Première nécessité

C’était un jour où je pratiquais mon activité physique intensive

C’est à dire que je faisais ma balade digestive.

Étant une bonne citoyenne

Et souhaitant éviter toute peine

J’avais bien entendu emporté avec moi

Ces petits papiers qui permettent de déroger à la loi.

Mon petit fils m’a bien expliqué

Qu’il fallait toujours en prendre un pour le retour et un pour l’aller.

 

N’ayant jamais rien fait d’illégal en 75 ans de vie

Montait en moi le sentiment grisant de braver l’interdit.

Par mes aïeux si j’avais su

A quel point c’est exaltant de braver la vertu!

J’aurais profité de toutes ces années

Pour braquer banques, supermarché et metteurs de PV!

 

Tandis que je savourais cette délicieuse rêverie

Un étrange animal surgit soudain des orties.

Vêtu de bleu et le chapeau prenant la tangente

Il me fit sentir que j’étais sur la mauvaise pente.

Le visage rouge et le ton courroucé

Sans plus attendre il se mit à m’apostropher:

 

«-Si je ne m’abuse à plus d’un kilomètre

De votre domicile présentement vous êtes!»

 

Je lui répondis alors sans me laisser démonter:

«-C’est que je m’en vais chercher des ingrédients de première nécessité.

En effet depuis ce matin je suis en quête

De champignons dont j’effectue la collecte.

Et par ma foi je serais bien en veine

De trouver baies de genièvres et quelques châtaignes.

 

- Mais Madame personne ne vous avait donc informé

Qu’uniquement ce qui s’achète est de première nécessité?

 

-Diantre! Voila qui me désarçonne

Comment vais-je assaisonner mon gibier aux pommes?

Je viens en effet de quérir

Une belle perdrix sans coup férir.

J’ai utilisé pour se faire

L’ancestrale technique de mon arrière-grand-père.

D’un coup net et bref je l’ai fait périr

En l’assommant avec ma poêle à frire.

Monsieur l’agent voulez-vous observer ce magnifique instrument

Qui au grand jamais ne quitte mon séant?

 

-Mmm...Cela ne sera pas nécessaire

Puisque vous chassez alors je vous laisse faire.

Il est en effet bien entendu permis

D’aller tuer quand vous en avez l’envie.

Sur ces mots je vous laisse à vos bonnes moeurs

Car j’entends une proie, euh...je veux dire un promeneur!»

 

Depuis ce jour je ne ramasse plus les produits gratuits des bois

Souhaitant être une bonne citoyenne je respecte la loi.

Je ne vais plus en forêt pour me promener

Mais uniquement pour tuer.

Et afin d’ accompagner mon gibier

Je m’en vais voler au supermarché.

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Andrea
Posté le 02/12/2020
Salut Soldanelles,

Bien vu !

Une critique de l'absurdité des règles... et de la chasse, en passant, j'ai l'impression ;-) (voire des violences policières..)

Un conseil typo : quand tu ouvres les guillemets et que commence un dialogue, tu n'as pas besoin d'un tiret juste après le guillemet ouvrant.

Prochain défi : le réécrire en alexandrins ?
Fy_
Posté le 23/11/2020
Excellent ! J'ai adoré :)

Suis-je en train de me tromper,
Ou derrière ces vers as-tu caché
Une critique au discours indirect
Sur toutes ces mesures abjectes ?

Je suis 100% d'accord avec toi, ce que tu dis dans ta petite histoire en vers est très vrai, le tout avec humour, ça donne le sourire et c'est très bien écrit :)
Bravo !
Merci pour cette agréable lecture,
Au plaisir de te lire ;)
Fy
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