Prologue

  Comme tous les matins de sa vie, engloutie par la stratosphère continuellement noire qui l’enfermait, Andromède se morfondait. Dans cet espace que l’on pouvait appeler Lune, le ciel prenait parfois une apparence très effrayante : il privait Andromède d’astres et lui imposait une brume glaciale. Dès la première lueur de l’aube, un vent sauvage la fustigeait violemment : c’était le préambule de l’hiver.    

  Andromède était habituée à ce silence, elle avait appris à l’entretenir grâce à ses périodiques bribes éphémères. Dans ce ciel orné d’étoiles, elle cherchait une réponse à une question inconnue. Depuis quelque temps, les constellations se déplaçaient, se cognaient et surtout désordonnaient le paysage pittoresque auquel Andromède s’était habituée. 

  Elle observait le ciel, quand un vent glacial interrompit sa contemplation. Andromède fixa le désert qui l’entourait d’un air malheureux. Au plus profond d’elle, cet endroit dépeuplé lui donnait une irrésistible envie de le remplir. Le remplir de bruits. Non. Son désir était d’être accompagnée d’une présence humaine. D’une vie. D’un cœur qui bat. 

  Sur ces terres vides et perdues, Andromède n’avait rien. 

  Elle se retourna, et aperçut au loin une silhouette qui s’illuminait petit à petit. Un être imposant qui n’émettait presque aucun bruit. Plus elle s’approchait d’Andromède, plus l’écho de ses pas dans le vide du désert devenait audible. Andromède crut reconnaître l'inconnue: cette angélophanie lui était familière.

 Un visage englouti par des mèches désordonnées, un corps élancé animé d’une élégante gestuelle, des yeux étincelants, un regard doux, très doux.

  Dame Lune.

  Elle s’approcha d’Andromède d’une démarche digne d’une déesse. Dame Lune était magnifique sous sa cape blanche presque transparente. Elle scintillait de plus en plus. Petit à petit, le cœur d’Andromède se remplissait d’une douce chaleur, d’un sentiment ineffable. Si les autres avaient peur de présences inconnues, Andromède, elle, en rêvait depuis toujours. Mais cet être-là est le seul qu’elle ait connu depuis son amnésie. 

 Parfois, Andromède pensait que Dame Lune était une étoile qui avait atterri de son plein gré dans cet espace morose pour la rejoindre elle et sa solitude.