Un bruit métallique dérange le silence, dehors. Ange ouvre un oeil. Puis les deux lorsqu’il remarque les ombres se mouvant sur les rideaux. Assez moches, ces rideaux, d’ailleurs. Il saute au bas du lit et secoue la femme qui dort sur le tapis.
-- Selma? Selma, réveille-toi! chuchote-t-il. Elle grogne et se met debout.
-- Observation, lui souffle-t-elle. Ange hoche la tête et ils s’accroupissent sous la fenêtre. Ange soulève un peu du rideau rugueux du bout des doigts. Un coup d’oeil au dehors lui indique que trois hommes se tiennent devant leur porte. Ange reconnaît immédiatement l’uniforme des militaires de Sandrie et en informe son chef. Bizarre. Les galons dorés sont habituellement de l’autre côté. Peu importe.
-- Pas d’inquiétude. Ils m’ont donné un insigne à leur montrer. Il montre qu’on est leurs alliés vatmans. Ange continue d’observer le manège des hommes devant la porte. Réveiller les honnêtes gens au milieu de la nuit, c’est quand même un peu fort. Il entend Selma fouiller sa sacoche de fond en comble, produisant des cliquetis métalliques. J’aurais bien aimé en avoir une moi aussi. Une sacoche magique, c’est toujours utile en mission. Mais c’est réservé aux vétérans. Ange sursaute. La porte tremble, les soldats lui frappent enfin dessus.
-- Dépêche-toi!
-- J’ai trouvé! sourit Selma, brandissant un carré doré. L’insigne peine à refléter la pâle lumière des étoiles, étouffée par les rideaux grossiers. Elle se met debout et lui lance la breloque. Elle dissimule son fouet sous sa veste. Ange tire sur son écharpe, un peu nerveux. Tout va bien se passer. C’est juste un contrôle nocturne, peut-être qu’ils font ça souvent à Sandrie. Il sort la clé rouillée de sa poche et la tourne dans la serrure. Il se mord la lèvre et ouvre la porte.
-- Nous sommes… commence Ange, surpris par le regard inhabituel des soldats. Ils ne lui laissent pas reprendre et l’attrapent par le cou, plaquant un lame glacée sur sa gorge. Il écarquille les yeux. La vitre donnant sur la rue vole en éclats dans une pluie de verre. Selma plonge dans l’ouverture et disparaît dans la nuit. Toujours les bons réflexes.