernant les humains afin de pouvoir améliorer le monde des sorciers, je ne fais pas que me balader ! Même si, note à moi-même, j'aimerais beaucoup visiter des monuments historiques et des musées. Il paraît que les musées humains contiennent des objets volés, et que les voleurs ne veulent pas les rendre à leurs propriétaires légitimes, et personne ne dit rien. Très curieux, le comportement humain.
— Alors ici, c'est le secrétariat de la fac. Si jamais t'as un problème, c'est ici que tu dois te rendre en priorité. La salle des profs est juste à côté, alors même si les secrétaires ne sont pas là...
Elle a lâché un petit soupir en levant les yeux au ciel. J'étais déjà au courant des problèmes concernant les administrations en général, mais en voyant le regard de cette humaine, j'ai eu pitié.
— ...il y aura toujours des profs à passer ! Maintenant on va passer devant l'infirmerie pour que tu puisses bien voir où c'est, car les nouveaux arrivants de l'étranger doivent tous passer un examen médical. Ca me fait penser que je dois repasser voir le médecin pour un examen moi aussi, il faudrait qu'on aille prendre rendez-vous ensemble si tu veux !
À la réunion de Mara, on nous avait parlé de possibles examens médicaux. Nous avons de faux papiers indiquant que tout est en règle, surtout au niveau de ce que les humains appellent des « vaccins ». Ces idiots s'enfoncent des aiguilles dans la peau et s'injectent des trucs pour se soigner. Je ne doute pas de l'efficacité, mais c'est... barbare. Ils ne veulent pas créer des vaccins effervescents comme tout le monde ? Des trucs qu'on peut simplement boire comme un jus d'orange le matin ? De toute façon, je n'aurai pas besoin de passer par là.
J'ai continué à suivre Agatha tout en tentant (vainement) de me souvenir du chemin. Je me suis retrouvée sans que je le sache devant une immense porte en bois, avec une plaque dorée indiquant « bibliothèque ». Agatha a ouvert la porte avec une facilité déconcertante (cette porte semblait extrêmement lourde), me faisait ainsi découvrir un nouveau monde. Les étagères en bois massif étaient immenses, la salle principale était immense, tout était immense. Et les livres... oh les livres... franchement, si j'avais été seule, j'aurais lâché ma petite larme. C'était si émouvant... l'humanité n'est pas si mal finalement, avec tous ces beaux livres...
— Et voilà la bibliothèque ! Il y a des salles pour travailler en groupe sur la droite, et des salles informatiques aussi dans le lot. Tu peux emprunter des livres auprès de la bibliothécaire, toutes les infos sont sur le grand panneau juste à côté.
— C'est trop beau...
— Ouais... ça m'a fait cet effet-là aussi, la première fois.
Agathe et moi sommes restées comme deux idiotes à observer la bibliothèque. C'est pas grave, autant de livres dans un même endroit, ça fait du bien au moral.
— Merci beaucoup de m'avoir accompagnée jusqu'ici, c'est gentil.
— De rien ! Par contre, je vais devoir filer, j'ai une réunion avec mon association... mais tiens, voilà mon numéro de portable, si t'as besoin d'aide, envoie-moi un sms.
Agatha m'a tendue une petite carte avec inscrit « Agatha, comité d'accueil des étudiants en échange, membre de l'association « Feministas » de la faculté ». Son numéro de téléphone y était inscrit en rose bonbon.
— Bye bye Opale, on se voit plus tard !
Tandis qu'elle s'en allait, je me suis autorisée à lui faire un signe de la main. J'ai ressenti quelque chose de très agréable à cet instant. J'avais un peu peur de cette première rencontre, car je ne savais pas comment ça allait se passer. À Moonstone, tout est très poli et cordial, même en amitié ou dans les relations amoureuses. Je ne dirais pas qu'il n'y a pas de sentiments, car ce serait faux, mais... on ne les exprime pas vraiment. Tout est dans le calme et dans la mesure. Mais ici, il y a une chaleur que je ne ressens pas dans mon monde. J'aime ça. Je vais l'étudier en profondeur, après mon « petit » tour de la bibliothèque.
Toujours ce petit ton critique...
"il y aura toujours des profs à passer !" : cette phrase me semble un peu étrange. Des profs passeront toujours ? Ou Il y aura toujours des profs pour passer par-là ? Ou trouver un autre verbe que passer qui est répété dans la phrase suivante.
Je poursuis ma lecture !